LA CONVENTION INTERNATIONALE POUR LA RÉPRESSION
DU FINANCEMENT DU TERRORISME

 

Rédaction :
Geoffrey Kieley
Division du droit et du gouvernement
Le 19 septembre 2001


TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

   A.  Historique de la Convention

   B.  Problème posé par le terrorisme

   C.  Financement du terrorisme

   D.  Identification et désignation des groupes terroristes

   E.  Engagement international du Canada

   F.  Activités de financement du terrorisme au Canada

CONVENTION DES NATIONS UNIES

   A.  Infractions

   B.  Application

   C.  Obligations des États parties à la Convention

LES GRANDES QUESTIONS

   A.  Définition du « terrorisme »

   B.  Transparence

   C.  Application et contrôle

   D.  Questions liées à la Charte
      1.  Liberté d’expression – Alinéa 2b)
      2.  Liberté de religion – Alinéa 2a)

   E.  Mise en œuvre

   F.  Coûts de fonctionnement

   G.  Partage de l’information et secret bancaire

ANNEXE  – Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme


LA CONVENTION INTERNATIONAL POUR LA RÉPRESSION
DU FINANCEMENT DU TERRORISME

CONTEXTE

   A.  Historique de la Convention

Le 9 décembre 1999, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une convention internationale destinée à endiguer le financement des activités terroristes.  La Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme (document A/C.6/54/L.16, voir l’annexe du présent document), qui comprend 28 articles, a été adoptée sur la recommandation du Sixième comité (juridique) de l’Assemblée générale.

La Convention oblige les États parties à adopter des lois nationales criminalisant les activités servant à recueillir des fonds pour des activités terroristes.  Les personnes qui donnent de l’argent à des groupes dont ils savent qu’ils appuient des activités terroristes commettraient une infraction en vertu de ces lois.  Bien que le « terrorisme » ne soit défini nulle part dans la Convention, son sens est clair, d’après la description des activités qu’elle est censée combattre :

Tout [...] acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque.

Qui plus est, neuf autres conventions « antiterrorisme » portant sur d’autres types d’actes « terroristes » sont annexées à la Convention.  En somme, quiconque verse une contribution financière à un groupe quelconque en sachant que ce groupe se livre à n’importe quelles des activités proscrites par la Convention ou par les conventions et protocoles qui y sont annexés commet une infraction.

Les États parties sont aussi tenus de coopérer aux enquêtes et aux procédures d’extradition à l’égard de telles infractions.  Les fonds dont on sait qu’ils sont destinés à des fins terroristes doivent être gelés ou saisis.

La Convention a été ouverte à la signature le 10 janvier 2000; elle entrera en vigueur le trentième jour suivant la date du dépôt du vingt-deuxième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou de consentement au bureau du Secrétaire général.  Le Canada a signé la Convention le 10 février 2001; il ne l’aura ratifiée qu’une fois qu’il aura adopté une loi fédérale prévoyant sa mise en œuvre.

   B.  Problème posé par le terrorisme

Dans son rapport du 14 janvier 1999, le Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services de renseignement s’est penché sur le contexte actuel des menaces pour la sécurité.  En plus d’évaluer la capacité de réaction du milieu de la sécurité et du renseignement de l’administration fédérale, il a analysé plusieurs nouvelles questions qui posent des défis particuliers, comme le cyberterrorisme.  Son président était le sénateur William Kelly, qui avait aussi présidé les deux comités spéciaux antérieurs du Sénat sur le terrorisme et sur la sécurité publiques, qui ont produit des rapports en 1987 et en 1989; son vice-président était le sénateur John Bryden.  Le Comité a tenu des audiences d’avril à octobre 1998 et entendu 74 témoins, sans compter les 42 personnes interrogées par son président et son personnel.  Les témoins et ces personnes étaient

Dans son rapport, le Comité spécial a longuement souligné la difficulté de définir la notion de terrorisme, dont la définition a radicalement changé au fil des siècles avec l’évolution des courants de la politique nationale et internationale.  À partir de ses origines révolutionnaires, le terrorisme a tour à tour été assimilé à des mouvements révolutionnaires populaires, à des répressions de masse perpétrées par des États totalitaires, à des insurrections anticolonialistes ou nationalistes, à des mouvements séparatistes et à des actions de guérilla de faible intensité montées ou appuyées par des États délinquants.  Il a toujours été associé à la violence ou, du moins, à une menace de violence.  Dans sa recherche d’une définition pratique et acceptable du terrorisme, Schmid(1) a analysé les éléments communs de 109 définitions; dans 83,5 p. 100 des cas, il a trouvé une mention de la « force » ou de la « violence ».  Les allusions à des motivations politiques se classaient au deuxième rang, dans 65 p. 100 des cas.  À cet égard, il est bon de citer ici l’alinéa 2c) de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, qui, sans mentionner expressément le terrorisme, est habituellement considéré comme censé l’englober :

les activités qui [...] visent à favoriser l’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens dans le but d’atteindre un objectif politique au Canada ou dans un État étranger; […]

Le Comité du Sénat a conclu que la définition du SCRS n’était pas exempte de difficultés, car on peut se demander pourquoi elle se limite à la violence « grave », comment il faut la définir, et qui doit établir qu’il y a violence « grave ».

Par ailleurs, le Comité n’a pas manqué de souligner que les conventions internationales sur le terrorisme, l’Antiterrorism and Effective Death Penalty Act des États-Unis et les définitions utilisées par le Federal Bureau of Investigation (FBI) et par le département américain de la Défense font également mention de la force, de la violence ou des menaces de force et de violence comme dénominateurs communs.

La Convention des Nations Unies se situe elle aussi dans ce contexte.  Bien que le mot « terrorisme » n’y soit pas défini comme tel, la Convention considère comme un acte criminel

tout [...] acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas activement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque [...] cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque.(2)

Le Comité du Sénat a aussi signalé le problème du crime international :

Un autre aspect qui vient compliquer la recherche d’une définition pratique du terrorisme est la distinction entre terrorisme et criminalité, surtout en cette époque de « narcoterrorisme » et de crime transnational.  À l’instar de ses prédécesseurs, le Comité affirme que le terrorisme est un crime et qu’il doit être traité comme tel. Toutefois, il s’agit d’un type particulier de criminalité ou d’un sous-ensemble, qui se distingue des autres genres par la motivation des auteurs.  Si terroristes et criminels utilisent des moyens illégaux et souvent identiques, le premier groupe est motivé par une « cause » tandis que les autres le sont par la perspective d’un gain économique personnel ou organisationnel.  Parmi les « causes » avancées par les terroristes, on retrouve des objectifs politiques ou idéologiques, la religion, le nationalisme, la séparation ethnique ou toute combinaison de ces aspects.

Le Comité a fini par ne pas définir explicitement la notion de terrorisme, en déclarant qu’il était peut-être temps de repenser ses définitions, surtout quand on sait que le terroriste moderne a accès à des tactiques qu’on n’associerait pas normalement à la violence ou à la force, mais qui peuvent être tout aussi dévastatrices.  Par exemple, la guerre de l’information et le cyberterrorisme n’entrent pas aisément dans les définitions existantes, qui s’articulent autour de la violence ou d’une menace de violence.  En outre, il n’est plus nécessairement vrai que les attaques terroristes ont pour but de communiquer un message politique ou d’obtenir des allégeances à une cause ou à une organisation politique.  Dans certains incidents récents, il semble que la vengeance de prétendues injustices ou la déstabilisation aient été les objectifs visés.

Dans sa définition générique du terrorisme, le Comité en a distingué quatre types :

1.  Le terrorisme parrainé par l’État – Les États qui financent les terroristes, les forment ou les abritent ou qui encouragent de quelque autre façon le terrorisme sont l’Iran, l’Irak, la Syrie, le Soudan, la Libye et des régimes comme celui des talibans en Afghanistan.  Ils appuient le terrorisme parce que c’est une méthode efficace de promouvoir leurs intérêts et, dans certains cas, une solution de rechange rentable à la guerre conventionnelle.  Ce genre de terrorisme continue de présenter une menace importante pour des pays comme les États-Unis.  Aux termes de l’alinéa 2c) de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, le terrorisme parrainé par l’État constitue une menace pour la sécurité du Canada, même si notre pays sert seulement de base à des activités visant d’autres pays.

2.  Le terrorisme d’agitation ou d’insurrection est imputable à des groupes non étatiques, mais habituellement très organisés.  Ces groupes peuvent avoir été engendrés par des organisations de guérilla dans certaines parties du monde.  Les groupes terroristes d’agitation ou insurgés sont généralement des organisations transnationales qui ont leur propre structure de commandement, leurs réseaux de financement et leurs installations d’entraînement.  Ils sont souvent affiliés à une ou plusieurs organisations politiques (légitimes) ou à une organisation sympathisante qui constituent leurs volets de financement, de propagande ou de lobbying politique.  En raison de leur structure transnationale, ces groupes peuvent avoir, dans un ou plusieurs pays, des activités légales à l’appui de leurs actions illégales ailleurs.

3.  Ce sont des terroristes vaguement affiliés qui ont été responsables de l’attentat à la bombe de 1993 au World Trade Centre ainsi que de celui de l’Alfred P. Murrah Federal Building d’Oklahoma City.  Traditionnellement, pour éviter d’être repérés, certains groupes terroristes se sont organisés en petites cellules qui pouvaient être reliées à une structure de commandement exerçant sur elles un certain degré de contrôle et de coordination.  Toutefois, comme ces terroristes n’ont pas nécessairement de structure de commandement organisée ou bien définie susceptible d’être infiltrée, que leurs affiliations sont souvent temporaires et que leurs activités sont ponctuelles, ils sont extrêmement imprévisibles. Le phénomène des terroristes complètement autonomes ou organisés en petites cellules constitue un type de menace nouveau et inquiétant. L’élément de motivation commun de ces terroristes peut être une religion, une idéologie ou encore une approche militariste patriotique, voire une philosophie millénariste.

4.  Le terrorisme mercenaire est une permutation ou une combinaison des trois autres types de terrorisme; on le qualifie parfois de « terreur à contrat ».  C’est Kadhafi qui aurait inventé cette approche, lorsqu’il a payé l’Armée rouge japonaise pour lui faire mener des attaques terroristes au nom de la Libye, au début des années 1980.

Le Comité a vite conclu qu’il ne semblait pas y avoir « de liste à jour des incidents terroristes survenus au Canada ».  Il a cru comprendre qu’une telle liste avait été maintenue jusqu’en 1992 seulement.  Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a fourni au Comité une liste faisant état de 17 incidents terroristes survenus à l’extérieur du Canada et touchant des Canadiens entre 1994 et octobre 1998.  Toutefois, il a bien précisé qu’on ne doit pas considérer ces données comme exhaustives.

Dans un communiqué de presse daté du 14 janvier 1999, le Comité a déclaré avoir été impressionné par la façon dont la compétence, le professionnalisme et le degré de préparation du milieu canadien de la sécurité et du renseignement avaient progressé pendant la dernière décennie, en soulignant toutefois que le milieu ne devait pas pour autant relâcher sa vigilance.  Le sénateur Kelly a d’ailleurs déclaré que la gamme des tactiques et des outils des terroristes s’était élargie et que la menace posée par les armes nucléaires, chimiques et biologiques s’était accrue(3).

Pour sa part, le sénateur Bryden a conclu que le message global que le Comité aurait aimé communiquer aux Canadiens est qu’ils sont bien servis par les organismes chargés de la sécurité et du renseignement et par les fonctionnaires de l’administration fédérale, mais que la mondialisation rapide présente de nouveaux dangers, comme le cyberterrorisme, de même que de nouveaux défis, tels que des communications chiffrées difficiles à décoder, qui vont exiger une attention et des ressources croissantes(4).

Le Comité a déclaré dans son rapport que, depuis celui du Comité spécial du Sénat sur le terrorisme et la sécurité publique rendu public en 1989, l’envergure et la nature des menaces pour la sécurité mondiale ont beaucoup changé.  La Figure 1 présente sous forme graphique le nombre d’incidents terroristes survenus dans le monde entier depuis 1989.  Il est important, dans ce contexte, de tenir compte des incidents terroristes qui ont pu avorter ou qui n’ont jamais abouti en raison des activités antiterroristes de la police et des organismes de sécurité et de renseignement; leur nombre n’est pas connu, mais il pourrait bien être élevé.

Figure 1
Nombre d’incidents terroristes survenus dans le monde, 1989-1997

Source : Données provenant du département d’État des États-Unis.

Même si le Comité a jugé que le Canada et les Canadiens ne constituent pas des cibles importantes d’attaques terroristes,

le Canada demeure toutefois une « antichambre » pour les groupes terroristes, c’est-à-dire un endroit où ils peuvent collecter des fonds, acheter des armes et exercer d’autres fonctions à l’appui de leur organisation et des activités terroristes qu’ils mènent ailleurs.  La plupart des grandes organisations terroristes internationales ont une présence au Canada.  Sa situation géographique fait également du Canada un point de transit privilégié pour les terroristes désireux d’entrer aux États-Unis, principale cible des attaques terroristes de par le monde.  En 1997, plus du tiers de toutes les attaques ont été dirigées contre des cibles américaines.

D’après les témoins qui ont comparu devant le Comité, le nombre d’incidents terroristes constatés au Canada a diminué, ce qui est considéré conforme à la tendance internationale.  En 1997, il y a eu en tout 304 attaques à l’échelle mondiale, l’un des totaux les plus bas enregistrés depuis 1971(5).  Bien que cette tendance soit nettement encourageante, le Comité a noté qu’un seul incident de l’envergure des attentats contre le vol 182 d’Air India ou contre l’édifice fédéral d’Oklahoma City peut prendre l’allure d’un cataclysme.  Cela dit, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international emploie 1 212 Canadiens et 4 288 travailleurs locaux dans ses missions à l’étranger, tandis que 1,5 million de Canadiens vivent à l’extérieur du pays de façon semi-permanente et qu’environ quatre millions voyagent à l’étranger chaque année.  Les Canadiens se rendent également de plus en plus souvent dans des régions marquées par l’instabilité politique(6).  Par conséquent, ils peuvent fortuitement devenir d’innocentes victimes du terrorisme.  C’est ainsi :

   C.  Financement du terrorisme

Dans leurs rapports, les comités spéciaux du Sénat sur le terrorisme et la sécurité publique ont souligné la croissance du « narcoterrorisme », c’est-à-dire des alliances entre les groupes terroristes et les cartels de la drogue.  Dans ce partenariat, les organisations terroristes fournissent aux narcotrafiquants leurs compétences et leurs structures paramilitaires, pour protéger leurs opérations et intimider les gouvernements importuns.  De leur côté, les cartels de la drogue puisent dans leurs énormes profits illicites pour mettre à la disposition des organisations terroristes des sommes dépassant de beaucoup ce qu’elles auraient pu recueillir par des moyens traditionnels.  En outre, les narcotrafiquants montrent aux terroristes comment transférer et blanchir de l’argent.  Actuellement, presque tous les grands groupes insurgés font du trafic de stupéfiants pour financer leurs activités.  Les FARC de Colombie, le Sentier lumineux du Pérou, l’armée Khun Sa du Myanmar, le Parti des travailleurs kurdes (PDT) de Turquie, les Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul (TLET) du Sri Lanka et l’Hizb-I-Islami d’Afghanistan comptent parmi les groupes terroristes qui font du trafic de stupéfiants soit indépendamment, soit en partenariat avec les cartels de la drogue.  Ces activités sont d’envergure internationale, mais elles peuvent aussi se dérouler au Canada.  Les narcodollars permettent aux terroristes d’avoir accès à des ressources financières suffisantes pour créer des organisations mondiales perfectionnées, capables de poursuivre des activités terroristes ou d’insurrection sans avoir besoin de l’appui consenti par la mère patrie, voire sans que leurs activités d’insurrection aient du succès sur le terrain.  Pour se financer, les organisations terroristes s’adonnent souvent à des activités criminelles comme l’extorsion, le vol, la fraude bancaire et le blanchiment d’argent. Beaucoup d’entre elles font du trafic d’armes et de la contrebande, notamment en facilitant le passage des immigrants illégaux.

Certains témoins ont déclaré au Comité qu’ils s’inquiétaient d’une tendance nouvelle qui semble se dessiner dans les grands groupes terroristes internationaux, à savoir la métamorphose de certains d’entre eux en véritables organisations criminelles, et c’est peut-être particulièrement vrai dans le cas des groupes terroristes insurgés, car les objectifs politiques qui les motivaient à l’origine ont été soit complètement remplacés par le désir d’acquérir une fabuleuse richesse personnelle rendue possible par des activités criminelles, soit subordonnés à ce désir.  Or, comme ces groupes étaient au départ des organisations paramilitaires dont certains membres avaient une formation et de l’expérience de combat, ils constituent une grande menace en tant qu’organisations criminelles.

On pourrait en outre prévoir que la phase terminale de l’évolution de tels groupes sera leur participation active à des entreprises commerciales licites, pour masquer leurs activités criminelles.  Ce faisant, ils suivraient l’exemple de la Cosa Nostra, de la mafia russe et d’autres groupes du crime organisé.  Les Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul, par exemple, auraient largement investi sur les marchés boursier et monétaire et dans l’immobilier, les sociétés de crédit, les exploitations agricoles, les magasins de location de vidéos et les restaurants(7), bref dans tout ce qui rapporte beaucoup et donne accès à de fortes sommes d’argent.  Les Tigres libérateurs et l’Armée républicaine irlandaise (IRA) posséderaient et exploiteraient des flottes entières de navires hauturiers qui leur serviraient à transporter – outre des armes et d’autres cargaisons de contrebande – des engrais, du bois-d’œuvre, du sucre, du ciment et divers autres produits commerciaux pour des clients légitimes (et vraisemblablement innocents).  Les organisations terroristes qui se transforment en entreprises commerciales multinationales poseront donc des défis de taille aux responsables de l’application des lois et de la protection de la sécurité nationale et internationale.

   D.  Identification et désignation des groupes terroristes

Aux États-Unis, l’Antiterrorism and Effective Death Penalty Act of 1996 autorise le Secrétaire d’État à établir tous les deux ans une liste des organisations terroristes étrangères (OTE) désignées.  Il peut, à n’importe quel moment, ajouter des organisations à cette liste.  En 1999, 28 organisations y figuraient(8).  Il s’agissait dans 27 de ces cas de désignations renouvelées, autrement dit d’organisations qui avaient déjà été inscrites sur la liste deux ans auparavant et qui y demeuraient.  Le renouvellement de la désignation est un acte positif qui reflète une décision du Secrétaire d’État selon laquelle une organisation répond toujours aux critères prévus par la Loi.  Si le Secrétaire d’État ne la désigne pas de nouveau, l’organisation est retirée de la liste.  Trois organisations en ont d’ailleurs été retirées parce qu’elles ne répondaient plus aux critères de désignation, tandis qu’une autre y a été ajoutée parce qu’elle y répond maintenant.

Les conséquences de la désignation comme OTE ne sont pas négligeables :

Les critères de désignation sont au nombre de trois :

1)   l’organisation doit être étrangère;

2)   elle doit se livrer à des activités terroristes telles qu’elles sont définies au sous-alinéa 212(a)(3)(B) de l’Immigration and Nationality Act;

3)   les activités de l’organisation doivent menacer la sécurité des ressortissants américains ou la sécurité nationale (la défense nationale, les relations étrangères ou les intérêts économiques) des États-Unis.

On a reproché au département d’État le manque de transparence du processus de désignation.  Le Secrétaire d’État désigne les organisations à la suite d’un « effort interorganisme exhaustif », et ses désignations doivent faire l’objet d’un contrôle judiciaire.  On conserve un dossier administratif de toutes les recommandations adressées au Secrétaire d’État à cet égard; toutefois, comme ces dossiers révéleraient les sources et les méthodes d’obtention de l’information, ils sont protégés.

La Loi autorise aussi l’ajout de groupes à la liste à n’importe quel moment sur décision du Secrétaire d’État, en consultation avec le Procureur général et le Secrétaire au Trésor.  Les désignations peuvent par ailleurs être révoquées si le Secrétaire d’État conclut qu’il y a des raisons valables de le faire et qu’il en informe le Congrès, lequel peut aussi adopter des lois pour révoquer des désignations.

La Loi a été conçue pour apaiser les craintes que des organisations terroristes étrangères recueillent des fonds aux États-Unis.  Certaines organisations terroristes essaient de donner l’impression qu’elles ne recueillent de l’argent que pour des activités caritatives de cliniques ou d’écoles, par exemple; ces activités les ont aidées à recruter des sympathisants et des activistes, et elles ont généré des appuis pour les terroristes.  C’est parce qu’il en était conscient que le Congrès a adopté la disposition suivante, à l’alinéa 301(a)(7) de la Loi :

Les organisations étrangères qui se livrent à des activités terroristes sont si marquées par leur comportement criminel que toute contribution à de telles organisations facilite ce comportement. (traduction)

Il s’ensuit que toute contribution, à quelque fin que ce soit, à une organisation terroriste étrangère désignée est interdite par la Loi, exception faite des dons de médicaments ou d’articles religieux.

Certains critiques reprochent aux Américains d’avoir deux poids deux mesures dans ce contexte, puisque l’IRA ne figure pas sur la liste des OTE.  Le Bureau du coordonnateur des mesures antiterroristes des États-Unis réfute cette critique de la façon suivante :

Il existe de nombreuses preuves de la participation de l’IRA à des activités terroristes dans le passé.  Ces preuves sont antérieures au moment où nous avons songé à désigner l’IRA comme OTE, il y a deux ans.  À l’époque, le Secrétaire d’État a pris bonne note du cessez-le-feu sans équivoque de l’IRA, de même que de la décision subséquente du gouvernement du Royaume-Uni de reconnaître que ce cessez-le-feu était « sincère, en paroles et en actes ».  C’est pour cette raison que le Sinn Fein a pu se joindre aux pourparlers généraux entre tous les partis à Belfast.  Le processus de rétablissement de la paix en Irlande du Nord se poursuit, non sans d’évidentes difficultés, et nous avons de nouveau conclu qu’il ne faudrait pas désigner l’IRA maintenant.  Cela dit, les indications récentes d’une intensification des activités terroristes en Irlande du Nord nous inquiètent.(9)

Au Canada, contrairement aux États-Unis, il n’y a pas d’enveloppe de ressources unique pour l’appareil de la sécurité et du renseignement.  De nombreuses organisations du milieu de la sécurité et du renseignement exercent des pouvoirs qui ont ou risquent d’avoir des répercussions sur les droits et libertés individuels.  Le Comité du Sénat a déclaré qu’il souhaiterait que les pouvoirs d’enquête et d’application de la loi de ces organismes soient assujettis à une forme quelconque de contrôle de leur conformité à la loi et aux règles de la justice naturelle.  De même, il estime important que ceux qui se sentent lésés par l’exercice de ces pouvoirs puissent avoir recours à un mécanisme d’examen indépendant.  À l’heure actuelle :

En outre, le bureau de l’inspecteur général créé par la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité est investi du mandat :

L’inspecteur général est nommé par le gouverneur en conseil pour rendre compte des activités du Service au solliciteur général.  Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et l’inspecteur général ont un accès illimité à l’information produite ou conservée par le Service canadien du renseignement de sécurité, et les deux ont déclaré au Comité du Sénat être parfaitement convaincus que leurs droits d’accès étaient respectés.

Le financement des activités terroristes relèverait vraisemblablement de la définition de l’alinéa 2c) de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, selon lequel « les menaces pour la sécurité du Canada » comprennent :

a)   l’espionnage ou le sabotage visant le Canada ou préjudiciables à ses intérêts, ainsi que les activités tendant à favoriser ce genre d’espionnage ou de sabotage;

b)   les activités influencées par l’étranger qui touchent le Canada ou s’y déroulent et sont préjudiciables à ses intérêts, et qui sont d’une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque;

c)   les activités qui touchent le Canada ou s’y déroulent et visent à favoriser l’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre les personnes ou des biens dans le but d’atteindre un objectif politique au Canada ou dans un État étranger;

d)   les activités qui, par des actions cachées et illicites, visent à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada ou dont le but immédiat ou ultime est sa destruction ou son renversement, par la violence.

Cette définition ne vise toutefois pas les activités licites de défense d’une cause, de protestation ou de manifestation d’un désaccord qui n’ont aucun lien avec les activités mentionnées aux points a) à d).

   E.  Engagement international du Canada

Dans son rapport de 1999, le Comité spécial a observé que « les négociations internationales sur le terrorisme achoppaient souvent sur la définition du terrorisme et prenaient l’allure de débats philosophiques ou idéologiques sur les racines du terrorisme, [et que ces] débats [ont] trop souvent [...] détourné les négociations de leur objet et [...] retardé l’avancement des travaux.  Le Comité a donc été heureux de constater que ces obstacles [avaient] été surmontés en grande partie. » La Déclaration des Nations Unies sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international de 1994 a marqué un profond changement, le débat portant non plus sur les définitions et sur les racines du terrorisme, mais bien sur les efforts conjugués déployés pour y faire face.  La plupart des pays reconnaissaient dès lors que le terrorisme est un crime.

Dans son rapport, le Comité a poursuivi en disant qu’on sait « depuis longtemps que, dans l’ensemble, l’efficacité des ententes internationales et du droit international dépend de la volonté du pays le plus puissant.  Pendant de nombreuses années, ce sont les États-Unis qui ont joué ce rôle, l’Union soviétique ayant servi dans une certaine mesure de contrepoids, jusqu’à ce qu’elle s’effondre. »  Par exemple, le bombardement par les États-Unis de présumées cibles terroristes en Afghanistan et au Soudan, justifié en invoquant l’article 51(10) de la Charte des Nations Unies, portait peut-être atteinte à la Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif.  Or, les pays du G-8 et vingt autres pays ont avalisé cette Convention, et le Canada l’a signée le 12 janvier 1988, mais elle n’a pas encore été ratifiée. D’après certains commentateurs, les actions des États-Unis montrent que ce pays constituera automatiquement la norme pour ce qui est de l’observation du droit international en matière de terrorisme.

Le Comité a jugé que, comme le Canada est le voisin et principal partenaire commercial des États-Unis, l’appui de ce pays aux ententes internationales sur le terrorisme aura un effet sur le Canada, et que « l’importance de la collaboration et du soutien que les deux pays s’accordent dans la lutte contre le terrorisme fait aussi que le Canada occupe une position sans pareille [pour] influer sur la politique et les activités des États-Unis dans ce domaine. »  Le Comité a recommandé que le gouvernement du Canada continue d’user de son influence à cet égard par tous les moyens légitimes à sa disposition.

   F.  Activités de financement du terrorisme au Canada

Dans ses délibérations, le Comité du Sénat a entendu des témoignages selon lesquels divers groupes ayant des affiliations terroristes mènent des activités de financement au Canada, en ayant souvent recours à des tactiques comme l’intimidation et d’autres formes de coercition auprès de diverses collectivités d’immigrants.  Il semble difficile de contrôler les activités de financement terroristes, peut-être parce que l’intimidation et les autres pratiques illégales sont rarement signalées.  Qui plus est, les groupes terroristes invoquent souvent le nom d’organismes caritatifs ou philanthropiques dans leurs activités de collecte de fonds.  Ils peuvent même être enregistrés comme œuvres de bienfaisance et de charité par l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu.  Ce statut accroît leur crédibilité et – fait ironique – incite les contribuables canadiens à subventionner leurs activités.  En effet, les donateurs ne savent généralement pas du tout que leur argent sera utilisé à des fins illégales.  Il est donc fréquemment impossible d’établir un lien clair entre les fonds recueillis au Canada et les actes terroristes commis ailleurs.  Ces groupes de façade prennent habituellement soin de ne pas commettre de crimes au Canada, de sorte que même si l’on réussit à établir un lien direct, la seule accusation que l’on puisse porter pour obtenir une condamnation est celle de complot.

Dans son rapport, le Comité note que :

[p]our lutter contre la collecte de fonds terroristes, les États-Unis ont adopté [la] Antiterrorism and Effective Death Penalty Act, 1996 [, mais qu’il] est encore trop tôt pour juger de l’efficacité d[e cette loi …]  En effet, les enquêtes que mène le FBI pour établir des liens entre les groupes de façade reconnus et les groupes terroristes et pour suivre leurs fonds sont fort complexes et exigent beaucoup de temps, de personnel et de ressources.

Enfin, le Comité a reconnu qu’il était incapable de proposer une solution novatrice à cet égard.  Il a toutefois déclaré qu’il serait peut-être plus efficace d’empêcher des organisations ostensiblement philanthropiques de s’enregistrer comme organismes de bienfaisance, en modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu afin que l’ADRC puisse refuser ce genre d’enregistrement à un groupe sur la foi d’un certificat délivré par le Service canadien du renseignement de sécurité, si celui-ci juge que ce groupe constitue une menace pour la sécurité du Canada, aux termes de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Il faudra bien sûr prendre soin d’établir les dispositions d’un tel régime de façon que le SCRS se conforme à une procédure bien établie et que son certificat puisse faire l’objet d’un examen par le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité et par les tribunaux, à la demande du groupe visé, conformément à la Charte canadienne des droits et libertés.  Il faudrait aussi, naturellement, faire en sorte d’éviter que le certificat ne devienne une monnaie d’échange avec ces groupes, pour obtenir leur collaboration à des activités de renseignement, d’enquête et d’application de la loi.

C’est dans le contexte de ces questions stratégiques que la Convention des Nations Unies fera maintenant l’objet d’une analyse.

CONVENTION DES NATIONS UNIES

   A.  Infractions

Les infractions qu’interdit la Convention sont énumérées à l’article 2, dont l’alinéa 1a) dispose que commet une infraction au sens de la Convention toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, illicitement et délibérément, fournit ou réunit des fonds dans l’intention de les voir utilisés ou en sachant qu’ils seront utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre une infraction, soit définie dans la Résolution, soit dans les neuf conventions et protocoles relatifs au terrorisme qui y sont annexés(11).

Selon l’alinéa 1b), une infraction est aussi commise si le financement rend possible un acte destiné à tuer ou à blesser grièvement un civil ou toute autre personne qui ne participe pas activement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque (ci-après, ce genre d’infraction sera appelée « infraction au sens du paragraphe 1 » par souci de concision).  Bien que ce paragraphe ne soit pas censé être une définition du « terrorisme », il précise les éléments essentiels de l’infraction, à savoir un acte de violence à l’égard de civils, dans le but de contraindre un État ou une organisation internationale à accomplir un acte ou à s’abstenir de l’accomplir.

Pour qu’un acte soit considéré comme une infraction au sens du paragraphe 1, il n’est pas nécessaire que le financement fourni soit effectivement utilisé pour perpétrer l’infraction.  Une tentative de commettre une infraction au sens du paragraphe 1 est aussi considérée comme une infraction (au sens du paragraphe 4).  De même, commet une infraction quiconque organise ou dirige ou se fait le complice d’une infraction ou d’une tentative d’infraction au sens du paragraphe 1.

En outre, commet une infraction quiconque contribue à dessein à la perpétration d’une infraction au sens du paragraphe 1 par un groupe de personnes agissant dans un but commun.  Cette contribution doit être intentionnelle et faite a) afin de faciliter l’activité du groupe par laquelle celui-ci compte commettre une infraction au sens du paragraphe 1, ou b) en sachant que ce groupe compte commettre une infraction au sens du paragraphe 1.

   B.  Application

L’article 3 de la Convention précise que celle-ci ne s’applique pas aux infractions perpétrées dans les frontières d’un seul État quand son auteur présumé est un ressortissant de cet État et qu’il se trouve sur son territoire.  Par contre, elle s’applique lorsqu’un autre État a une raison d’établir sa compétence.  Un autre État peut en effet se prévaloir de sa compétence en vertu des dispositions des paragraphes 1 ou 2 de l’article 7.  Il s’agit alors d’infractions commises :

a)  à bord d’un navire battant le pavillon de l’autre État ou d’un aéronef immatriculé conformément à sa législation;

b)  par un de ses ressortissants;

c)  en ayant pour but ou pour résultat la commission d’une infraction contre une installation gouvernementale ou publique située en dehors du territoire de cet État, y compris ses locaux diplomatiques ou consulaires;

d)  pour tenter de contraindre cet État à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque;

e)  par un apatride ayant sa résidence habituelle sur le territoire de cet État; 

f)  à bord d’un aéronef exploité par le gouvernement dudit État.

L’effet de ces dispositions semble donner à un État la compétence nécessaire pour poursuivre en vertu de ses propres lois l’auteur d’une infraction commise entièrement dans le territoire d’un autre État, lorsque cette infraction vise directement ou indirectement ses ressortissants ou ses installations, où que ce soit dans le monde.  On pourrait aussi les interpréter en concluant qu’ils visent les actes de terrorisme contre des entreprises multinationales privées, lorsque l’infraction est commise dans le but d’obliger l’État à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte.

   C.  Obligations des États parties à la Convention

Chaque État partie ratifiant la Convention est tenu d’informer le Secrétaire général de la compétence qu’il va exercer en vertu de l’article 7.  Dans la plupart des cas, l’État partie sur le territoire duquel l’auteur de l’infraction est arrêté ou situé doit soit le poursuivre, soit l’extrader.  Quand plus d’un autre État affirme avoir compétence pour poursuivre l’auteur de l’infraction, chacun s’efforce de coordonner ses actions comme il convient.

Les États parties à la Convention sont tenus de prendre les mesures nécessaires pour ériger en infractions pénales au regard de leur droit interne les infractions définies dans la Convention et de les punir « de peines appropriées compte tenu de leur gravité ».  En outre, l’article 5 de la Convention oblige les États parties à prendre les mesures nécessaires pour que la responsabilité des personnes morales situées sur leur territoire ou constituées sous l’empire de leur législation soit engagée lorsqu’une personne responsable de la direction ou du contrôle de ces personnes morales a, en cette qualité, commis une infraction à la Convention.

Quand les infractions sont codifiées dans le droit interne des États parties, elles doivent l’être à titre d’infractions justifiant l’extradition, et les États parties sont tenus de s’engager à les inclure dans tous les traités d’extradition qu’ils concluent avec d’autres États. D’autres dispositions régissent la coopération et l’aide mutuelle des États parties à l’égard des enquêtes pénales relatives aux infractions prévues par la Convention et aux efforts déployés pour prévenir ces infractions.  Les résultats des poursuites intentées contre les auteurs d’infractions à la Convention doivent être communiqués au Secrétaire général pour qu’il les fasse connaître aux autres États parties.

L’article 6 de la Convention oblige les États parties à adopter les mesures nécessaires pour que les actes criminels relevant de la Convention « ne puissent en aucune circonstance être justifiés par des considérations de nature politique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ou d’autres motifs analogues. »

En outre, les États parties doivent prendre des mesures pour identifier, détecter et geler ou saisir tous les fonds utilisés afin que les terroristes puissent commettre de telles infractions ou censés l’être à cette fin.  Les États parties doivent envisager l’établissement de mécanismes d’utilisation des fonds ainsi saisis pour dédommager les victimes des attentats terroristes ou leurs familles.  Ils doivent inviter leurs institutions financières à accorder une attention particulière aux opérations inhabituelles ou suspectes et à signaler au gouvernement celles qui leur semblent découler d’activités criminelles.

La Convention précise enfin que ses dispositions doivent être mises en œuvre sans porter préjudice aux droits des tierces parties de bonne foi.  Les États parties doivent donc songer à se pencher sur la nature des contributions financières pour déterminer ce qu’on entend par « de bonne foi ».

LES GRANDES QUESTIONS

La mise en œuvre de la Convention au Canada soulève plusieurs questions.  Il ne s’agit pas de les énumérer ou de les analyser de façon exhaustive dans ces pages, mais plutôt de les préciser comme thèmes de recherches ou de discussions plus poussées.

   A.  Définition du « terrorisme »

En plus des problèmes de définition dont il a été question à la partie 1, il faut souligner que les débats de l’Assemblée générale des Nations Unies ont été marqués par des interventions (particulièrement de représentants du Pakistan, de la Syrie, du Liban, de l’Irak et de Cuba) sur les risques d’abus attribuables au fait qu’il n’y a pas dans la Convention de définition précise du « terrorisme ». Même si les alinéas 2a) et b) peuvent être interprétés comme une énumération implicite des activités assimilées au terrorisme dans la Convention, les délégués voulaient que les initiatives antiterrorisme de l’Assemblée générale soient précisées grâce à une distinction claire entre le terrorisme et les efforts légitimes des peuples pour assurer leur liberté nationale ou leur libération d’une occupation étrangère.

Les interventions de ces délégués font ressortir une importante question soulevée dans le contexte de la Convention, à savoir qui définit ce qui est et ce qui n’est pas une organisation terroriste.  Bien que la définition de l’alinéa 1b) de l’article 2 soit raisonnablement claire en théorie, son application à des cas particuliers pourrait se révéler difficile.  Par exemple :

Les représentants d’autres pays se sont joints à ces critiques en accusant les États-Unis de financer et de former sous le manteau des groupes terroristes.  Les États-Unis se sont prévalus de leur droit de réplique pour nier ces allégations.

Bien que la Convention ne donne pas de définition explicite du « terrorisme » ou d’un « terroriste », elle semble en sous-entendre une dans son article 2(12).  Toutefois, la façon précise qu’adopte un État pour interpréter et appliquer la Convention est laissée à sa discrétion, en fonction de son droit interne.  Une fois qu’un État décide qu’une organisation fonctionnant dans sa sphère de compétence est une organisation terroriste qui réunit des fonds, il ne semble pas qu’il ait besoin d’une autre justification pour ordonner que des mesures punitives soient prises contre elle, à condition, bien sûr, que la conclusion juridique soit atteinte d’une façon largement compatible avec la Convention.  Le risque d’abus est clair : un État pourrait persécuter des organisations non terroristes pour des raisons politiques sous prétexte d’avoir identifié des organisations prétendument « terroristes » actives sur son territoire, de les avoir désignées comme telles et de les poursuivre.  Naturellement, le droit international ne prévoit actuellement aucune mesure – sauf la désapprobation et la condamnation d’autres États – pour empêcher un gouvernement d’appliquer à tort ou à raison les principes de la Convention afin de qualifier un groupe d’opposition de « terroriste » et d’avoir ainsi un prétexte pour proscrire ses activités.  En décrivant des activités considérées comme « terroristes » sans définir la notion de terrorisme elle-même, la Convention semble viser à établir une norme de base servant à distinguer l’activité terroriste de l’activité politique légitime.  Il n’est toutefois pas sûr que certains États ne puissent pas se servir de la Convention pour supprimer des partis d’opposition sous l’apparence d’une lutte antiterrorisme.

Dans l’éventualité d’un différend entre États parties au sujet de l’application ou de l’interprétation de la Convention (notamment, on le conçoit, au sujet du fait qu’un État détermine qu’un groupe fonctionnant dans son territoire est « terroriste » ou s’adonne à des activités terroristes), l’article 24 oblige les États parties à tenter d’abord d’obtenir un règlement par la négociation.  Si cela se révèle impossible, chacune des parties peut soumettre le différend à l’arbitrage.  Si les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur l’arbitrage dans les six mois suivant sa demande, l’une ou l’autre des parties peut renvoyer le différend à la Cour internationale de justice.

Enfin, l’article 15 permet à un État partie de refuser d’extrader ou de fournir l’aide judiciaire réclamée s’il a des raisons sérieuses de croire que la demande d’extradition a pour objet la poursuite ou la punition d’une personne pour des raisons tenant à sa race, à sa religion, à sa nationalité, à son origine ethnique ou à ses opinions politiques, ou que faire droit à la demande porterait préjudice à la situation de cette personne pour l’une ou l’autre de ces raisons.

   B.  Transparence

Comme le Comité du Sénat l’a noté dans son rapport de 1999 :

Sauf quelques très rares exceptions, le Parlement n’a pas accès aux analyses et aux évaluations produites par le milieu du renseignement.  Dans le système canadien, les clients des services du renseignement se limitent aux stratèges et aux décideurs du pouvoir exécutif.  Quand vient le temps d’approuver des mesures législatives, des budgets et des politiques, le Parlement n’a souvent pas accès directement à des analyses ou des évaluations des services du renseignement.  Par exemple, dans le débat sur le projet de loi ayant trait au blanchiment de l’argent, les parlementaires ne devraient-ils pas avoir accès aux renseignements de sécurité qui ont aidé à reconnaître le problème et à trouver une solution? [...] Le Comité recommande que le milieu du renseignement de sécurité explore des moyens pour intégrer, au moins en partie, les parlementaires dans le réseau du renseignement sans porter atteinte à la sécurité nationale.

Comme nous l’avons vu, l’importance de protéger l’intégrité de la démarche du renseignement est l’une des raisons invoquées pour justifier la confidentialité du processus d’enquête.  L’idéal serait bien sûr de concilier les deux objectifs de transparence et de sécurité.  Le projet de loi C-16 : Loi sur l’enregistrement des organismes de bienfaisance (renseignements de sécurité)qui a été déposé en mars 2001 – et qui fera l’objet d’une discussion plus longue un peu plus loin – a été précisément conçu à cette fin : certes, il permettrait au gouvernement de se fonder sur les rapports secrets de l’appareil de la sécurité et du renseignement pour révoquer le statut d’organisme de bienfaisance des groupes servant de façade à des organisations terroristes, mais il convient de souligner, car c’est important, qu’un juge de la Cour fédérale devrait déterminer si ces décisions du gouvernement sont « raisonnables ».  Le manque de transparence perçu dans ce processus décisionnel pourrait vraisemblablement être contesté en vertu de la Charte (voir plus loin).

   C.  Application et contrôle

Il a déjà été souligné que les organisations terroristes sont susceptibles de se créer des « façades » – une organisation religieuse, par exemple – pour réunir des fonds.  Certaines de ces façades peuvent même avoir des objectifs religieux légitimes en plus de leurs activités terroristes.  En termes idéologiques, l’atteinte de l’objectif religieux et celle de l’objectif politique sont souvent reliées.  C’est le cas, par exemple, de la notion de « djihad », un terme qui, dans la tradition islamique, s’entend de la guerre sainte qui se livre dans l’âme du croyant pour vaincre le mal grâce aux pratiques religieuses voulues.  Bien entendu, le terme a pris une connotation différente à notre époque, puisqu’il s’entend désormais souvent du combat sacré contre l’exploitation et l’oppression dont certains Musulmans se sentent victimes de la part des nations chrétiennes des pays occidentaux.

Ce n’est pas tout : comment peut-on déterminer l’utilisation ultime des fonds recueillis?  En plus d’avoir des objectifs politiques ou religieux légitimes, une organisation peut être impliquée dans des activités terroristes.  Retracer les fonds jusqu’à leur utilisation ultime pourrait causer des difficultés énormes aux organismes responsables du respect de la loi.  En outre, le moment auquel les fonds sont reçus par les terroristes pourrait être séparé par plusieurs opérations de celui où le donateur original remet de l’argent à quelqu’un, à telle enseigne que ni les donateurs, ni ce quelqu’un n’ont aucune idée de l’utilisation ultime du don.  Même si les dons faits dans ces conditions ne seraient pas considérés comme des infractions criminelles (puisque la mens rea doit être prouvée, autrement dit, le donateur doit savoir que son argent va être utilisé en tout ou en partie à l’appui d’activités terroristes), le problème plus grave d’endiguer le financement des terroristes demeure.

Bien sûr, il est toujours possible que des personnes ou des groupes innocents fassent l’objet de sanctions injustifiées, par exemple le gel et la saisie de leurs comptes bancaires. La meilleure protection contre de telles injustices serait vraisemblablement l’inclusion dans nos lois de dispositions exhaustives de contrôle judiciaire.

   D.  Questions liées à la Charte(13)

Il est probable que certaines questions liées à la Charte seront soulevées, essentiellement en ce qui concerne les garanties de liberté d’expression ou de religion.

      1.  Liberté d’expression – Alinéa 2b)

Donner de l’argent à une organisation dont on sait qu’elle appuie le terrorisme est-il une forme d’expression protégée par la Charte?  Les tribunaux ont interprété la notion d’« expression » en jugeant qu’elle englobe certains actes positifs de « communication » non verbale, comme le piquetage et l’établissement d’un « camp de la paix » sur la colline du Parlement (arrêt Weisfield) ou l’affichage sur une propriété publique (affaire Ramsden c. Peterborough (Ville)).  Comme l’affichage encourage la prise de décisions politiques et sociales, le tribunal a jugé que c’est une activité favorable à au moins une des valeurs fondamentales de l’alinéa 2b) et que son interdiction par la municipalité y portait atteinte; le tribunal a donc conclu que, bien que méritoire, l’objectif législatif de l’interdiction ne justifiait pas une interdiction complète de l’affichage.

Dans d’autres affaires, les tribunaux ont imposé des limites à la liberté d’action en tant qu’expression politique.  Ainsi, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a jugé en 1994 que l’arrestation d’un groupe d’environnementalistes qui avaient bloqué un chemin forestier au mépris d’une injonction du tribunal ne constituait pas une violation de leur liberté d’expression. Elle a conclu que l’injonction ne faisait pas obstacle à leur liberté d’expression licite, en déclarant que les accusés avaient par ailleurs l’entière liberté de se tenir n’importe où le long du chemin pour s’exprimer verbalement ou symboliquement (affaire MacMillan Bloedel). Dans l’affaire Dieleman, un tribunal ontarien a accordé une injonction interdisant des manifestations anti-avortement aux alentours de cliniques et de cabinets de médecins.  Même si cette injonction limitait la liberté d’expression garantie par la Charte, les intérêts physiologiques, psychologiques et le droit à l’intimité des femmes qui se rendaient dans ces cliniques et ces cabinets pour un avortement constituaient selon le tribunal des objectifs suffisamment importants pour passer outre à la liberté d’expression des protestataires.  Bref, ces affaires montrent que certaines actions sont protégées au nom de la « liberté d’expression », mais que cette liberté peut être restreinte lorsqu’un intérêt sociétal suffisamment important le justifie.

 Le juge Robertson, de la Cour d’appel fédérale, s’est directement prononcé sur la question de la collecte de fonds pour des groupes terroristes dans le contexte de la Charte dans la décision Suresh c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) rendue en 2000(14) :

Les formes d’expression violentes ne sont pas protégées par la Constitution, et la collecte de fonds à l’appui du terrorisme ne l’est pas non plus.  Il est vrai qu’on n’a fait aucune allégation d’activités criminelles contre l’appelant, ni d’allégations qu’il a eu des activités terroristes au Sri Lanka ou qu’il a directement participé à l’acquisition d’armes et qu’il en a fournies aux TLET.  Néanmoins, les actes ayant pour but d’appuyer et de faciliter des activités terroristes sont répréhensibles et ne peuvent pas bénéficier de protection de la Charte. À mon avis, ceux qui décident librement de recueillir de l’argent qui va servir à appuyer des organisations terroristes sont tout aussi coupables et responsables des actes de ces organisations que ceux qui les commettent effectivement.  Les gens qui recueillent de l’argent pour l’achat d’armes en sachant qu’on va s’en servir pour tuer des civils sont tout aussi à blâmer que ceux qui appuient sur la détente.  Il est évident que la liberté d’association et la liberté d’expression sont des droits accordés à tous ceux qui ont des objectifs politiques, mais ces droits ne s’étendent pas à ceux qui cherchent à atteindre des objectifs politiques par des moyens qui sapent les libertés et les valeurs mêmes que la Charte est censée promouvoir. [...] Bref, recueillir des fonds à l’appui de la violence terroriste doit nécessairement tomber hors de la sphère de l’expression protégée. (traduction)

Dans l’affaire Suresh, l’appelant était connu comme collecteur de fonds pour les TLET (les Titres libérateurs de l’Eelam Tamoul), un groupe terroriste connu; il devait être déporté au Sri Lanka (où il allait presque certainement être torturé).

L’analyse serait-elle différente si seule une petite partie des sommes données devait être utilisée pour appuyer des activités terroristes, alors que le reste servirait à financer des activités politiques, humanitaires et sociales légitimes?  Une interdiction complète serait-elle justifiée?  Comme il a déjà été vu, la Convention prévoit la criminalisation de l’acte de donner de l’argent quand il doit être utilisé en tout ou en partie pour appuyer le terrorisme.  On peut facilement imaginer qu’une organisation pourrait réunir des fonds pour financer des activités politiques légitimes et non violentes (ou pour des raisons humanitaires), en plus d’avoir des objectifs terroristes.  Contrairement au raisonnement qui sous-tend la décision rendue dans l’affaire Suresh, on pourrait soutenir que le fait de donner de l’argent à une organisation est une forme d’expression protégée par la Charte et que, lorsque le groupe auquel on donne de l’argent ne contribue que peu et pour ainsi dire par la bande seulement au terrorisme, une interdiction générale de donner de l’argent à une organisation connue pour appuyer le terrorisme, même de façon très modeste, ne satisferait pas au critère de « proportionnalité » d’interprétation de l’article 1.

Ce critère d’interprétation comprend trois volets auxquels il faut répondre par l’affirmative : 1) La loi est-elle rationnellement liée à l’objectif (le « critère du lien rationnel »)?  2) La loi limite-t-elle le droit d’expression seulement dans la mesure nécessaire (le « critère de la proportionnalité »)?  3) La loi a-t-elle un impact inutilement lourd sur le droit limité?  Il est évident que la suppression du terrorisme est un objectif louable, et qu’une loi qui en interdit le financement semble être un moyen rationnel de l’atteindre, mais on pourrait aussi dire qu’une telle interdiction globale des dons d’argent ne résisterait pas à l’application du critère de la proportionnalité, puisqu’on pourrait peut-être trouver un moyen moins radical d’atteindre le même objectif.  Il semble toutefois que la distinction entre un groupe qui finance généreusement le terrorisme et un groupe qui le fait rarement ou modestement n’est peut-être pas suffisante pour influer sur l’analyse dans le contexte de la Charte.

Comme il a été dit plus haut, si le projet de loi C-16 est adopté, il pourrait être contesté en vertu de la Charte parce qu’il porterait atteinte à la liberté d’expression en raison du manque de « transparence » du processus selon lequel un organisme de bienfaisance serait réputé « terroriste » afin qu’on puisse révoquer son statut d’organisme de bienfaisance.  On peut lire dans le projet de loi que la décision de révoquer ce statut serait prise par le solliciteur général et par le ministre du Revenu national sur la foi de rapports du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).  Or, le public n’a pas accès aux processus d’enquête et de rapport du SCRS, et ce, pour des raisons de sécurité.  Dans l’affaire Southam (no 1) (1983), la Cour d’appel de l’Ontario a jugé que le paragraphe 12(1) de la Loi sur les jeunes délinquants, qui exigeait que leurs procès se déroulent à huis clos, était inconstitutionnel puisqu’il était incompatible avec l’alinéa 2b) de la Charte.  La Cour d’appel de l’Ontario a conclu alors que la règle de transparence des tribunaux favorise la confiance indispensable du public dans l’intégrité du système judiciaire et aide le public à comprendre l’administration de la justice.  Qu’une loi fédérale interdise absolument l’accès du public au procès d’un jeune délinquant ne pouvait pas être justifié de façon convaincante dans une société libre et démocratique.  La Cour d’appel a toutefois reconnu qu’il pourrait être justifié d’exclure le public de certaines audiences en vertu de la Loi sur les jeunes délinquants, mais que l’interdiction absolue était trop générale.  La Cour d’appel de l’Ontario a maintenu cette interprétation dans le contexte de la Loi sur les jeunes contrevenants, dans le renvoi Southam (1986).

Dans une affaire entendue en 1994, Canadian Broadcasting Corp. c. New Brunswick (Attorney-General), la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick s’est prononcée sur l’interprétation du paragraphe 486(1) du Code criminel, qui autorise un juge à exclure un membre du public ou tout le public d’un tribunal quand, à son avis, il le fait « dans l’intérêt de la moralité publique, du maintien de l’ordre ou de la bonne administration de la justice ».  Même si la Cour a conclu que ce paragraphe du Code criminel limite la liberté d’expression, elle l’a estimé justifié en se fondant sur l’article premier de la Charte.  En effet, si l’ordonnance d’exclusion n’avait pas été rendue, les victimes en auraient souffert encore davantage, puisque cette affaire portait sur des accusations d’agression sexuelle et d’autres infractions du genre.  Bien que la décision de la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick ait été renversée par la Cour suprême du Canada en 1996, parce que les circonstances ne justifiaient pas l’exclusion du public du tribunal, le raisonnement fondé sur la Charte de la Cour d’appel pour juger constitutionnel le paragraphe 486(1) n’a pas été cassé.

On pourrait dire que le manque de transparence du processus décisionnel porte atteinte aux droits des organisations visées de s’occuper de leurs affaires ainsi qu’au droit des personnes de contribuer à leurs activités.  Néanmoins, l’existence de mécanismes de plainte (CSARS), d’examen et d’appel applicables au SCRS lui-même pourrait retirer de son poids à cet argument. Le SCRS pourrait d’ailleurs invoquer des raisons de sécurité légitimes pour maintenir le secret du processus, et les tribunaux en tiendraient sûrement compte pour déterminer si la loi pourrait continuer à s’appliquer, compte tenu de l’article premier de la Charte.

Dans l’affaire La Reine c. Skinner, la Cour suprême du Canada a confirmé une disposition du Code criminel interdisant la communication dans un contexte de sollicitation pour prostitution.  L’article 213 (l’article 195.1 jusqu’en 1988) déclare qu’est coupable d’une infraction quiconque « de quelque manière que ce soit, communique ou tente de communiquer [avec une personne] » dans le but de se livrer à la prostitution et de retenir les services sexuels d’une personne qui s’y livre.  Le 31 mai 1990, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans trois appels portant sur cet article : Skinner, de la Nouvelle-Écosse, Reference Re Sections 193 and 195.1 of the Criminal Code, du Manitoba, et Stagnitta, de l’Alberta.  L’article 213 n’avait été jugé inconstitutionnel que dans l’affaire Skinner, parce qu’il portait atteinte au droit à la liberté d’expression garanti par l’alinéa 2b) de la Charte.  La décision majoritaire de la Cour a été rédigée par le juge en chef Dickson, les juges Wilson et L’Heureux-Dubé étant dissidentes.  Le juge en chef a conclu que l’article contesté portait effectivement atteinte à la liberté d’expression garantie par l’alinéa 2b), mais pas à la liberté d’association garantie par l’article 2d), ni à la garantie de liberté de l’article 7 de la Charte.  Il a jugé que la limitation de la portée de l’alinéa 2b) était justifiée en vertu de l’article premier.

Quoi qu’il en soit, l’interdiction que la Convention propose n’équivaut pas à une interdiction de la communication ni de l’association.  Quelqu’un pourrait communiquer ou s’associer librement avec les TLET, par exemple, sans commettre une infraction.  C’est seulement le fait de contribuer financièrement à l’organisation qui constituerait une infraction.

Dans deux autres arrêts, la Cour suprême du Canada a conclu à la constitutionnalité de deux dispositions interdisant différentes formes d’incitation à la haine(15).  Bien que ces arrêts ne portent pas directement sur la question étudiée ici, ils pourraient servir de cadre d’analyse.  Dans les affaires La Reine c. Keegstra et La Reine c. Andrews, la disposition contestée était le paragraphe 319(2) du Code criminel, qui interdit de fomenter volontairement la haine contre un groupe identifiable par sa couleur, sa race, sa religion ou son origine ethnique.

La Cour suprême a décidé à la majorité – quoique par une courte majorité, dans les deux cas – que cette disposition était constitutionnelle, après avoir effectué une analyse historique approfondie de la législation interdisant la propagande haineuse.  Dans chaque affaire, la décision des juges dissidents a été rédigée par la juge McLachlin (devenue depuis juge en chef) appuyée par le juge Sopinka et en partie par le juge LaForest; le raisonnement est serré et persuasif dans les deux cas, ce qui laisse entendre que la question pourrait être soulevée de nouveau.

Dans les affaires Keegstra et Andrews, les cours d’appel provinciales avaient rendu des décisions contradictoires : la Cour d’appel de l’Ontario avait déclaré constitutionnel le paragraphe 319(2), tandis que la Cour d’appel de l’Alberta l’avait jugé inconstitutionnel, en déclarant qu’il imposait une limite injustifiable au droit d’expression fondamental garanti par l’alinéa 2b) de la Charte.  Le juge en chef d’alors, le juge Dickson, a conclu que le paragraphe 319(2) portait atteinte à la liberté d’expression garantie par la Charte, mais il a jugé qu’il était tout de même constitutionnel, en se fondant sur l’article premier; dans son raisonnement, il a tenu compte des conséquences néfastes de cette forme de communication pour la société, de même que des engagements du Canada, en droit international, d’interdire l’incitation à la haine, ainsi que des principes sous-jacents aux articles 15 et 27 de la Charte, lesquels garantissent l’égalité et soulignent l’importance du patrimoine multiculturel des Canadiens.  Le paragraphe 319(2) et les dispositions inverses de l’alinéa 319(3)a), qui permet à l’accusé de se défendre en établissant que ses déclarations sont vraies, ont donc été jugées constitutionnelles en vertu de l’article premier de la Charte, puisque leurs dispositions imposent des limites raisonnables qui peuvent être justifiées dans une société libre et démocratique.

Par analogie, on pourrait dire que l’incitation à la haine n’est pas bien différente du terrorisme en ce sens qu’elle encourage la haine ou la violence, habituellement contre un groupe identifiable.  L’action est souvent ouvertement « politique ».  Il semble donc qu’un tribunal aurait raison de tenir compte des « conséquences néfastes pour la société » de cette forme d’expression, ainsi que des engagements du Canada en droit international, dans son analyse fondée sur l’article premier.

Dans sa dissidence, la juge McLachlin a soutenu que la garantie de la liberté d’expression de l’alinéa 2b) de la Charte ne devrait pas être limitée par des instruments internationaux.  En jugeant que l’objectif législatif était suffisamment important pour justifier une limite de la liberté d’expression fondamentale, elle n’en a pas moins conclu qu’on n’avait pas clairement prouvé que le paragraphe 319(2) était un moyen efficace de prévenir l’incitation à la haine, mais plutôt qu’il ne donnait souvent d’autre résultat que de la publicité gratuite.  Comme telle, cette disposition ne satisfaisait pas, selon elle, au critère de proportionnalité, puisqu’elle ne limite pas la liberté d’expression seulement dans la mesure minimale permise par ses objectifs.  Elle a conclu que ses avantages douteux étaient moins importants que son atteinte manifeste à la garantie constitutionnelle de liberté d’expression.

L’argument de la juge McLachlin est peut-être le plus puissant contre l’interdiction des dons aux organisations terroristes : une telle interdiction va-t-elle effectivement mettre fin au terrorisme ou le combattre?  Comme nous l’avons précisé au début, les terroristes ont beaucoup d’ingéniosité quand ils recueillent des fonds, et il peut être difficile, voire dans certains cas virtuellement impossible, de retracer l’argent qu’ils recueillent.  Si une interdiction générale des dons à leurs organisations devait se révéler inefficace pour leur couper les vivres, on pourrait alléguer qu’elle constitue une limitation injustifiée ou exagérée d’un droit protégé.  De même, si la loi ne peut pas résoudre le problème du financement du terrorisme, elle risque de ne pas satisfaire au critère du « lien rationnel ».

      2.  Liberté de religion – Alinéa 2a)

La Loi constitutionnelle de 1867 ne prévoit aucune compétence législative précise en matière de religion, et les tribunaux n’ont pas encore tranché la question de savoir si les lois relatives à la religion relèvent de l’article 91 ou de l’article 92 de cette loi.  Dans ce domaine, la jurisprudence accumulée avant que la Charte ne soit invoquée avait essentiellement trait à la contestation, par des marchands, de diverses lois ordonnant la fermeture des commerces le dimanche.

La séparation de la « conscience » et de la « religion » dans l’alinéa 2a) a incité certains commentateurs à déclarer que la Charte pourrait accorder une protection constitutionnelle au droit de désobéissance civile quand la contestation de la loi est suffisamment attribuable à un système de convictions morales profondes du contestataire, que ces convictions soient fondées sur des valeurs normalement considérées comme religieuses ou pas.  Cela pourrait s’appliquer notamment au fait de donner de l’argent à une organisation terroriste, si les préceptes de la religion ou la conscience du donateur l’exigeaient.  Cette question a été tranchée dans l’affaire La Reine c. Big M Drug Mart, où la Cour suprême a déclaré que la liberté de conscience est liée à la liberté de conscience sur les questions de religion.  L’alinéa 2a) protège la liberté de culte contre toutes les limites que l’État impose à l’exercice de convictions religieuses, qu’elles soient directes ou indirectes, intentionnelles ou non, prévisibles ou pas, pourvu qu’elles ne puissent être considérées comme simplement triviales ou frivoles.

Il n’existe pas de jurisprudence portant directement sur cette question, mais un survol des principales affaires tranchées en vertu de l’alinéa 2a) pourrait servir de cadre théorique permettant de l’analyser dans le cas qui nous intéresse, celui du droit de donner de l’argent à une organisation « religieuse ».

Plusieurs affaires, dont certaines datant d’avant la Charte, portent sur des lois exigeant la fermeture des commerces le dimanche.  Dans l’affaire Big M Drug Mart, la majorité des juges de la Cour d’appel de l’Alberta a décidé que la Lord’s Day Act était inconstitutionnelle en s’appuyant sur le principe que cette loi avait une raison d’être religieuse, puisqu’elle imposait aux minorités l’obligation de respecter le dimanche, qui est le jour du Seigneur pour la majorité chrétienne.  La Cour a poursuivi ce raisonnement en déclarant que la liberté de conscience et de religion garantie par la Charte signifie à tout le moins que, désormais, les gouvernements du Canada ne devraient pas prendre parti dans une controverse sectaire.  Une opinion minoritaire de la Cour se fondait sur une interprétation beaucoup plus large de cet alinéa de la Charte; ses auteurs prônaientune interprétation de la liberté de religion visant l’élimination de l’oppression et de la répression par l’autorité civile basées sur des convictions religieuses et s’opposaient à toute propension à accepter une doctrine en particulier.  Selon eux, la raison d’être de la Lord’s Day Act n’était pas d’imposer une obligation à d’autres, ni de s’ingérer dans leur liberté de religion.

La Cour suprême du Canada a maintenu la décision majoritaire de la Cour d’appel fédérale en déclarant la Lord’s Day Act inconstitutionnelle.  Le juge en chef Dickson a rejeté l’argument du gouvernement de l’Alberta selon lequel Big M, une entreprise commerciale, n’était pas une personne civile et n’avait par conséquent pas de droits religieux.  Il a déclaré que, si la loi est inconstitutionnelle, il importe peu que l’accusé soit un chrétien, un juif, un musulman, un hindou, un bouddhiste, un athée, un agnostique, voire une personne morale ou une personne civile.

Dans cette affaire – comme dans les autres affaires basées sur la Charte qu’il avait entendues –, le juge en chef a conclu que les tribunaux doivent se demander quelle est la véritable raison d’être de la loi pour déterminer si elle porte atteinte à la Charte.  La Cour suprême a donc conclu qu’il était clair que la Lord’s Day Act avait été adoptée par le Parlement pour donner force de loi à l’observation chrétienne du dimanche comme jour de repos; il ne s’agissait pas simplement d’une loi destinée à faire du dimanche le jour où tous les commerces seraient fermés, ni d’une loi d’inspiration syndicale conçue pour limiter le nombre de jours où les gens sont tenus de travailler.  Le plus haut tribunal du pays a jugé que, depuis la promulgation de la Charte, chaque Canadien et chaque Canadienne a le droit d’interpréter ses propres obligations religieuses, le cas échéant, et qu’il n’appartient pas à l’État de lui dicter quoi faire.

En revenant au financement du terrorisme, on pourrait prétendre – quoique probablement sans succès – que, même si la loi envisagée ne vise pas explicitement de groupes religieux, elle a essentiellement pour objet d’interdire une organisation religieuse, et qu’elle est par conséquent inconstitutionnelle.

Qu’arriverait-il si les « obligations religieuses » de quelqu’un l’obligeaient à donner de l’argent à une organisation cultuelle dont il sait, même vaguement, qu’elle appuie le terrorisme?  Il est possible que l’interdiction d’une obligation religieuse porte atteinte à l’alinéa 2a).  Les tribunaux devraient alors décider si l’interdiction pourrait résister à une analyse fondée sur l’article premier.

En 1986, la Cour suprême du Canada a rejeté l’appel de Thomas Larry Jones, de Calgary, qui avait prétendu que les dispositions de la Alberta School Act qui interdisaient aux parents d’instruire leurs enfants à la maison pour des raisons religieuses revenait à nier la garantie de liberté de religion.  Dans l’arrêt de la Cour, le juge Gérard LaForest a écrit que l’intérêt fondamental de la province et du pays d’assurer l’instruction efficace des enfants l’emporte sur cette liberté.  Bref, pour pouvoir continuer à enseigner à ses enfants à la maison, M. Jones allait d’abord devoir obtenir l’autorisation des autorités scolaires provinciales.

Bien que manifestement très différente du cas des organisations terroristes « religieuses », l’affaire Jones est peut-être celle qui nous permet de tirer la meilleure analogie. Dans cette affaire, une personne que sa conscience obligeait à faire quelque chose de précis, c’est-à-dire à instruire ses enfants à la maison, s’était vu refuser le droit de le faire au motif de l’intérêt fondamental du pays.  Dans le même ordre d’idées, une personne que sa conscience ou sa religion obligerait à donner de l’argent à une organisation cultuelle pourrait se voir refuser ce droit en raison d’un intérêt social plus important.

Dans des affaires semblables, la Cour suprême a refusé d’entendre l’appel d’une ordonnance de tutelle de parents qui avaient refusé qu’on fasse une transfusion sanguine à leur nouveau-né (B.(R.)).  L’enfant était devenu temporairement pupille de la Société d’aide à l’enfance et avait reçu une transfusion de sang dans le contexte d’autres traitements médicaux. Les parents ont interjeté appel de l’ordonnance de tutelle, en disant qu’elle portait atteinte à leur droit à la liberté de religion, mais ils ont été déboutés à la Cour de district et à la Cour d’appel. La Cour suprême a rejeté l’appel à l’unanimité; quatre des juges ont conclu qu’on n’avait pas porté atteinte à l’alinéa 2a) de la Charte parce que la liberté de religion ne comprend pas la liberté d’imposer à un enfant des pratiques religieuses qui menacent sa sécurité, sa santé ou sa vie.  La liberté de religion ne devrait pas comprendre des activités qui nient si catégoriquement la liberté de conscience d’autrui, y compris un enfant.  Les cinq autres juges de la Cour ont conclu que le droit des parents d’élever leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses est un aspect fondamental de la liberté de religion garantie par l’alinéa 2a) de la Charte.  Même si la Child Welfare Act a pour objet de protéger les enfants, elle a porté atteinte à la liberté de religion des parents.  Pourtant, quelle que soit cette atteinte, elle était amplement justifiée dans l’intérêt qu’a l’État à protéger les enfants en danger, un objectif valide au sens de l’article premier.

Avec le même raisonnement, on pourrait soutenir que reconnaître pour des raisons religieuses le droit de quelqu’un de contribuer à une organisation religieuse reconnue comme terroriste aurait pour effet d’imposer à l’ensemble de la société l’obligation correspondante de tolérer une pratique « religieuse » menaçant la sécurité, la santé ou la vie de tous les citoyens.  La liberté de religion ne devrait pas s’entendre d’activités qui nient si catégoriquement la liberté de conscience d’autrui.

En 1985, un juge de la Cour du Banc de la Reine du Manitoba a conclu qu’un Sikh baptisé ne pouvait pas porter son kirpan (un symbole religieux, sorte de poignard à lame de quatre pouces) dans l’enceinte du tribunal pendant son procès (affaire Hothi).  En 1994, on a jugé que la modification d’un règlement autorisant des exceptions à la règle de l’uniforme standard de la GRC, comme le port d’un turban plutôt que du feutre réglementaire par certains membres, pour des raisons religieuses, ne portait pas atteinte à l’alinéa 2a) (affaire Grant c. Canada).

On peut déduire du jugement rendu dans l’affaire Hothi et dans le reste de la jurisprudence citée qu’il est clair que la liberté de religion protégée par la Charte dépasse la simple liberté de pensée ou de conscience et qu’elle protège certains actes dont l’individu a l’obligation pour des motifs religieux.  Cela dit, il n’est pas moins clair que ce droit n’est pas sans limite.  Il semble que l’interdiction des dons aux organisations reconnues comme terroristes, mais se présentant comme cultuelles et pouvant par conséquent se réclamer de la protection de la Charte serait vraisemblablement maintenue en vertu de l’article premier, en raison de l’importance de cet objectif législatif pour la société dans son ensemble, à condition qu’il satisfasse au critère de « proportionnalité ».

   E.  Mise en œuvre

La mise en œuvre de la Convention au Canada comprend trois étapes :

 L’article 18 de la Convention oblige les États parties à adopter des mesures en vertu desquelles les institutions financières et les autres professions intervenant dans les opérations financières sont tenues d’utiliser les moyens disponibles pour identifier leurs clients inhabituels ou occasionnels et d’accorder une attention particulière aux opérations inhabituelles ou suspectes, ainsi que de signaler les opérations présumées découler d’activités criminelles.  À cette fin, le Parlement a adopté d’importantes nouvelles règles sur la déclaration du blanchiment d’argent de même que des lois sur le statut d’organisme de bienfaisance.

En 2000, le projet de loi C-22 (Loi sur le recyclage des produits de la criminalité), plus tard modifié par le projet de loi S-16(16), a été déposé, débattu et adopté au Parlement.  Cette nouvelle loi a pour objet de faciliter la lutte contre le « blanchiment d’argent » dans les banques canadiennes et les autres intermédiaires financiers, en exigeant notamment la déclaration obligatoire des opérations en espèces « suspectes » et importantes à un nouvel organisme appelé Centre d’analyse des opérations et des déclarations financières.  Ses dispositions s’inspirent très largement de l’approche de réglementation de l’article 18 de la Convention, qui précise que, dans tous les cas, ces mesures doivent être assujetties à des garanties strictes visant à assurer que l’information est utilisée à bon escient et qu’elle n’entrave d’aucune façon la libre circulation des capitaux.  La nouvelle loi prévoit effectivement de telles garanties.  En outre, les États parties sont tenus de coopérer en échangeant les informations nécessaires.  Dans ce cas-là aussi, la nouvelle loi sur le blanchiment de l’argent contient aussi des dispositions assurant le partage mutuel des renseignements, conformément à des lignes directrices rigoureuses.

Un deuxième projet de loi nouveau, le projet de loi C-16(17) : Loi sur l’enregistrement des organismes de bienfaisance (renseignements de sécurité), a été déposé en mars 2001.  Il contribuerait à concrétiser l’engagement du Canada à faire enquête sur les organismes de bienfaisance susceptibles d’avoir des liens avec des terroristes et à prendre des mesures pour frustrer les activités de collecte de fonds des terroristes.  Elle permettrait au solliciteur général et au ministre du Revenu national de révoquer leur statut d’organisme de bienfaisance si, à leur « avis », il y avait des motifs raisonnables de croire que ces organismes ont fourni ou vont fournir de l’aide financière à quiconque s’adonne au terrorisme.  Cet « avis » serait basé sur des rapports des services de sécurité et de renseignement, même si l’information utilisée à cette fin resterait confidentielle.  La nouvelle loi tenterait en outre de protéger les droits des organismes de bienfaisance visés en exigeant que la décision de leur retirer ce statut soit contrôlée par la Cour fédérale, qui devrait en confirmer le caractère raisonnable.  L’organisme de bienfaisance pourrait demander à la Cour de respecter la confidentialité des renseignements produits dans ce contexte (autrement dit de ne pas les rendre publics).  La Cour serait par ailleurs tenue d’analyser les rapports sur lesquels la décision de révocation du statut d’organisme de bienfaisance est fondée et d’entendre tous les autres renseignements ou éléments de preuves présentés par les ministres.  Ceux-ci pourraient demander que les renseignements ou la preuve en question soient entendus en l’absence de l’organisme de bienfaisance, lequel aurait droit à une chance raisonnable de se faire entendre, ainsi qu’à un résumé écrit des renseignements dont la Cour disposait, pourvu que cela ne mette pas en danger la sécurité nationale ou celle des personnes.  Si la Cour juge la décision raisonnable et confirme la révocation de statut de l’organisme de bienfaisance, ce dernier pourrait tout de même demander au solliciteur général et au Ministre de revenir sur leur décision, si sa situation changeait substantiellement.

Les représentants du gouvernement ont reconnu que le projet de loi ne permet pas au Canada de s’acquitter de toutes ses obligations aux termes de la Convention, qui exige que les États parties adoptent eux-mêmes des lois criminalisant la collecte de fonds pour des activités terroristes.  Ces changements devraient vraisemblablement être mis en œuvre par la voie de modifications du Code criminel.

   F.  Coûts de fonctionnement

Le coût de la mise en œuvre de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité (et plus précisément les coûts de fonctionnement du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières) était au départ estimé à 10 millions de dollars par an par le ministère parrain, mais cette estimation a depuis été révisée à la hausse.  On s’attend aussi à ce que les renseignements traités par le Centre et fournis aux organismes canadiens d’application de la loi feront augmenter les coûts d’enquête et d’exécution de ces organismes.  La création et le fonctionnement du Centre devraient permettre au Canada d’atteindre sur son territoire l’objectif de la Convention, à savoir le ciblage et la saisie des sources terroristes de financement des activités terroristes.  On ne sait pas encore clairement quels autres changements précis devront être apportés à la législation canadienne, puisqu’aucun autre projet de loi habilitante n’a encore été déposé.

   G.  Partage de l’information et secret bancaire

Le paragraphe 12.1 de la Convention oblige les États parties à s’accorder « l’entraide judiciaire la plus large possible » dans leurs procédures pénales relatives aux infractions visées à l’article 2, et le paragraphe 12.2 précise expressément qu’ils ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser de faire droit à une demande d’entraide judiciaire. Néanmoins, le paragraphe 12.5 oblige simplement les États parties à s’acquitter des obligations qui leur incombent conformément aux traités ou aux autres ententes conclus entre eux.  En l’absence de tels traités ou de telles ententes, les États parties sont tenus de s’entraider conformément aux dispositions de leur législation interne.  La Convention semble effectivement devoir prévaloir sur les lois nationales du secret bancaire, à moins que l’État partie intéressé n’ait expressément négocié un traité à cet effet avec l’État partie qui lui demande de ne pas les respecter.  En outre, afin de protéger le droit à la protection des renseignements personnels, le paragraphe 12.3 interdit à l’État partie requérant de communiquer ou d’utiliser les informations ou les éléments de preuve fournis par un autre État partie pour des enquêtes, des poursuites pénales ou des procédures judiciaires autres que celles qui sont visées dans sa demande, sans le consentement préalable de l’État partie qui les a fournis.  Encore une fois, ces dispositions se reflètent dans celles de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité.


ANNEXE – CONVENTION INTERNATIONALE POUR LA RÉPRESSION
DU FINANCEMENT DU TERRORISME

Résolution adoptée par l’assemblée générale
[sur le rapport de la Sixième Commission (A/54/615)]  A/RES/54/109

Préambule

Les États Parties à la présente Convention,

Ayant à l’esprit les buts et principes de la Charte des Nations Unies concernant le maintien de la paix et de la sécurité internationales et le développement des relations de bon voisinage, d’amitié et de coopération entre les États,

Profondément préoccupés par la multiplication, dans le monde entier, des actes de terrorisme sous toutes ses formes et manifestations,

Rappelant la Déclaration du cinquantième anniversaire de l’Organisation des Nations Unies, qui figure dans la résolution 50/6 de l’Assemblée générale en date du 24 octobre 1995,

Rappelant également toutes les résolutions de l’Assemblée générale en la matière, notamment la résolution 49/60 du 9 décembre 1994 et son annexe reproduisant la Déclaration sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international, dans laquelle les États Membres de l’Organisation des Nations Unies ont réaffirmé solennellement qu’ils condamnaient catégoriquement comme criminels et injustifiables tous les actes, méthodes et pratiques terroristes, où qu’ils se produisent et quels qu’en soient les auteurs, notamment ceux qui compromettent les relations amicales entre les États et les peuples et  menacent l’intégrité territoriale et la sécurité des États,

Notant que dans la Déclaration sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international, l’Assemblée a également encouragé les États à examiner d’urgence la portée des dispositions juridiques internationales en vigueur qui concernent la prévention, la répression et l’élimination du terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, afin de s’assurer qu’il existe un cadre juridique général couvrant tous les aspects de la question,

Rappelant l’alinéa f)du paragraphe 3 de la résolution 51/210 de l’Assemblée générale, en date du 17 décembre 1996, dans lequel l’Assemblée a invité les États à prendre des mesures pour prévenir et empêcher, par les moyens internes appropriés, le financement de terroristes ou d’organisations terroristes, qu’il s’effectue soit de manière directe, soit indirectement par l’intermédiaire d’organisations qui ont aussi ou prétendent avoir un but caritatif, culturel ou social, ou qui sont également impliquées dans des activités illégales telles que le trafic illicite d’armes, le trafic de stupéfiants et l’extorsion de fonds, y compris l’exploitation de personnes aux fins de financer des activités terroristes, et en particulier envisager, si besoin est, d’adopter une réglementation pour prévenir et empêcher les mouvements de fonds soupçonnés d’être destinés à des fins terroristes, sans entraver en aucune manière la liberté de circulation des capitaux légitimes, et intensifier les échanges d’informations sur les mouvements internationaux de tels fonds,

Rappelant également la résolution 52/165 de l’Assemblée générale, en date du 15 décembre 1997, dans laquelle l’Assemblée a invité les États à considérer en particulier la mise en œuvre de mesures telles que celles qui sont énumérées aux alinéas af)du paragraphe 3 de sa résolution 51/210, 

Rappelant en outre la résolution 53/108 de l’Assemblée générale, en date du 8 décembre 1998, dans laquelle l’Assemblée a décidé que le Comité spécial créé par la résolution 51/210 du 17 décembre 1996 élaborerait un projet de convention internationale pour la répression du financement du terrorisme afin de compléter les instruments internationaux existants portant sur le terrorisme,

Considérant que le financement du terrorisme est un sujet qui préoccupe gravement la communauté internationale tout entière,

Notant que le nombre et la gravité des actes de terrorisme international sont fonction des ressources financières que les terroristes peuvent obtenir,

Notant également que les instruments juridiques multilatéraux existants ne traitent pas expressément du financement du terrorisme,

Convaincus de la nécessité urgente de renforcer la coopération internationale entre les États pour l’élaboration et l’adoption de mesures efficaces destinées à prévenir le financement du terrorisme ainsi qu’à le réprimer en en poursuivant et punissant les auteurs,

Sont convenus de ce qui suit :

Article 1

Aux fins de la présente Convention :

1.  « Fonds » s’entend des biens de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par quelque moyen que ce soit, et des documents ou instruments juridiques sous quelque forme que ce soit, y compris sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de propriété ou un intérêt sur ces biens, et notamment les crédits bancaires, les chèques de voyage, les chèques bancaires, les mandats, les actions, les titres, les obligations, les traites et les lettres de crédit, sans que cette énumération soit limitative.

2.  « Installation gouvernementale ou publique » s’entend de toute installation ou de tout moyen de transport, de caractère permanent ou temporaire, qui est utilisé ou occupé par des représentants d’un État, des membres du gouvernement, du parlement ou de la magistrature, ou des agents ou personnels d’un État ou de toute autre autorité ou entité publique, ou par des agents ou personnels d’une organisation intergouvernementale, dans le cadre de leurs fonctions officielles.

3.  « Produits » s’entend de tous fonds tirés, directement ou indirectement, de la commission d’une infraction telle que prévue à l’article 2, ou obtenus, directement ou indirectement, grâce à la commission d’une telle infraction.

Article 2

1.  Commet une infraction au sens de la présente Convention toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, illicitement et délibérément, fournit ou réunit des fonds dans l’intention de les voir utilisés ou en sachant qu’ils seront utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre :

a) Un acte qui constitue une infraction au regard et selon la définition de l’un des traités énumérés en annexe;

b) Tout autre acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque.

2.  a) En déposant son instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion, un État Partie qui n’est pas partie à un traité énuméré dans l’annexe visée à l’alinéa a)du paragraphe 1 du présent article peut déclarer que, lorsque la présente Convention lui est appliquée, ledit traité est réputé ne pas figurer dans cette annexe. Cette déclaration devient caduque dès l’entrée en vigueur du traité pour l’État Partie, qui en notifie le dépositaire;

b) Lorsqu’un État Partie cesse d’être partie à un traité énuméré dans l’annexe, il peut faire au sujet dudit traité la déclaration prévue dans le présent article.

3.  Pour qu’un acte constitue une infraction au sens du paragraphe 1, il n’est pas nécessaire que les fonds aient été effectivement utilisés pour commettre une infraction visée aux alinéas a)ou b)du paragraphe 1 du présent article.

4.  Commet également une infraction quiconque tente de commettre une infraction au sens du paragraphe 1 du présent article.

5.  Commet également une infraction quiconque :

a) Participe en tant que complice à une infraction au sens des paragraphes 1 ou 4 du présent article;

b) Organise la commission d’une infraction au sens des paragraphes 1 ou 4 du présent article ou donne l’ordre à d’autres personnes de la commettre;

c) Contribue à la commission de l’une ou plusieurs des infractions visées aux paragraphes 1 ou 4 du présent article par un groupe de personnes agissant de concert. Ce concours doit être délibéré et doit :

i) Soit viser à faciliter l’activité criminelle du groupe ou en servir le but, lorsque cette activité ou ce but supposent la commission d’une infraction au sens du paragraphe 1 du présent article;

ii) Soit être apporté en sachant que le groupe a l’intention de commettre une infraction au sens du paragraphe 1 du présent article.

Article 3

La présente Convention ne s’applique pas lorsque l’infraction est commise à l’intérieur d’un seul État, que l’auteur présumé est un national de cet État et se trouve sur le territoire de cet État, et qu’aucun autre État n’a de raison, en vertu du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 de l’article 7, d’établir sa compétence, étant entendu que les dispositions des articles 12 à 18, selon qu’il convient, s’appliquent en pareil cas.

Article 4

Chaque État Partie prend les mesures qui peuvent être nécessaires pour :

a) Ériger en infractions pénales au regard de son droit interne les infractions visées à l’article 2;

b) Punir ces infractions de peines appropriées compte tenu de leur gravité.

Article 5

1.  Chaque État Partie, conformément aux principes de son droit interne, prend les mesures nécessaires pour que la responsabilité d’une personne morale située sur son territoire ou constituée sous l’empire de sa législation soit engagée lorsqu’une personne responsable de la direction ou du contrôle de cette personne morale a, en cette qualité, commis une infraction visée à l’article 2. Cette responsabilité peut être pénale, civile ou administrative.

2.  Elle est engagée sans préjudice de la responsabilité pénale des personnes physiques qui ont commis les infractions.

3.  Chaque État Partie veille en particulier à ce que les personnes morales dont la responsabilité est engagée en vertu du paragraphe 1 fassent l’objet de sanctions pénales, civiles ou administratives efficaces, proportionnées et dissuasives. Ces sanctions peuvent être notamment d’ordre pécuniaire.

Article 6

Chaque État Partie adopte les mesures qui peuvent être nécessaires, y compris, s’il y a lieu, d’ordre législatif, pour que les actes criminels relevant de la présente Convention ne puissent en aucune circonstance être justifiés par des considérations de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ou d’autres motifs analogues.

Article 7

1.  Chaque État Partie adopte les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées à l’article 2 lorsque :

a) L’infraction a été commise sur son territoire;

b) L’infraction a été commise à bord d’un navire battant son pavillon ou d’un aéronef immatriculé conformément à sa législation au moment des faits; ou

c) L’infraction a été commise par l’un de ses nationaux.

2.  Chaque État Partie peut également établir sa compétence sur de telles infractions lorsque :

a) L’infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commission d’une infraction visée aux alinéas a)ou b)du paragraphe 1 de l’article 2, sur son territoire ou contre l’un de ses nationaux;

b) L’infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commission d’une infraction visée aux alinéas a)ou b)du paragraphe 1 de l’article 2, contre une installation gouvernementale ou publique dudit État située en dehors de son territoire, y compris ses locaux diplomatiques ou consulaires;

c) L’infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commission d’une infraction visée aux alinéas a)ou b)du paragraphe 1 de l’article 2, visant à le contraindre à accomplir un acte quelconque ou à s’en abstenir;

d) L’infraction a été commise par un apatride ayant sa résidence habituelle sur son territoire;

e) L’infraction a été commise à bord d’un aéronef exploité par le Gouvernement dudit État.

3.  Lors de la ratification, de l’acceptation ou de l’approbation de la présente Convention ou de l’adhésion à celle-ci, chaque État Partie informe le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies de la compétence qu’il a établie conformément au paragraphe 2. En cas de modification, l’État Partie concerné en informe immédiatement le Secrétaire général.

4.  Chaque État Partie adopte également les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées à l’article 2 dans les cas où l’auteur présumé de l’infraction se trouve sur son territoire et où il ne l’extrade pas vers l’un quelconque des États Parties qui ont établi leur compétence conformément au paragraphe 1 ou au paragraphe 2.

5.  Lorsque plus d’un État Partie se déclare compétent à l’égard d’une infraction visée à l’article 2, les États Parties intéressés s’efforcent de coordonner leur action comme il convient, en particulier pour ce qui est des conditions d’engagement des poursuites et des modalités d’entraide judiciaire.

6.  Sans préjudice des normes du droit international général, la présente Convention n’exclut l’exercice d’aucune compétence pénale établie par un État Partie conformément à son droit interne.

Article 8

1.  Chaque État Partie adopte, conformément aux principes de son droit interne, les mesures nécessaires à l’identification, à la détection, au gel ou à la saisie de tous fonds utilisés ou destinés à être utilisés pour commettre les infractions visées à l’article 2, ainsi que du produit de ces infractions, aux fins de confiscation éventuelle.

2.  Chaque État Partie adopte, conformément aux principes de son droit interne, les mesures nécessaires à la confiscation des fonds utilisés ou destinés à être utilisés pour la commission des infractions visées à l’article 2, ainsi que du produit de ces infractions.

3.  Chaque État Partie intéressé peut envisager de conclure des accords prévoyant de partager avec d’autres États Parties, systématiquement ou au cas par cas, les fonds provenant des confiscations visées dans le présent article.

4.  Chaque État Partie envisage de créer des mécanismes en vue de l’affectation des sommes provenant des confiscations visées au présent article à l’indemnisation des victimes d’infractions visées aux alinéas a)ou b)du paragraphe 1 de l’article 2, ou de leur famille.

5.  Les dispositions du présent article sont appliquées sans préjudice des droits des tiers de bonne foi.

Article 9

1.  Lorsqu’il est informé que l’auteur ou l’auteur présumé d’une infraction visée à l’article 2 pourrait se trouver sur son territoire, l’État Partie concerné prend les mesures qui peuvent être nécessaires conformément à sa législation interne pour enquêter sur les faits portés à sa connaissance.

2.  S’il estime que les circonstances le justifient, l’État Partie sur le territoire duquel se trouve l’auteur ou l’auteur présumé de l’infraction prend les mesures appropriées en vertu de sa législation interne pour assurer la présence de cette personne aux fins de poursuites ou d’extradition.

3.  Toute personne à l’égard de laquelle sont prises les mesures visées au paragraphe 2 du présent article est en droit :

a) De communiquer sans retard avec le plus proche représentant qualifié de l’État dont elle a  la nationalité ou qui est autrement habilité à protéger ses droits ou, s’il s’agit d’une personne apatride, de l’État sur le territoire duquel elle a sa résidence habituelle;

b) De recevoir la visite d’un représentant de cet État;

c) D’être informée des droits que lui confèrent les alinéas a)et b)du présent paragraphe.

4.  Les droits énoncés au paragraphe 3 du présent article s’exercent dans le cadre des lois et règlements de l’État sur le territoire duquel se trouve l’auteur ou l’auteur présumé de l’infraction, étant entendu toutefois que ces lois et règlements doivent permettre la pleine réalisation des fins pour lesquelles les droits énoncés au paragraphe 3 du présent article sont accordés.

5.  Les dispositions des paragraphes 3 et 4 du présent article sont sans préjudice du droit de tout État Partie ayant établi sa compétence conformément à l’alinéa b)du paragraphe 1 ou à l’alinéa b du paragraphe 2 de l’article 7 d’inviter le Comité international de la Croix-Rouge à communiquer avec l’auteur présumé de l’infraction et à lui rendre visite.

6.  Lorsqu’un État Partie a placé une personne en détention conformément aux dispositions du présent article, il avise immédiatement de cette détention, ainsi que des circonstances qui la justifient, directement ou par l’intermédiaire du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, les États Parties qui ont établi leur compétence conformément aux paragraphes 1 ou 2 de l’article 7 et, s’il le juge opportun, tous autres États Parties intéressés. L’État qui procède à l’enquête visée au paragraphe 1 du présent article en communique rapidement les conclusions auxdits États Parties et leur indique s’il entend exercer sa compétence.

Article 10

1.  Dans les cas où les dispositions de l’article 7 sont applicables, l’État Partie sur le territoire duquel se trouve l’auteur présumé de l’infraction est tenu, s’il ne l’extrade pas, de soumettre l’affaire, sans retard excessif et sans aucune exception, que l’infraction ait été ou non commise sur son territoire, à ses autorités compétentes pour qu’elles engagent des poursuites pénales selon la procédure prévue par sa législation. Ces autorités prennent leur décision dans les mêmes conditions que pour toute autre infraction de caractère grave conformément aux lois de cet État.

2.  Chaque fois que la législation interne d’un État Partie ne l’autorise à extrader ou à remettre un de ses nationaux qu’à la condition que l’intéressé lui sera rendu pour purger la peine à laquelle il aura été condamné à l’issue du procès ou de la procédure pour lesquels l’extradition ou la remise est demandée, et que cet État et l’État demandant l’extradition acceptent cette formule et les autres conditions qu’ils peuvent juger appropriées, l’extradition ou la remise conditionnelle vaudra exécution par l’État Partie requis de l’obligation prévue au paragraphe 1 du présent article.

Article 11

1.  Les infractions prévues à l’article 2 sont de plein droit considérées comme cas d’extradition dans tout traité d’extradition conclu entre États Parties avant l’entrée en vigueur de la présente Convention. Les États Parties s’engagent à considérer ces infractions comme cas d’extradition dans tout traité d’extradition qu’ils pourront conclure entre eux par la suite.

2.  Un État Partie qui subordonne l’extradition à l’existence d’un traité a la faculté, lorsqu’il reçoit une demande d’extradition d’un autre État Partie avec lequel il n’est pas lié par un traité d’extradition, de considérer la présente Convention comme constituant la base juridique de l’extradition en ce qui concerne les infractions prévues à l’article 2. L’extradition est assujettie aux autres conditions prévues par la législation de l’État requis.

3.  Les États Parties qui ne subordonnent pas l’extradition à l’existence d’un traité reconnaissent les infractions prévues à l’article 2 comme cas d’extradition entre eux, sans préjudice des conditions prévues par la législation de l’État requis.

4.  Si nécessaire, les infractions prévues à l’article 2 sont réputées, aux fins d’extradition entre États Parties, avoir été commises tant au lieu de leur perpétration que sur le territoire des États ayant établi leur compétence conformément aux paragraphes 1 et 2 de l’article 7.

5.  Les dispositions relatives aux infractions visées à l’article 2 de tous les traités ou accords d’extradition conclus entre États Parties sont réputées être modifiées entre États Parties dans la mesure où elles sont incompatibles avec la présente Convention.

Article 12

1.  Les États Parties s’accordent l’entraide judiciaire la plus large possible pour toute enquête ou procédure pénale ou procédure d’extradition relative aux infractions visées à l’article 2, y compris pour l’obtention des éléments de preuve en leur possession qui sont nécessaires aux fins de la procédure.

2.  Les États Parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser de faire droit à une demande d’entraide judiciaire.

3.  La Partie requérante ne communique ni n’utilise les informations ou les éléments de preuve fournis par la Partie requise pour des enquêtes, des poursuites pénales ou des procédures judiciaires autres que celles visées dans la demande sans le consentement préalable de la Partie requise.

4.  Chaque État Partie peut envisager d’établir des mécanismes afin de partager avec d’autres États Parties les informations ou les éléments de preuve nécessaires pour établir les responsabilités pénales, civiles ou administratives, comme prévu à l’article 5.

5.  Les États Parties s’acquittent des obligations qui leur incombent en vertu des paragraphes 1 et 2 en conformité avec tout traité ou autre accord d’entraide judiciaire ou d’échange d’informations qui peut exister entre eux. En l’absence d’un tel traité ou accord, les États Parties s’accordent cette entraide en conformité avec leur législation interne.

Article 13

Aucune des infractions visées à l’article 2 ne peut être considérée, aux fins d’extradition ou d’entraide judiciaire, comme une infraction fiscale. En conséquence, les États Parties ne peuvent invoquer uniquement le caractère fiscal de l’infraction pour refuser une demande d’extradition ou d’entraide judiciaire.

Article 14

Pour les besoins de l’extradition ou de l’entraide judiciaire entre États Parties, aucune des infractions visées à l’article 2 n’est considérée comme une infraction politique, comme une infraction connexe à une infraction politique ou comme une infraction inspirée par des mobiles politiques. En conséquence, une demande d’extradition ou d’entraide judiciaire fondée sur une telle infraction ne peut être rejetée pour la seule raison qu’elle concerne une infraction politique, une infraction connexe à une infraction politique ou une infraction inspirée par des mobiles politiques.

Article 15

Aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme énonçant une obligation d’extradition ou d’entraide judiciaire si l’État Partie requis a des raisons sérieuses de croire que la demande d’extradition pour les infractions visées à l’article 2 ou la demande d’entraide concernant de telles infractions a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des raisons tenant à sa race, sa religion, sa nationalité, son origine ethnique ou ses opinions politiques, ou que faire droit à la demande porterait préjudice à la situation de cette personne pour l’une quelconque de ces raisons.

Article 16

1.  Toute personne détenue ou purgeant une peine sur le territoire d’un État Partie dont la présence est requise dans un autre État Partie à des fins d’identification ou de témoignage ou pour qu’elle apporte son concours à l’établissement des faits dans le cadre d’une enquête ou de poursuites relatives aux infractions visées à l’article 2 peut faire l’objet d’un transfert si les conditions ci-après sont réunies :

a) Ladite personne y consent librement et en toute connaissance de cause;

b) Les autorités compétentes des deux États concernés y consentent, sous réserve des conditions qu’elles peuvent juger appropriées.

2.  Aux fins du présent article :

a) L’État vers lequel le transfert est effectué a le pouvoir et l’obligation de garder l’intéressé en détention, sauf demande ou autorisation contraire de la part de l’État à partir duquel la personne a été transférée;

b) L’État vers lequel le transfert est effectué s’acquitte sans retard de l’obligation de remettre l’intéressé à la garde de l’État à partir duquel le transfert a été effectué, conformément à ce qui aura été convenu au préalable ou à ce que les autorités compétentes des deux États auront autrement décidé;

c) L’État vers lequel le transfert est effectué ne peut exiger de l’État à partir duquel le transfert est effectué qu’il engage une procédure d’extradition pour que l’intéressé lui soit remis;

d) Il est tenu compte de la période que l’intéressé a passée en détention dans l’État vers lequel il a été transféré aux fins du décompte de la peine à purger dans l’État à partir duquel il a été transféré.

3.  À moins que l’État Partie à partir duquel une personne doit être transférée en vertu du présent article ne donne son accord, ladite personne, quelle que soit sa nationalité, ne peut pas être poursuivie ou détenue ou soumise à d’autres restrictions à sa liberté de mouvement sur le territoire de l’État vers lequel elle est transférée à raison d’actes ou de condamnations antérieurs à son départ du territoire de l’État à partir duquel elle a été transférée.

Article 17

Toute personne placée en détention ou contre laquelle toute autre mesure est prise ou procédure engagée en vertu de la présente Convention se voit garantir un traitement équitable et, en particulier, jouit de tous les droits et bénéficie de toutes les garanties prévus par la législation de l’État sur le territoire duquel elle se trouve et les dispositions applicables du droit international, y compris celles qui ont trait aux droits de l’homme.

Article 18

1.  Les États Parties coopèrent pour prévenir les infractions visées à l’article 2 en prenant toutes les mesures possibles, notamment en adaptant si nécessaire leur législation interne, afin d’empêcher et de contrecarrer la préparation sur leurs territoires respectifs d’infractions devant être commises à l’intérieur ou à l’extérieur de ceux-ci, notamment :

a) Des mesures interdisant sur leur territoire les activités illégales de personnes et d’organisations qui, en connaissance de cause, encouragent, fomentent, organisent ou commettent des infractions visées à l’article 2;

b) Des mesures faisant obligation aux institutions financières et aux autres professions intervenant dans les opérations financières d’utiliser les moyens disponibles les plus efficaces pour identifier leurs clients habituels ou occasionnels, ainsi que les clients dans l’intérêt desquels un compte est ouvert, d’accorder une attention particulière aux opérations inhabituelles ou suspectes et de signaler les opérations présumées découler d’activités criminelles. À cette fin, les États Parties doivent envisager :

i) D’adopter des réglementations interdisant l’ouverture de comptes dont le titulaire ou le bénéficiaire n’est pas identifié ni identifiable et des mesures garantissant que ces institutions vérifient l’identité des véritables détenteurs de ces opérations;

ii) S’agissant de l’identification des personnes morales, d’exiger que les institutions financières prennent, si nécessaire, des mesures pour vérifier l’existence et la structure juridiques du client en obtenant d’un registre public ou du client, ou des deux, une preuve de la constitution en société comprenant notamment des renseignements concernant le nom du client, sa forme juridique, son adresse, ses dirigeants et les dispositions régissant le pouvoir d’engager la personne morale;

iii) D’adopter des réglementations qui imposent aux institutions financières l’obligation de signaler promptement aux autorités compétentes toutes les opérations complexes, inhabituelles, importantes, et tous les types inhabituels d’opérations, lorsqu’elles n’ont pas de cause économique ou licite apparente, sans crainte de voir leur responsabilité pénale ou civile engagées pour violation des règles de confidentialité, si elles rapportent de bonne foi leurs soupçons;

iv) D’exiger des institutions financières qu’elles conservent, pendant au moins cinq ans, toutes les pièces nécessaires se rapportant aux opérations tant internes qu’internationales.

2.  Les États Parties coopèrent également à la prévention des infractions visées à l’article 2 en envisageant :

a) Des mesures pour la supervision de tous les organismes de transfert monétaire, y compris, par exemple, l’agrément de ces organismes;

b) Des mesures réalistes qui permettent de détecter ou de surveiller le transport physique transfrontière d’espèces et d’effets au porteur négociables, sous réserve qu’elles soient assujetties à des garanties strictes visant à assurer que l’information est utilisée à bon escient et qu’elles n’entravent en aucune façon la libre circulation des capitaux.

3.  Les États Parties coopèrent en outre à la prévention des infractions visées à l’article 2 en échangeant des renseignements exacts et vérifiés conformément à leur législation interne et en coordonnant les mesures administratives et autres mesures prises, le cas échéant, afin de prévenir la commission des infractions visées à l’article 2, et notamment en :

a) Établissant et maintenant des canaux de communication entre leurs organismes et services compétents afin de faciliter l’échange sûr et rapide d’informations sur tous les aspects des infractions visées à l’article 2;

b) Coopérant entre eux pour mener des enquêtes relatives aux infractions visées à l’article 2 portant sur :

i) L’identité, les coordonnées et les activités des personnes dont il est raisonnable de soupçonner qu’elles ont participé à la commission de telles infractions;

ii) Les mouvements de fonds en rapport avec la commission de ces infractions.

4.  Les États Parties peuvent échanger des informations par l’intermédiaire de l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol).

Article 19

L’État Partie dans lequel une action pénale a été engagée contre l’auteur présumé de l’infraction en communique, dans les conditions prévues par sa législation interne ou par les procédures applicables, le résultat définitif au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en informe les autres États Parties.

Article 20

Les États Parties s’acquittent des obligations découlant de la présente Convention dans le respect des principes de l’égalité souveraine et de l’intégrité territoriale des États, ainsi que de celui de la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres États.

Article 21

Aucune disposition de la présente Convention n’a d’incidence sur les autres droits, obligations et responsabilités des États et des individus en vertu du droit international, en particulier les buts de la Charte des Nations Unies, le droit international humanitaire et les autres conventions pertinentes.

Article 22

Aucune disposition de la présente Convention n’habilite un État Partie à exercer sur le territoire d’un autre État Partie une compétence ou des fonctions qui sont exclusivement réservées aux autorités de cet autre État Partie par son droit interne.

Article 23

1.  L’annexe peut être modifiée par l’ajout de traités pertinents réunissant les conditions suivantes :

a) Être ouverts à la participation de tous les États;

b) Être entrés en vigueur;

c) Avoir fait l’objet de la ratification, de l’acceptation, de l’approbation ou de l’adhésion d’au moins vingt-deux États Parties à la présente Convention.

2.  Après l’entrée en vigueur de la présente Convention, tout État Partie peut proposer un tel amendement.  Toute proposition d’amendement est communiquée par écrit au dépositaire, qui avise tous les États Parties des propositions qui réunissent les conditions énoncées au paragraphe 1 et sollicite leur avis au sujet de l’adoption de l’amendement proposé.

3.  L’amendement proposé est réputé adopté à moins qu’un tiers des États Parties ne s’y oppose par écrit dans les 180 jours suivant sa communication.

4.  Une fois adopté, l’amendement entre en vigueur, pour tous les États Parties ayant déposé un instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation, 30 jours après le dépôt du vingt-deuxième de ces instruments. Pour chacun des États Parties qui ratifient, acceptent ou approuvent l’amendement après le dépôt du vingt deuxième instrument, l’amendement entre en vigueur le trentième jour suivant le dépôt par ledit État Partie de son instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation.

Article 24

1.  Tout différend entre des États Parties concernant l’interprétation ou l’application de la présente Convention qui ne peut pas être réglé par voie de négociation dans un délai raisonnable est soumis à l’arbitrage, à la demande de l’un de ces États. Si, dans les six mois qui suivent la date de la demande d’arbitrage, les Parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur l’organisation de l’arbitrage, l’une quelconque d’entre elles peut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice, en déposant une requête conformément au Statut de la Cour.

2.  Tout État peut, au moment où il signe, ratifie, accepte ou approuve la présente Convention ou y adhère, déclarer qu’il ne se considère pas lié par les dispositions du paragraphe 1 du présent article. Les autres États Parties ne sont pas liés par lesdites dispositions envers tout État Partie qui a formulé une telle réserve.

3.  Tout État qui a formulé une réserve conformément aux dispositions du paragraphe 2 du présent article peut la retirer à tout moment en adressant une notification à cet effet au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

Article 25

1.  La présente Convention est ouverte à la signature de tous les États du 10 janvier 2000 au 31 décembre 2001, au Siège de l’Organisation des Nations Unies, à New York.

2.  La présente Convention est soumise à ratification, acceptation ou approbation. Les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation seront déposés auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

3.  La présente Convention est ouverte à l’adhésion de tout État. Les instruments d’adhésion seront déposés auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

Article 26

1.  La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date de dépôt auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies du vingt-deuxième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion.

2.  Pour chacun des États qui ratifieront, accepteront ou approuveront la Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingt-deuxième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion, la Convention entrera en vigueur le trentième jour après le dépôt par cet État de son instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion.

Article 27

1.  Tout État Partie peut dénoncer la présente Convention en adressant une notification écrite à cet effet au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

2.  La dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle la notification aura été reçue par le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

Article 28

L’original de la présente Convention, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en fera tenir copie certifiée conforme à tous les États.

EN FOI DE QUOI les soussignés, dûment autorisés à cet effet par leurs gouvernements respectifs, ont signé la présente Convention, qui a été ouverte à la signature au Siège de l’Organisation des Nations Unies à New York, le 10 janvier 2000.

Annexe

1.  Convention pour la répression de la capture illicite d’aéronefs, faite à La Haye le 16 décembre 1970.

2.  Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, faite à Montréal le 23 septembre 1971.

3.  Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d’une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1973.

4.  Convention internationale contre la prise d’otages, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 17 décembre 1979.

5.  Convention sur la protection physique des matières nucléaires, adoptée à Vienne le 3 mars 1980.

6.  Protocole pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l’aviation civile internationale, complémentaire à la Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, fait à Montréal le 24 février 1988.

7.  Convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime, faite à Rome le 10 mars 1988.

8.  Protocole pour la répression d’actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental, fait à Rome le 10 mars 1988.

9.  Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 15 décembre 1997.


(1)  Alex P. Schmid et al.« Political Terrorism: A New Guide to Actors, Authors, Concepts, Data Bases », Theories and Literature, Transaction Books, 1988, p. 1 à 9.

(2)  Article 2 de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme.

(3)  Communiqué de presse du 14 janvier 1999.

(4)  Ibid.

(5)  Statistiques provenant du département d’État des États-Unis (avril 1998).

(6)  Statistiques du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

(7)  Rahan Gunaratna, « International and Regional Security Implications of the Sri Lankan Tamil Insurgency », Alumni Association of the Bandaranake Centre for International Studies and the International Foundation of Sri Lankans, Londres (1997), p. 24; entrevue avec Peter Chalk, le 9 juillet 1998.

(8)  Organisation Abou Nidal (OAN); Groupe Abou Sayyaf (GAS); Groupe islamique armé (GIA); Aum Shinriykyo; Patrie basque et liberté (ETA); HAMAS (Mouvement de résistance islamique); Harakat oul-Moudjahiddine (HUM); Hetzballah (Parti de Dieu); Gama’a al-Islamiyya (Groupe islamique ou GI); Armée rouge japonaise (ARJ); al-Djihad; Kach Kahane Chai; Parti travailliste du Kurdistan (PKK); Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul (TLET); Organisation moudjahiddine Kalq (MEK, MKO, NCR et bien d’autres); Armée de libération nationale (ALN); Faction palestinienne islamique du Djihad-Shaqaqi (PIJ); Front de libération palestinien – Faction Abou Abbas (PLF); Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP); Front populaire pour la libération de la Palestine – Commandement général (FPLP-GC); al-Qa’ida; Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC); Organisation révolutionnaire du 17 novembre (17 novembre); Armée/Front révolutionnaire de libération du peuple (DHKP/C); Combat révolutionnaire du peuple (ELA); Sentier lumineux (Sendero Luminoso ou SL); Mouvement révolutionnaire Tupac Amaru (MRTA).

(9)  http://www.state.gov/www/global/terrorism/fto_1999.html#designation (8 octobre 1999) (traduction).

(10)  Légitime défense.

(11)  Le texte intégral de la résolution figure à l’annexe.  Les conventions et protocoles qui y sont annexés portent sur la capture d’aéronefs, sur les actes illicites dirigés contre les aéronefs ou les aéroports civils ou contre la sécurité de la navigation maritime ou des plates-formes fixes situées sur le plateau continental, sur les crimes contre les personnes jouissant d’une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, sur la prise d’otages, sur les crimes relatifs aux matières nucléaires et sur les attentats terroristes à l’explosif.  Ces traités peuvent être annexés à la Convention dans la mesure où ils seront ratifiés, par exemple la Convention sur le terrorisme nucléaire de 1998.

(12)  L’article 2 (paragraphe 1) se lit comme suit : « Commet une infraction au sens de la présente Convention toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, illicitement et délibérément, fournit ou réunit des fonds dans l’intention de les voir utilisés ou en sachant qu’ils seront utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre : a) Un acte qui constitue une infraction au regard et selon la définition de l’un des traités énumérés en annexe; b) Tout autre acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque. »

(13)  Pour une analyse plus détaillée des libertés fondamentales garanties par la Charte, le lecteur est invité à prendre connaissance du document produit par la Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement sur ce sujet, consultable à http://lopparl/lopimages2/PRBpubs/cir1000/8416-f.htm.

(14)  [2000] J.C.F. no 5, dossier de la Cour no A-415-99, Cour d’appel fédérale, Toronto (Ontario), les juges Décary, Linden et Robertson, entendue les 4 et 5 octobre 1999. Jugement : 18 janvier 2000.

(15)  La Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement a produit un document à jour sur la propagande haineuse (consultable en direct à http://lopparl/lopimages2/PRBpubs/cir1000/856-f.htm).

(16)  Des résumés législatifs produits par la Direction de la recherche parlementaire au sujet du projet de loi C-22 (LS-355F) et du projet de loi S-16 (LS-388F) sont disponibles à la Bibliothèque du Parlement ou sur le site Web de la Bibliothèque.

(17)  Un résumé législatif du projet de loi C-16 (LS-400F) produit par la Direction de la recherche parlementaire) est disponible à la Bibliothèque du Parlement ou sur le site Web de la Bibliothèque.