PRB 01-3F

 

LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS :
LE COMMERCE, L'INVESTISSEMENT, L'INTÉGRATION ET L'AVENIR

 

Rédaction :
Blayne Haggart
Division de l'économie
Le 2 avril 2001


TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

LA PORTÉE DE L’INTÉGRATION

LE COMMERCE

   A.  Le commerce et les traités
      1.  Profil des relations
         a.  Structure des échanges régionaux

   B.  L’incidence de l’ALÉ
      1.  Tarifs réduits
      2.  Stabilité accrue
      3.  L’ALÉ a-t-il débouché sur la tranquillité?
      4.  Productivité
      5.  Niveau de vie

   C.  Les questions commerciales liées à l’ALÉ et à l’ALÉNA
      1.  Le statut spécial du Canada est menacé
      2.  Mécanisme d’investissement
      3.  Dépendance excessive à l’égard des États-Unis
      4.  Recours commerciaux
      5.  Préoccupations relatives à l’environnement et au travail
      6.  Influence sur la politique nationale
      7.  Incidence sur la souveraineté
      8.  Culture
      9.  Autres questions

L’INVESTISSEMENT ÉTRANGER DIRECT

CONCLUSIONS

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES CHOISIES

   A.  Intégration et aperçu

   B.  Commerce

   C.  Accords parallèles de l’ALÉNA


LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS :   LE COMMERCE, L’INVESTISSEMENT,
L’INTÉGRATION ET L’AVENIR

INTRODUCTION

De tout temps, la politique canadienne a oscillé entre le désir de liens économiques plus étroits avec les États-Unis et le désir de se tenir à une distance raisonnable du pays le plus puissant du monde.  Trois campagnes électorales – en 1891, 1911 et 1988 – ont porté sur la question du libre-échange avec les États-Unis et, même lorsque la conjoncture économique est au beau fixe, les préoccupations au sujet des menaces apparentes que posent les États-Unis pour la souveraineté canadienne ne manquent pas.

Le débat se poursuit, mais le contexte dans lequel il se déroule change rapidement.  Au cours de la dernière décennie, les liens économiques du Canada avec les États-Unis se sont manifestement resserrés, tout d’abord aux termes de l’Accord de libre-échange (ALÉ), puis aux termes de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) qui englobait aussi le Mexique.  Ailleurs, l’intégration économique s’accélère, tant à l’échelle multilatérale sous les auspices de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qu’à l’échelle régionale par l’intermédiaire de l’Union européenne, de l’Organisation de coopération économique Asie-Pacifique et de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA) proposée.

Le Canada et les États-Unis entretiennent l’une des relations les plus étroites au monde.  Au fil des ans, les États-Unis ont grandement contribué à assurer la sécurité et la prospérité du Canada.  Bien que toute relation donne lieu à l’occasion à des différends, celle qui existe entre le Canada et les États-Unis est très stable, comme en fait foi la plus longue frontière sans défense au monde, par laquelle passent chaque jour des marchandises d’une valeur de plus de 1,5 milliard de dollars.

En raison de l’importance des États-Unis pour le bien-être du Canada, il est essentiel que même en période de tranquillité et de prospérité, le Canada soigne ses rapports avec son voisin du Sud.  La gestion de ces rapports se fait de plus en plus complexe, et ce pour un certain nombre de raisons. 

  • Premièrement, la tendance mondiale à l’intégration économique redéfinit la souveraineté et les conditions auxquelles les nations peuvent être indépendantes, interdépendantes et prospères.  Cette tendance a incité certains analystes de la politique à prôner une intégration accrue avec les États-Unis.

  • Deuxièmement, l’accès garanti au marché le plus important du Canada (et au pays le plus riche au monde), toujours une préoccupation majeure, doit se faire dans le contexte de l’évolution des États-Unis.  Le point de mire du pouvoir aux États-Unis change.  Le Canada a toujours entretenu une « relation spéciale » avec les États-Unis, fondée sur l’entente entre des dirigeants et des décisionnaires qui avaient une expérience commune de la grande crise de 1929 et la Deuxième Guerre mondiale.   Toutefois, le centre du pouvoir se déplaçant aux États-Unis du nord-est vers le sud-ouest, il pourrait s’avérer de plus en plus difficile pour le Canada de se faire comprendre et de plaider sa cause à Washington.

  • Troisièmement, une nouvelle génération de dirigeants américains, dont le président George W. Bush, anciennement gouverneur du Texas, est le parfait exemple, arrive au pouvoir, pour laquelle le Canada n’est qu’un pays parmi tous ceux avec lesquels les États-Unis traitent.  L’attention des États-Unis se tournera davantage vers un Mexique au dynamisme nouveau dirigé par le président Vicente Fox.

  • Quatrièmement, les préoccupations traditionnelles à propos d’une dépendance excessive à l’égard du marché américain pour le bien-être économique du Canada demeurent.  Des craintes ont également été exprimées au sujet des dispositions de l’ALÉNA, dont les règles régissant les relations entre États et investisseurs au chapitre 11; les critiques craignent que ces règles n’érodent le pouvoir national d’établir des règlements dans le domaine de l’environnement, entre autres.  Ironiquement, les auteurs du chapitre 11 n’avaient pas prévu ce problème lorsqu’ils ont conçu ce qui était censé être un outil pour protéger les investissements canadiens et américains au Mexique.  Il   faut mentionner aussi la préoccupation constante au sujet de la protection de la culture canadienne vu l’attrait des produits culturels américains, dont témoignait le différend au sujet des magazines « à tirage dédoublé » à la fin des années 1990.

  • Enfin, il y a tous les facteurs qui influent sur toute relation étroite, en ce qui concerne la mise en œuvre de l’ALÉ et de l’ALÉNA, et le fait d’être un petit pays situé à côté du pays le plus puissant de l’histoire.

Le présent document est divisé en quatre parties :

  • La première partie décrit les relations économiques entre le Canada et les États-Unis. 

  • La deuxième partie, soit la principale, examine l’état des relations commerciales et l’expérience aux termes de l’ALÉ et de l’ALÉNA, en soulignant les questions importantes dans le contexte d’une intégration économique accrue.

  • La troisième partie aborde brièvement la question de l’investissement étranger direct. 

  • Viennent en dernier lieu les conclusions. 

LA PORTÉE DE L’INTÉGRATION

Certains universitaires préconisent une intégration plus poussée avec les États-Unis, sous la forme d’un véritable marché commun avec pleine mobilité de la main-d’œuvre, une politique commerciale commune, l’harmonisation fiscale et/ou une forme quelconque de monnaie commune.  Entre-temps, dans le cadre de l’ALÉNA, les relations commerciales – pour ne donner qu’un exemple – sont en train de matérialiser cette vision d’une intégration économique accrue.

Contrairement à l’Union européenne, qui a opté pour l’intégration au moyen de la création d’institutions supranationales ayant des objectifs clairs et des priorités en matière d’intégration, les relations entre le Canada et les États-Unis sont relativement moins formelles et moins dirigées.  Les relations en matière de défense sont gérées bilatéralement au sein du NORAD et sur le plan multilatéral au sein de l’OTAN.  Le commerce est géré dans le cadre de l’ALÉ et de l’ALÉNA, et un certain nombre d’autres ententes bilatérales portent sur d’autres questions d’intérêt commun.  Par exemple, la Commission mixte internationale s’occupe de questions liées aux eaux frontalières (surtout dans les Grands Lacs) depuis 1909.

L’intégration a surtout été évidente dans la sphère économique, mais, même dans ce cas, l’ALÉ et l’ALÉNA « n’établissent aucune institution supranationale permanente, ni ne prévoient comment les liens économiques pourraient être resserrés »(1). Contrairement à l’Union européenne, l’ALÉ et l’ALÉNA sont des accords commerciaux, pas des unions douanières.  Il n’y a ni monnaie commune, ni tarif extérieur commun, seulement une mobilité limitée de la main-d’œuvre, et chaque gouvernement national continue à établir sa propre politique en matière d’affaires étrangères et, en grande partie, sa politique économique nationale.  Par contre, il y a mobilité des capitaux et nos marchés financiers sont étroitement liés.  Contrairement à ce qui s’est passé en Europe, une plus grande intégration économique ne laissait pas présager une plus grande intégration politique. 

Les exhortations de plus en plus nombreuses à une plus grande intégration économique proviennent principalement du milieu d’affaires canadien, « notamment le Conseil canadien des chefs d’entreprises (CCCE) et John Roth de Nortel, ainsi que de groupes de réflexion canadiens, surtout l’Institut C.D. Howe »(2). En principe, une intégration plus poussée assurerait aux entreprises le plein accès à un vaste marché tout en leur permettant de rationaliser leurs coûts.

Selon un autre argument, une intégration économique plus poussée est nécessaire, parce que le système de commerce multilatéral mondial est en train de devenir un système à trois régions : l’Amérique du Nord (ou les Amériques); l’Union européenne; et l’Asie-Pacifique, dirigée par le Japon.  Parce que les États-Unis sont le plus important partenaire commercial du Canada, il est essentiel pour ce dernier de se voir garantir un accès à leur marché.

Font contrepoids à cet argument la crainte de ce que cela pourrait signifier pour la souveraineté politique et, dans le cas de la faiblesse du dollar, la prise de conscience qu’une devise plus faible attire l’industrie, à qui la main-d’œuvre coûte moins cher qu’aux États-Unis, et rend les exportations canadiennes concurrentielles à l’étranger.

Malgré la faiblesse de son dollar, le Canada a connu une sortie nette de l’investissement étranger direct.  Le rôle d’un dollar fléchissant est controversé : même s’il peut protéger une industrie à court terme, la mesure dans laquelle il met les entreprises à l’abri de réformes de la productivité peut nuire à l’industrie à long terme. 

LE COMMERCE

Nulle part l’intégration économique plus poussée entre le Canada et les États-Unis ne s’est fait sentir davantage que dans le secteur du commerce.   À bien des égards, le commerce soutient le niveau de vie des Canadiens.  Les exportations représentent environ 40 p. 100 du produit intérieur brut du Canada et, selon le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, un emploi sur trois est relié au commerce.

Dans le cas du Canada, lorsqu’on parle de commerce international, on parle surtout du commerce avec les États-Unis.  Au total, 86 p. 100 des exportations canadiennes – valant 33 p. 100 du PIB – sont destinées aux États-Unis.  L’importance des États-Unis à l’égard du bien-être du Canada ne s’arrête pas là.  Le Canada jouit d’un excédent sur marchandises constant et important avec les États-Unis – lequel atteignait 60,5 milliards de dollars en 1999 – qui compense les déficits commerciaux persistants avec le reste du monde (s’élevant au total à 26,6 milliards de dollars en 1999).  Cela explique en partie pourquoi « du point de vue de l’intérêt national, les États-Unis sont la première, la deuxième et la troisième priorité du Canada »(3).

Les relations canado-américaines dans la sphère économique et politique sont actuellement caractérisées par une impression de tranquillité et la coopération générale.  Les différends occasionnels au sujet de vieilles questions comme Cuba et le bois d’œuvre résineux n’ont pas vraiment jeté un froid sur les relations. 

Bien que ces relations soient plus importantes pour le Canada, les États-Unis comptent beaucoup sur ce dernier.  Comme destinataire de 23 p. 100 des exportations américaines, le Canada est le plus important marché étranger des États-Unis, devant l’Union européenne, qui compte presque dix fois sa population.

Le degré d’intégration économique entre le Canada et les États-Unis est encore plus frappant lorsqu’on examine le commerce intra-entreprise et le commerce intrasectoriel.  Dans le cadre de l’ALÉ, le commerce intra-entreprise et intrasectoriel a augmenté étant donné que les entreprises peuvent maintenant implanter leurs installations de production dans les zones les plus efficientes sur un plus vaste marché.  Autrement dit, une grande partie des échanges qui figurent dans les statistiques de Statistique Canada sur le commerce international ne sont pas attribuables à des entreprises indépendantes.  D’après une estimation, « quelque 70 p. 100 de nos échanges ne se font pas dans des conditions de pleine concurrence – environ 40 p. 100 des échanges sont effectués au sein d’une même entreprise tandis que 30 p. 100 sont le résultat de la délivrance de licences et d’autres relations entre sociétés »(4). Les sociétés américaines dominent le commerce intra-entreprise(5).

Un niveau élevé d’intégration existe entre les entreprises qui ne reconnaissent plus des marchés « canadiens » ou « américains » distincts.  Le commerce intrasectoriel et intra-entreprise a été particulièrement évident dans l’industrie de l’automobile, qui représente plus de 30 p. 100 des exportations canadiennes aux États-Unis et environ 25 p. 100 des exportations américaines au Canada : « Il s’agit presque d’une relation incestueuse entre les mêmes compagnies qui sont situées de part et d’autre de la frontière à proximité les unes des autres ».  En outre, « la même tendance peut également être observée dans d’autres secteurs, par exemple ceux des produits chimiques et des produits pharmaceutiques, de la machinerie industrielle, des produits alimentaires et du matériel de télécommunications »(6).

   A.  Le commerce et les traités

Tandis que les États-Unis – avec leur économie dynamique, leur nombreuse population et leur proximité du Canada – ont toujours attiré un pourcentage important du commerce canadien, la signature de l’ALÉ a resserré encore davantage des liens économiques déjà étroits.

L’accord a entraîné un abaissement des tarifs tout en instituant des droits et des obligations s’agissant de l’investissement, des services et du règlement des différends.  L’élimination graduelle des tarifs entreprise dans le cadre de l’ALÉ s’est terminée le 1er janvier 1998, quoique certains tarifs demeurent en place pour certains produits dans des secteurs canadiens soumis à la gestion de l’offre (p. ex., les produits laitiers et la volaille), ainsi que pour le sucre, les produits laitiers, les arachides et le coton aux États-Unis.

Par conséquent, entre 1989 et 1999, le commerce bilatéral entre le Canada et les États-Unis a augmenté de 167 p. 100.  Le commerce des services financiers s’est accru à un rythme annuel de 21 p. 100 tandis que les services informatiques et d’information ont connu une hausse de près de 30 p. 100(7). Comme on pouvait s’y attendre, le commerce des marchandises dans le cas desquelles il y a eu libéralisation en vertu de l’ALÉ a augmenté plus rapidement que le commerce des marchandises qui n’ont pas été touchées par cet accord.  Environ le quart de l’augmentation totale des échanges canado-américains a été « directement attribué à des tarifs plus bas, chiffre qui suppose un changement très important dans les importations en réaction à une réduction donnée des tarifs »(8).

      1.  Profil des relations

Le commerce des marchandises du Canada avec les États-Unis a représenté 81 p. 100 de tous nos échanges en 1999, par comparaison à 72 p. 100 en 1988.  Au total, 86 p. 100 des exportations canadiennes de marchandises ont été dirigées vers les États-Unis en 1999.  Cela a représenté environ 33 p. 100 du PIB du Canada, par comparaison à moins de 20 p. 100 en 1989.

Graphique 1

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Même si le changement n’a pas été spectaculaire, il y a eu une légère diminution du pourcentage des ressources exportées vers les États-Unis.   Dans l’ensemble, les produits automobiles sont ceux qui font l’objet des échanges les plus fréquents, puisqu’ils interviennent pour 32 p. 100 des exportations du Canada et 27 p. 100 de ses importations.  Viennent ensuite le matériel et l’outillage (22 p. 100 des exportations et 29 p. 100 des importations) et les produits industriels (17 p. 100 et 21 p. 100).  Les produits primaires représentent une autre catégorie importante et illustrent clairement la différence entre le profil commercial du Canada et celui des États-Unis : 26 p. 100 des exportations canadiennes à destination des États-Unis consistent en des produits primaires contre 8 p. 100 seulement de ses importations (9).

D’après Industrie Canada, les exportations « non traditionnelles » – comme les vêtements et les textiles, les meubles et articles d’ameublement, les plastiques et les « autres produits manufacturés » – augmentent rapidement.  Le même rapport fait aussi observer que « pour plusieurs industries canadiennes, le marché américain est relativement plus important que le marché canadien »(10).

Graphique 2

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Graphique 3

 

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Bien qu’elles soient beaucoup moins importantes que le commerce des marchandises, les exportations de services du Canada vers les États-Unis ont presque triplé depuis 1989, pour passer de 11,8 milliards de dollars en 1989 à 31,1 milliards de dollars.  Les importations de services en provenance des États-Unis ont doublé au cours de la même période pour passer de 18,1 milliards à 36,9 milliards.  Même si l’ALÉ a moins touché les services que les produits, le commerce des services visés par l’accord a augmenté davantage que celui des services qui ne l’étaient pas(11). La part américaine des importations et des exportations est demeurée relativement constante au cours de cette période, la quote-part de ses exportations étant passée de 57 p. 100 à 60 p. 100 et la quote-part de ses importations étant demeurée à 63 p. 100.  Les services commerciaux interviennent pour environ la moitié de ces totaux.

         a.  Structure des échanges régionaux

Le commerce avec les États-Unis a dépassé en importance le commerce interprovincial.  En 1988, les exportations interprovinciales de produits étaient plus élevées, à 133 milliards de dollars, que les exportations vers les États-Unis (101 milliards de dollars).   En 1998, les exportations vers les États-Unis (252 milliards de dollars) dépassaient facilement les exportations interprovinciales totales (177 milliards de dollars).  Entre 1992 et 1998, le commerce interprovincial a augmenté en moyenne de 4,7 p. 100, un chiffre bien inférieur au taux de 11,9 p. 100 enregistré pour les exportations internationales(12).

 

Tableau 1 : Comparaison du commerce interprovincial
avec les exportations vers les États-Unis

 

1988

1998

 

en milliards de $ (courants)

Exportations vers les É.-U.

101

252

Importations des É.-U.

86

203

Total

187

455

Exportations interprovinciales

133

177

Importations interprovinciales

133

177

Total

266

354

Source :   Statistique Canada, Le commerce interprovincial au Canada, 1992-1998; 1984-1996, Catalogue no 15-546-XIF; base de données CANSIM; Le commerce international de marchandises au Canada, décembre 1998, Catalogue no 65-001-XIB.  Les chiffres pour les États-Unis correspondent aux prix courants, non ajustés; Industrie Canada.

Le Canada est le principal partenaire commercial de 37 des 50 États américains.  D’après Industrie Canada, le commerce avec le Canada représente plus de 3 p. 100 du produit intérieur brut de la plupart des États du Nord des États-Unis.  Ce sont les plus grands partenaires du Canada (puisqu’ils sont intervenus pour 63,4 p. 100 des exportations canadiennes vers les États-Unis en 1998, par comparaison à 70,1 p. 100 en 1989), quoique les exportations vers les États du Midwest et du Sud des États-Unis, surtout la Californie et le Texas, soient à la hausse(13).

L’importance du commerce entre les régions (États et provinces) a augmenté.  « Ces dernières années, le commerce entre les États américains frontaliers et leurs homologues au Canada a augmenté beaucoup plus rapidement que le commerce bilatéral national »(14). Cela n’est pas surprenant étant donné la réduction des obstacles au commerce aux termes de l’ALÉ et de l’ALÉNA et la proximité des centres urbains du Canada des États-Unis.   Par exemple, le sud de l’Ontario, d’où proviennent la plus grande partie des échanges du Canada, est à une distance de route d’une journée pour plus de 100 millions d’Américains. 

Graphique 4

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L’Ontario accapare la part du lion des échanges avec les États-Unis, soit près de 60 p. 100.  Il n’est donc pas surprenant que cette province soit celle qui dépende le plus du commerce avec les États-Unis.  Les exportations vers les États-Unis ont représenté 40 p. 100 de son PIB en 1998, par comparaison à 20 p. 100 en 1989.  Le Québec et l’Alberta, dont les exportations vers les États-Unis représentent un quart du PIB, se classent derrière l’Ontario.  Toutes les provinces ont affiché d’énormes progrès dans leurs exportations vers les États-Unis au cours de la période de 1990 à 1999.

Graphique 5

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Tableau 2 : Augmentation du commerce de marchandises
avec les États-Unis, par province et territoire

 

1990

1999

 Différence p. 100

 

en millions de $ (courants)

 

Terre-Neuve

1 315

1 998

51,9

Île-du-Prince-Édouard

101

489

381,4

Nouveau-Brunswick

2 077

5 204

150,5

Nouvelle-Écosse

1 515

3 144

107,5

Québec

19 148

52 557

174,5

Ontario

60 357

182 842

202,9

Manitoba

1 813

6 569

262,3

Saskatchewan

2 417

5 638

133,2

Alberta

11 510

29 360

155,1

Colombie-Britannique

7 113

20 241

184,6

Territoires du Nord-Ouest

21

12

-42,6

Yukon

2

18

790,1

Nunavut

1

Total du commerce avec les États-Unis

107 393

308 076

186.9

Source :   Industrie Canada, L’accroissement des relations économiques entre le Canada et les États-Unis, Première partie – Principales caractéristiques, 10 septembre 1999

   B.  L’incidence de l’ALÉ

L’ALÉ et, dans une mesure moindre, l’ALÉNA(15), l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) et les ententes relevant de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont eu une forte incidence sur le commerce et la productivité.  Cette incidence s’est fait sentir à deux principaux égards.

      1.  Tarifs réduits

Premièrement, en prenant le GATT comme point de départ, l’ALÉ a réduit les obstacles tarifaires et non tarifaires au commerce « de tous les produits et de la plupart des services, ainsi qu’à de nombreuses transactions en matière d’investissement et à la plupart des voyages d’affaires.  Les plus grandes obligations couvraient le commerce des marchandises et englobaient les tarifs, les règles d’origine, les contingents, les formalités douanières, les mesures de sauvegarde, les voies de recours applicables au commerce déloyal, les marchés publics, le traitement national, les obstacles techniques et les exceptions »(16).

Des études ont révélé que l’abaissement de ces obstacles tarifaires avait entraîné dans l’ensemble une augmentation du commerce : « Exception faite des automobiles et des pièces ainsi que du pétrole, le commerce entre les deux pays a augmenté plus rapidement dans les secteurs qui ont été libéralisés par l’ALÉ que dans les secteurs qui ne l’ont pas été »(17).

Toutefois, il est difficile d’isoler l’incidence d’un accord commercial en particulier, comme l’ALÉNA, sur le commerce et la performance économique globale d’un pays(18). Bien qu’il ne fasse aucun doute que l’ALÉNA a eu des effets bénéfiques, on pourrait très bien soutenir que d’autres facteurs (p. ex., la robustesse de l’économie américaine par comparaison à la nôtre au cours de la période 1993 à 1998, le taux de change, etc.) ont eu une incidence toute aussi grande sinon plus grande sur l’amélioration du commerce et de la performance économique du Canada.  La forte poussée récente de l’activité économique aurait fort vraisemblablement été enregistrée, que l’ALÉNA ait existé ou non.

      2.  Stabilité accrue

Deuxièmement, le commerce a été avantagé par une stabilité accrue attribuable au « régime bilatéral important, surtout dans la sphère du commerce et de l’investissement, avec ses propres principes, normes et règles, ainsi que certaines institutions » qui a été mis en place pour gérer ce commerce accru(19). Cela a fait baisser les coûts des transactions et dissipé l’incertitude.

Le commerce entre le Canada et les États-Unis a profité notamment de la croissance des régimes à base de règles conçus pour renforcer le libre-échange entre les pays, comme l’ALÉ, l’ALÉNA et l’OMC.  Le mécanisme de règlement des différends de l’ALÉ (et de l’ALÉNA), en particulier, a « grandement renforcé la primauté du droit dans les relations entre le Canada et les États-Unis...  Bien que la suppression des irritants quotidiens reliés aux  mouvements en progression rapide du commerce et des investissements puisse poser des problèmes, le Canada a ressenti les bienfaits d’une approche plus raisonnée du règlement des conflits »(20). D’autres différends commerciaux sont réglés à l’OMC.  Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu d’irritants commerciaux – le bois d’œuvre résineux et la gestion de l’offre du secteur agricole demeurent des points délicats – mais malgré l’ampleur des rapports commerciaux entre le Canada et les États-Unis, très peu ont causé des difficultés au point où il a fallu recourir à un règlement officiel des différends.

      3.  L’ALÉ a-t-il débouché sur la tranquillité?

Le terme le plus souvent utilisé pour décrire les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis (et leurs autres rapports) est « tranquille ».  Cela est en partie attribuable aux répercussions de l’ALÉ décrites ci-dessus.  Cependant, le rôle d’une expansion économique sans précédent aux États-Unis tout au long des années 1990 ne saurait être passé sous silence.   En période de prospérité, il est plus facile de ne pas prêter attention aux irritants commerciaux que durant les récessions.   Tout comme le Canada oscille entre une plus grande et une moins grande intégration avec les États-Unis, ceux-ci balancent entre l’internationalisme et le protectionnisme/l’isolationnisme.  Le protectionnisme et sa suite d’irritants commerciaux émergent toujours durant un ralentissement économique.

Un accès garanti au marché américain était la raison d’être de l’ALÉ.  La dernière décennie a été caractérisée par une prospérité économique qui a apaisé les préoccupations traditionnelles à propos des différends commerciaux.  Il sera intéressant de voir si ces rapports « tranquilles » persisteront lorsque la conjoncture économique ne sera pas aussi favorable.

      4.  Productivité

Un important argument de vente de l’accord était que la concurrence accrue d’un marché américain plus vaste entraînerait des améliorations de la productivité; on ne sait pas très bien encore si cela s’est fait ou commence à se faire.  D’après une étude, « alors qu’on se serait attendu à ce que les petites entreprises canadiennes commencent à réduire l’écart de productivité qui les séparait des grandes entreprises canadiennes et étrangères, cela n’a pas été le cas ».  Une explication possible veut que ces entreprises continuent à se heurter à des obstacles à l’accès aux États-Unis.  La constatation que l’industrie manufacturière a enregistré des gains de productivité, surtout dans les secteurs où les obstacles tarifaires étaient auparavant très élevés, semblerait le confirmer(21). Un autre économiste, Daniel Trefler, a signalé, lors des audiences sur la productivité tenues par le Comité permanent des finances de la Chambre des communes, que l’ALÉ avait accru la productivité des secteurs dans lesquels il y avait eu réduction de la protection tarifaire.  Selon le rapport qui en a résulté, « il estime que l’ALÉ a permis à ces secteurs d’enregistrer une augmentation de la productivité de 0,5 p. 100 par année, ce qui est beaucoup à son avis »(22).

Quoi qu’il en soit, le Canada n’a pas enregistré les mêmes gains que les États-Unis, où la croissance de la productivité a été supérieure, bien qu’il semble que les augmentations de la productivité aient été plus importantes dans les industries les plus touchées par l’ALÉ.

      5.  Niveau de vie

Les attentes initiales à l’égard de l’ALÉ étaient élevées : « Avant que l’ALÉ n’entre en vigueur, des études en étaient venues à la conclusion que les Canadiens verraient leur niveau de vie augmenter par suite de l’élimination des tarifs entre le Canada et les Etats-Unis »(23). Toutefois, malgré les promesses d’une plus grande prospérité née d’un accord de libre-échange, les niveaux de revenu et d’emploi au Canada n’ont pas suivi le rythme américain : « Les niveaux de vie, en termes de revenu personnel disponible par personne, ont diminué de 5 p. 100 au cours de la dernière décennie, alors qu’ils ont augmenté de 12 p. 100 aux États-Unis; et la part de l’investissement étranger direct mondial détenue par le Canada est tombée de 6,5 p. 100 à 4 p. 100 »(24). Comme on pouvait s’y attendre dans une économie traversant une période de restructuration, le Canada a perdu plus de 15 p. 100 de ses emplois dans l’industrie manufacturière à la suite de la signature de l’ALÉ (1989-1992).

On comprend mal le rôle du libre-échange à l’égard du revenu et de l’emploi.  De nombreux économistes attribuent, du moins en partie, la diminution des salaires et l’augmentation du chômage à la récession du début des années 1990.  D’après l’économiste Robert Mundell, titulaire d’un prix Nobel, et d’autres économistes, la politique monétaire resserrée à inflation zéro de la Banque du Canada, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, a maintenu l’intérêt à des taux élevés, et ainsi restreint la croissance et aggravé le chômage : « Généralement parlant, le public canadien n’a jamais compris cet épisode de son histoire et c’est en grande partie sur la nouvelle zone de libre-échange que le blâme a été injustement jeté »(25).

L’économiste Daniel Schwanen en est arrivé à la conclusion que même si l’on ne peut blâmer l’ALÉ pour la perte d’emplois, il a créé moins d’emplois que promis.  D’autres facteurs, comme la mise en application de nouvelles technologies et la conjoncture économique nationale, ont également joué un rôle important dans la création d’emplois(26). L’économiste John McCallum résume la recherche en ces termes :

Le débat n’est donc pas clos, mais il semble très probable qu’il se soit produit des pertes d’emplois attribuables à la transition avec la chute des tarifs douaniers, qui dans certains cas sont passés de plus de 20 p. 100 à zéro en une petite décennie.  En revanche, l’expansion des exportations stimulées par l’ALÉ a indubitablement créé des emplois, même si une partie du mérite revient à la dépréciation du dollar canadien et à d’autres forces.  Dans l’ensemble, je ne pense pas que nous sachions si l’ALÉ a entraîné une hausse ou une baisse de l’emploi total(27).

   C.  Les questions commerciales liées à l’ALÉ et à l’ALÉNA

Si l’on jette un regard sur l’avenir, il y a de nombreuses questions dont il faudra tenir compte dans le cadre de toute discussion au sujet d’une intégration économique plus poussée.  Mentionnons les problèmes de mise en œuvre de l’ALÉNA et les préoccupations géopolitiques, dont l’ascendance du Mexique et la perte possible de la « relation spéciale » entre le Canada et les États-Unis.   Certaines de ces questions sont abordées ci-après.

L’ALÉ et l’ALÉNA promettaient également une hausse de la productivité, une diminution des prix et une augmentation des revenus.  Il faudrait aussi tenir compte de la mesure dans laquelle ces promesses ont été tenues dans le cadre de l’examen d’une intégration plus poussée.

      1.  Le statut spécial du Canada est menacé

Malgré les efforts pour assurer l’accès au marché américain par le biais de l’ALÉ, le Canada demeure vulnérable face à son partenaire commercial beaucoup plus gros.  Cela est dû en grande partie au simple fait d’être un petit pays situé à côté de la superpuissance économique la plus imposante de toute l’histoire.  Pour ne donner qu’un exemple, la moitié du PIB de l’Ontario dépend actuellement des exportations vers les États-Unis.  Malgré l’ALÉ, un plus grand protectionnisme de la part des États-Unis nuirait au Canada et aggraverait vraisemblablement les différends commerciaux entre les deux pays.

Le Canada a traditionnellement entretenu une relation spéciale avec les États-Unis.  Celle-ci a été façonnée par plusieurs facteurs : l’expérience commune de la grande crise de 1929 et de la Deuxième Guerre mondiale; le fait que le centre du pouvoir aux États-Unis soit situé à proximité du Canada dans le nord-est; et la dépendance mutuelle durant la guerre froide, au sein de l’OTAN et notamment du NORAD.  Bref, malgré l’ignorance stéréotypée du Canada qui caractérise la perception que les Américains ont des Canadiens, les Américains (du moins ceux qui étaient au pouvoir) connaissaient le Canada et ne le considéraient pas simplement comme n’importe quel autre pays.

Cependant, la génération de la crise de 1929 et de la Deuxième Guerre mondiale étant en train de quitter la scène et la guerre froide, d’entrer dans l’histoire, cette relation spéciale se trouve menacée.  De plus, le centre de la politique américaine se déplace du nord-est vers le sud et le sud-ouest.  Vu la disparition d’une expérience commune et une moins grande dépendance (sinon aucune) à l’égard du Canada pour défendre le territoire américain contre une attaque de missiles russes au-dessus du pôle Nord, Washington tend de plus en plus à traiter le Canada comme une nation comme les autres. 

Par exemple, seul un lobbyisme de dernière minute a soustrait l’industrie canadienne de la défense à l’application des règles de l’International Traffic in Arms Regulations (ITAR) des États-Unis qui auraient limité l’accès des entreprises canadiennes aux marchés militaires américains d’une valeur de cinq milliards de dollars par année pour le Canada.  Même aujourd’hui, l’exemption accordée en vertu de l’ITAR n’a pas donné de résultats concrets et pourrait s’avérer de courte durée(28).

Le Canada et les États-Unis partagent la plus longue frontière sans défense au monde.  L’immigration illégale demeure en tête de la liste des préoccupations des États-Unis.  Bien qu’elle présente un problème relativement plus grave à la frontière qui les sépare du Mexique – les Services américains d’immigration et de naturalisation comptent 8 000 agents le long de la frontière de 2 000 milles entre les États-Unis et le Mexique, par comparaison à 300 seulement le long de la frontière de 8 895 km (5 000 milles) entre le Canada et les États-Unis(29) – les nombreux mouvements transfrontières, les préoccupations accrues en matière de sécurité et le désir d’accorder le même traitement au Mexique et au Canada (la perte de la « relation spéciale ») confèrent une importance de plus en plus grande à la question du passage de la frontière.

Le règlement frontalier américain de 1996 destiné à réduire l’immigration clandestine en provenance du Mexique ne comportait à l’origine aucune exemption pour la frontière canadienne, risquant ainsi « de nuire au commerce et de limiter l’accès.  Les politiciens impatients de fermer la frontière aux Mexicains voient d’un bon œil le fait qu’un traitement égal soit réservé aux Canadiens »(30).

Le Canada a réagi à ces préoccupations.  Le budget de février 2000 prévoyait l’octroi de fonds pour la surveillance de la frontière; de plus, le projet de loi C-16 était conçu pour resserrer la surveillance de l’immigration illégale.  Il a expiré au Feuilleton lorsque les élections fédérales de novembre 2000 ont été déclenchées.  Les deux gouvernements continuent de collaborer au règlement des questions frontalières, dans le cadre, par exemple, du Partenariat Canada-États-Unis (PCÉU),  une tribune binationale qui réunit des responsables des douanes, de l’immigration et de l’application de la loi.

Ce dernier exemple démontre comment, en ce qui concerne le commerce et la sécurité et, de manière générale, le Canada est davantage considéré comme n’importe quelle autre nation.  Il démontre aussi – et c’est peut-être plus important encore – l’importance accrue du Mexique aux yeux des États-Unis.  La signature de l’ALÉNA a accéléré la tendance à mettre l’accent sur le Sud et sur les relations des États-Unis avec le Mexique.

Les chiffres expliquent ce changement d’orientation.   Le Mexique dont l’économie est en pleine expansion compte plus de 100 millions d’habitants – plus de trois fois la taille de la population du Canada – et l’espagnol est rapidement en voie de devenir la deuxième langue non officielle des États-Unis.  Mis à part les chiffres, l’élection de l’homme d’affaires Vicente Fox au poste de président du Mexique, qui a ainsi rompu avec une tradition autocratique remontant à sept décennies, peut améliorer la démocratie et le climat des affaires au Mexique tout en captivant l’imagination des États-Unis.  En outre, l’élection du gouverneur du Texas George W. Bush à la présidence des États-Unis pourrait orienter encore davantage les vues des Américains vers le Sud.

Grâce à l’ALÉNA, le Mexique a pu augmenter sa part des échanges nord-américains qui est passée de 7 p. 100 en 1990 à un peu moins de 13 p. 100 en 1999.  Pour le Mexique comme pour le Canada, les États-Unis sont devenus de loin le marché le plus important – la destination de près de 90 p. 100 de ses exportations(31). La renaissance économique du Mexique sera source d’une augmentation de la concurrence pour les entreprises américaines qui exportent aux États-Unis.

À mesure que la relation spéciale du Canada avec les États-Unis s’érodera, il deviendra plus difficile d’obtenir des exemptions spéciales du Congrès et de l’administration américaine et d’empêcher des problèmes auparavant mineurs de s’aggraver.  Comme Christopher Sands le faisait observer, « sans le préjugé politique favorable au Canada attribuable à l’ancien consensus sociétal, l’intégration se poursuivra et les intérêts canadiens se ressentiront de plus en plus des conséquences directes et indirectes de l’élaboration de la politique américaine à différents niveaux »(32).

La possibilité de mésententes de plus en plus fréquentes fait ressortir la nécessité pour le Canada de fournir une information de haute qualité à toutes les composantes du système politique américain – y compris le Congrès et les États individuels – afin qu’elles comprennent bien le Canada et les intérêts canado-américains, par exemple, en leur expliquant pourquoi la frontière entre le Canada et les États-Unis ne veut pas dire la même chose que la frontière entre les États-Unis et le Mexique.

      2.  Mécanisme d’investissement

Les environnementalistes craignent que le chapitre 11 de l’ALÉNA serve à remanier le droit de l’environnement national.  En fait, les dispositions du chapitre 11 de l’ALÉNA relatives à l’investissement font maintenant partie de celles qui sont le plus controversées.  Elles ont été rédigées au départ pour protéger les sociétés et les investisseurs contre une réglementation arbitraire et un protectionnisme commercial déguisé, en ce qui concerne surtout les investissements au Mexique.  Le chapitre est conçu pour conférer aux entreprises le droit d’intenter des poursuites contre les gouvernements en cas de prise de décisions qui nuisent injustement à leurs intérêts commerciaux.

Ces dispositions font en sorte que les investisseurs étrangers n’aient pas à se soumettre à des règles plus strictes que celles qui s’appliquent aux entreprises nationales; ils ont aussi droit à une indemnisation si leurs biens sont expropriés.  Cependant, ce qui était au départ pour les investisseurs un mécanisme de défense contre les gouvernements étrangers semble être devenu un outil dont se servent agressivement les sociétés pour contester le droit des gouvernements d’adopter des règlements. 

Ses détracteurs affirment que le chapitre 11 mine la capacité du Canada de protéger la santé et l’environnement.  Dans l’affaire qui a opposé l’Ethyl Corporation au Canada en 1998, laquelle portait sur les restrictions imposées au commerce interprovincial et international du MMT, un additif du pétrole soupçonné d’être la cause de désordres nerveux (et qui, selon les fabricants automobiles, réduit la performance des véhicules), il a été jugé que « les mesures canadiennes étaient bien en deçà des normes définies dans l’accord »(33). L’affaire a été réglée à l’amiable.  Une affaire États-Unis-Mexique au sujet de règlements environnementaux a été rejetée parce qu’elle a été jugée frivole, et la barre a ainsi été haut placée pour ce qui est des dommages allégués imputables aux règlements normalement établis par les gouvernements.

D’autres procès ont rapidement suivi celui intenté avec succès par l’Ethyl Corporation.  Deux jours après l’annonce du règlement à l’amiable entre cette société et le gouvernement du Canada, S.D. Myers Inc. de l’Ohio a donné avis qu’elle entamait une contestation en vertu du chapitre 11 de l’ALÉNA en raison de l’interdiction fédérale de l’exportation de BPC en 1995 et 1996.  En novembre 2000, le tribunal international nommé pour entendre la cause s’est prononcé en faveur de S.D. Myers.

Trois autres sociétés ont décidé d’invoquer le chapitre 11 de l’ALÉNA pour poursuivre le gouvernement canadien en dommages-intérêts.

  • La Sun Belt Water Inc. de la Californie réclame 220 millions de dollars de dommages à la suite d’une interdiction des exportations d’eau de la Colombie-Britannique.

  • Pope and Talbot Inc., une entreprise de produits forestiers de l’Oregon, réclame 30 millions de dollars US en dommages-intérêts en vertu de l’ALÉNA à la suite de l’accord sur le bois d’œuvre résineux entre le Canada et les États-Unis.

  • United Parcel Services réclame des dommages-intérêts d’au moins 160 millions de dollars en raison de l’aide accordée par le gouvernement canadien à la Société canadienne des postes.

Le chapitre 11 n’empêche pas un gouvernement d’adopter des règlements qui sont vraiment conçus pour protéger la santé et l’environnement, bien qu’il permette également aux tribunaux de ne tenir compte que d’un éventail très étroit de préoccupations lorsqu’ils rendent leurs décisions.  Malgré tout, le gouvernement fédéral a décidé d’essayer de définir plus clairement la portée des dispositions relatives aux relations entre les États et les investisseurs.  En 1998, le Canada a demandé aux États-Unis et au Mexique de réexaminer le chapitre 11.  Il cherchait plus particulièrement à obtenir une note interprétative de la clause régissant les relations entre États et investisseurs, ce qui devait aider à restreindre les poursuites en vertu de ce chapitre, protégeant ainsi la capacité du gouvernement d’adopter des lois et des règlements dans l’intérêt public.

Les trois gouvernements parties à l’ALÉNA n’arrivent toujours pas à s’entendre sur une réinterprétation possible de la clause d’expropriation, les efforts du Canada se heurtant à la résistance du Mexique.  Ironiquement, alors que les mesures de protection des investisseurs ont été prévues essentiellement pour apaiser les craintes au sujet du commerce avec le Mexique, ce pays semble aujourd’hui être la pierre d’achoppement, s’agissant de préciser les droits des investisseurs.  Le Mexique hésite à modifier les dispositions, car il ne veut pas aliéner les investisseurs étrangers éventuels à qui les dispositions strictes du chapitre 11 donnent à entendre que le Mexique les traitera équitablement et favorablement.

Par ailleurs, les gouvernements du Canada et des États-Unis semblent essayer d’assortir le processus du chapitre 11 de considérations environnementales.  Les deux gouvernements appuient la demande de l’Institut international du développement durable (IIDD) d’être autorisé à intervenir à une audience dans la poursuite de un milliard de dollars intentée par la société Methanex de Vancouver contre le gouvernement américain, parce que la Californie se propose d’interdire d’ici à 2002 son additif du pétrole à base de méthanol fort controversé, l’éther méthylique du tert-butanol (MTBE)(34). Le Mexique s’oppose à l’intervention de l’IIDD.

      3.  Dépendance excessive à l’égard des États-Unis

Peu importe la manière dont les chiffres sont ventilés, le Canada dépend grandement de l’économie américaine.  Cette dépendance ravive les préoccupations canadiennes traditionnelles à propos d’une dépendance excessive à l’égard du marché américain et de ses répercussions pour l’économie et l’unité canadienne.  Dans le premier cas, bien que le Canada bénéficie des retombées d’une économie américaine forte, il serait durement touché par une récession aux États-Unis.  

De plus en plus, les entreprises ne voient plus deux marchés nationaux distincts, mais un seul marché, comme s’il n’y avait pas de frontière.  La forte intégration de l’Ontario avec le marché américain, le fait que le commerce canado-américain soit en train d’éclipser le commerce interprovincial et l’accroissement du commerce intra-entreprise et intrasectoriel viennent confirmer ce point de vue.

Le commerce Canada-États-Unis démontre que le Canada n’est pas un commerçant mondial : son expérience de la mondialisation se limite essentiellement à son expérience de l’intégration économique avec les États-Unis.

Cela ne veut pas dire que le Canada devrait ne tenir aucun compte du marché américain en tentant de diversifier ses échanges ou préconiser une diversification des échanges aux dépens de ses relations avec les États-Unis.  Il est tout à fait logique de tirer parti de notre proximité du vaste marché américain.  En outre, l’alternative n’est pas claire.  Dans des audiences qu’il a tenues au printemps 2000, le Sous-comité du commerce, des différends et des investissements internationaux de la Chambre des communes s’est laissé dire que de nombreuses entreprises canadiennes se servent de l’expérience acquise dans leurs échanges avec le marché américain qui est (relativement) accueillant et leur est familier pour prendre de l’expansion outre-mer sur les marchés de l’Union européenne, du Japon et autres. 

Dans la mesure où les entreprises canadiennes se concentrent sur le marché américain, elles risquent de laisser passer des occasions sur les marchés émergents dont la croissance est plus rapide, de même que sur des marchés déjà établis comme ceux de l’Union européenne et du Japon, lesquels pourraient fort bien un jour défier la suprématie économique des États-Unis.  Toutefois, en raison de l’importance des relations du Canada avec les États-Unis, il y a très peu de chances que la diversification du commerce remette sérieusement en question les échanges entre les deux pays dans un avenir prévisible.

      4.  Recours commerciaux

Les mécanismes de règlement des différends prévus par l’ALÉ et subséquemment par l’ALÉNA ont aidé à atténuer certaines des tensions entourant les différends commerciaux, quoiqu’ils ne les aient pas éliminés – les différends sont une réalité dans toute relation commerciale.  Le Canada continue à réclamer une plus grande coopération dans l’utilisation de recours commerciaux (p. ex., les mesures antidumping et compensatoires) en Amérique du Nord.  En vertu de l’ALÉ et de l’ALÉNA, des groupes spéciaux binationaux rendent des décisions obligatoires quant à savoir si les droits antidumping ou compensateurs ont été correctement appliqués.  Toutefois, l’ALÉNA n’a pas réglé ces questions de manière satisfaisante (y compris l’application, les délais, l’incapacité d’établir des précédents et la tendance des États-Unis à ne tenir aucun compte des règles du commerce international lorsqu’elles vont à l’encontre des intérêts nationaux(35) et un certain nombre de poursuites afférentes aux droits antidumping et compensateurs ont été intentées.

Même s’ils ont contribué à atténuer certaines des tensions, d’une certaine manière, l’ALÉ et l’ALÉNA n’ont pas réussi à dépolitiser et à régulariser les différends : « Un grave problème tient à ce que les différends peuvent toujours être réglés par les voies diplomatiques traditionnelles, les États-Unis utilisant la stratégie qui sert le mieux leurs intérêts, sans se soucier des dispositions de l’ALÉNA »(36). Cela ne semble pas cadrer avec l’essor du libre-échange et il y a de la place pour l’amélioration.  La véritable question consiste cependant à savoir si les États-Unis accepteront ou non les changements proposés.

      5.  Préoccupations relatives à l’environnement et au travail

L’ALÉ, qui est un accord commercial, traite exclusivement de questions de commerce, par opposition à des considérations sociales, en matière de travail et environnementales.  En outre, le texte de l’accord établit des droits pour les acteurs commerciaux, uniquement.  Il contraste à cet égard avec l’organisation de l’Union européenne qui, à titre d’union douanière, prévoit une beaucoup plus grande intégration politique et traite de ces questions.  Par exemple, l’Union européenne a « un fonds de développement régional pour contrer les répercussions négatives du marché commun sur des régions en particulier et permettre aux régions relativement moins développées d’être plus concurrentielles » et des lois qui sont obligatoires à moins que les pays qui en sont membres décident de se soustraire à leur application (37).

L’ALÉ et l’ALÉNA sont des accords commerciaux et non des accords douaniers.  Par conséquent, les questions mentionnées ci-dessus relèvent surtout de chacune des nations qui y sont parties.  Cependant, l’ALÉNA prévoit une réglementation commune pour ce qui est du travail et de l’environnement.  Négociés et mis en œuvre parallèlement à l’ALÉNA, les accords nord-américains sur la coopération dans le domaine du travail et de l’environnement ont été conçus pour faciliter la coopération entre les pays partenaires dans ces secteurs et promouvoir l’application efficace des lois et règlements de chaque pays.  Les commissions de coopération dans le domaine de l’environnement et du travail responsables de la mise en œuvre de ces accords jouissent de pouvoirs très limités.

Aucun verdict n’a encore été rendu quant à l’efficacité des deux commissions.  Bien qu’elles aient été établies pour s’occuper de questions fréquemment laissées de côté lorsqu’il s’agit d’intégration économique, elles sont souvent lentes et inefficaces du point de vue de l’application de la loi.  Il ne fait aucun doute qu’elles sont toutes les deux subordonnées à l’accord commercial cadre, dont les principes sont exécutoires.

Le Canada et les États-Unis entretiennent des relations sur le plan de l’environnement en dehors de l’ALÉNA, ce qui leur permet en fin de compte de régler les différends.  Alan M. Schwartz a conclu au terme d’un examen des relations entre le Canada et les États-Unis en matière d’environnement que les deux pays ont su travailler ensemble au règlement de questions communes dans ce domaine.  Il a cité l’exemple de la Commission mixte internationale, créée en 1909, qui est responsable des bassins hydrographiques communs et qui a été remarquablement efficace.  Figurent au nombre des autres questions abordées sur d’autres tribunes, a-t-il indiqué, les pluies acides et la gestion des stocks de saumon du Pacifique(38).

Il semble y avoir un mouvement aux États-Unis en faveur de l’enchâssement de normes en matière de travail et d’environnement dans les accords commerciaux.  En décembre, Bill Clinton, alors président des États-Unis, a annoncé le déclenchement de négociations sur le libre-échange avec le Chili.  L’accord proposé englobe des « dispositions controversées au sujet des droits des travailleurs et de la protection de l’environnement ».  Il faisait directement suite à un accord de libre-échange États-Unis-Jordanie qui était « le premier accord commercial à prévoir des normes dans le domaine du travail et de l’environnement »(39). Reste à savoir, toutefois, comment un changement dans l’administration américaine influera sur cette position, et ce que cela veut dire pour l’ALÉNA et l’OMC.

L’intégration économique Canada-États-Unis a la même incidence sur le travail que l’internalisation de la production en général.  Quoique les capitaux et la technologie soient mobiles internationalement, la main-d’œuvre ne l’est pas (bien qu’elle le soit au sein de l’Union européenne)(40). La protection des travailleurs contre les bouleversements qui peuvent résulter de la libéralisation du commerce peut parfois aller à l’encontre de la promotion du commerce.  Il y a deux solutions possibles à cela :

  • des accords internationaux sur le traitement de la main-d’œuvre (que laissait peut-être présager l’entente signée parallèlement à l’ALÉNA);

  • l’utilisation de programmes gouvernementaux pour encourager les entreprises à établir des structures de soutien qui ne sont liées à aucun emploi ni à aucune industrie en particulier.

      6.  Influence sur la politique nationale

Au fond, le débat qui entoure le travail, l’environnement et le commerce porte sur les liens entre le commerce et la politique sociale et entre l’intégration économique et l’intégration politique.  Un camp affirme qu’une plus grande intégration économique entraînera la dissolution du Canada; l’autre camp soutient qu’il n’y a guère de lien entre les sphères économique, politique et culturelle.

La question de savoir si l’intégration économique influe sur les politiques nationales demeure toujours sans réponse.  La convergence semble plus probable dans certains secteurs que dans d’autres.  Par exemple, de plus grandes pressions s’exerceront sur la convergence des taxes qui influent sur des facteurs de production très mobiles, comme les capitaux et la main-d’œuvre bien instruite.  Comme l’indiquaient Gary C. Hufbauer et Jeffrey J. Schott de l’Institute of International Economics de Washington dans un document rédigé pour Industrie Canada, l’intégration supposera également une plus grande flexibilité de la main-d’œuvre : « Les syndicats qui limitent la flexibilité de la main-d’œuvre (pour ce qui est des affectations, des congédiements et des règles relatives à l’ancienneté) seront une importante force négative » lorsqu’il s’agira d’attirer les entreprises dans une région(41).

Tout tend à montrer, soutiennent-ils, que les pays peuvent adopter une politique fiscale indépendante à l’appui d’un gouvernement socialement activiste.  Ils citent l’exemple des pays du Bénélux et l’Allemagne qui ont des structures fiscales très différentes et un haut degré d’intégration économique : « Bref, les plus petits partenaires ont pu mettre en œuvre un programme social plus vaste que le plus grand partenaire »(42).

En fait, la prestation de services sociaux de qualité – bonnes écoles publiques, main-d’œuvre instruite, environnement propre, rues sûres et culture dynamique – peut aider à attirer les entreprises et les travailleurs vers une région ou un pays.

Pourtant, plus les deux économies deviennent intégrées, plus il y a de chances qu’il y ait des différends au sujet de régimes réglementaires différents.  Un différend pourrait être centré sur « les règles relatives à la teneur en éléments locaux pour promouvoir l’identité culturelle ou les règlements sur la sécurité des produits de consommation »(43). Un tel différend a déjà surgi ; pensons à la contestation par les Américains de la gestion de l’offre de produits agricoles au Canada et l’interdiction des publications à tirage dédoublé.

Comme Julie A. Soloway, chercheuse attachée au Centre des études internationales de l’Université de Toronto, le faisait observer, l’influence croissante du système de commerce et d’investissement international – qui ne relève pas directement de la population nationale – peut mettre en question la légitimité de la législation nationale s’il semble faire disparaître sa raison d’être.  « L’incapacité de gérer ce rapport présente un danger en raison du risque que ‘le consensus national en faveur de marchés ouverts s’érode au point où une réapparition généralisée du protectionnisme pourrait être chose possible’ »(44). Cela pose un problème dans le cas de tous les accords commerciaux qui nécessitent probablement une transparence accrue et une plus grande participation du public.

      7.  Incidence sur la souveraineté

Tout mouvement en faveur d’une intégration plus poussée avec les États-Unis a toujours soulevé des inquiétudes quant à son incidence sur la souveraineté.  Lorsque les Libéraux de sir Wilfrid Laurier ont proposé un accord de libre-échange avec les États-Unis lors des élections de 1891, les Conservateurs ont laissé entendre qu’un tel accord était simplement un prélude à l’annexion par les États-Unis (les Conservateurs ont remporté les élections).  Aujourd’hui, le même argument veut que des liens nord-sud plus étroits affaiblissent l’axe est-ouest sur lequel le pays a été fondé.

Nul ne sait quelle incidence le remplacement du commerce interprovincial par le commerce Canada-États-Unis et l’intégration de l’Ontario au marché américain auront sur la souveraineté.  On craint qu’il n’en résulte une série de régions « autonomes » – surtout l’Ontario – plus proches des États-Unis que les unes des autres.  Thomas Courchene, économiste de l’Université de Toronto, croit que nous sommes témoins de l’avènement des « régions-États », régions qui feront surtout du commerce à l’intérieur de leur propre territoire.  À preuve, l’intensité du commerce transfrontalier et l’intégration en Ontario.  Chaque région réagit donc aux politiques économiques et financières de ses États voisins.  En raison de cette augmentation du commerce avec le reste du monde aux dépens du commerce avec le Canada, « il convient de plus en plus de considérer le Canada non plus comme une seule économie est-ouest, mais plutôt comme une série d’économies régionales nord-sud (transfrontières).  Cela a des répercussions considérables, dont l’une consiste à savoir comment faire concorder notre système d’échanges est-ouest avec une économie régionale de plus en plus nord-sud »(45).

Il existe des raisons de croire que les statistiques exagèrent l’attrait des États-Unis et ses conséquences pour la souveraineté.  Dans la mesure où le commerce nord-sud a amélioré le bien-être des Canadiens, une prospérité accrue devrait renforcer le Canada.  En outre, le commerce est-ouest demeure important.  D’après la Chambre de commerce du Canada, pour les petites entreprises, « le commerce interprovincial (et non la tendance nord-sud davantage orientée en fonction de la géographie) demeure une plate-forme d’expansion particulièrement importante »(46).

Bien que la signature de l’ALÉ et de l’ALÉNA ait entraîné une augmentation des échanges avec les États-Unis, le commerce interprovincial demeure fort si l’on considère la taille et la proximité du marché américain.  Comme une étude l’a fait ressortir, « malgré l’aspiration géographique exceptionnellement forte, on conserve en ce qui concerne les transactions économiques un fort penchant pour le commerce avec des concitoyens canadiens...  En raison de l’aspiration géographique exceptionnellement forte, un tiers du produit intérieur brut est lié au commerce avec les Américains »(47).

      8.  Culture

Le traitement de la culture continuera sûrement aussi à soulever des préoccupations en raison des différences fondamentales de perception.

Contrairement à tous les autres pays, les États-Unis considèrent la culture comme une marchandise et sont donc préoccupés par les barrières commerciales tandis que la politique du Canada est axée sur l’identité culturelle.  Aux États-Unis, la culture est équivalente (essentiellement) au divertissement et est un produit qui appartient au marché.  Au Canada (comme dans de nombreux pays européens), la culture est une expression de l’identité nationale et doit donc à ce titre être promue et protégée en tant que responsabilité publique.  Dans la mesure où la culture pour les Américains est assimilée à une industrie du spectacle rentable et pour les Canadiens à la politique de l’identité nationale, il ne fait presque aucun doute qu’il risque d’y avoir des malentendus de part et d’autre au sujet de la possible exemption des industries culturelles dans les arguments de libre-échange(48).

La culture est exempte de l’application de l’ALÉNA, mais pas des accords de l’OMC.  L’OMC a rendu une décision en faveur des États-Unis contre l’interdiction par le Canada des magazines « à tirage dédoublé »; l’OMC a statué que les magazines sont un produit, et non un service. 

Toutefois, les « guerres culturelles » ne sont pas toutes unilatérales.  Même si les produits culturels américains continuent à dominer au Canada sur les écrans de cinéma et de télévision, dans les librairies, sur les ondes, chez les disquaires et dans les kiosques à journaux, le Canada a été témoin de la percée d’un « petit volume pourtant croissant de produits et services culturels canadiens sur les marchés américains »(49). En outre, la protection de la culture ne consiste pas uniquement à faire de la place aux Canadiens pour qu’ils puissent faire connaître leurs vues : une concurrence accrue – peu importe la source – peut augmenter le nombre de débouchés que les artistes canadiens peuvent utiliser pour atteindre un auditoire.

      9.  Autres questions

D’autres aspects du traité ont aussi soulevé des problèmes.   Le degré de diversification dans le cadre de l’ALÉ demeure un sujet de discorde.  Les détracteurs de l’ALÉ signalent que plus de 20 p. 100 de l’augmentation du commerce est concentrée dans le secteur de l’automobile et que l’économie canadienne n’a pas réussi à se diversifier depuis la mise en œuvre de l’ALÉ(50).  Bien que la dépendance à l’égard des exportations de ressources naturelles ait quelque peu diminué, il y a eu une « augmentation relative substantielle » des exportations de produits finis, surtout dans l’industrie automobile, tandis que certaines améliorations se sont opérées dans divers secteurs de haute technologie(51).

Parce que l’ALÉNA est un accord commercial et non douanier, il ne prévoit pas la libre circulation de la main-d’œuvre, mais il facilite à certaines catégories de travailleurs – comme les travailleurs de la technologie et les gens d’affaires – l’accès au marché de l’autre pays.   Il serait peut-être souhaitable d’ouvrir les frontières aux partenaires de l’ALÉNA pour que la main-d’œuvre puisse les franchir aussi facilement que les capitaux et les marchandises, mais un tel mouvement risque de se heurter à une farouche résistance de la part des États-Unis où les responsables craignent le terrorisme, le trafic des drogues illicites et l’afflux massif de travailleurs mexicains qui pourraient en résulter.

L’INVESTISSEMENT ÉTRANGER DIRECT

Outre le commerce, l’ALÉ (et l’ALÉNA) a grandement libéralisé le mouvement des investissements entre le Canada et les États-Unis.  Il accorde un traitement national aux investisseurs américains tout en excluant l’investissement de certains secteurs vulnérables, en maintenant les mécanismes gouvernementaux d’examen de l’investissement et en interdisant certaines prescriptions de résultats liées aux investissements(52).

L’ALÉ et l’ALÉNA ont entraîné une augmentation de l’investissement étranger direct (IED) parmi les partenaires de l’ALÉNA.  Les États-Unis demeurent le principal investisseur étranger au Canada, la majorité des investissements « prenant la forme d’acquisitions plutôt que de l’établissement de nouvelles entreprises », et étant orientés vers les industries de haute technologie(53). À la fin de 1999, l’IED au Canada s’élevait à 173 milliards de dollars alors qu’il était de 80 milliards en 1988.  L’industrie manufacturière a attiré environ la moitié des investissements, suivie par les secteurs des finances (autres que les banques), de l’assurance et de l’immobilier (21 p. 100), ainsi que du pétrole (12 p. 100).  Le Canada est aussi le deuxième bénéficiaire en importance de l’IED total des États-Unis (11 p. 100), ne se laissant devancer que par le Royaume-Uni.

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Graphique 7

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L’investissement canadien à l’étranger, traditionnellement faible, a augmenté parallèlement à l’IED au Canada au point où il est aujourd’hui presque à parité avec celui-ci.  Le pourcentage de l’IED canadien dans des pays autres que les États-Unis a augmenté, parce qu’il est plus facile en vertu de l’ALÉ de desservir le marché américain à partir du Canada.

Malgré ces changements, la part de l’investissement étranger direct des États-Unis au Canada n’a pas augmenté au même rythme que le commerce, puisqu’elle s’élevait à 72 p. 100 en 1999 par comparaison à 75 p. 100 en 1985 et se situait en deçà du sommet de 82 p. 100 enregistré en 1966.  Une explication plausible serait que les entreprises qui ne se heurtent plus à des obstacles commerciaux investissent aux endroits les plus efficients.  L’intégration accrue attribuable à l’ALÉ et à l’ALÉNA a subtilement modifié l’interaction entre le commerce et l’investissement.  Lorsqu’elles se heurtent à des barrières tarifaires, les entreprises investissent directement à l’étranger pour les surmonter et desservir le marché national.  

Dans les cas où les entreprises peuvent s’implanter où bon leur semble, cette considération disparaît.  Par conséquent,

une bonne partie des exportations du Canada sont mues par l’investissement direct américain au Canada et, de plus en plus, par l’investissement direct du Canada aux États-Unis.  Il s’agit d’investissements « étrangers » selon la définition officielle, mais, en réalité, maintenant que la mentalité de succursales a disparu sous l’effet de l’ALÉ, l’investissement est davantage fondé sur l’existence d’un vaste marché nord-américain(54).

Le Canada est la cinquième source la plus importante d’investissements étrangers directs sur le marché américain.  Les sommes que le Canada investit aux États-Unis – 134 milliards de dollars en 1999, soit 52 p. 100 de l’IED canadien – sont loin d’être proportionnelles à la taille de notre économie.  Quelque 35 p. 100 de l’investissement direct canadien aux États-Unis va au secteur de la fabrication, suivi des assurances (11 p. 100), d’autres secteurs financiers (10 p. 100) et des banques (3 p. 100).

Ces augmentations sont de nature à inquiéter.  La part du Canada de l’IED mondial total a diminué considérablement au cours de la dernière décennie.  Par suite de l’ALÉ, le Canada était censé être en mesure de se faire valoir comme endroit attrayant où pourraient investir différents pays pour avoir accès au marché mondial.  La diminution de sa part de l’IED mondial donne à entendre que cela ne s’est pas produit.   Il se pourrait que le Canada ne soit pas suffisamment attrayant pour les investisseurs étrangers pour les trois raisons suivantes :

  • l’atmosphère nationale;

  • les obstacles à l’accès au marché américain;

  • le fait, en période d’incertitude, que les États-Unis soient considérés comme la seule économie « sûre » au monde.

Dans son évaluation des dix premières années d’existence de l’ALÉ, John McCallum en arrive non sans hésitation à la conclusion que l’IED n’a pas diminué par suite de l’ALÉ, quoiqu’il y ait lieu de s’inquiéter.  En théorie, a-t-il dit :

les IED peuvent aussi bien être négatifs que positifs : négatifs parce que le démantèlement des barrières tarifaires élevées par John A. Macdonald en 1879 permet aux entreprises étrangères et américaines d’approvisionner le marché canadien de l’extérieur, ce qui rend l’argument visant l’IED moins probant; positifs parce que le traité autorise les sociétés implantées au Canada à desservir la totalité du marché continental et que nos coûts de production sont inférieurs dans tous les secteurs [KPMG 1999], ce qui devrait entraîné un plus grand IED au Canada...  Le volume des IED entrant au Canada a augmenté plus vite par rapport au PIB, et diminué plus lentement en proportion du volume mondial que cela n’avait été le cas dans les années 1980. 

...Alors que les frontières économiques Canada-États-Unis se dissipent, [sa préoccupation première] est que les failles de notre régime fiscal et notre incapacité à paraître sur les écrans radar des entreprises multinationales puissent extorquer des tarifs plus élevés.  Les entraves continues à la circulation frontalière entre le Canada et les États-Unis pourront contrarier le désir du Canada à devenir l’endroit choisit des investisseurs nationaux et étrangers en matière de marché nord-américain(55).

CONCLUSIONS

Le présent document a décrit l’état général des relations économiques tout en faisant des suppositions quant à leur évolution future.   L’intégration économique entre les deux pays se poursuivra vraisemblablement, mais dans le contexte d’une intégration économique régionale et internationale.

À l’échelle régionale, l’intégration économique se poursuivra probablement au moyen de l’élargissement de l’ALÉNA au Chili (avec qui le Canada a déjà conclu un accord de libre-échange et avec qui les États-Unis ont commencé à en négocier un) et à d’autres pays, et de la signature de l’Accord de libre-échange des Amériques proposé, qui engloberait tous les pays des Amériques, sauf Cuba.  Les pays de l’ALNA, surtout les États-Unis, domineraient, puisqu’ils interviennent pour 85 p. 100 de toute la production hémisphérique(56). À l’échelle internationale, l’OMC continuera à exercer une influence sur les relations économiques entre le Canada et les États-Unis, comme en témoigne sa décision restreignant l’interdiction du Canada à l’égard des magazines à tirage dédoublé.

La gestion des relations entre le Canada et les États-Unis l’obligera à travailler à tous ces niveaux.  Pour le moment, les relations sont tranquilles, en raison des liens étroits et d’une conjoncture économique favorable.  Cependant, l’expérience passée (acquise à vivre dans l’ombre d’un géant) et le contexte changeant qui érode la « relation spéciale » invitent au maintien de la vigilance.  Quant à l’évolution de la future intégration économique, il y a une chose sur laquelle la plupart des étudiants des relations Canada-États-Unis peuvent s’entendre, à savoir que même si un régime (ou un niveau d’intégration) peut convenir pendant un certain temps, cela n’exclut pas la possibilité qu’il faudrait le modifier lorsque les circonstances changent. 

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES CHOISIES

   A.  Intégration et aperçu

The American Review of Canadian Studies, été 2000, documents consacrés à l’état des relations entre le Canada et les États-Unis.

Hoberg, George.  « Canada and North American integration », Analyse de Politiques, août 2000, p. S35-S50.

Hufbauer, Gary C. et Jeffrey J. Schott.  L’intégration économique de l’Amérique du Nord : les 25 dernières années et les 25 prochaines annéesOttawa, Industrie Canada, novembre 1998.

Industrie Canada.  L’accroissement des relations économiques entre le Canada et les États-Unis« Première partie – Principales caractéristiques », 10 septembre 1999; « Deuxième partie – Maximiser nos possibilités », 8 décembre 1999.

Molot, Maureen Appel et Fen Osler Hampson (éd.).  Vanishing Borders:  Canada Among Nations 2000, Toronto : Oxford University Press, 2000. 

   B.  Commerce

Britton, John N.H.  « Is the Impact of the North American Trade Agreements Zero? », Revue canadienne des sciences régionales, été 1998.

Relations Canada-États-Unis (site Web du gouvernement canadien avec information générale).

Affaires étrangères et Commerce international.

Hufbauer, Gary C.  NAFTA In A Skeptical Age:  The Way Forward, Institute for International Economics, juillet 2000.

Hunter, Todd.  « Les répercussions de l’ALE et de l’ALENA : Que disent les publications récentes? », ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, décembre 1998, document de référence no 6.

McCallum, John.  « ALE : un traité deux-étoiles », Libre-échange @ 10 : Étude d’impact BRC, Toronto : Banque royale, 1999.

L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), site Web du gouvernement consacré à l’ALÉNA.

   C.  Accords parallèles de l’ALÉNA

Les accords nord-américains sur la coopération dans le domaine du travail et de l’environnement sont disponibles sur le site Web de l’ALÉNA, comme des liens vers les commissions de coopération dans le domaine de l’environnement et du travail.

Carr, Barry.  « Globalization from below:  Labour internationalism under NAFTA »,   International Social Science Journal 51:1, mars 1999, p. 49-60.

« A greener, or browner, Mexico? », The Economist, 7 août 1999, p. 26-27.


(1)    Fen Osler Hampson et Maureen Appel Molot, « Does the 49th Parallel Matter Any More? », Vanishing Borders:   Canada Among Nations 2000, sous la dir. de Maureen Appel Molot et Fen Osler Hampson, Toronto : Oxford University Press, 2000, p. 3.

(2)   Andrew F. Cooper, « Waiting at the Perimeter:  Making US Policy in Canada », Vanishing Borders, p. 39-40.

(3)   Cooper, p. 27.

(4)   Michael Hart, What’s Next:   Canada, the Global Economy and the New Trade Policy, Ottawa : Centre de droit et politique commerciale, 1994, p. 20.

(5)    John N.H. Britton, « Is the Impact of the North American Trade Agreements Zero? », Revue canadienne des sciences régionales, été 1998, p. 189.

(6)    Hampson et Molot, p. 8.

(7)  Gary C. Hufbauer et Jeffrey J. Schott, L’intégration économique de l’Amérique du Nord : les 25 dernières années et les 25 prochaines années, Industrie Canada, novembre 1998, p. v.

(8)  John McCallum, « ALE : un traité deux-étoiles », Banque royale, 1999.

(9)  Hampson et Molot, p. 4, et données de Statistique Canada.

(10)  Industrie Canada, L’accroissement des relations économiques entre le Canada et les États-Unis, Première partie – Principales caractéristiques, 10 septembre 1999, p. 25. 

(11)   Marcel Côté, « Is Free Trade Good for Canada?  Ten Years Later the Balance is Positive », Cité Libre 26, avril-mai 1998, p. 51.

(12)    Calculé d’après : Le commerce interprovincial au Canada, Catalogue no 15-546-XIF, 1992-1998, 1984-1996; Le commerce international de marchandises au Canada, Catalogue n65-001-XIB, décembre 1999.

(13)   Industrie Canada, p. N-1-3.

(14)  Hufbauer et Schott, p. iii.

(15)  L’ALÉNA, qui est entré en vigueur en 1994, a eu une incidence relativement moins importante sur le Canada parce qu’il prenait appui sur l’ALÉ, déjà en œuvre. 

(16)   Hart, « The Role of Dispute Settlement in Managing Canada-US Trade and Investment Relations », Vanishing Borders, p. 99.

(17)  Hampson et Molot, « Does the 49th Parallel Matter Any More? », p. 6.

(18)   Voir Canada, Affaires étrangères et Commerce international Canada, L’ALENA à cinq ans : un partenariat productif, avril 1999, p. 7.  L’administration américaine en est arrivée à une conclusion analogue dans son rapport de juillet 1997 sur l’ALÉNA et ses répercussions où elle faisait observer qu’il était « difficile d’isoler les répercussions de l’ALÉNA sur l’économie américaine ».

(19)  Hampson et Molot, p. 4.

(20)  Hart, « The Role of Dispute Settlement in Managing Canada-US Trade and Investment Relations », p. 95.

(21)  Daniel Schwanen, « Catching Up is Hard to Do:  Thinking about the Canada-US Productivity Gap », Vanishing Borders, p.134, 137.

(22)   Comité permanent des finances de la Chambre des communes, Stimuler la productivité pour relever le niveau de vie des Canadiens, 1999.

(23)   Schwanen, p. 137.

(24)  McCallum, cité dans « A New Realism », The Economist, Survey of Canada, édition Internet, 22 juillet 1999.

(25)   Robert Mundell, « Canada’s Dollar:  To Fix or Not », The Nobel Money Duel, dialogue entre Robert Mundell et Milton Friedman dans le National Post, 12 décembre 2000, Noel Gaston et Daniel Trefler, « Labour Market Consequences of the Canada-U.S.  Free Trade Agreement », Revue canadienne de l’économique, février 1997, p. 18-41, de Todd Hunter, « Les répercussions de l’ALÉ et de l’ALÉNA : Que disent les publications récentes?  », MAECI, décembre 1998, Document de référence no 6.

(26)   Côté, p. 56.

(27)   McCallum, « ALÉ : un traité deux-étoiles ».

(28)  Stéphane Roussel, « Canada-American Relations:  Time for Cassandra? », The American Review of Canadian Studies, été 2000, p. 149.

(29)  Deborah Waller Meyers, « Border Management at the Millennium », The American Review of Canadian Studies, p. 256.

(30)  Robert Bothwell, « Friendly, Familiar, Foreign, and Near », Vanishing Borders, p. 177.

(31)  Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Bulletin mensuel du commerce, novembre 2000.

(32)  Christopher Sands, « How Canada Policy Is Made in the United States », Vanishing Borders, p. 70.

(33)  Hart, « The Role of Dispute Settlement in Managing Canada-US Trade and Investment Relations », p. 112, 113.

(34)  Mark MacKinnon, « Canada, U.S. support role for NGO in ALENA », The Globe and Mail, 24 novembre 2000, p. B7.

(35) Gilbert Gagné, « North American Free Trade, Canada, and US Trade Remedies:  An Assessment after Ten Years », The World Economy 23:1, janvier 2000, p. 83, 90.

(36)   Ibid., p. 86.

(37)  Nancy Riche et Robert Baldwin, « Economic Integration and Harmonization with the United States:  A Working-Class Perspective », Vanishing Borders, p. 186.

(38)  Alan M. Schwartz, « The Canada-U.S.  Environmental Relationship at the Turn of the Century », The American Review of Canadian Studies, été 2000, p. 207-226.

(39)   International Centre for Trade and Sustainable Development, « US launches free trade talks with Chile », BRIDGES Weekly Trade News Digest, vol.  4, no 46, décembre 2000.

(40)  La loi autorise les citoyens de l’Union européenne à travailler dans n’importe lequel des pays qui en sont membres.  Dans la pratique, en raison de facteurs comme les barrières linguistiques, la main-d’œuvre européenne n’est pas complètement mobile.

(41)  Hufbauer et Shott, p. 51.

(42)  Ibid.  p. vi.

(43)  Hart, What Next?  p. 41.

(44)  Julie A. Soloway, « Environmental Regulation as Expropriation:   The Case of NAFTA’s Chapter 11 », Canadian Business Law Journal 33:1, février 2000, p. 125, citant Dani Rodrik, Has Globalization Gone Too Far?  Washington : Institute for International Economics, 1997, p. 6.

(45)  Thomas J. Courchene, « NAFTA, the Information Revolution, and Canada-U.S. Relations:  An Ontario Perspective », The American Review of Canadian Studies, été 2000, p. 166, 173.

(46)  Schwanen, p. 135.

(47)   George Hoberg, « Canada and North American Integration », Analyse de politiques 26, août 2000, p. s41.

(48)  Ibid., p. 190.

(49)  Kevin V. Mulcahy, « Cultural Imperialism and Cultural Sovereignty », The American Review of Canadian Studies, été 2000, p. 187.

(50)  Riche et Baldwin, p. 188.

(51)  Britton, p. 181, 182.

(52)  Ce sont : les prescriptions relatives aux exportations, à l’approvisionnement intérieur, au contenu national, au transfert technologique et aux « fournisseurs exclusifs »; et une interdiction des politiques qui consistent à réduire les importations ou à les assujettir à la performance en matière d’exportation.  De telles prescriptions de résultats pourraient être imposées si elles sont liées aux subventions gouvernementales.

(53)   Britton, p. 176, citant Mel Hurtig, « How Much of Canada Do We Want to Sell? », The Globe and Mail, 5 février 1998, et A.D. MacPherson, « Shifts in Canadian Direct Investment Abroad and Foreign Direct Investment in Canada », sous la dir. de J. Britton, Canada and the Global Economy, Montréal et Kingston : McGill-Queen’s University Press, 1998.

(54)  Weintraub, p. 474.

(55)  McCallum, « ALE : un traité deux-étoiles ».

(56)  Hufbauer et Schott, p. 59.