BP-367F

 

LES BUDGETS DE 1993 :
RÉACTIONS DES AUTORITÉS FÉDÉRALES ET
PROVINCIALES À LA CROISSANCE DES DÉFICITS

 

Rédaction  Marion G. Wrobel
Analyste principal
Décembre 1993

                                      


 

TABLE DES MATIÈRES

GOUVERNEMENT DU CANADA

   A. Tendances dans les recettes

   B. Tendances dans les dépenses

   C. Dette, déficits et frais d'intérêt

   D. Mesures de lutte contre le déficit

   E. Prévisions économiques

   F. Nouvelles données

LES PROVINCES DU CENTRE

   A. Ontario
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   B. Québec
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

LES PROVINCES DE L'OUEST

   A. Colombie-Britannique
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   B. Saskatchewan
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   C. Alberta
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   D. Manitoba
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

LES PROVINCES DE L'ATLANTIQUE

   A. Île-du-Prince-Édouard
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficit et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   B. Nouvelle-Écosse
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   C. Nouveau-Brunswick
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

   D. Terre-Neuve et Labrador
      1. Tendances dans les recettes
      2. Tendances dans les dépenses
      3. Dette, déficits et frais d'intérêt
      4. Mesures fédérales limitant les transferts
      5. Mesures de lutte contre le déficit
      6. Prévisions économiques

RÉSUMÉ DES TENDANCES

   A. Généralités

   B. Modifications des paiements de péréquation


 

LES BUDGETS DE 1993 :
RÉACTIONS DES AUTORITÉS FÉDÉRALES ET PROVINCIALES
À LA CROISSANCE DES DÉFICITS

 

Les difficultés des gouvernements au Canada se sont poursuivies en 1993. On sait maintenant que la situation financière du gouvernement fédéral est bien pire qu'on ne l'avait d'abord pensé, et rien ne laisse présager des améliorations à court terme. Les provinces enregistrent toujours des déficits qui approchent un niveau record, même si elles ont pris tout un train de mesures pour accroître les rentrées fiscales et comprimer les dépenses.

Une plainte qu'on entend souvent dans la bouche des premiers ministres des provinces concerne les réductions unilatérales dans les paiements de transfert fédéraux. En effet, ces mesures d'austérité ont coûté cher aux provinces, et la situation financière du gouvernement fédéral rend peu probable un retour aux niveaux antérieurs de financement. Il importe de signaler que, la plupart du temps, les provinces ne parlent, à propos des transferts fédéraux, que des transferts pécuniaires, sans tenir compte du montant transféré sous forme de points fiscaux.

Le présent document porte sur 11 budgets qui ont été déposés en 1993, soit le budget fédéral et ceux des dix provinces, mais il tient compte également d'une mise à jour de l'information dans le cas du gouvernement fédéral. Il vise à permettre au lecteur de dégager au premier coup d'oeil les tendances financières diverses et de comparer les politiques budgétaires pratiquées au Canada par les différents gouvernements.

Les pages qui suivent reprennent de l'information provenant de divers budgets, dans lesquels on utilise pas toujours la même terminologie ni les mêmes conventions comptables, surtout à propos du déficit et de la dette. Lorsque les budgets sont résumés, nous reprenons les conventions comptables utilisées par le gouvernement en cause, mais nous employons également des conventions uniformes pour permettre au lecteur de faire des comparaisons entre les provinces.

En plus d'utiliser l'information tirée des budgets, nous employons des renseignements provenant de la Revue financière publiée par le ministère des Finances en novembre 1993 et du discours prononcé par l'hon. Paul Martin à l'École des Hautes Études Commerciales le 29 novembre 1993, ainsi que des informations fournies par l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières ou extraites de la Revue fiscale canadienne.

Tous les exercices financiers prennent fin le 31 mars. Celui qui a pris fin le 31 mars 1993, souvent désigné comme l'exercice 1992-1993, est ici appelé exercice 1993.

GOUVERNEMENT DU CANADA

Le budget fédéral de 1993 a été déposé à la Chambre des communes le 26 avril 1993. Il suivait de près l'exposé économique et financier que le ministre des Finances avait fait le 2 décembre 1992. À l'automne 1993, les chiffres préliminaires sur l'exercice 1992-1993 ont paru dans la Revue financière et, le 29 novembre 1993, le nouveau ministre des Finances, l'hon. Paul Martin, a rendu publics les chiffres révisés de 1993-1994.

   A. Tendances dans les recettes

En 1993, les recettes fédérales se sont établies à 122,9 milliards de dollars, soit un peu plus de 1,1 milliard de moins que ce qui avait été prévu au mois de décembre 1992, et seulement 8 p. 100 de plus qu'en 1990. Tandis que le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers a augmenté de 13 p. 100 pendant cette période de trois ans, pour atteindre 58,7 milliards, celui de l'impôt sur le revenu des sociétés a diminué de 35 p. 100 et le total des recettes provenant des taxes de vente et d'accise a baissé de 4 p. 100. Le seul autre type de recettes qui a affiché une forte croissance, ce qui, dans ce cas-ci, traduit une piètre performance de l'économie, ce sont les contributions à l'assurance-chômage, qui ont augmenté de 63 p. 100.

Pendant cette période, l'assurance-chômage est passée au deuxième rang parmi les plus importantes sources de recettes du gouvernement fédéral, car les contributions au régime représentent maintenant 15 p. 100 de toutes les recettes. En outre, l'impôt sur le revenu des particuliers a continué de dominer de plus en plus. En 1990, il produisait 46 p. 100 des recettes; en 1993, la proportion était passée à 47,7 p. 100. Qui plus est, les modifications comptables apportées par le gouvernement fédéral sous-estiment cette prédominance de plus en plus marquée de l'impôt sur le revenu des particuliers depuis 1990.

   B. Tendances dans les dépenses

Depuis 1990, les dépenses fédérales croissent plus rapidement que les recettes: elles ont progressé de 11 p. 100. Les dépenses au titre des programmes ont subi une hausse de 14,5 p. 100, alors que les frais de la dette n'ont augmenté que de moins de 2 p. 100, grâce à la chute des taux d'intérêt.

Les dépenses ont été poussées à la hausse par une augmentation de 30 p. 100 des transferts aux particuliers, résultat de déboursés beaucoup plus importants en prestations d'assurance-chômage. Les grands transferts aux autres ordres de gouvernement n'ont augmenté que de 9 p. 100, si l'on ne tient pas compte des transferts d'impôt. Si l'on prend en considération la valeur des transferts de points fiscaux, la hausse sur trois ans est plus près des 12 p. 100. Les autres transferts -- aux autochtones, aux entreprises et à l'agriculture -- ont progressé de 25 p. 100 sur trois ans.

   C. Dette, déficits et frais d'intérêt

Le déficit fédéral, selon le budget, était de 35,5 milliards de dollars, soit 1,1 milliard de plus que l'estimation avancée dans l'exposé économique du ministre des Finances, au mois de décembre précédent, et 16,4 p. 100 de plus qu'en 1990. Cette augmentation sur trois ans n'est pas très spectaculaire, mais elle est bien pire que les prévisions faites en 1990 par le gouvernement, qui entrevoyait une tendance à la baisse du déficit.

Ainsi, en 1993, la dette publique nette s'élevait à 458,6 milliards de dollars, contre 351 milliards en 1990. Selon le budget de 1990, elle devait être de 428 milliards en 1993. Malgré ces résultats décevants, les frais du service de la dette n'ont guère varié depuis 1990, grâce à des taux d'intérêt nettement plus faibles.

   D. Mesures de lutte contre le déficit

Si l'exposé budgétaire du gouvernement fédéral a exprimé une certaine déception à l'égard de la croissance du déficit, il ne prévoyait guère de mesures. Certaines avaient été prévues en décembre, le gouvernement ayant alors amputé ses dépenses de 775 millions de dollars. Le budget de 1993 a réduit encore les dépenses de fonctionnement du gouvernement, accentué les compressions déjà annoncées et en a étendu l'application. La plupart de ces réductions de dépenses n'ont pas pris effet immédiatement; elles devaient s'appliquer à compter de 1994.

   E. Prévisions économiques

Si le gouvernement fédéral a dû réviser ses prévisions économiques pour 1993, il a continué de prédire une vigoureuse reprise à compter de 1994. Tablant sur une croissance réelle moyenne de plus de 4,3 p. 100 au cours des cinq prochaines années et sur une progression de l'emploi de plus de 3 p. 100, il prédisait un taux de chômage de 7,5 p. 100 en 1998.

C'est sur cette robuste performance de l'économie que le gouvernement fondait ses prévisions, croissance de 6 p. 100 par année des recettes à moyen terme et baisse rapide du déficit.

   F. Nouvelles données

En novembre 1993, le ministère des Finances a rendu publics ses résultats financiers préliminaires pour l'exercice 1992-1993, déclarant un déficit de 40,5 milliards de dollars. L'écart, par rapport au montant prévu dans le budget, était de cinq milliards. La Revue financière a signalé que les recettes de 1993 étaient en fait en régression par rapport à l'année précédente en raison d'une croissance anémique de l'économie.

Néanmoins, près des trois quarts de l'augmentation du déficit étaient attribuables, au bout du compte, à une hausse des dépenses au titre des programmes par rapport aux chiffres avancés dans le budget. Cela était en partie prévisible. Les prestations de l'assurance-chômage ont été à la hausse, ainsi que les prestations destinées aux personnes âgées. Les transferts pécuniaires pour le financement des programmes établis ont augmenté de plus de 26 p. 100 parce que la baisse des recettes tirées de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés a réduit la valeur des points fiscaux, ce qu'il a fallu compenser en liquide.

D'autres augmentations de dépenses sont moins évidentes. Les paiements aux «autres» sociétés d'État ont subi une hausse de 750 millions de dollars, soit un relèvement de 31 p. 100. Selon la publication du ministère des Finances, la majeure partie de l'accroissement est attribuable à des rajustements d'évaluation pour mieux tenir compte de la valeur de réalisation estimative des investissements du gouvernement dans ses sociétés d'État. Il faut sans doute en déduire que la position des investissements du gouvernement n'est pas aussi bonne qu'on le croyait auparavant.

En outre, d'autres dépenses de programme ont augmenté de 15,7 p. 100, soit de 2,7 milliards de dollars, ce qui est partiellement attribuable à une diminution ponctuelle des dépenses de fonctionnement en 1992, dont il a déjà été tenu compte dans le budget. Parmi les autres facteurs cités dans la publication, notons le coût du référendum sur la Constitution.

Pour ce qui est de l'exercice financier de 1994, les dernières estimations révèlent que le déficit avoisine les 45,5 milliards de dollars, soit environ 12,5 milliards de plus que l'estimation avancée dans le budget. Le ministre des Finances explique l'écart par une croissance économique plus faible que prévue en 1993 et 1994, ce qui fera fléchir les rentrées fiscales et alourdira le budget des crédits versés aux personnes à faible revenu. Le budget de 1993 prévoyait une croissance de 2,9 p. 100 en 1993 et de 4,6 p. 100 en 1994. Le ministre a ramené ces estimations à 2,5 et 3 p. 100 respectivement.

Conséquence de la performance médiocre de l'économie, les provinces adressent également des demandes de stabilisation au gouvernement fédéral; un montant de 1,2 milliard est prévu au budget à cet égard. En outre, des besoins exceptionnels, par exemple un traitement plus rapide des remboursements et la non-adoption de certaines mesures législatives, ont alourdi le déficit de 1994 d'environ deux milliards de dollars.

LES PROVINCES DU CENTRE

L'Ontario et le Québec sont le coeur de l'économie canadienne. Ce sont les deux économies les plus importantes au Canada et c'est là que se concentre l'activité manufacturière. C'est également dans ces deux provinces que la récente récession a eu les conséquences les plus accablantes.

L'Ontario est la plus prospère des deux provinces et sa position financière, avant la récession, était supérieure à celle du Québec. En 1990, elle déclarait un excédent budgétaire équivalant à 9 $ par habitant, tandis que le Québec accusait un déficit de 248 $ par habitant.

Cette position relative a changé. En 1993, le déficit québécois est de 488 $ par habitant et celui de l'Ontario, de plus de 1 000 $.

   A. Ontario

Le budget ontarien a été déposé à l'Assemblée législative le 19 mai 1993.

      1. Tendances dans les recettes

En 1989, l'Ontario a perçu des recettes totalisant 36,991 milliards de dollars. En 1993, le montant était de 41,799 milliards, ce qui représente une croissance annuelle de 3,1 p. 100. En 1994, on s'attend à une progression de 5,4 p. 100 des recettes.

Pendant cette période, la part de l'impôt sur le revenu des particuliers, par rapport au total des recettes, est demeurée à peu près stable, représentant un peu moins du tiers de celles-ci. La part de la taxe sur les ventes au détail a fléchi, passant de 20,7 p. 100 en 1990 à 17,5 p. 100 en 1993 tandis que, pendant la même période, celle de l'impôt sur le revenu des sociétés fondait, tombant de 11,5 à 6,5 p. 100. Par contre, les transferts fédéraux ont progressé de 13 à 18,1 p. 100 des recettes totales en dépit des compressions fédérales dans ce domaine. Des transferts de stabilisation fiscale de 300 millions de dollars figurent dans le budget ontarien de 1993.

      2. Tendances dans les dépenses

Les dépenses du gouvernement provincial ont connu une croissance très rapide. De 1989 à 1993, le total des dépenses a progressé au rythme de 8,7 p 100 pour atteindre 53,789 milliards; pour leur part, les dépenses de fonctionnement ont subi une hausse de 9,3 p. 100 par année. L'augmentation des dépenses en immobilisation a été plus modérée, étant de seulement 2,5 p. 100 par année. En 1990, le total des dépenses équivalait à 15,1 p. 100 du PIB de la province; la proportion est maintenant de 19,6 p. 100.

Ce sont les dépenses dans le domaine des services communautaires et sociaux qui ont augmenté le plus vite. Elles sont passées de 4,955 milliards de dollars en 1990 à 8,566 milliards en 1993, soit une croissance de 20 p. 100 par année. En 1994, les dépenses en services sociaux devraient encore augmenter de 4 p. 100. Cet élément, qui comptait pour 13 p. 100 des dépenses de fonctionnement en 1990, est maintenant de 17,8 p. 100.

Depuis 1990, les dépenses au titre des services de santé ont augmenté de 9 p. 100 par année et celles qui sont consacrées au logement de 31 p. 100. Ce dernier poste représente toutefois une part bien plus modeste du total des dépenses que les soins de santé ou les services sociaux.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

En 1990, le gouvernement ontarien a déclaré un excédent budgétaire de 90 millions de dollars. Deux ans plus tard, il accusait un déficit de 10,93 milliards. En 1993, ce déficit a augmenté d'environ un milliard, et le gouvernement prévoit le ramener à 9,159 milliards en 1994. Compte tenu de cette évolution, la dette de 1994, qui s'élèvera à 78,628 milliards de dollars, aura doublé depuis 1990.

Le coût du service de la dette publique, qui était de 3,817 milliards de dollars en 1990, a été de 5,350 milliards de dollars en 1993. En 1994, il s'élèvera à 7,150 milliards de dollars, soit 16,3 cents par dollar de recette; en1990, ce coût était de 9,3 cents par dollar perçu.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

En 1993, le gouvernement ontarien a reçu plus de 7,5 milliards de dollars en transferts pécuniaires du gouvernement fédéral. Ce montant devrait diminuer de près de 10 p. 100 en 1994. L'Ontario est l'une des trois provinces qui ne bénéficient pas du régime de péréquation et dont les transferts au titre du Régime d'assistance publique du Canada ont été plafonnés à une augmentation annuelle de 5 p. 100. Les dépenses de la province en assistance sociale ont progressé à un rythme beaucoup plus rapide.

Le gouvernement ontarien a reçu du gouvernement fédéral 300 millions de dollars pour stabilisation fiscale en 1993. Il considère ce versement comme provisoire et poursuit ses négociations avec les autorités fédérales à ce sujet.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le gouvernement ontarien a annoncé dans son budget des mesures pour réduire son déficit d'environ 8,7 milliards de dollars sur une année complète. La moitié du montant doit provenir de mesures de gestion des dépenses, deux milliards des dispositions du contrat social et 1,6 milliard d'une augmentation des impôts. Une meilleure gestion des actifs devrait se traduire par des économies de 900 millions de dollars.

Le contrat social visait à réduire de deux milliards la rémunération dans le secteur public, qui coûtait 43 milliards. Le gouvernement a annoncé au moment du budget qu'il négocierait avec les fonctionnaires pour éviter des licenciements qui pourraient toucher de 20 000 à 40 000 personnes. En dépit de ces mesures, il prévoyait éliminer 5 000 emplois par rapport aux chiffres de 1991-1992.

Diverses mesures font partie du plan de contrôle des dépenses prévoyant une diminution de quatre milliards de dollars des dépenses. Un peu plus d'un milliard doit provenir du secteur de la santé et 375 millions de celui de l'éducation; la rationalisation de l'appareil gouvernemental et le blocage des dépenses discrétionnaires se traduiront par des économies de 1,076 milliard de dollars. Quant au reste, il doit venir de compressions dans les paiements de transfert aux particuliers et aux municipalités (économies de 543 millions de dollars) et d'autres compressions dans les programmes.

L'autre élément, dans les mesures de réduction du déficit, est une augmentation des impôts qui devrait rapporter 1,63 milliard en 1993-1994 et 2,047 milliards lorsque les mesures seront bien en place. Près de 50 p. 100 de ce montant viendront d'augmentations de l'impôt sur le revenu : le taux d'imposition passe à 58 p. 100 de l'impôt fédéral de base et il y a augmentation de la surtaxe. La surtaxe de base passe de 14 à 20 p. 100 de l'impôt provincial supérieur à 5 500 $, et la surtaxe additionnelle passe de 6 à 10 p. 100 de l'impôt provincial, au-delà de 8 000 $.

Si le budget n'a pas relevé le taux de la taxe sur les ventes au détail, il a par contre considérablement élargi l'assiette de cet impôt en l'appliquant à des éléments comme les primes d'assurance (dans le cas de l'assurance-automobile, le taux a été ramené à 5 p. 100), les frais de stationnement, le gravier et la pierre, les pièces et la main-d'oeuvre fournies aux termes de garanties. Le budget a taxé également la bière et le vin fabriqués dans les établissements où on peut faire soi-même ces produits.

Enfin, le budget a modifié quelques dispositions de l'impôt sur le revenu des sociétés: application d'un impôt minimum et réduction de 80 à 50 p. 100 de la proportion des frais de représentation et de repas qui peuvent être déduits du revenu des sociétés aux fins du calcul de l'impôt à payer.

      6. Prévisions économiques

L'Ontario a été frappée très durement par la dernière récession, et le gouvernement ontarien prévoit une vigoureuse reprise de l'économie provinciale au cours des quelques années à venir. Pendant les quatre prochaines années, le produit intérieur brut et l'emploi devraient augmenter plus vite en Ontario que dans l'ensemble du Canada. En fait, le taux de croissance de l'Ontario devrait être supérieur à celui de tous les pays du G-7. Selon les prévisions, la production réelle progressera d'environ 3,5 p. 100 par année à compter de 1993, tandis que le niveau de l'emploi devrait augmenter de près de 2,5 p. 100 par année. En 1996, le taux de chômage devrait être inférieur à 9 p. 100 en Ontario.

Les prévisions du budget ontarien reposent sur l'hypothèse de taux d'inflation et d'intérêt qui resteraient peu élevés, ce qui rendra les coûts unitaires de main-d'oeuvre au Canada plus compétitifs par rapport à ceux des États-Unis et soutiendra la croissance dans le secteur des biens durables, notamment sur le marché résidentiel.

   B. Québec

Le budget québécois a été déposé à l'Assemblée nationale le 20 mai 1993.

      1. Tendances dans les recettes

En 1993, le total des recettes a été de 14 p. 100 supérieur à celui de 1990. Le gouvernement québécois a eu en 1993 des recettes de 35,477 milliards de dollars, dont 27,663 milliards provenant de ses propres sources et 7,814 milliards du gouvernement fédéral sous forme de transferts pécuniaires. La croissance des recettes a été modeste en 1992 et 1993, mais ce n'est qu'en 1993 que les recettes provenant des sources propres à la province ont légèrement fléchi, ce qui a été compensé par une hausse exceptionnellement importante des transferts pécuniaires du gouvernement fédéral, qui ont augmenté de plus de 15 p. 100.

Les recettes fiscales se sont comportées en 1993 comme on pouvait s'y attendre, vu la conjoncture. Le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés a diminué, tandis que les recettes de la taxe de vente sont restées stables. En fait, les recettes de l'impôt sur le revenu des sociétés sont toujours en deça de ce qu'elles étaient en 1990, tandis que celles tirées de l'impôt sur le revenu des particuliers sont de 11,5 p. 100 plus élevées.

Le produit des taxes sur le tabac poursuivent leur déclin par rapport à 1991, sans doute à cause de la contrebande.

      2. Tendances dans les dépenses

Les dépenses du gouvernement ont augmenté au total de 24 p. 100 entre 1990 et 1993. Les dépenses au titre des soins de santé et des services sociaux ont progressé à peu près au même rythme, mais celles qui sont consacrées à la formation et au soutien du revenu ont augmenté deux fois plus vite.

Les dépenses prévues au budget de 1993, soit 40,455 milliards de dollars, représentent 25,5 p. 100 du PIB de la province, légèrement en retrait sur le pourcentage record atteint en 1984, au sortir de la récession précédente. On prévoit pour 1994 un pourcentage de 24,8 p. 100 du PIB. En 1990, il n'était que de 22,3 p. 100.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

En 1993, le déficit du gouvernement québécois a atteint 4,978 milliards de dollars, soit trois fois plus qu'en 1990. Ce déficit, égal à 3,1 p. 100 du PIB de la province, a porté la dette directe de la province à un niveau record de 24,5 p. 100 du PIB. Les frais d'intérêt s'élèvent maintenant à 4,766 milliards, accaparant juste un peu moins de 10 p. 100 des recettes.

Le déficit a atteint le pourcentage record de 3,8 p. 100 du PIB provincial en 1985 à cause de la récession précédente.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

En 1993, le gouvernement du Québec a eu droit à une augmentation de 15 p. 100 des transferts pécuniaires fédéraux. Par conséquent, ces transferts ont représenté 22 p. 100 des rentrées du gouvernement provincial. Il s'agit d'un renversement provisoire d'une tendance à plus long terme qui verra passer la part fédérale de 28,9 p. 100 en 1984 à 15,8 p. 100 en 1998, selon les prévisions. Ces transferts pécuniaires devraient diminuer tous les ans après 1993.

Une nouvelle pomme de discorde entre la province et le gouvernement fédéral est la décision qu'a prise celui-ci d'utiliser, aux fins du calcul des transferts, les données démographiques préliminaires de Statistique Canada, avec rajustement pour couverture insuffisante. Le gouvernement québécois estime qu'il en résultera une réduction annuelle des transferts de 161 millions de dollars de 1995 à 1999.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le déficit du Québec en 1993 dépasse d'environ 1,2 milliard les prévisions du budget de 1992. Compte tenu de cet écart, le gouvernement a bloqué les traitements pour deux ans et réduit ses dépenses de fonctionnement de 6 p. 100. Les dépenses au titre des programmes seront désormais limitées à une croissance de 1 p. 100 par année. Les remboursements pour les médicaments et les services d'optométrie sont assujettis à un contrôle plus rigoureux, et le gouvernement entend porter les frais des études universitaires à un niveau qui se rapproche de la moyenne canadienne.

Pour ce qui est des recettes, le gouvernement a imposé une surtaxe de 5 p. 100 sur l'impôt sur le revenu supérieur à 5 000 $ et de 5 p. 100 de plus sur l'impôt supérieur à 10 000 $. L'indexation du régime fiscal a été suspendue pendant un an et le gouvernement a annoncé son intention d'imposer les prestations d'invalidité. Tout comme en Ontario, les déductions pour frais de représentation et de repas ont été ramenées à 50 p. 100 du montant dépensé.

Le gouvernement prévoit que, grâce à ces mesures et à la reprise de l'économie, il y aura un léger excédent budgétaire en 1998. Si tout se déroule comme prévu, le rapport entre la dette et le PIB devrait alors avoir été ramené à 21,8 p. 100 et avoir amorcé une nette tendance à la baisse.

      6. Prévisions économiques

Le budget prévoit une croissance économique à moyen terme s'établissant en moyenne à 3,4 p. 100 par année, ce qui créera 64 000 emplois par année et entraînera un relèvement du niveau de l'emploi de 2 p. 100 par année. Selon les prévisions, le taux de chômage restera élevé, se situant en moyenne à 11,8 p. 100 entre 1994 et 1998. Pour ce qui est de l'emploi, les prévisions québécoises sont bien moins optimistes que celles de l'Ontario.

LES PROVINCES DE L'OUEST

Sur les plans économique et financier, les quatre provinces de l'Ouest sont très différentes les unes des autres. L'Alberta et la Colombie-Britannique ne touchent pas de paiements de péréquation du gouvernement fédéral tandis que la Saskatchewan et le Manitoba comptent parmi les provinces «défavorisées». Des quatre, c'est le Manitoba qui a le plus souffert de la récession.

   A. Colombie-Britannique

Le budget de la Colombie-Britannique a été déposé à l'Assemblée législative le 30 mars 1993.

      1. Tendances dans les recettes

À la différence des autres gouvernements au Canada, le gouvernement de la Colombie-Britannique voit se maintenir une croissance relativement solide de ses recettes. En 1993, elles s'élevaient à 16,022 milliards de dollars, soit 8,6 p. 100 de plus que l'année précédente, et elles devraient augmenter de 8,9 p. 100 en 1994. Les recettes fiscales ont augmenté tous les ans. Le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés a accusé une certaine baisse en 1993, mais les autres taxes ont compensé le manque à gagner. Un impôt sur le capital beaucoup plus élevé qu'auparavant a rapporté directement 255 millions de dollars au Trésor de la province.

Depuis 1990, les transferts pécuniaires en provenance du gouvernement fédéral n'ont augmenté en moyenne que de 2,4 p. 100 par année, alors que la progression a été de 6,4 p. 100 pour l'ensemble des recettes et de 8 p. 100 pour les recettes fiscales. En 1994, les transferts pécuniaires du gouvernement fédéral devraient diminuer, et s'établir à 2,365 milliards de dollars, contre 2,497 milliards en 1993.

      2. Tendances dans les dépenses

Depuis 1990, le total des dépenses du gouvernement a augmenté au taux de 9,4 p. 100 par année, ce qui est d'environ 50 p. 100 supérieur à la croissance des recettes. Cette année, la croissance des dépenses a été ramenée à 5 p. 100; ces dépenses devraient toutefois connaître une hausse de près de 6 p. 100 l'an prochain. Cette croissance des dépenses est considérable, comparée à ce qui se passe chez les autres gouvernements au Canada.

L'augmentation la plus rapide a été observée dans les domaines des services sociaux, de l'éducation et de la protection du public. Dans le domaine de la santé, la croissance est inférieure à la moyenne. Du côté des services sociaux, la hausse est actuellement d'environ 17 p. 100. Depuis 1992, la progression des dépenses de fonctionnement générales est freinée, tendance qui devrait se maintenir.

En 1990, les dépenses totales du gouvernement étaient de 13,25 milliards de dollars, soit 17,2 p. 100 du PIB de la province. En 1993, elles étaient passées à 17, 972 milliards, soit 20,2 p. 100 du PIB.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Au 31 mars 1990, la dette nette directe du gouvernement était de 4,2 milliards de dollars. Au 31 mars 1993, elle était de 8,964 milliards, et elle devrait s'élever à 10,538 milliards l'an prochain.

Le déficit provincial, tant sur le compte courant que sur le compte de capital, s'est beaucoup alourdi. En 1992, il a atteint le niveau record de 2,355 milliards, ce qui est près de quatre fois plus que l'année précédente. Il a été ramené à 1,950 milliard en 1993 et il devrait diminuer encore l'an prochain, pour s'établir à 1,535 milliard.

L'accumulation rapide des dettes ne peut faire autrement que de pousser à la hausse les coûts du service de la dette. En 1992, ces coûts ont augmenté de 21 p. 100. La hausse a été de 27 p. 100 en 1993 et elle devrait être de 21 p. 100 en 1994. En 1990, le service de la dette n'exigeait que 3,7 p.100 du total des recettes totales. En 1994, elle devrait accaparer 5,7 p. 100 des recettes, ce qui est peu, par rapport à la situation des autres gouvernements, mais bien plus qu'il y a quelques années.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

Le gouvernement de la Colombie-Britannique ne dépend pas très lourdement des transferts, qui représentent de 14 à 16 p. 100 des recettes totales. Les diverses mesures du gouvernement fédéral qui touchent les transferts aux provinces -- notamment les dispositions plafonnant les transferts au titre du Régime d'assistance publique du Canada dans le cas des provinces qui ne reçoivent pas de paiements de péréquation -- ont une incidence sur la Colombie-Britannique comme sur les autres provinces. Selon une étude que la province a commandée, il aurait été possible, sans ces mesures fédérales, d'équilibrer à peu près le budget en 1993 et 1994.

Cette étude tient compte du fait qu'une partie des transferts au titre du Financement des programmes établis (FPE) se fait par points fiscaux. Mais environ 25 p. 100 de la charge supplémentaire attribuée aux mesures fédérales sont en fait des coûts indirects et non pas directs. L'étude repose sur l'hypothèse que la province ne réagit d'aucune manière aux modifications des transferts fédéraux. Ces réductions entraînent donc directement des déficits plus élevés ou des excédents moindres, ce qui se traduit par des frais d'intérêt accrus pour le gouvernement. Le gouvernement de la Colombie-Britannique se distingue sur ce plan, car il est le seul à tenir compte de ces frais dans son estimation de l'incidence des réductions des transferts fédéraux.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Par rapport à celle du reste du Canada, l'économie de la Colombie-Britannique a connu une bonne performance au cours des dernières années. La province n'a pas une dette trop lourde et son déficit, en pourcentage de son PIB, est le plus faible au Canada. Néanmoins, la forte croissance des dépenses a obligé le gouvernement à prendre des mesures pour freiner la hausse du déficit.

Du côté des recettes, le budget prévoit des mesures qui augmenteraient les recettes totales à des fins générales d'un peu plus de 800 millions de dollars par année. Les plus significatives ont été une augmentation de la taxe de vente provinciale, qui est passée de 6 à 7 p. 100, l'application de la taxe de vente à certains services (réparations de voitures, par ex.) et l'augmentation de la surtaxe provinciale. La surtaxe sur les revenus élevés sera maintenant de 50 p. 100 de l'impôt provincial à payer, au-delà de 9 000 $.

Le budget ne prévoit aucun contrôle des dépenses qui soit significatif. Il bloque les traitements des députés provinciaux et des cadres supérieurs, réduit quelques dépenses de fonctionnement, mais les économies sont peu de chose auprès des augmentations d'impôt. Le budget parle plutôt de mesures de compression adoptées antérieurement dans la bureaucratie et qui ont permis des économies d'environ 300 millions de dollars. Il demeure que l'augmentation des dépenses au titre des programmes est maintenant de l'ordre de 4 ou 5 p. 100, ce qui est plus élevé que dans les autres provinces, mais inférieur aux augmentations de plus de 10 p. 100 qu'on a connues il y a deux ou trois ans.

      6. Prévisions économiques

En 1992, l'économie de la Colombie-Britannique a connu une croissance de 2,4 p. 100, ce qui est supérieur de un point au taux de croissance de l'économie nationale. L'emploi a augmenté de 1,9 p. 100 dans la province, alors qu'il a diminué dans l'ensemble du Canada. La province demeure une destination intéressante pour les immigrants, et la conjoncture de certains secteurs, comme la hausse remarquable des prix du bois de construction, favorise la croissance économique de la province. En 1993, l'économie de la province devrait croître plus rapidement que celle de l'ensemble du pays. En 1994, les deux économies devraient avoir une croissance comparable, d'environ 3,4 p. 100. Le taux de chômage devrait rester stable, à 10,4 p. 100, malgré une croissance de l'emploi de 2,3 p. 100 en 1993 et en 1994.

   B. Saskatchewan

Le budget de la Saskatchewan a été déposé à l'Assemblée législative en mars 1993.

      1. Tendances dans les recettes

En 1992, les recettes totales du gouvernement de la Saskatchewan ont été de 4,052 milliards de dollars. Elles ont augmenté de 7,7 p. 100 en 1993 et elles devraient encore progresser de 6 p. 100 en 1994. C'est là une croissance plus forte que celle des autres provinces, et elle s'explique principalement par une hausse des recettes fiscales et des recettes tirées des droits et licences.

Les transferts fédéraux, qui représentent environ 27 p. 100 des recettes totales, sont essentiellement inchangés depuis 1992, tout comme les recettes provenant de l'exploitation des ressources non renouvelables, mais la province prévoit une augmentation du produit de l'impôt sur le revenu des particuliers, de l'impôt sur le capital des sociétés ainsi qu'une forte hausse de l'impôt sur le revenu des sociétés, qui, en 1994, devrait être deux fois plus élevé que deux ans auparavant.

      2. Tendances dans les dépenses

En 1994, le total des dépenses devrait être de 0,5 p. 100 plus élevé qu'en 1992, l'augmentation provenant presque uniquement du coût plus élevé du service de la dette. Les dépenses de programme et en capital diminuent, les premières de 2,5 p. 100 par année et les secondes de 20 p. 100 par année. En 1994, la province prévoit dépenser 4,928 milliards, dont 3,9 milliards pour les programmes, 180 millions en projets d'immobilisations et 848 millions pour le service de la dette.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Les coûts du service de la dette augmentent rapidement, passant de 523 millions de dollars en 1992 à 848 millions en 1994, ce qui constitue une augmentation annuelle moyenne de 27 p. 100. La cause en est claire. Les déficits budgétaires récents de 846 millions de dollars en 1992, de 592 millions en 1993 et, selon les prévisions, de 296 millions en 1994 ont considérablement alourdi la dette nette du gouvernement. Lorsqu'on les ajoute à la radiation de 1,453 milliard de dollars en actifs, en 1992, ces facteurs ont fait passer le déficit accumulé de 3,688 milliards au 31 mars 1992 à un montant qui, selon les prévisions, sera de 7,676 milliards au 31 mars 1995. Il aura donc doublé en trois ans.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

Il est signalé dans le budget que les modifications des transferts fédéraux ont occasionné des problèmes financiers à la province, mais il n'y a guère de détails. Le gouvernement avait estimé antérieurement que le blocage du financement des programmes établis et la modification du calcul des paiements de péréquation lui avaient coûté environ 200 millions de dollars en 1992. Il soutient maintenant que l'ensemble des mesures de délestage du gouvernement fédéral, notamment en ce qui concerne les programmes agricoles, coûte à la province 500 millions de dollars par année. Sans ces mesures, le budget aurait été équilibré.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le budget prévoit un plan qui permettra d'équilibrer le budget d'ici à 1997. Le budget de 1993 prévoit des compressions des dépenses de près de 800 millions de dollars, qui ne sont que partiellement compensées par des augmentations d'environ 250 millions dans d'autres domaines. Le gouvernement s'efforcera de faire ces compressions en rationalisant la prestation des services gouvernementaux, en réduisant le financement des hôpitaux, des écoles et universités, et des municipalités de 2,8, 4 et 8 p. 100 respectivement en 1995. Ces mesures s'ajoutent aux compressions annoncées dans le budget de l'an dernier.

Du côté des recettes, le gouvernement a porté la taxe de vente à 9 p. 100 et il en a élargi le champ d'application. Les taxes sur l'essence ont augmenté de 2 cents le litre, et la taxe sur la vente des ressources imposées aux grandes sociétés est passée de 3 à 3,6 p. 100. Ces mesures devraient rapporter 176,5 millions de dollars de plus en 1994.

Pour équilibrer le budget d'ici à 1997, le gouvernement compte sur un blocage à peu près total des dépenses de fonctionnement et une augmentation de 4 p. 100 par année du total des recettes.

      6. Prévisions économiques

De 1993 à 1996, le gouvernement prévoit une croissance économique de 2,3 p. 100 par année en moyenne, ce qui est inférieur aux prévisions pour l'ensemble de l'économie canadienne. La croissance de l'emploi devrait être inférieure à 1 p. 100 par année.

   C. Alberta

Le budget de l'Alberta a été déposé à l'Assemblée législative le 6 mai 1993 et il a été mis à jour le 8 septembre 1993. Les renseignements qui suivent viennent de cette nouvelle version.

      1. Tendances dans les recettes

En 1990, les recettes totalisaient 9,72 milliards de dollars. Elles s'élevaient à 11,63 milliards en 1992, en hausse de 9,4 p. 100. Par contre, elles ont fléchi en 1993 pour s'établir à 11,47 milliards de dollars (15,3 p. 100 du PIB de la province) et elles devraient encore diminuer très légèrement en 1994.

De 1992 à 1993, le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers a baissé d'environ 9 p. 100, tandis que celui de l'impôt sur le revenu des sociétés a été en recul d'environ 13 p. 100. Les revenus tirés des investissements du Fonds du patrimoine, qui représentaient 12 p. 100 de toutes les recettes en 1992, ont diminué de 28 p. 100. Les transferts pécuniaires du gouvernement fédéral ont augmenté en 1993, mais ils devraient baisser légèrement en 1994. L'impôt sur le revenu des particuliers est la source de recettes la plus importante du gouvernement: 2,794 milliards de dollars, soit 24 p. 100 de toutes les recettes.

En 1993, les recettes provenant des ressources non renouvelables ont accusé une hausse de 8 p. 100, et elles représentaient cette année-là 19 p. 100 de toutes les recettes. Pour 1994, les prévisions du gouvernement sont égales à la moyenne des recettes réelles des cinq années précédentes, ce qui équivaut à une augmentation de 6 p. 100.

      2. Tendances dans les dépenses

En 1990, le total des dépenses s'élevait à 12,057 milliards de dollars. Il a atteint 13,402 milliards en 1992, ce qui donne une croissance de 5,4 p. 100. Les dépenses ont de nouveau augmenté de 6,3 p. 100 en 1993, atteignant 19 p. 100 du PIB de la province. Les dépenses au titre des services aux familles et des services sociaux ont accusé une hausse de 138 millions de dollars (8,6 p. 100) et le nouveau programme pour l'emploi a coûté 200 millions. Les dépenses consacrées à l'éducation ont également progressé plus vite que la moyenne (6,6 p. 100), celles de la santé restant en deça (moins de 5 p. 100).

En 1994, les dépenses totales devraient diminuer de près de 6 p. 100 et les dépenses au titre des programmes de 7,7 p. 100.

En 1993, les dépenses de la catégorie du Trésor ont subi une énorme hausse ponctuelle. Le total s'est établi à 873 millions de dollars au lieu du montant initialement prévu, 255 millions. Deux raisons expliquent cette augmentation: le gouvernement a modifié ses conventions comptables pour donner suite aux recommandations du vérificateur général, et il a rajusté à la baisse la valeur comptable d'un certain nombre d'actifs. La modification la plus importante, parmi ces dernières, concerne l'usine de valorisation du pétrole de Lloydminster, pour laquelle le gouvernement a soustrait 217,3 millions à son investissement.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Au 31 mars 1993, la dette nette du gouvernement albertain était de 11,824 milliards de dollars, montant bien supérieur aux chiffres antérieurs en raison des modifications comptables apportées par le gouvernement. Désormais, la dette nette tient compte notamment des dettes non provisionnées au titre des retraites s'élevant à 4,5 milliards de dollars et qui n'étaient pas prises en considération jusqu'ici. Toute comparaison avec les années antérieures serait donc trompeuse.

Le déficit consolidé de 1993 est de 3,409 milliards de dollars (4,5 p. 100 du PIB de la province); il devrait diminuer d'environ un milliard l'an prochain, laissant place à un excédent de 220 millions de dollars en 1997. En 1991, le déficit s'élevait à environ deux milliards de dollars. Le service de la dette a coûté 1,219 milliard en 1993, soit moins de 11 p. 100 de l'ensemble des recettes.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

Le budget de 1993 est muet sur la question. L'Alberta est soumise aux mêmes compressions que l'Ontario et la Colombie-Britannique.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le gouvernement albertain a fait adopter cette année le Deficit Elimination Act, qui prévoit un calendrier de quatre ans pour parvenir à l'équilibre budgétaire et rend obligatoire l'équilibre budgétaire tous les ans après 1996.

Ces objectifs doivent être atteints au moyen d'une série de compressions des dépenses, équivalant à une réduction de 20 p. 100 des dépenses de programme d'ici à 1997. Ces compressions visent tous les aspects des programmes du gouvernement. Le budget ne prévoit aucune augmentation d'impôt, mais les cotisations à l'assurance-maladie ont augmenté de 11 p. 100.

      6. Prévisions économiques

En 1992, l'économie albertaine a connu une croissance de 2,2 p. 100, alors que le taux, à l'échelle nationale, n'était que de 0,7 p. 100. En fait, elle a toujours fait mieux que l'économie nationale depuis 1990. Le gouvernement fait reposer ses prévisions sur une croissance économique de 3 p. 100 par année jusqu'en 1997. À court terme, on prévoit que le taux de chômage sera de 1,5 p. 100 inférieur à la moyenne nationale.

   D. Manitoba

Le budget manitobain de 1993 a été déposé à l'Assemblée législative le 6 avril 1993.

      1. Tendances dans les recettes

Le total des recettes a diminué d'environ 1 p. 100 en 1993, s'établissant à 4,895 milliard de dollars, à cause d'un recul des recettes fiscales. Alors que le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers a été à la hausse, les recettes de la taxe de vente ont diminué. Les transferts fédéraux n'ont augmenté que légèrement, et ils devraient diminuer en 1994. L'ensemble des recettes en 1994, représentant 19,2 p. 100 du PIB de la province, seront, d'après les prévisions, en recul sur les résultats de 1992, en chiffres absolus et de façon relative. Elles représentaient alors 21,1 p. 100 du PIB.

De 1990 à 1994, les recettes ont progressé au taux moyen de 1,3 p.100 par année.

      2. Tendances dans les dépenses

Depuis 1990, les dépenses au titre des programmes augmentent au rythme annuel de 2,8 p. 100, soit deux fois plus vite que les recettes. Ces dépenses devraient diminuer de près de 2 p. 100 en 1994 pour s'établir à 4,809 milliards de dollars. Les dépenses en assistance sociale, avec une croissance de 4,5 p.100, sont la seule catégorie importante de dépenses où il y aura augmentation.

Le total des dépenses en 1994, soit 5,359 milliards de dollars, devrait représenter 21 p. 100 du PIB de la province, contre 22,7 p. 100 l'année précédente.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Au 31 mars 1993, la dette générale nette de la province s'élevait à 6,2 milliards de dollars, soit près de 17 p. 100 de plus que l'année précédente. Elle était égale à 26 p. 100 du PIB de la province. La dette nette totale, si l'on tient compte de la dette de la société hydroélectrique de la province et d'autres organismes, était de 12,778 milliards, ce qui représente 53,5 p. 100 du PIB.

Le Manitoba a constamment accusé des déficits depuis 1990. Celui de 1993 était de 530 millions de dollars, de 64 p. 100 plus élevé que celui de l'année précédente. Depuis 1990, la progression du déficit a été de 55 p. 100 par année.

Le gouvernement déclare que le déficit de 1993 est de 330 millions de dollars, ce qui équivaut à 1,4 p. 100 du PIB au lieu des 2,25 p. 100 qu'on obtient si on considère que le déficit est de 530 millions.

Tout le produit des loteries est versé dans un compte distinct, à la différence de ce qui se passe dans la plupart des autres provinces, et le gouvernement a créé un fonds de stabilisation dans lequel il a déposé 200 millions de dollars en 1989. Les retraits de ces comptes sont traités comme des recettes et les dépôts au compte de stabilisation, comme des dépenses. Ces transactions, globalement, sont sans effet sur la dette, mais elles peuvent modifier le moment où des déficits sont déclarés. Ainsi, un excédent de 59 millions de dollars, en 1989, a été transformé en un déficit de 141 millions, puisque la province a versé 200 millions dans le compte de stabilisation. De la même manière, un retrait de 200 millions, en 1993, a donné l'impression que le déficit de cette année-là était inférieur de 4 millions à celui de l'année précédente alors que, en fait, il lui était de 206 millions supérieur.

À l'exception de 1993, le gouvernement du Manitoba a généralement enregistré un excédent de fonctionnement. La position déficitaire du gouvernement, dans les années 90, est en fait meilleure que celle de la deuxième moitié des années 80. Par conséquent, les coûts du service de la dette n'ont pas beaucoup augmenté depuis 1990, ne progressant que de 2,3 p. 100 par année.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

Le budget de 1993 ne dit rien du coût que représentent les réductions des transferts fédéraux. La province n'a reçu du gouvernement fédéral aucune aide au titre de la stabilisation.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le gouvernement a pris des mesures tant du côté des recettes que de celui des dépenses, réduisant le déficit dans chaque cas d'environ 100 millions de dollars. En 1994, les dépenses au titre des programmes seront réduites de 2 p. 100 (100 millions de dollars); une nouvelle coupe de 1 p. 100 suivra en 1995 et les dépenses seront pratiquement bloquées par la suite. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement fusionnera certains organismes, réduira certains frais de fonctionnement et réduira l'enveloppe salariale du secteur public de 3,8 p. 100 en abaissant certains traitements (députés provinciaux, juges) et en réduisant le nombre d'heures de travail dans la fonction publique.

En ce qui concerne les recettes, l'assiette de la taxe de vente est élargie et la province a conclu avec le gouvernement fédéral un accord pour faire percevoir sa taxe de vente à la frontière. En outre, les crédits pour impôts fonciers, dont profitent surtout les personnes âgées, sont réduits d'environ 53 millions de dollars.

Ces mesures visent à rétablir l'équilibre budgétaire d'ici à 1997. Pour que l'objectif soit atteint, les recettes doivent augmenter de 2,7 p. 100 par année, tandis que les dépenses de programme doivent rester bloquées à leur niveau de 1995, ce qui représenterait une différence de 3 p. 100 en moins par rapport à 1993.

      6. Prévisions économiques

Le budget prévoit une croissance économique légèrement inférieure à celle de l'ensemble de l'économie canadienne en 1993 et 1992. Le chômage devrait tomber à 8,6 p. 100 en 1994, contre 9,6 p. 100 en 1992.

LES PROVINCES DE L'ATLANTIQUE

Les quatre provinces de l'Atlantique forment la région la plus pauvre du Canada. C'est là que les taux de chômage sont les plus élevés et que les revenus par habitant sont les plus faibles. Ces provinces dépendent beaucoup des transferts fédéraux.

La situation financière de ces provinces varie énormément. En 1992-1993, l'Île-du-Prince-Édouard a enregistré une dette nette de plus de 350 millions de dollars, soit près de 3 000 $ par habitant et moins de 17 p. 100 du PIB. Cela est bien inférieur à la moyenne des provinces de l'Atlantique. La même année, la dette nette de Terre-Neuve a dépassé le cap des 50 p. 100 du PIB de la province.

   A. Île-du-Prince-Édouard

Le budget de l'Île-du-Prince-Édouard a été déposé le 17 juin 1993. Bien que la situation du gouvernement, du point de vue du déficit, soit l'une des meilleures au Canada, la petite taille de la province et la faible diversification de l'économie ont contribué à lui donner l'une des pires cotes de crédit au Canada. En outre, le gouvernement de la province est très important par rapport à l'ensemble de l'économie de la province. En conséquence, le gouvernement se méfie beaucoup de toute augmentation significative de son déficit et de sa dette.

      1. Tendances dans les recettes

Selon les prévisions, le total des recettes en 1992-1993 sera de 723 millions de dollars, soit 5,7 p. 100 de moins que ce qui avait été prévu dans le budget de 1992. Cette année, le budget prévoit des recettes de 767 millions, soit à peu près la même chose que ce qui était prévu l'an dernier. En 1989-1990, les recettes avaient totalisé 660 millions.

Les recettes fiscales de l'an dernier représentaient 18,2 p. 100 du PIB de la province, et le total des recettes, 34 p. 100 du PIB. L'an dernier, il y a eu dans le budget surestimation des recettes fiscales et des transferts directs du gouvernement fédéral; l'écart a été de 8 p. 100 dans le cas des recettes fiscales et de 3,5 p. 100 dans le cas des transferts, ce qui est en grande partie attribuable à un écart de 15 p. 100 dans les paiements de péréquation, qui représentaient 56 p. 100 du total des transferts pécuniaires du gouvernement fédéral.

En 1993-1994, l'Île-du-Prince-Édouard s'attend à une nouvelle baisse des transferts pécuniaires du gouvernement fédéral, mais à une augmentation substantielle des recettes fiscales et des recettes provinciales provenant d'autres sources. L'augmentation de 13,8 p. 100 des recettes fiscales de 1993-1994 exigerait un important revirement de l'économie locale.

      2. Tendances dans les dépenses

Le total des dépenses -- compte courant et compte de capital net -- s'élevait à 689 millions de dollars en 1990. Il est passé à 806 millions en 1992, ce qui représente une hausse de 5,4 p. 100 par année. En 1992, les dépenses équivalaient à 38 p. 100 du PIB de la province, ce qui est très élevé par rapport à la situation des autres provinces. En 1993, le total des dépenses devrait être à la baisse, à 793 millions de dollars.

      3. Dette, déficit et frais d'intérêt

Au 31 mars 1993, la dette nette du gouvernement était de 352 millions, soit 199 millions de plus que seulement trois ans auparavant. Le déficit de 83,4 millions, au cours du dernier exercice, a lourdement contribué à cette hausse. Le déficit cumulatif, à chacune des deux dernières années, a été de 50 p. 100 plus élevé que dans les six années précédentes. La tendance est certes inquiétante pour le gouvernement. Les résultats récents sont également bien supérieurs aux prévisions de 1990.

Le budget prévoit néanmoins des mesures pour réduire le déficit pendant l'exercice financier en cours et rétablir l'équilibre sous peu. De 83,4 millions en 1993 (4 p. 100 du PIB de la province), le déficit devrait être ramené à 25,4 p. 100 en 1994. Un léger excédent est prévu en 1996.

Cette forte croissance de la dette nette de la province a entraîné une augmentation substantielle du coût du service de la dette: 9 p. 100 par année au cours des deux dernières années. Ces frais accaparent près de 17 p. 100 des recettes, contre 13 p. 100 en 1990.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

Les transferts fédéraux représentent environ 45 p. 100 de toutes les recettes du gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard. Les mesures d'austérité des autorités fédérales ont donc eu de lourdes conséquences sur les finances de la province. Le plafonnement du taux de croissance des paiements de péréquation (limité au taux de croissance de l'économie canadienne) a coûté environ 28 millions de dollars à la province en 1991 et 1992. En outre, des révisions dans l'estimation de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés et la modification du calcul de la population par Statistique Canada ont entraîné des réductions dans les transferts fédéraux. Le gouvernement provincial estime que tous ces facteurs ont provoqué une baisse de 52 millions de dollars dans les transferts fédéraux en 1993.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

De 1988 à 1992, le taux de chômage, à l'Île-du-Prince-Édouard, a progressé régulièrement, passant de 13 à 17,7 p. 100; pendant cette période, le déficit s'est considérablement alourdi. En 1991, tandis que d'autres provinces commençaient à mettre en place des mesures pour limiter les dépenses, le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard accroissait les impôts pour régler ses problèmes budgétaires. À cette époque, on a envisagé une pleine harmonisation de la taxe de vente provinciale et de la TPS et il y a eu plusieurs hausses de l'impôt sur le revenu.

Cette fois-ci, l'accent est mis sur la compression des dépenses, avant tout au moyen d'une plus grande efficacité dans la prestation des services du gouvernement. Pour un dollar d'augmentation des recettes, on prévoit des coupes de deux dollars dans les dépenses. Les taux de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés et de la taxe de vente sont restés inchangés. L'assiette de la taxe de vente, qui n'a jamais été harmonisée avec celle de la TPS, est élargie, les taxes sur les cigarettes et l'essence relevées et les crédits pour impôts fonciers abaissés.

      6. Prévisions économiques

La performance de l'économie provinciale a été supérieure à la moyenne nationale en 1992, et le taux de chômage, au début de 1993, était de 16,5 p. 100, contre 17,7 p. 100 un an auparavant. En 1993, la croissance devrait ralentir quelque peu et tirer de l'arrière par rapport à la moyenne nationale.

   B. Nouvelle-Écosse

Le budget de la Nouvelle-Écosse a été déposé à l'Assemblée législative le 30 septembre 1993.

      1. Tendances dans les recettes

Au cours de l'exercice 1990, les recettes totales du gouvernement néo-écossais ont été de 3,775 milliards de dollars. L'an dernier, elles se sont élevées à 3,95 milliards, et elles devraient atteindre 4,032 milliards en 1994 (21,8 p. 100 du PIB de la province), soit une augmentation de seulement 2,1 p. 100. De 1991 à 1993, le total des recettes est resté à peu près inchangé en raison d'une diminution des recettes fiscales et des transferts pécuniaires du gouvernement fédéral. Ainsi, les paiements de péréquation ont fléchi de 16 p. 100 sur deux ans.

      2. Tendances dans les dépenses

Le total des dépenses du gouvernement, compte courant et compte de capital confondus, a progressé modérément ces dernières années. Si la croissance a été de 5 p. 100 l'an dernier, la tendance à plus long terme, depuis 1990, est une croissance de moins de 4 p. 100, et il est prévu que, en 1994, elle sera de moins de 3,1 p. 100, le total s'établissant à 4,97 milliards de dollars (27 p.100 du PIB de la province).

La répartition des dépenses montre clairement une concentration sur les domaines régis par les facteurs économiques et démographiques, au détriment des activités discrétionnaires. Ainsi, les dépenses consacrées à la culture et aux loisirs, à la mise en valeur des ressources, aux transports et aux communications ont diminué, en chiffres absolus, depuis 1990. Les dépenses ont été particulièrement importantes dans les domaines de la santé, de l'éducation et des services sociaux, ce qui est vrai pour la plupart des gouvernements provinciaux.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Au 31 mars 1993, la dette nette de la province s'élevait à 6,68 milliards de dollars, contre 3,947 milliards en 1989. Elle a augmenté de 26,5 p. 100 par rapport à l'an dernier et de 45 p. 100 sur deux ans. En 1993, elle représentait environ 38 p. 100 du PIB de la province. On prévoit pour 1994 une dette nette de 7,529 milliards, soit 41 p. 100 du PIB.

Le budget signale que le manque à gagner, dans les recettes ordinaires qui servent à financer les dépenses ordinaires, a été de 471 millions de dollars en 1993, contre 322 millions l'année précédente, un écart de 47 p. 100. Ce manque à gagner n'était que de 61,7 millions en 1990. Mais ces chiffres ne correspondent pas au déficit réel, car ils ne traduisent pas l'augmentation de la dette nette du gouvernement d'une année sur l'autre. Une mesure plus fidèle consiste à utiliser les besoins budgétaires nets dont on soustrait les contributions nettes au fonds d'amortissement. Le résultat est un déficit de 770 millions de dollars pour 1993, contre 558 millions l'année précédente.

Cette augmentation rapide de l'endettement net a alourdi les coûts du service de la dette, qui ont accusé une hausse de 11 p. 100 depuis 1990. En 1994, les frais d'intérêt accaparaient 21 p. 100 du total des dépenses, contre 16 p. 100 en 1990.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

En 1994, les transferts pécuniaires du gouvernement fédéral devraient être de 3 p. 100 moins élevés qu'en 1991. Au cours des cinq dernières années, ces transferts ont représenté environ 40 p. 100 de toutes les recettes du gouvernement. En 1994, le pourcentage devrait être d'environ 38,4 p. 100.

Les paiements de péréquation du gouvernement fédéral ont beaucoup diminué ces dernières années, tandis que les transferts pécuniaires au titre du financement des programmes établis n'ont progressé que modestement. Le seul domaine de forte croissance a été celui des transferts pour le Régime d'assistance publique du Canada, ce qui n'est pas bon signe.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le budget de 1994 a mis en place un programme quadriennal visant à maîtriser les finances de la province. La surtaxe sur les revenus élevés a été augmenté pour un an et comprend maintenant deux paliers: 20 p. 100 sur l'impôt provincial entre 7 000 $ et 10 499 $, et 30 p. 100 sur tout montant supérieur à ce seuil. Les taxes sur l'essence ont été accrues, le taux de la taxe de vente provinciale, appelée taxe des services de santé, est passé de 10 à 11 p. 100 et l'assiette de la taxe a été quelque peu élargie.

Pour ce qui est des dépenses, le gouvernement a comprimé à la fois les dépenses de fonctionnement et les dépenses en capital par rapport à l'année précédente. En outre, il met en place un programme quadriennal de contrôle des dépenses qui se traduira par des économies de 300 millions dans les frais de fonctionnement et de 60 millions des dépenses en capital sur la durée du programme.

      6. Prévisions économiques

Le budget prévoit, à court terme, une croissance anémique en Nouvelle-Écosse. L'économie s'est repliée en 1992, alors que l'économie nationale enregistrait une légère croissance. En 1993, la croissance devrait être de moitié inférieure à la moyenne nationale. Aucune hausse de l'emploi n'aura lieu avant 1994 et, même alors, elle sera modeste. Le taux de croissance de l'économie devrait être d'environ 2,5 p. 100. Le chômage restera donc élevé, à quelque 14,5 p. 100.

   C. Nouveau-Brunswick

Le budget du Nouveau-Brunswick a été déposé à l'Assemblée législative le 31 mars 1993.

      1. Tendances dans les recettes

Les recettes budgétaires du Nouveau-Brunswick ont totalisé 3,583 milliards de dollars en 1990, 3,69 milliards en 1992 et 3,9 milliards en 1993. En 1994, elles devraient être légèrement en recul sur 1993.

Dans le budget de l'an dernier, le produit de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés avait été passablement surestimé. L'écart, pour le seul impôt sur le revenu des particuliers, a été d'une centaine de millions de dollars. Heureusement pour le gouvernement, il avait sous-estimé les transferts fédéraux d'un montant presque équivalent, si bien que le total des recettes a été légèrement supérieur aux prévisions. Pour 1994, le gouvernement prévoit une hausse marquée des recettes de l'impôt sur le revenu et une légère baisse des transferts fédéraux.

      2. Tendances dans les dépenses

En 1991, le Nouveau-Brunswick a eu des dépenses de 3,773 milliards de dollars pour le compte courant, et ses dépenses nettes en immobilisations ont été de 296 millions. En 1993, ces deux types de dépenses ont totalisé 4,452 milliards de dollars, soit une augmentation de 9,4 p. 100. En 1994, on prévoit une diminution de 4,5 p. 100.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Au 31 mars 1992, la dette nette du gouvernement provincial s'élevait à 31 p. 100 du PIB provincial, en hausse par rapport à 27,6 p. 100 sur deux ans auparavant. Le déficit s'est élevé à 494 millions de dollars en 1993, en léger recul sur les 516 millions de 1992.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

On estime que la limitation du financement des programmes établis a coûté environ 180 millions de dollars au Nouveau-Brunswick en 1993. Bien que le plafonnement de la péréquation ne représente aucune contrainte pour l'instant, il a occasionné des pertes à la province par le passé et ce pourrait être encore le cas plus tard.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a fait adopter cette année une loi prévoyant un équilibre entre les dépenses courantes et les recettes courantes de la province. Cette loi vise à obliger le gouvernement à équilibrer ses comptes courants en quatre ans. Le budget prévoit que, en 1995, le compte courant sera excédentaire.

Le budget prévoit également, pour lutter contre le déficit, des mesures qui portent aussi bien sur les recettes que sur les dépenses. En ce qui concerne les recettes, le taux de l'impôt sur le revenu des particuliers passe de 60 à 62 p. 100 de l'impôt fédéral de base en 1993 et à 64 p. 100 en 1994. L'assiette de la taxe de vente a été élargie et le gouvernement provincial a pris des dispositions avec le gouvernement du Canada pour percevoir à la frontière la taxe provinciale sur le tabac et l'alcool. Ces mesures devraient ajouter 75 millions de dollars aux recettes fiscales.

Quant aux compressions des dépenses, un moratoire sur les nouveaux projets d'immobilisations a été annoncé et le budget net des immobilisations a été limité à 275 millions de dollars en 1995 et à 250 millions en 1996. Les dépenses en immobilisations ont été de 293 millions en 1992 et de 360 millions en 1993 et on estime qu'elles seront de 307 millions en 1994.

En outre, le régime provincial des médicaments d'ordonnance est réduit, les subventions sont amputées de 2,8 millions et 23 organismes sont regroupés en seulement six, tandis que 23 autres sont éliminés.

      6. Prévisions économiques

Jusqu'à maintenant, dans les années 90, l'économie du Nouveau-Brunswick a eu une meilleure performance que celle du reste de la région de l'Atlantique et cette tendance devrait se maintenir. En 1992, le niveau de l'emploi a augmenté dans la province, tandis qu'il a reculé dans l'ensemble du pays; de plus, alors que le taux de chômage augmentait d'environ 10 p. 100 dans le reste du pays, il restait stable dans cette province.

En 1993, le taux de chômage devrait être de 11,5 p. 100 et la croissance économique d'environ 4,7 p. 100.

   D. Terre-Neuve et Labrador

Le budget terre-neuvien de 1993 a été déposé à l'Assemblée législative le 18 mars 1993.

      1. Tendances dans les recettes

En 1990, les recettes totales du gouvernement de Terre-Neuve se sont élevées à 2,931 milliards de dollars. D'ici à 1994, elles devraient être de 3,182 milliards de dollars, ce qui représenterait une augmentation annuelle de 2,1 p. 100. Les recettes fiscales de 1994 devraient être de 5 p. 100 supérieures à celles de 1993.

La taxe sur les ventes au détail rapporte davantage au gouvernement de Terre-Neuve que l'impôt sur le revenu des particuliers. L'impôt sur le revenu des sociétés vient au quatrième rang, derrière le produit des taxes sur l'essence.

      2. Tendances dans les dépenses

En 1990, les dépenses totales nettes du gouvernement provincial se sont élevées à 2,748 milliards de dollars. En 1993, elles ont atteint 2,946 milliards, ce qui représente une augmentation de 2,3 p. 100. En 1994, elles devraient croître de 3,3 p. 100 pour s'établir à 3,043 milliards.

      3. Dette, déficits et frais d'intérêt

Le total de la dette consolidée de la province, moins la dette de la société de services publics, était de 3,709 milliards en 1989. En 1993, elle a atteint 4,685 milliards. Le déficit de la province diminue régulièrement depuis 1991, année où il était de 347 millions. En 1993, il n'était plus que de 265 millions et il devrait être ramené à 223 millions en 1994.

Les frais de la dette s'élevaient à 492,5 millions en 1993, soit 16 p. 100 du total des dépenses. Il s'agit d'une augmentation de 10 millions par rapport à 1992.

      4. Mesures fédérales limitant les transferts

En 1987, les contributions pécuniaires du gouvernement fédéral ont représenté 48,5 p. 100 des recettes du gouvernement provincial. La proportion a été ramenée depuis à 43 p. 100. La province doit rembourser 70 millions de paiements en trop versés en 1992 et 1993, résultat de rajustements dans l'estimation de la population.

      5. Mesures de lutte contre le déficit

Le budget terre-neuvien de 1993 ne prévoit aucune hausse d'impôt et limite la croissance future des dépenses à 1,4 p. 100, croissance presque uniquement attribuable à la progression des coûts du service de la dette. Le déficit du compte courant (excluant les dépenses en immobilisations) devrait diminuer de 30 millions pour s'établir à 51 millions en 1994.

Le programme de compression des dépenses du gouvernement repose sur une réduction de la rémunération totale de la fonction publique provinciale.

      6. Prévisions économiques

En 1992, le taux de chômage s'élevait à un peu plus de 20 p. 100 dans la province, l'emploi ayant diminué de 4,6 p. 100 par rapport à l'année précédente. On prévoit tout de même une certaine hausse du taux de chômage, attribuable en grande partie aux difficultés dans le secteur de la pêche. Le budget ne propose aucune prévision à long ou à moyen termes. Le taux de croissance prévu pour 1993 est de 1,2 p. 100, en raison essentiellement de l'activité découlant du projet Hibernia.

RÉSUMÉ DES TENDANCES

   A. Généralités

Tous les gouvernements au Canada éprouvent des difficultés financières depuis 1990. Bien qu'on ait fait grand cas de la révision à la hausse du déficit fédéral, ce sont les déficits des provinces qui sont les plus inquiétants.

Le total des déficits provinciaux de l'exercice 1991 totalisaient moins de 9,5 milliards de dollars, soit environ 31 p. 100 du déficit fédéral, 30,6 milliards. En 1993, le déficit fédéral était passé à 40,5 milliards, mais ceux des provinces avaient augmenté encore plus vite, pour atteindre 25 milliards; ils équivalent maintenant à 62 p. 100 du déficit fédéral. En 1994, les déficits des provinces devraient diminuer pendant que celui du gouvernement fédéral restera à la hausse.

En raison de ces tendances, la dette nette de toutes les provinces représentera 40,5 p. 100 de la dette fédérale en 1994, alors qu'elle en représentait 33 p. 100 en 1991. Le total des dettes fédérale et provinciales égalera bientôt la valeur d'une année complète de la production de l'économie canadienne.

Les graphiques 1 et 2 illustrent les perspectives de la dette et du déficit des gouvernements fédéral et provinciaux, d'après leurs plus récents états financiers. Ces chiffres sont présentés comme proportion du produit intérieur brut correspondant et ils ont été compilés de manière uniforme par l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières.

La performance financière passée du gouvernement fédéral, évaluée en fonction de l'accumulation de la dette nette, est pire que celle de toutes les provinces. La dette nette approche maintenant des 70 p. 100 du PIB. Il y a moins de 20 ans, elle était d'environ 17 p. 100. La dette nette de Terre-Neuve est d'un peu plus de 50 p. 100 du PIB provincial et celle de la Saskatchewan approche des 45 p. 100.

Le graphique 2, qui porte sur les derniers chiffres des déficits, montre que, là encore, c'est le gouvernement fédéral qui s'en tire le moins bien, même s'il a pris plusieurs mesures pour réduire les transferts aux provinces. En 1993, l'Alberta, l'Ontario et la Nouvelle-Écosse ont eu des déficits supérieurs à 4 p. 100 de leurs PIB respectifs. Les meilleures performances ont été celles de la Colombie-Britannique et du Manitoba.

Tous les gouvernements provinciaux prévoient réduire la taille relative et absolue de leurs déficits en 1994. Le gouvernement fédéral, d'autre part, prévoit que le déficit de 1994 sera de près de cinq milliards de plus qu'en 1993, sa taille relative passant de 5,9 à 6,3 p. 100 du PIB.

Le graphique 3 illustre les mesures de compression du déficit mises en place par les gouvernements au Canada dans leurs derniers plans financiers. Comme nous l'avons dit plus haut, le déficit fédéral devrait continuer de croître tandis que, exception faite de la Nouvelle-Écosse, toutes les provinces prévoient réduire leur déficit d'au moins 0,5 p. 100 du PIB provincial. Si l'on tient compte du fait que le déficit de la Nouvelle-Écosse en 1993 est l'un des pires au Canada et que la dette de la province vient au troisième rang par ordre d'importance, cette réaction est plutôt timide. Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard, par contre, a pris de très vigoureuses mesures à court terme pour combattre son déficit, dont la taille relative sera réduite d'un montant égal à 2,8 p. 100 du PIB. Il s'agit d'une diminution de 70 p. 100 en un an.

La Saskatchewan et l'Alberta prévoient soustraire à leurs déficits un montant qui avoisine 1,5 p. 100 de leur PIB, mais les mesures de la Saskatchewan auront un effet à court terme plus considérable pour rétablir l'équilibre financier. De manière analogue, le Manitoba, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick prennent tous des dispositions pour amputer leurs déficits d'un montant égal à environ 1 p. 100 du PIB de la province. En 1994, toutefois, le Manitoba sera dans une meilleure situation financière que les deux autres provinces.

De toutes les provinces, c'est la Colombie-Britannique qui a eu la meilleure performance financière en 1993. En 1994, c'est vraisemblablement l'Île-du-Prince-Édouard qui lui ravira cette position, la Saskatchewan et l'Alberta devançant également la Colombie-Britannique.

   B. Modifications des paiements de péréquation

En 1994, le gouvernement fédéral versera aux sept provinces qui reçoivent des paiements de péréquation 962 millions de dollars de moins que ce qu'elles prévoyaient au départ. Cette réduction s'explique principalement par la performance médiocre que l'économie ontarienne continue d'afficher; il y a donc moins de «nivellement» à faire entre les capacités fiscales des provinces riches et pauvres.

La plupart des provinces avaient prévu les montants les plus élevés. Les chiffres révisés à la baisse se traduiront donc parfois par une chute brutale des recettes (voir tableau 1).

En Saskatchewan, par exemple, la diminution est du tiers sur le montant initialement prévu. À Terre-Neuve et au Québec, l'écart est de 2 et de 3 p. 100 respectivement. Les différences d'une province à l'autre sont importantes parce que la performance économique varie et que les données démographiques sont révisées. Quel que soit le cas, plusieurs provinces auront plus de mal à atteindre leurs objectifs relatifs aux déficits à cause de ces révisions.

 

Tableau 1

Révision des paiements de péréquation en 1993-1994

Terre-Neuve 915 18 1,93
Nouvelle-Écosse 880 169 16,11
Î.P.-É. 176 23 11,56
Nouveau-Brunswick 888 86 17,32
Québec 3633 110 2,94
Mani 844 231 21,49
Saskatchewan 458 225 32,94

 

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