PRB 99-11F

 

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES :
LE RÔLE DES RÉSERVES

 

Rédaction :
Corinne McDonald
Division des affaires politiques et sociales
Le 29 novembre 1999


TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

HISTORIQUE

SITUATION ACTUELLE

   A. Rôle
      1. Le renfort
      2. Les assises de mobilisation
      3. Les liens avec la collectivité

   B. Stratégies de mobilisation
      1. La constitution de la force
      2. L'amélioration de la force
      3. L'expansion de la force
      4. La mobilisation nationale

   C. Structure
      1. La Première réserve
         a. La Réserve navale
         b. La Milice (Réserve de la Force terrestre ou de l’Armée)
         c. La Réserve aérienne
         d. La Réserve des communications
      2. La Réserve supplémentaire
         a. La Réserve supplémentaire disponible (RSD)
         b. La Réserve supplémentaire d’attente (RSA)
      3. Le Cadre des instructeurs de cadets
      4. Les Canadian Rangers

   D. Questions opérationnelles
      1. Le recrutement
      2. La formation et l’équipement
      3. Le déploiement
      4. Le financement
      5. La rémunération et les avantages sociaux
      6. Le régime de promotion
      7. L’attrition
      8. Les coûts
      9. Les relations avec la Force régulière

RÉSUMÉ DES CHOIX POSSIBLES ET COMMENTAIRES

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE


LES FORCES ARMÉES CANADIENNES :
LE RÔLE DES RÉSERVES

INTRODUCTION

Partout dans le monde, les forces armées sont structurées en fonction de stratégies de défense visant à contrer les pressions extérieures et intérieures influant sur la sécurité nationale d’un pays(1). Ces pressions fluctuent selon le contexte de sécurité internationale, les nouveaux moyens de faire la guerre et les valeurs sociétales en évolution. Par conséquent, la structure des forces armées évolue aussi avec les années.

Au fil des ans, les gouvernements successifs du Canada ont tenté de définir la structure et le rôle du secteur militaire. Ils ont notamment cherché à établir un équilibre efficace et efficient entre les éléments de la « Régulière » et de la « Réserve » à une époque marquée par de profondes réductions des dépenses en matière de défense et un contexte stratégique en perpétuelle évolution. Ces dernières années, c’est là un thème qui revient toujours dans la politique de défense du Canada.

Dans le présent document, nous traçons un bref historique des réserves et examinons leur situation actuelle dans les Forces canadiennes. Nous fournissons des renseignements fondamentaux sur le rôle, les stratégies de mobilisation et les structures des réserves, et en particulier de la Milice et nous donnons un aperçu de plusieurs problèmes opérationnels liés à leur administration. Enfin, nous énumérons un certain nombre de choix possibles pour la restructuration des Forces canadiennes et, plus particulièrement, nous précisons le rôle des réserves dans la mise en œuvre de la politique de défense du Canada.

HISTORIQUE(2)

Les forces de réserve du Canada sont synonymes d’une tradition de service militaire à temps partiel dont les origines remontent avant la Confédération. Basé initialement sur le principe de la levée en masse(3), le service dans la milice est obligatoire pour tous les hommes de 16 à 60 ans qui sont aptes, du début des années 1600 jusqu’en 1855, année où une grande partie de l’armée britannique se retire du Canada. Par la suite, le projet de loi sur la milice de 1855 constitue officiellement un petit corps de volontaires de la milice active dont l’effectif maximal doit être composé de 5 000 membres de la cavalerie, de l’artillerie et de l’infanterie. En 1866, cependant, en raison des tensions entre les Américains et les Britanniques à la suite de la Guerre de Sécession aux États-Unis, l’effectif de la milice active est porté à 33 000 hommes devant servir de force de dissuasion.

Après la Confédération, la première Loi fédérale sur la milice (1868) est adoptée. Bien qu’elle demeure fondée sur le principe d’une levée en masse faisant appel à des civils non entraînés, elle met davantage l’accent sur un groupe de volontaires ? les miliciens. Le Canada étant un nouveau pays, il doit assumer les coûts de sa défense, et les dépenses nécessaires pour équiper, gérer et entraîner la milice sont beaucoup moins grandes que celles qu’exige l’établissement d’une armée permanente comparable. En adoptant la Loi sur la milice de 1883, le Canada ajoute des unités à la Milice « active », c’est-à-dire la petite force permanente dont la première tâche consiste à entraîner des régiments de volontaires organisés (la milice « sédentaire ») en cas de mobilisation. Pendant la guerre des Boers en Afrique du Sud (1899-1902), la Grande-Bretagne assume les coûts liés à l’enrôlement des 8 372 hommes de la milice canadienne qui se portent volontaires pour combattre et qui constituent effectivement la première force expéditionnaire du Canada.

En 1914, le Canada compte deux plans de mobilisation distincts. L’un vise la défense du territoire et prévoit la mobilisation complète de la milice avec des éléments de renfort civils. L’autre est axé sur l’établissement d’une force expéditionnaire aux fins de l’envoi de soldats et de renforts outre-mer. Ces plans sont toutefois abandonnés au moment du déclenchement de la guerre en Europe. Bon nombre des meilleurs soldats de la Milice se portent volontaires pour aller servir outre-mer au début de la guerre. En 1917, le nombre de pertes force le recours à la conscription.

Après 1919, avec la fin de la Première Guerre mondiale, « l’épuisement d’après-guerre et les contraintes budgétaires ont, une fois de plus, poussé le Canada à se tourner vers une milice, mal ou peu formée, de 50 000 officiers et hommes. Une minuscule force permanente (4 500 en 1939) fournissait l’instruction à cette milice »(4). Les responsables de l’élaboration des politiques, qui se préoccupent avant tout de la démobilisation, ne s’intéressent presque pas à la planification de la mobilisation dans la période qui suit immédiatement la guerre. De plus, en raison des effets de la Grande Crise, les questions sociales et économiques prennent le pas sur la défense. On ne peut dégager de l’argent pour former ou équiper les forces armées. En dépit de ces réalités, le Canada met sur pied la Réserve des volontaires de la Marine royale canadienne, l’Aviation auxiliaire et la Réserve aérienne, et les effectifs augmentent par rapport aux niveaux d’avant-guerre, passant à 10 000 dans la Force régulière et à 120 000 dans la Milice.

Le Canada continue d’être largement tributaire de la mobilisation des réserves et des civils pour satisfaire à ses besoins de temps de guerre, la planification de défense étant principalement axée sur la préparation d’une force expéditionnaire. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les effectifs des Forces canadiennes passent de 7 945 membres de la Force régulière en 1939 à un total de 838 119 militaires au milieu de 1945. Bien que la majorité de ces derniers soient des civils sans formation militaire, cet accroissement n’aurait pas été possible sans l’apport des réservistes.

Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada est l’un des membres fondateurs de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et il conclut bon nombre d’alliances militaires, comme celle du Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD), qui exige l’établissement d’une force régulière permanente assez nombreuse au sein des trois services, ainsi que de réserves. Devant la perspective d’un nouveau conflit important en Europe, les Canadiens qui participent à la guerre de Corée sont principalement des membres du personnel de la Réserve, les membres de la Force régulière étant retenus au pays en vue d’une affectation possible en territoire européen. Pour la première fois dans l’histoire de la défense canadienne, « les membres de la Régulière prennent le pas sur les réservistes, bien que le rôle de la Milice soit encore de mobiliser une force plus nombreuse pour les fins d’un conflit prolongé ou à grande échelle »(5).

Le début de la guerre froide (ou de la « longue période de paix ») s’accompagne de la menace d’une guerre nucléaire. Dans les pays de l’OTAN, on met de plus en plus l’accent sur la nécessité de compter sur une « force prête au combat » ou sur des « forces en devenir » que l’on perçoit essentiellement comme étant des soldats professionnels à temps plein de la Force régulière immédiatement disponibles pour la guerre. Une force de réserve à temps partiel est incapable d’aboutir à des niveaux de préparation aussi élevés. On tient également pour acquis que toute guerre nucléaire sera de brève durée, ce qui ne laissera pas assez de temps pour mobiliser, former et équiper une force de réserve prête au combat. Dans ces circonstances, les planificateurs ne voient pas dans les réserves une force « disponible » et, par conséquent, en 1956, ils leur confient (principalement à la Milice) une nouvelle mission principale, soit celle de veiller à la « survie nationale » ou à la défense civile en cas de guerre nucléaire. Au milieu des années 60, la négligence et les réductions mènent à la démoralisation des forces de réserve; celles-ci n’ont aucun but bien précis et elles possèdent très peu de ressources utiles.

Un examen ministériel mené en 1969 laisse entendre qu’il ne serait pas durable à long terme de mettre uniquement l’accent sur les « forces en devenir » en raison des coûts élevés rattachés au maintien de forces armées permanentes et élargies qui, en tout état de cause, ne sont pas assez nombreuses pour satisfaire aux besoins en cas de guerre non nucléaire. Au début des années 70, dans le Livre blanc intitulé La Défense dans les années 70, le gouvernement remet en question le rôle des réserves, dont les forces totales sont réduites à moins de 21 000 membres. Selon le Livre blanc, leur rôle consistera à soutenir et à renforcer (en cas d’urgence) la Force régulière. Le gouvernement affirme que les réserves continueront d’être employées dans le cadre des plans internes de sécurité générale.

Comme les forces d’autres pays de l’OTAN, les Forces canadiennes essaient pour la première fois d’adopter le concept de la « force totale » à la fin des années 70. C’est là le plus important changement dans la politique de défense canadienne depuis le processus d’unification de la fin des années 60. Au début des années 80, cependant, la théorie n’a pas encore été mise en pratique(6). Les structures des Forces régulière et de réserve et les effectifs des réserves demeurent bien en deçà des niveaux autorisés. Dans le Livre blanc de 1987 sur la politique de défense intitulé Défis et engagements, le gouvernement réaffirme le concept de la Force totale, qui prévoit l’intégration des Forces régulière et de réserve. Il préconise également, entre autres choses, la revitalisation de la Force de réserve et attribue de nouvelles tâches et des rôles élargis aux éléments des Réserves navale, aérienne et terrestre. La fin de la guerre froide en 1989 ainsi que la crise de la dette au Canada intensifient les pressions en vue d’une réduction des dépenses en matière de défense. Cette situation, à laquelle vient s’ajouter le fait que le Canada a pris trop d’engagements en matière de maintien de la paix à l’échelle internationale, se traduit par une utilisation accrue des réservistes dans les opérations.

En dépit de la participation accrue des réservistes aux opérations, on brosse, dans une étude détaillée menée par le bureau du vérificateur général en 1992, un sombre tableau de l’état de préparation, de l’équipement et de la formation de la Force de réserve ainsi que du manque de planification des activités de celle-ci par le ministère de la Défense nationale. Le vérificateur général recommande un examen des rôles et de la rentabilité de la Réserve et souligne que les politiques en matière d’avancement, les normes d’instruction et les niveaux de préparation sont inadéquats. Le ministère de la Défense nationale reconnaît l’existence de graves problèmes, mais soutient que des réformes sont déjà en cours. Toutefois, dans son suivi de 1994 (paragraphes 2.192 à 2.219), le vérificateur général signale que le ministère a fait très peu pour corriger ces problèmes, si ce n’est offrir de la formation.

De plus, en 1994, un Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes se livre à un examen en profondeur de la politique de défense du Canada, y compris la question de la Réserve. Dans le chapitre IV de son rapport, le Comité demande « un important remaniement, rationalisation et réaffectation de la Réserve »(7).   Par la suite, dans le Livre blanc sur la Défense de 1994 le gouvernement réaffirme l’engagement du Canada envers le concept de la Force totale, mais précise que la nouvelle situation stratégique et les demandes auxquelles doivent faire face la Réserve et la Force régulière en matière de capacité d’intervention immédiate exigent une modification des plans de mobilisation. Par conséquent, il énonce un nouveau plan de mobilisation nationale comprenant quatre seuils. Il annonce aussi une réduction des effectifs de la Force régulière et de la Première réserve et recommande un examen en profondeur de tous les éléments des réserves primaire et supplémentaire en vue de rationaliser les activités de ces deux organismes.

Le 5 avril 1995, le ministre de la Défense nationale met sur pied une Commission spéciale sur la restructuration des réserves (CSRR) en réaction à deux impératifs fondamentaux :

Premièrement, le Livre blanc sur la Défense de 1987 recommandait la création d’une Force totale au Canada […]. Cette procédure d’intégration n’est toujours pas complétée en 1995. Deuxièmement, le Livre blanc sur la Défense de 1994 exigeait une réduction des coûts et du nombre de réservistes tout en augmentant leur efficacité, reflétant ainsi le rapport du vérificateur général de 1992. De plus, le budget de 1995 imposait de nouvelles contraintes aux Forces canadiennes(8).

La Commission spéciale, composée du très honorable Brian Dickson (président), du lieutenant-général (à la retraite) Charles H. Belzile et du professeur Jack Granatstein, tient des audiences publiques partout au Canada avant de présenter le 3 octobre 1995 au ministre de la Défense nationale un rapport comprenant 41 recommandations. Une des principales recommandations est de modifier le plan de mobilisation énoncé dans le Livre blanc sur la Défense de 1994 pour mieux définir le rôle que les unités de réserve auraient à jouer à diverses étapes. La majorité des autres recommandations principales ont trait à la milice, étant donné que la Commission spéciale a relevé peu de problèmes liés aux Réserves navale, aérienne et des communications.

À la fin de 1995, le rapport de la Commission spéciale est examiné par le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants (CPDNAC) de la Chambre des communes et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Le CPDNAC présente son rapport au ministre de la Défense nationale en janvier 1996 et demande que la majorité des recommandations de la CSRR soient mises en œuvre, après certaines modifications. Le comité sénatorial dépose son rapport le 14 décembre 1995. Comme le comité de la Chambre, il accepte la majorité des recommandations de la CSRR, après quelques modifications. Des critiques des travaux de la Commission spéciale ne tardent pas à souligner que le rapport de cette dernière ne renferme aucune estimation des coûts ou des économies prévues; ainsi, le CPDNAC recommande notamment que l’on effectue une analyse des coûts et des autres répercussions de la mise en œuvre des recommandations.

À l’occasion d’une réunion du CPDNAC tenue le 7 mai 1996, le ministre de la Défense nationale (MDN) de l’époque, M. David Collenette, annonce que le ministère de la Défense nationale accepte de mettre en œuvre 39 des 41 recommandations de la CSRR. Une recommandation concernant l’adoption d’une législation sur la protection de l’emploi (numéro 41) est rejetée parce que l’on estime que sa mise en œuvre serait difficile. L’autre recommandation rejetée (numéro 17) demande que tous les militaires soient enrôlés dans la Réserve supplémentaire disponible au moment de leur libération honorable de la Force régulière. Cette mesure est rejetée comme étant contraire à la tradition canadienne. Selon le ministre, certaines des autres recommandations, et en particulier celles qui ont trait à la Milice, exigent une étude ou des modifications supplémentaires. En octobre 1996, le ministre annonce que la Milice sera restructurée en vue de mettre en œuvre le concept de la Force totale et de corriger des lacunes chroniques sur les plans de l’administration et du commandement.

Le 14 octobre 1997, le ministre de la Défense nationale, M. Art Eggleton, met sur pied un « Comité de surveillance des changements au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes (CSCMDNFC) ». Le CSCMDNFC sert de « fenêtre » permettant au public canadien de suivre l’évolution du ministère dans la mise en œuvre des recommandations acceptées, qui venant de commissions, commissions d’enquête et comités divers, y compris de la Commission spéciale sur la restructuration des réserves. Le comité a un mandat de deux ans au cours duquel il devra produire quatre rapports semestriels à l’intention du ministre qui les rendra ensuite publics. Le premier rapport – essentiellement un plan de travail – est produit en mars 1998. Selon le rapport d’étape de novembre 1998 du Comité de surveillance, « la mise en œuvre de recommandations relativement aux Réserves a été lente. Il reste encore énormément de travail à accomplir, par exemple, en ce qui a trait à la mise en œuvre du concept de Force totale, et pour ce qui est de la définition du rôle des Réserves dans le nouveau plan de mobilisation en quatre étapes »(9). Selon le plus récent examen effectué par le Comité, en dépit des affirmations du ministère selon lesquelles il a donné suite aux recommandations de corriger les problèmes au sein des réserves, bon nombre des plans de changement ne satisfont pas aux exigences initiales, n’ont pas encore été mis pleinement en œuvre ou ont été reportés(10). Un bilan final est censé être soumis à l’automne de 1999.

SITUATION ACTUELLE

Contrairement à ce qui se passe dans de nombreux autres pays, l’enrôlement dans la Réserve canadienne est strictement volontaire. Les réservistes sont des citoyens qui consacrent une partie de leur temps libre au service militaire et qui jouent un rôle crucial en tissant des liens entre les FC et la société canadienne. Ils possèdent des compétences et des connaissances que la Force régulière ne peut maintenir de façon rentable, ce qui permet aux FC de faire une utilisation plus efficace de ses ressources humaines. Les liens qui unissent les deux éléments sont renforcés par les anciens membres de la Régulière qui continuent de servir dans la Réserve(11).

   A. Rôle

Dans le cadre du concept de Force totale, les Forces régulière et de réserve appuient les tâches et les activités courantes des Forces canadiennes en temps de paix. Selon le Livre blanc de 1994 sur la Défense, le premier rôle de la Force de réserve consiste à renforcer et à soutenir les forces déployées. Dans certains cas, la Force de réserve se livre aussi à des tâches qui ne sont pas accomplies par la Force régulière. Selon les constatations de la Commission spéciale sur la restructuration des réserves, la Première réserve doit actuellement remplir trois rôles distincts : « […] servir de renfort dans les deux premières étapes de la mobilisation […] servir de base pour la mobilisation d’envergure générale [et] […] servir de lien entre les Forces canadiennes et la communauté »(12).

      1. Le renfort

La Force de réserve est chargée de servir de renfort à la Force régulière dans les deux premières étapes de la mobilisation (voir ci-après). C’est donc dire que des réservistes prennent part, souvent de façon individuelle, à des missions de maintien de la paix et participent à des opérations en cas de catastrophe naturelle et de crise nationale (la crise d’Oka en 1990, par exemple). En aidant la Force régulière à s’acquitter de ses engagements opérationnels, les réservistes reçoivent une formation qu’ils ne peuvent obtenir au sein de leur propre unité et sont en mesure de parfaire les compétences qu’exigent les étapes ultérieures de la mobilisation.

      2. Les assises de la mobilisation

Le Canada fait sienne la définition du terme mobilisation donnée par l’OTAN :

Action de se préparer à la guerre ou à tout autre état d’urgence en rassemblant et en organisant les ressources nationales; procédés par lesquels les forces armées, en totalité ou en partie, sont mises sur pied de guerre ou préparées en vue de toute autre situation critique sur le plan national. Ils comprennent le rassemblement et l’organisation des personnels, ravitaillements et matériels en vue de leur emploi opérationnel(13).

Lorsque la mobilisation des forces armées exige plus que le simple renfort de la Force régulière, la Force de réserve sert de premier bassin de personnel formé.

      3. Les liens avec la communauté

Le dernier et, selon certains, le plus important des rôles de la Force de réserve est de servir de lien entre les Forces canadiennes (FC) et la communauté. Les réservistes sont devenus des ambassadeurs de fait des FC auprès du public en raison des divers endroits où ils sont dispersés. Ils constituent une force favorisant l’unité nationale et rappellent aux collectivités locales le travail accompli et les services fournis par le ministère de la Défense nationale. Grâce à la Force de réserve, les FC peuvent participer au soutien des collectivités locales et obtenir leur collaboration en retour, ainsi que maintenir une présence partout au pays.

   B. Stratégies de mobilisation

Dans son article sur la mobilisation militaire au Canada, Peter Dawson dit ce qui suit :

Peu d’États possèdent les ressources voulues pour maintenir en temps de paix des forces armées permanentes d’une taille suffisante pour appuyer une intervention militaire prolongée ou à grande échelle. Utiliser des normes de temps de guerre pour déterminer les besoins de temps de paix n’aurait aucun sens sur les plans militaire et économique. Les niveaux de temps de paix sont fondés sur certains engagements et sur la nécessité d’avoir un « cadre d’instruction » (pour accroissement ultérieur), de déployer des forces rapidement en cas d’urgence et de maintenir la valeur dissuasive des forces. Les niveaux de temps de guerre sont fonction de la majorité des critères énumérés ci-dessus ainsi que de la nécessité d’intensifier les engagements en vigueur, de remplacer les pertes et d’accroître les effectifs afin de satisfaire à de nouveaux engagements(14).

Cette démarche se reflète dans le Livre blanc sur la Défense de 1994, dans lequel le gouvernement canadien annonce son intention d’adopter un nouveau schéma de planification de la mobilisation comprenant quatre seuils (voir les détails ci-après) : la constitution de la force, l’amélioration de la force, l’expansion de la force et la mobilisation nationale. Ce schéma prévoit « une transition progressive et méthodique des opérations courantes en temps de paix aux opérations d’intervention pouvant nécessiter divers degrés de mobilisation, y compris la mobilisation générale »(15).

La Commission spéciale sur la restructuration des réserves approuve la révision des plans de mobilisation du MDN en fonction de ce nouveau schéma, mais elle fait observer qu’il y aurait lieu d’adapter les structures et les missions de la Force de réserve à ces quatre seuils. De plus, le processus devrait accorder la priorité au rôle fondamental de la Force de réserve, qui est de fournir la base de mobilisation en cas de guerre(16).

En novembre 1998, le Comité de surveillance de la mise en œuvre du changement au ministère a mentionné ne pas être convaincu que l’on ait accordé une priorité suffisante à la planification de la mobilisation. Bien que le ministre ait ordonné au ministère de la Défense nationale d’élaborer et de mettre en œuvre un plan de mobilisation nationale « aussitôt que possible », plusieurs dates cibles fixées pour la réalisation de cette tâche n’ont pas été respectées(17). Par exemple, le ministre avait décidé que les étapes 3 et 4 du plan de mobilisation devaient être modifiées immédiatement pour attribuer des rôles plus clairs à la Force de réserve, et en particulier à la Milice, pour ce qui est du recrutement, de l’instruction et de l’apport d’unités constituées nécessaires en cas de conflit important. Les plans concernant la révision de la troisième étape étaient censés être prêts en avril-mai 1998 et ceux de la quatrième étape, en juin 1998. En novembre 1998, aucun de ces engagements n’avait été respecté. Le 18 mars 1999, le vice-chef d’état-major de la Défense a diffusé une « directive d’exécution » dans laquelle il semble « interrompre l’élaboration de son plan de mobilisation nationale » et exprime plutôt « de vagues intentions d’orienter la mobilisation »(18).

Le Comité de surveillance souligne dans son rapport d’étape de 1998 que « l’absence d’un plan crée de l’incertitude au sein des Réserves. Ces dernières sont, en vertu de la politique gouvernementale, le fondement de la mobilisation nationale, soit l’étape 4. Cependant, dans la pratique, le Ministère a accordé de l’attention presque exclusivement à leur rôle d’augmentation […] mais ne fait nullement mention du rôle premier de la Milice : le fondement de la mobilisation nationale »(19). Cette imprécision quant au rôle des réserves sur le plan de la mobilisation nationale perdure et, de plus, leur rôle précis dans les autres étapes de la mobilisation continue d’être mal défini. Devant l’attitude du ministère qui soutient avec insistance qu’il ne peut planifier les structures des Forces tant que les situations opérationnelles et d’autres facteurs ne seront pas connus, le Comité de surveillance lui propose « de prévoir des « situations » éventuelles et d’établir les méthodes, les processus et, par-dessus tout, la structure des Forces qui permettront de réagir adéquatement »(20). Il y aurait donc un rôle clair pour les réserves à toutes les étapes.

Les descriptions des quatre étapes de la mobilisation sont tirées principalement du Livre blanc sur la Défense de 1994(21).

      1. La constitution de la force

La première étape de la réaction à une crise ou à une situation d’urgence a pour but la constitution de la force, qui comprend l’ensemble des mesures nécessaires pour préparer les éléments des Forces canadiennes à entreprendre des nouvelles tâches opérationnelles et à en assurer le soutien. Ces fonctions seront assumées dans les limites des ressources actuelles des Forces canadiennes et comprendront la formation et la préparation des réservistes volontaires, souvent de façon individuelle, devant renforcer la Force régulière.

      2. L'amélioration de la force

À la deuxième étape de la mobilisation, soit l’amélioration de la force, on accroît les capacités opérationnelles des forces existantes en y affectant d’autres ressources. On y passerait sans modifier de façon permanente ni la structure ni les rôles des Forces canadiennes, encore que la création d’unités temporaires ou d’éléments spécialisés pourrait se révéler nécessaire. C’est en gros le seuil de mobilisation atteint pendant la guerre du Golfe, en 1990, et dans le cadre des opérations actuelles de maintien de la paix. De nouveau, on s’attend à ce que la Force de réserve fournisse du personnel, avant tout de façon individuelle, pour renforcer les unités de la Force régulière.

      3. L'expansion de la force

Le troisième seuil, celui de l’expansion de la force, a pour but d’augmenter l’effectif des Forces canadiennes, voire même certains éléments du ministère de la Défense nationale, en cas de crise ou d’urgence majeure. À ce stade, il faudrait vraisemblablement apporter des changements permanents aux rôles, aux structures et aux missions des Forces canadiennes, si ce n’est former de nouvelles unités, améliorer les installations et acquérir du matériel supplémentaire. C’est à ce niveau de mobilisation que tous les éléments des Forces canadiennes et du ministère de la Défense nationale ont subi des changements de structure et de rôle, entre 1950 et 1952, quand le Canada a mis des forces armées à la disposition des forces multinationales des Nations Unies, en Corée, et de l’OTAN, qui venait de se former en Europe. Au troisième seuil, on procéderait à l’activation sélective des réservistes, de façon individuelle ou par unité, en faisant un appel en vertu d’un décret en conseil.

      4. La mobilisation nationale

Enfin, même si une guerre mondiale est fort peu probable pour l’instant, il est prudent de disposer de plans qui « ne coûtent rien », en vue d’une mobilisation nationale totale. L’effet de ce quatrième seuil pourrait se faire sentir dans toute la société canadienne, y compris au sein des réserves et de la société civile sans formation militaire; on n’y passerait que sur proclamation d’un état de guerre par le gouverneur en conseil, en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence. Dans le rapport de la CSRR, on dit qu’« il est étonnant qu’il n’existe pas de plan détaillé pour une mobilisation nationale en quatre étapes »(22).

   C. Structure

Tel qu’il est précisé dans la Loi sur la Défense nationale, la Force de réserve est un des trois éléments des Forces canadiennes(23). La Force de réserve est composée d’officiers et de militaires du rang enrôlés pour le service militaire autre que le service continu et à plein temps, lorsqu’ils ne sont pas en activité de service ? c’est-à-dire qu’en règle générale ils sont à temps partiel. La Force de réserve comprend les quatre sous-éléments suivants :

  • la Première réserve;
  • la Réserve supplémentaire;
  • le Cadre des instructeurs de cadets;
  • les Canadian Rangers.

Les descriptions qui suivent ont été établies à partir de divers documents récents du ministère de la Défense nationale.

      1. La Première réserve

Comme l’a souligné le ministre dans son discours devant le Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants en novembre 1996, le niveau de planification de la Première réserve est de 30 000 membres. À l’heure actuelle, la Première réserve comprend environ 31 600 officiers et militaires du rang qui se sont engagés à accomplir les fonctions militaires ou l’entraînement qui peuvent être exigés d’eux.

Il existe trois classes de service s’offrant aux militaires de la Première réserve :

  • Classe « A » : Cette classe comprend de brèves périodes de service de réserve comptant au maximum 12 jours consécutifs, y compris les fins de semaine et les jours fériés. Les tâches sont normalement exécutées au sein de l’unité d’appartenance du réserviste. Celui-ci reçoit une indemnité journalière venant du budget de la Réserve.
  • Classe « B » : Cette classe s’applique aux militaires servant pendant 13 jours consécutifs et plus et s’acquittant normalement de leurs fonctions ailleurs qu’au sein de leur unité de réserve, à l’appui des activités des Forces régulières et des Forces de réserve. Une classe « B » à long terme permet aux réservistes de servir pendant des périodes de six mois à un an et plus avec leurs homologues de la Force régulière. Le réserviste de classe « B » est rémunéré au taux du service de classe « A » et à même le budget de cette dernière. Le service de classe « B » portant l’annotation « A » comprend le service dans des postes établis à l’appui des activités de la Première réserve ou des Cadets. L’annotation « A » signifie que les postes doivent être comblés par des réservistes et que ces derniers sont autorisés à accomplir du service continu 365 jours par année. Ces militaires touchent la même solde que les réservistes de classe « B ».
  • Classe « C » : Cette classe s’applique au service de réserve à temps plein dans un poste de la Force régulière, normalement pour une période supérieure à un an, avec droit à tous les avantages consentis à la Force régulière. Il n’y a pas de limite à la période pendant laquelle le militaire peut servir dans la classe « C » pourvu que le poste soit libre, que les fonds soient disponibles et que l’on puisse justifier de combler le poste. Le critère déterminant pour le service de la classe « C » est la non-disponibilité d’un militaire de la Force régulière pour combler le poste. Les réservistes de classe « C » touchent le même taux de solde que les militaires de la Force régulière, et leur solde vient du budget de cette dernière.

La Première réserve comprend les quatre principaux éléments suivants :

  • la Réserve navale;
  • la Milice (la Réserve de la Force terrestre ou de l’Armée);
  • la Réserve aérienne;
  • la Réserve des communications.

Elle comprend aussi environ 250 postes affectés au cadre de la Première réserve au Quartier général de la Défense nationale (plutôt qu’à une unité de réserve).

         a. La Réserve navale

L’effectif de planification de la Réserve navale se situe entre 4 000 et 5 000 membres, le niveau actuel étant d’environ 4 000.

La mission de la Réserve navale consiste à fournir au Commandement maritime du personnel formé pour la dotation d’éléments de combat et de soutien. De plus, les réservistes de la Marine ont comme principale responsabilité de fournir des équipages entraînés pour les 12 navires de défense côtière (NDCM) chargés des tâches suivantes : missions de surveillance, surveillance des pêches, répression du trafic des drogues, surveillance de l’environnement, appréhension des immigrants illégaux et opérations de recherche et de sauvetage. En outre, la Réserve navale est chargée de la défense des ports, du contrôle du trafic maritime (UNCM), des mesures anti-mines ainsi que du soutien administratif et logistique ou du « renforcement de la flotte ».

La Réserve navale comprend 24 divisions réparties partout au Canada et relevant du Chef d’état-major des Forces maritimes. Les divisions, parfois qualifiées de « frégates de béton » (ce sont des unités statiques portant le nom de navires et se trouvant dans des bâtiments), permettent aux Forces canadiennes de maintenir une présence navale partout au Canada et, partant, de mousser les relations avec la collectivité et le public.

Selon la Commission spéciale, la Réserve navale est en « bonne condition, grâce à l’assignation de tâches précises, particulièrement la dotation en personnel des navires de défense côtière maritime. Ce rôle a eu un impact positif sur le morale [sic] et la formation, et, en général, les réservistes de la Marine sont convaincus qu’on a besoin d’eux et qu’ils peuvent rencontrer [sic] leurs engagements »(24).

         b. La Milice (la Réserve de la Force terrestre ou de l’Armée)

La structure de la Milice, ordonnée selon le concept des secteurs géographiques en vigueur au Commandement de la Force terrestre, comprend présentement dix groupes-brigade du Canada (ce nombre sera ramené à neuf en novembre 1999)(25), commandés par un officier du grade de colonel et relevant du Chef d’état-major de l’Armée de terre. Ce changement entraîne l’élimination de l’ancienne structure des « districts ». Au nombre des autres changements, on maintient les quatre quartiers généraux de secteur existants, qui seront réorganisés et qui prendront désormais l’appellation de quartiers généraux divisionnaires.

Il existe présentement 133 unités de réserve établies dans 115 endroits au pays. Aux fins de la restructuration, la viabilité de chacune des unités de la Milice sera évaluée en fonction des critères suivants : besoins opérationnels; capacité de recruter et de conserver un effectif réel; capacité de mener l’entraînement individuel et collectif; soutien de la Force régulière; rentabilité, performance historique et Honneur de bataille; et liens avec la communauté(26). Il y aura mise en œuvre de la Dotation totale de l’Armée (DTA), qui comprend une structure commune de grades pour la Milice et les unités de la Force régulière et il y aura révision des nouvelles unités de l’Escadre de soutien en cas d’urgence (ESCU) de façon que les unités superflues ou excédentaires puissent être considérées pour des rôles dans l’ESCU. Cette restructuration se déroulera selon des plans élaborés par le Commandement de la Force terrestre et vise à créer une structure d’armée plus cohésive comprenant moins d’infrastructure et de frais généraux.

L’effectif actuel est d’environ 24 000 réservistes, y compris les membres de l’effectif en non-activité et ceux qui sont en voie de faire l’objet d’une libération, ce qui fait de la Milice le plus vaste élément de la Première réserve. Pour la première fois depuis de nombreuses années, l’effectif de la Milice est supérieur à celui de l’armée régulière. Selon le rapport de rendement du MDN pour la période prenant fin le 31 mars 1998, il est prévu que le nombre de miliciens sera ramené à 18 500 (avec la possibilité de passer à 20 500).

La Milice a pour mission d’améliorer la capacité de dissuasion des Forces canadiennes et d’appuyer la Force régulière dans l’exécution de tâches de temps de paix, y compris des déploiements opérationnels périodiques, ainsi que des opérations de maintien de la paix et d’aide au pouvoir civil (dans les situations d’urgence), c’est-à-dire fournir des militaires, des sous-unités et des unités entraînés pour augmenter l’élément de la Force régulière. Les déploiements peuvent comprendre des éléments des blindés, de l’artillerie, du génie ou de l’infanterie ainsi que des bataillons des services et des compagnies médicales. La Milice peut également servir de fondement à la mobilisation.

Le Canada n’étant doté que d’une petite armée régulière et comprenant un territoire vaste à la population éparse, ce n’est que grâce à la Milice qu’il peut maintenir dans de nombreuses collectivités une présence de l’Armée. On appuie des activités qui favorisent l’acquisition de qualités de citoyen et font progresser l’unité nationale, y compris des cérémonies militaires en des occasions comme le Jour du souvenir.

         c. La Réserve aérienne

La Réserve aérienne a pour rôle de rehausser la capacité d’intervention de la Force aérienne en cas d’urgence nationale et d’appuyer l’élément de la Force régulière dans le cadre de l’exécution des tâches de temps de paix sous le commandement du Chef d’état-major de la Force aérienne.

Le niveau de planification de la Réserve aérienne permet de porter à 2 500 réservistes l’effectif pour l’année financière 1998-1999 et à 3 000, pour l’année financière 1999-2000. Le 31 mai 1998, l’effectif total de la Réserve aérienne était de 1 785 membres.

La Réserve aérienne fait partie intégrante de la Force aérienne totale, la majorité des unités de réserve ayant été fusionnées avec leurs homologues de la Force régulière pour former des unités intégrées. Les réservistes de l’Air travaillent désormais à bord de presque tous les types d’aéronef faisant partie de la flotte des Forces canadiennes. L’élément de la Réserve aérienne de ces unités permet de maintenir les coûts à un niveau abordable tandis que le regroupement de membres de la Force régulière et de la Réserve permet l’optimisation des seuils de préparation et de maintien en puissance qu’exige l’exécution du mandat de la Force aérienne. Bon nombre de réservistes de l’Air ont participé à des opérations récentes de l’ONU et de l’OTAN ainsi qu’à des opérations intérieures, y compris à des activités de recherche et de sauvetage, de transport léger et de surveillance maritime, prenant ainsi la relève du personnel de soutien de la Force régulière et du personnel de vol et au sol.

         d. La Réserve des communications

L’effectif annuel moyen de la Réserve des communications est d’environ 1 900 membres répartis dans 23 unités au sein de cinq groupes régionaux. Selon la trousse d’information du MDN et des FC figurant dans le site Web du Ministère, les escadrons de transmission en campagne de la Milice doivent être rétablis et l’effectif de la Réserve des communications ramené à 1 500 membres.

Le rôle de la Réserve des communications est de fournir des renforts aptes au combat, qu’il s’agisse de particuliers ou de sous-unités, chargés d’appuyer les opérations de gestion de l’information et d’information. À titre d’exemple, signalons qu’elle fournit le personnel de renfort des unités de la Force régulière du Commandement des communications et du Commandement de la Force terrestre et prend part à des opérations de maintien et de rétablissement de la paix ainsi qu’à des opérations relatives aux situations d’urgence civiles. La Réserve des communications appuie également d’autres unités des Forces régulières et de réserve au cours d’exercices et de déploiements opérationnels. Elle possède le matériel de communications stratégique et les véhicules nécessaires à l’entraînement et au déploiement.

La Commission spéciale souligne que la Réserve des communications « est en bonne condition et est très avancée dans la mise en œuvre de la Force totale » et recommande que l’élément des transmissions soit transféré au Commandement de la force terrestre(27).

      2. La Réserve supplémentaire

Selon la Commission spéciale, « la Première réserve peut contribuer un nombre considérable d’individus qualifiés ». Par conséquent, elle recommande « que les membres licenciés honorablement soient automatiquement transférés à la Réserve supplémentaire […qui] peut contribuer considérablement et est essentielle à la mobilisation nationale »(28). Le ministre n’a pas accepté cette recommandation.

La Réserve supplémentaire comprend quelque 15 000 officiers et militaires du rang qui peuvent être des personnes à la retraite de la Force régulière, de la Première réserve ou du Cadre des instructeurs de cadets. Ces personnes ne sont pas tenues de remplir leurs fonctions ni de s’entraîner, sauf lorsqu’elles sont en service actif. Elles constituent un bassin de personnel ayant reçu une formation militaire et susceptible d’être rappelé en cas d’urgence. Des spécialistes civils sont aussi enrôlés en cas de nécessité.

La Réserve supplémentaire est divisée en deux parties :

  • la Réserve supplémentaire disponible;
  • la Réserve supplémentaire d’attente.

         a. La Réserve supplémentaire disponible (RSD)

La RSD est composée de gens possédant des compétences militaires à jour, physiquement aptes au service militaire et disponibles immédiatement pour le service. Les membres de la RSD sont des anciens de la Force régulière ou de la Première réserve, des personnes qualifiées d’autres sous-éléments de la Force de réserve et des personnes sans expérience militaire antérieure et possédant des aptitudes ou des compétences spéciales pour lesquelles il existe un besoin militaire. Ces réservistes se sont portés volontaires en vue de se présenter au travail dans les périodes d’urgence nationale ou de mobilisation avant d’être placés en service actif par le gouverneur en conseil.

         b. La Réserve supplémentaire d’attente (RSA)

La RSA regroupe d’anciens militaires de n’importe quel élément ou sous-élément des Forces canadiennes et des personnes sans expérience militaire préalable qui possèdent des aptitudes ou des compétences spéciales. Ces personnes ne possèdent aucune compétence militaire à jour et ne sont pas réputées être immédiatement disponibles pour entreprendre des tâches en période d’urgence nationale si jamais elles sont appelées à prendre du service actif par un décret du gouverneur en conseil.

      3. Le Cadre des instructeurs de cadets (CIC)

Le Cadre des instructeurs de cadets comprend environ 6 500 officiers qui ont entrepris d’accomplir les fonctions militaires et l’instruction qui peuvent être exigées d’eux mais dont les fonctions premières sont la supervision, l’administration et la formation des cadets de la Marine, des cadets de l’Armée et des cadets de l’Air. Chaque année, de septembre à juin, jusqu’à concurrence de 62 000 cadets de 12 à 18 ans participent à des défilés et s’entraînent de façon hebdomadaire. Plus de 20 000 cadets participent chaque année à des camps d’été. Bien que les officiers du CIC soient membres des Forces canadiennes, les cadets dont ils assurent la supervision ne le sont pas. Selon la Commission spéciale, le CIC accomplit un « excellent » travail.

      4. Les Canadian Rangers

Les Canadian Rangers ont été formés en 1947 et comptent actuellement près de 3 000 membres de tous les grades. Les Rangers comptent cinq Groupes de patrouille comprenant 130 patrouilles situées en Colombie-Britannique, dans le territoire du Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, en Alberta, au Manitoba, en Ontario, au Québec et à Terre-Neuve.

Ces volontaires sont prêts à prendre du service en cas d’urgence, mais ils ne sont pas tenus de suivre chaque année une formation militaire organisée pour être considérés en activité. Ils ne sont obligés de servir que lorsqu’ils sont placés en service actif. Les Rangers doivent être en bonne santé et capables de subsister à partir des ressources accessibles. Leur rôle consiste à assurer une présence militaire dans les régions peu peuplées, les régions du Nord, les régions côtières et les régions isolées du Canada, où il ne serait ni pratique ni rentable d’envoyer d’autres éléments des Forces canadiennes.

Les Rangers évoluent habituellement à titre individuel, et, dans le cadre de leurs activités civiles, signalent toute activité douteuse ou irrégulière dans leur secteur respectif. Ils recueillent aussi des renseignements détaillés concernant leur zone locale, renseignements susceptibles de leur être utiles dans leurs autres tâches ou de revêtir de l’importance pour les Forces canadiennes. Selon le Ministère, « ces services ne sont en général pas rémunérés. Le taux de solde équivalent de la Réserve est versé au titre des exercices locaux d’entraînement, des opérations terrestres de recherche et de sauvetage et de la participation à d’autres exercices des Forces canadiennes en tant que guides, conseillers ou instructeurs de survie »(29).  En situation d’urgence, les Rangers participent à des mesures immédiates de défense locale jusqu’à l’arrivée d’autres forces.

La Commission spéciale constate que « les Canadian Rangers accomplissent un excellent travail et applaudit le programme d’amélioration ainsi que les essais du Programme de Rangers juniors »(30).

Un autre programme, à savoir le programme Bold Eagle, qui a vu le jour en Saskatchewan et qui a ensuite été étendu à toutes les provinces des Prairies, mérite aussi d’être signalé. Il constitue une tentative de recrutement d’Autochtones canadiens dans la Réserve des Forces canadiennes.

   D. Questions opérationnelles

Selon le Comité de surveillance des changements au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes :

La réforme actuelle des Réserves constitue une bonne vérification ponctuelle de la mise en œuvre par le Ministère du concept de la Force totale, qui est en place depuis la parution du Livre blanc sur la défense de 1987. À l’heure actuelle, la Marine et la Force aérienne semblent bien fonctionner en tant que commandements de la Force totale, mais ça ne semble pas être le cas de l’Armée de terre, dont les chefs semblent réticents à accepter les vastes ramifications de la Force totale(31).

      1. Le recrutement

Le recrutement dans les réserves était auparavant l’apanage des unités de réserve, mais la responsabilité de cette tâche a été transférée aux centres de recrutement locaux des Forces canadiennes (CRFC) à la fin des années 80. À l’heure actuelle, ces CRFC se chargent de la sélection et de l’enrôlement des membres de l’effectif de la Force régulière et de la Force de réserve. Le processus de recrutement pour tous les services des deux forces est identique et se fonde sur des exigences et des normes communes.

Le Canada étant un pays de plus en plus urbain puisque de 78 à 85 p. 100 de sa population habite dans de grands centres, il est plus difficile qu’auparavant de faire du recrutement dans les petits secteurs ruraux. Pour résoudre ce problème, les CRFC envoient des équipes de recrutement mobiles dans les régions éloignées et les manèges militaires. Selon des détracteurs, cette façon de faire ne tient pas véritablement compte du potentiel des régions rurales du Canada; toutefois, d’autres estiment cependant que l’on fait contrepoids à ce déséquilibre en adoptant des initiatives du type de celle des Rangers. De plus, en vertu du système de recrutement en vigueur, les unités de milice locales demeurent largement responsables d’attirer des recrues; les CRFC ont tendance à ne s’occuper que de la paperasserie, aux fins des entrevues, de l’établissement des dossiers, des examens médicaux et de la recommandation d’un code d’emploi militaire. Selon la Commission spéciale, cette centralisation « devrait produire des économies, et elle convient dans le contexte de la Force totale qui tente de minimiser [sic] la différenciation entre les éléments de la Régulière et de la Réserve »(32).

Malheureusement, le mauvais côté de ce processus tient au fait que la bureaucratie ? par exemple procéder à une vérification de la fiabilité au sein du ministère avant l’enrôlement d’une recrue ? peut entraîner des retards d’au moins six mois. Par conséquent, de nombreux candidats prometteurs abandonnent le processus et se tournent vers d’autres débouchés. Il s’agit pour les unités de réserve locales d’une source de frustration constante et d’embarras personnel contre laquelle elles ne peuvent à peu près rien faire compte tenu de l’autonomie des CRFC. La Commission spéciale a reçu de nombreuses plaintes à ce sujet. De nombreux commandants de la Réserve ont dit qu’il faut que « les unités redeviennent responsables du recrutement ». La Commission n’est pas convaincue que ce soit là une solution souhaitable. Elle a plutôt recommandé que le ministère de la Défense nationale envisage l’adoption d’une politique d’« enrôlement conditionnel » et s’efforce de compléter le processus « en un mois »(33).

La Réserve fait face à un deuxième problème de recrutement, soit la tendance au sein du gouvernement, y compris dans la Force régulière, d’adjuger à des civils des services spécialisés à court terme. Selon la Commission spéciale, cette situation donne naissance à deux sous-problèmes interreliés. Premièrement, les unités de réserve pourraient, si elles étaient mises au fait des besoins de spécialistes de la Force régulière, cibler leur recrutement en conséquence. Deuxièmement, la Force régulière pourrait d’abord se tourner vers les unités de réserve avant de recruter directement des spécialistes du secteur civil. Selon les recommandations de la Commission spéciale, l’harmonisation des compétences civiles et militaires pourrait contribuer à régler ces problèmes(34).

Par conséquent, le ministre a adopté diverses politiques ayant pour objet de veiller à ce que la Force régulière cherche à satisfaire à ses besoins en spécialistes en faisant d’abord appel à des réservistes, d’aider la Force de réserve à cibler le recrutement sur les spécialistes requis et d’harmoniser les compétences civiles et militaires en vertu du Programme d’équivalences militaires des Forces canadiennes (PEMFC). Le PEMFC est un programme cadre qui s’applique à la grandeur des FC et qui accordera des qualifications partielles ou complètes des FC dans le cas d’expérience et de qualifications civiles reconnues. Des lignes directrices sont en cours d’élaboration pour évaluer les équivalences éventuelles, et on a prévu la mise en œuvre de la politique et du programme au plus tard en avril 1999. Des difficultés relatives à la gestion de systèmes pertinents de données et de gestion pour les réserves signifient cependant que les systèmes nécessaires à cette fin ne seront pas exploitables avant l’an 2003. Le Comité de surveillance souligne que les progrès dans ces domaines d’administration « semblent plutôt lents » et qu’à moins que les attitudes et les institutions ne changent, « les questions relatives au personnel des réserves sont reléguées au bas de l’échelle des priorités du Ministère »(35).

      2. La formation et l’équipement

En vertu du concept de la Force totale, les Forces canadiennes ont arrêté le principe selon lequel les membres des Forces régulière et de réserve doivent être formés de façon à satisfaire aux mêmes normes ou groupes professionnels militaires pour les mêmes tâches. De plus, comme l’on met davantage l’accent sur le rôle des réserves sur le plan du renforcement, la qualité de l’instruction est essentielle. Selon la preuve présentée à la Commission spéciale, les réserves sont en mesure d’atteindre un niveau d’efficacité « essentiellement équivalent » à celui de la Force régulière, « du moins après trois mois d’instruction préparatoire »(36). Toutefois, bon nombre de personnes soutiennent qu’il n’y a pas assez de journées d’instruction pour les réservistes, en grande partie en raison des restrictions budgétaires.

Qui plus est, le système d’instruction actuel ne semble pas assez souple pour satisfaire aux besoins spéciaux des réservistes. À titre d’exemple, on a dit que les cours offerts par la Force régulière pour rehausser les compétences techniques et de leadership des réservistes étaient trop longs, surtout pour ceux qui occupent un emploi à temps plein. Pour corriger ce problème, la Commission a recommandé que ces cours soient divisés en de plus brefs modules offerts sur de plus courtes périodes.

Selon un des membres de la Commission, les réserves doivent à la fois « repenser le système d’instruction individuelle » et « remettre l’accent sur l’apprentissage en équipe »(37). Voici les façons possibles d’améliorer l’efficience, la rentabilité et l’efficacité de l’instruction des réserves : utiliser des trousses de formation, des simulateurs et du matériel didactique par modules normalisés; étudier les possibilités de formation à distance; utiliser des systèmes d’enseignement vidéo interactifs et des logiciels spécialisés d’instruction individualisée; veiller à ce qu’il ait assez d’armes et d’autres matériels, d’installations d’enseignement de haute technologie et d’instructeurs qualifiés (qui pourraient venir de la collectivité locale). De telles améliorations coûtent cher, mais bon nombre de personnes ont souligné qu’il serait vraisemblablement encore plus onéreux de ne pas moderniser le système de soutien de l’instruction des réserves.

Enfin, des périodes d’instruction communes plus fréquentes intégrant des éléments des Forces régulière et de réserve à tous les niveaux pourraient se traduire par une meilleure formation qui serait plus rentable, étant donné qu’il y aurait partage de matériel et de compétences. Cet aspect est important sur le plan de la mise en œuvre efficace du concept de la Force totale en vertu duquel des membres des Forces régulière et de réserve serviraient et travailleraient ensemble au sein de toutes les unités à tous les niveaux des quartiers généraux.

Selon les constatations de la Commission spéciale, « un des principaux problèmes des réserves est la facilité avec laquelle une personne peut impunément s’abstenir de participer à des séances d’instruction régulières ou encore tout simplement quitter les réserves après une brève période ». Ce manque perçu d’engagement de la part de certains réservistes peut être une cause importante de formation inefficace, particulièrement au sein de la Milice, étant donné qu’il signifie que l’instruction de base doit être répétée, ce qui laisse peu ou pas de temps pour du travail plus avancé et plus stimulant. (Les façons de résoudre le problème d’attrition dans les réserves sont abordées plus loin.)

Même si l’instruction s’améliore, cependant, les réserves ne peuvent être ni plus crédibles ni plus efficaces si elles n’obtiennent pas d’équipement plus approprié. On a dit aux membres de la Commission spéciale « que quelques soldats n’avaient jamais vu, et encore moins reçu de l’instruction sur l’équipement qu’ils étaient appelés à manier avec compétence »(38). L’établissement de Centres de soutien de l’entraînement de la milice (CSEM) dans chacun des cinq secteurs de commandement dans la foulée du Livre blanc de 1987 a amélioré de façon marquée la qualité et l’efficience de l’instruction et apporté dans une certaine mesure des solutions aux problèmes d’équipement ou de manque d’équipement. Compte tenu des restrictions budgétaires actuelles, des arrangements supplémentaires, comme l’établissement de périodes d’instruction communes ou la mise en commun d’équipement par des unités situées au sein du même secteur géographique pourraient permettre d’apporter une solution à ces pénuries au niveau local.

En réponse à ces recommandations, le ministre de la Défense nationale a accepté de rendre les cours plus accessibles aux réservistes, dans la mesure du possible, en les divisant en tranches de deux à trois semaines. Le ministre a aussi décidé d’intégrer davantage les membres de la Force régulière et les Réservistes, en exigeant qu’ils servent dans les formations de l’un et de l’autre. Pour faciliter ce processus, les barrières administratives qui séparent la Force régulière et la Force de réserve seront rendues plus perméables, de façon à permettre le service continu et ininterrompu entre les deux éléments. Enfin, les FC identifieront l’équipement nécessaire à l’instruction et adopteront des dispositions en vue de le regrouper de façon à ce que les unités puissent y avoir accès de façon régulière(39).

      3. Le déploiement

Dans la plus grande partie du monde, il est de pratique courante pour les réserves des forces armées d’être composées de citoyens ordinaires qui exercent un emploi à temps plein, mais qui sont formés et équipés de façon à pouvoir être déployés si le besoin s’en fait sentir(40). Ce n’est pas le cas au Canada où, sauf en vertu d’un décret en conseil, les réservistes, bien qu’ils soient formés, ne peuvent être déployés à moins qu’ils ne se portent volontaires. Par conséquent, le service au sein de la Première réserve au Canada peut être consensuel ou obligatoire. Ainsi, avec son consentement, un membre de la Première réserve peut être employé avec un autre sous-élément de la Force de réserve ou avec la Force régulière. Parallèlement, selon la Loi sur la Défense nationale, les membres de la Première réserve peuvent être appelés à des fins de service et de formation obligatoires dans les circonstances suivantes :

  • lorsque le gouverneur en conseil les met en service actif n’importe où au Canada ou à l’étranger, n’importe quand, en raison d’un état d’urgence relatif à la défense du Canada ou à la suite d’engagements internationaux pris par le Canada;
  • lorsque le gouverneur en conseil déclare l’existence ou l’imminence d’une catastrophe nationale;
  • dans toute situation où une émeute ou des troubles nécessitent une intervention du fait de l’impuissance des autorités civiles à les réprimer; les réservistes peuvent alors être appelés à prêter main-forte au pouvoir civil (dans de tels cas, le procureur général d’une province doit adresser au Chef d’état-major de la Défense ou à une personne désignée par ce dernier une demande officielle requérant l’aide de la réserve);
  • pour une période d’instruction (d’une durée maximale de 15 jours pour le service de réserve de classe « B » et de 60 jours pour le service de réserve de classe « A »);
  • dans toute autre circonstance jugée nécessaire par le gouverneur en conseil(41).

En ce qui a particulièrement trait au déploiement de la Milice dans le cadre d’opérations des Nations Unies, le Chef d’état-major de la Force terrestre (CEMFT) a rendu public le 8 mai 1998 un énoncé de politique qui autorise les commandants en déploiement à inclure jusqu’à concurrence de 20 p. 100 de réservistes dans leur(s) unité(s). Le Conseil des Forces armées a éliminé les prescriptions relatives au pourcentage limite en septembre 1998, mais confirmé que la limite des 20 p. 100 continuerait d’être utilisée à des fins de planification(42).

Depuis 1991, les engagements opérationnels du Canada ont été accueillis de façon très positive par les réservistes, et l’objectif fixant à 20 p. 100 la participation de ceux-ci à tout engagement outre-mer a parfois été dépassé. À titre d’exemple, signalons que les réservistes représentaient plus de 40 p. 100 des effectifs de combat à l’occasion des premiers déploiements du Canada dans l’ancienne Yougoslavie, et qu’un militaire des forces terrestres sur six déployés outre-mer depuis 1991 est un réserviste. La Réserve est également intervenue à l’occasion d’urgences nationales comme les inondations au Manitoba en 1997, situation où les réservistes représentaient quelque 10 p. 100 des effectifs militaires déployés.

Dans son énoncé, le CEMFT accordait également aux commandants en déploiement le pouvoir discrétionnaire d’utiliser des éléments de réserve constitués (c.-à-d. des sections ou des pelotons) et d’employer des officiers subalternes qualifiés de la réserve à des postes de commandement en se fondant sur le succès de la mission et le bien-être du personnel de l’unité. Dans l’utilisation des réservistes, les commandants doivent tenir compte d’un certain nombre de facteurs, notamment « les coûts additionnels associés au renfort de la Réserve, le temps nécessaire pour amener les réservistes à un état de préparation et la capacité de la force de campagne de s’autosuffire sans renfort »(43). Ces modalités sous-tendent un accroissement possible des rôles de la réserve dans le cadre de missions opérationnelles, mais le caractère discrétionnaire de la décision d’un commandant concernant la taille et le rôle de l’apport de la réserve n’encouragera pas nécessairement le recours à des éléments constitués de la Milice. Le Comité de surveillance a manifesté de l’inquiétude devant le fait que « les commandants, du fait qu’ils n’accordent pas un statut prédéterminé à la Milice pour les déploiements opérationnels, sont peu motivés à inclure des éléments constitués [pelotons ou sections] de la Milice »(44). Le Comité de surveillance a depuis lors soutenu que si des éléments constitués étaient intégrés au moins aux niveaux un et deux de la mobilisation (constitution et amélioration de la force), le Ministère pourrait, entre autres choses, créer « des conditions de planification et de déploiement [qui] favoriseraient le leadership et la formation des réservistes »(45).

Un dernier problème connexe concerne le traitement dont font l’objet les réservistes après un déploiement. Certains ont mentionné que les réservistes qui participent à des missions opérationnelles ne bénéficient pas à leur retour d’un traitement comparable à celui de leurs homologues de la Force régulière. Par conséquent, la Commission spéciale a fait une recommandation selon laquelle, après un déploiement, « [o]n doit allouer suffisamment de temps pour une transition ordonnée d’une unité régulière à une unité de réserve, pour des évaluations médicales et dentaires adéquates, et pour une bonne évaluation de la prédisposition de l’individu au syndrome de stress post-traumatique »(46). Le ministère a accepté cette recommandation sans la modifier.

      4. Le financement

Selon le Guide de planification de la défense de 1999, les niveaux d’effectifs pour la Réserve continuent de dépendre du financement, tandis que la Force régulière se voit attribuer des niveaux précis de personnel. Un tel financement ponctuel porte atteinte à la capacité des réserves de s’acquitter de leurs trois rôles. De plus, l’aptitude des réserves à fournir du personnel hautement qualifié à des fins de renfort (ce qui correspond à leur rôle prédominant à l’heure actuelle) est directement tributaire de son aptitude à recruter, à former et à faire progresser le personnel ainsi qu’à le conserver à son effectif. Toutes ces activités ont souffert des réductions. Par conséquent, il est difficile de tenir les unités de réserve responsables des lacunes qui ont résulté sur les plans du commandement et du contrôle. Selon le Comité de surveillance, pour que les Forces de réserve demeurent efficaces, elles devront être intégrées dans les étapes initiales du processus global d’établissement des budgets(47).

Le ministre de la Défense nationale a reconnu qu’il y a lieu d’évaluer l’attribution et le contrôle de fonds à la Milice (en particulier), étant donné que la Force régulière a tendance à refiler les réduction à la Réserve sans être pleinement consciente des répercussions de ce geste. En réaction, le ministre a accepté les quatre recommandations de la Commission spéciale à cet effet. Premièrement, chaque unité de la Milice se verra garantir des fonds équivalant à quatre jours de formation par mois pour chacun de ses membres effectifs pour la période de septembre à mai, et ces jours devront être consacrés entièrement et directement à l’instruction. Deuxièmement, le ministère « évaluera » le niveau de financement nécessaire à l’exercice du commandement, du contrôle et de l’administration des unités, et ces dernières seront financées en conséquence. Troisièmement, les fonds nécessaires accompagneront toute délégation des tâches (notamment en matière d’instruction collective) aux unités. Enfin, les unités de réserve se verront déléguer une autorité et une flexibilité accrues pour gérer le budget lié aux opérations et à l’entretien de leurs unités et de leur infrastructure(48).

Malheureusement, le Comité de surveillance n’est toujours pas convaincu que l’Armée sera en mesure de mettre en œuvre ces recommandations liées au budget. L’incertitude concernant le financement de la Force de réserve pourrait mettre en péril l’aptitude de nombreuses unités à demeurer viables selon les normes du MDN, de sorte que même des unités ancrées dans l’histoire et ayant reçu les honneurs de bataille pourraient faire l’objet d’un démantèlement ou d’une fusion(49).

      5. La rémunération et les avantages sociaux

Une des plaintes maintes fois faite à la Commission spéciale a trait au système de solde de la réserve : « […] les réservistes étaient des mois sans être payés et […] lorsqu’ils étaient payés, le montant de la solde était erroné et devait être recalculé »(50). La Commission a fait plusieurs recommandations visant à corriger cette situation, et l’une d’elles préconise que le ministère intègre totalement les systèmes de la solde et du personnel des Forces régulière et de réserve. Le ministère est en train de mettre en œuvre cette recommandation.

Les auteurs du rapport de la Commission spéciale réitèrent la position adoptée par le ministère, selon lequel la solde des réservistes devrait continuer à être légèrement inférieure (environ 85 p. 100) à celle des membres de la Force régulière. Pour justifier cet écart, on invoque le fait que les membres de la Force régulière doivent être prêts à être déployés en tout temps dans le cadre d’opérations menées à l’intérieur comme à l’extérieur du Canada. Toutefois, en dépit de la règle des 85 p. 100, la Commission a aussi relevé plusieurs inégalités dans les barèmes de solde de la réserve, qui varient non seulement selon le grade et les catégories de solde, mais aussi selon le nombre d’heures de service. À titre d’exemple, signalons que les caporaux de la réserve ont droit à 67,7 p. 100 du taux de solde de la Force régulière, tandis que les soldats de réserve à leur entrée dans les Forces touchent une solde plus importante que leurs homologues de la Force régulière. Devant cette disparité, la Commission spéciale a recommandé que le ministère veille à ce que le seuil des 85 p. 100 soit considéré comme un minimum en ce qui concerne le taux de solde de chacun des grades.

En 1997, le ministère a établi un Système de solde révisé de la Réserve (SSRR) à volets multiples, et réaffirmé son engagement de veiller à ce que la solde des réservistes de tous grades respecte le seuil des 85 p. 100. De plus, des ajustements fondés sur le principe de la comparabilité de la rémunération qui étaient auparavant limités aux membres de la Force régulière s’appliquent désormais aux réservistes. Les pilotes, médecins, dentistes et avocats obtiennent une rémunération supplémentaire, et des indemnités de vacances et de spécialiste sont présentement adoptées pour tous les membres de la Réserve. Le SSRR est pour la première fois entré en vigueur dans le Secteur de l’Atlantique de la Force terrestre, et on s’attendait à ce qu’il soit en œuvre partout au pays à la fin de 1997.

En plus de corriger les disparités sur le plan de la solde, le ministère devait adopter un Projet d’information intégré de la Réserve (PIIR) qui aurait compris des données concernant la gestion du personnel et de l’instruction, le contrôle budgétaire et le soutien logistique des réserves. Toutefois, le PIIR a été annulé et doit être remplacé par le logiciel Peoplesoft, logiciel de gestion des ressources humaines présentement utilisé par d’autres ministères du gouvernement du Canada. Ce système intégré de solde pour les Forces régulière et de réserve est censé entrer en vigueur au plus tard en avril 2001(51).

Au fil des ans, le programme des avantages sociaux destiné aux réservistes a été beaucoup amélioré. Selon la Commission spéciale, « [i]l existe une impression commune chez les réservistes à l’effet [sic] que leurs avantages sociaux ne correspondent pas à ceux dont jouissent les membres réguliers des Forces canadiennes »(52). Dans l’ensemble, cependant, les avantages consentis aux réservistes ont été comparables à ceux qui sont accordés aux membres de la Force régulière depuis l’adoption d’un nouveau régime d’avantages en 1990. Celui-ci comprend le régime provincial d’assurance-santé et la participation à quatre régimes d’assurance collective : le régime d’assurance collective chirurgicale-médicale, le régime de soins dentaires à l’intention des personnes à charge des militaires des FC, le régime d’assurance en cas d’invalidité prolongée de la Réserve et le régime d’assurance des officiers généraux de la Réserve. Il y aussi le régime d’assurance temporaire de la Réserve (RATR), qui est un régime d’assurance-vie, et le régime de soins dentaires de la Réserve des Forces canadiennes. Plus récemment, les réservistes ont obtenu le droit de voyager à bord des aéronefs militaires lorsqu’ils ne sont pas de service, ainsi que de participer à d’autres régimes de santé, dont le Régime de soins de santé de la fonction publique, le Régime d’assurance-revenu militaire et le régime de congés/prestations de maternité et d’invalidité prolongée(53).

Le domaine des pensions est un de ceux où les avantages des réservistes diffèrent de façon marquée de ceux des membres de la Force régulière(54). Les réservistes ne sont pas protégés par la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes et n’ont pas droit à quelque pension que ce soit après avoir servi dans la Force de réserve. De plus, à la différence des membres de la Force régulière, les réservistes ne peuvent faire reconnaître leur service dans la réserve pour les fins d’une contribution au régime de pension que s’ils ont servi pendant une période continue d’au moins six mois. Soucieux de corriger ce problème, le ministère a créé en septembre 1997 l’Allocation de retraite de la Force de réserve (ARFR). En résumé, l’ARFR (qui ne s’applique pas aux 5 000 officiers du Cadre des instructeurs de cadets) n’est pas une pension et constitue plutôt une forme d’indemnité de départ fondée sur le système d’indemnité de départ de la Force régulière. Ce régime, qui a un effet rétroactif à avril 1997, permet à un réserviste comptant 30 années et plus de service de toucher sept jours de solde par année de service jusqu’à concurrence de 210 jours. Les personnes comptant plus de 10 ans mais moins de 20 ans de service peuvent toucher une rémunération correspondant à 3,5 jours de solde par année. Les réservistes comptant moins de 10 années de service n’ont pas droit à cet avantage.

Tout réserviste victime d’une blessure ou d’une maladie pendant qu’il effectue du service de réserve est rémunéré pendant qu’il est à l’hôpital ou qu’il attend de réintégrer son emploi civil. Dans un cas d’invalidité grave, cette indemnisation peut s’appliquer jusqu’à ce que débutent les paiements d’une pension d’invalidité en vertu de la Loi sur les pensions. L’indemnité correspond au taux de solde en vigueur au moment de la blessure ou de la maladie qui a entraîné l’invalidité.

Enfin, au milieu des années 90, il a été reconnu que certains militaires participant à des opérations de maintien de la paix avaient besoin d’aide pour faire face au stress dû à un incident critique. Des mesures ont été adoptées afin de préparer les militaires de façon plus pertinente avant leur déploiement. De nombreux réservistes de retour au pays qui, auparavant, n’avaient pas accès à des services destinés à les aider à faire face au stress dû à des incidents critiques font désormais partie d’un programme ayant pour objet de communiquer régulièrement avec tous les gardiens de la paix après leur déploiement.

      6. Le régime de promotion

On trouve très peu de renseignements dans les documents au sujet du régime de promotion de la Force de réserve. Toutefois, deux préoccupations qui affectent les réservistes semblent resurgir régulièrement. La première a trait au manque de disponibilité de cours techniques et de cours de leadership ainsi qu’au manque d’accès à ces cours, qui sont nécessaires pour obtenir de l’avancement. La progression en grade de nombreux réservistes semble avoir été entravée par leur incapacité de participer à des séances de formation offertes par la Force régulière. Il a déjà été question auparavant dans le présent document des solutions possibles à ce problème, comme rendre l’entraînement plus flexible.

Le deuxième problème tient au fait que de nombreux réservistes subissent une baisse d’un grade lorsqu’ils participent à des missions opérationnelles, notamment à des missions de maintien de la paix. À l’heure actuelle, les réservistes de classe « C » ont droit au taux de la Force régulière auquel ils sont admissibles en fonction des normes s’appliquant à la Force régulière, ce qui n’est pas nécessairement le taux applicable à leur grade effectif. Bon nombre de réservistes acceptent l’explication selon laquelle ce traitement se fonde sur le fait qu’ils ont moins d’expérience que les membres de la Force régulière pour s’acquitter des tâches d’un poste donné, mais la Commission spéciale maintient que ces réductions constituent une forme de discrimination. Le Comité de surveillance a signalé que le sous-ministre adjoint – Ressources humaines examine cette politique. Si elle est modifiée, les réservistes de classe « C » ne seront pas tenus d’abandonner leur grade pour combler des postes donnés(55).

      7. L’attrition

Bien que le taux d’attrition dans le secteur militaire au Canada soit en gros comparable à celui d’autres pays, soit entre 25 et 30 p. 100 annuellement, ce phénomène est considéré comme un problème au sein des réserves canadiennes et plus particulièrement dans la Milice. Cette situation tient en partie au fait qu’environ 35 p. 100 des réservistes sont des étudiants qui fréquentent l’école secondaire ou le collège et que les niveaux d’attrition augmentent lorsqu’ils ont terminé leurs études. De plus, comme il en va au sein de tout organisme bénévole, les insatisfaits sont susceptibles de faire connaître leur mécontentement en s’en allant. Ces départs peuvent être onéreux pour les Forces canadiennes, étant donné que de faibles taux de maintien à l’effectif ramènent sur le tapis le coût manifeste et répétitif d’avoir continuellement à former de nouveaux membres du personnel.

Au nombre des motifs les plus fréquemment cités pour justifier un départ de la Réserve, mentionnons les conflits avec un emploi civil, les obligations scolaires et familiales et, sur une note positive, la décision de s’enrôler dans la Force régulière. Les Forces canadiennes ne peuvent rien faire à l’égard de la majorité des motifs invoqués, sauf pour ce qui est du manque de sécurité d’emploi. C’est là un obstacle important pour les réservistes qui doivent demander un congé à leur employeur civil en vue de participer aux cours de formation ou aux déploiements annuels. Le Conseil de liaison des Forces canadiennes ou CLFC (qui portait autrefois l’appellation de Comité national d’appui aux employeurs) a tenté de persuader les sociétés et entreprises d’intégrer la sécurité d’emploi dans les contrats de travail de leurs employés réservistes. Malheureusement, la pression morale exercée par le CLFC ne s’est pas traduite par une amélioration marquée du soutien volontaire des réservistes par les employeurs. Le gouvernement a essayé de montrer la voie à suivre en intégrant des dispositions particulières à l’égard de ses employés qui servent au sein des Forces de réserve. La Commission spéciale a recommandé au gouvernement d’aller plus loin et d’adopter une mesure législative semblable à celle qui a cours en Australie, en Grande-Bretagne et en Nouvelle-Zélande, en vue de protéger les emplois civils des réservistes. Toutefois, le ministre de la Défense nationale a rejeté cette suggestion sous prétexte qu’elle est trop difficile à mettre en œuvre. Au nombre des autres solutions possibles, on pourrait offrir des incitatifs fiscaux ou d’autres bonis aux entreprises qui emploient un réserviste et lui garantissent son poste.

Au nombre des autres facteurs contribuant à l’attrition, on a aussi souligné des problèmes liés au système de solde, au manque d’une garantie minimum de jours d’emploi et aux obligations d’instruction vagues et inapplicables. Des membres de la Milice mentionnent aussi l’absence d’un rôle défini et l’équipement d’instruction inadéquat(56). Le ministère s’occupe à l’heure actuelle de bon nombre de ces problèmes, comme il est signalé ailleurs dans le présent document.

      8. Les coûts

Il est très onéreux de maintenir des forces armées régulières, non seulement au Canada mais aussi partout dans le monde. Par conséquent, un des éléments centraux justifiant le recours à la Force de réserve est que cette façon de faire coûte moins cher au pays et aux contribuables que de maintenir un contingent permanent constitué de membres à plein de la Force régulière(57). Ce faisant, le pays a toujours la garantie de compter sur du personnel qui possède une formation militaire et qui peut être déployé dans le cadre d’opérations au moment et aussi longtemps que le besoin s’en fait sentir. Après coup, le nom des militaires peut être retiré de la liste de paie à temps plein, et ils peuvent être retournés chez leur employeur civil et reprendre leur service de réserve à temps partiel.

Toutefois, selon le rapport du vérificateur général de 1992, le ministère de la Défense nationale « [ne connaissait] pas de façon précise ni le coût ni les capacités de la Réserve et [ne savait] pas non plus comment celle-ci se compare à la Force régulière, car ses systèmes comptables et d’information de gestion ne peuvent produire facilement les données nécessaires »(58). Selon le Rapport sur les plans et les priorités de 1998-1999 du ministère, « la Première réserve compte pour environ 9,6 p. 100 des dépenses totales du Programme des services de la Défense »(59), et ses dépenses totales réelles ont atteint 978 464 000 $ en 1997-1998. Des modifications récentes des méthodes de rapport permettent d’obtenir une ventilation plus claire du coût total de la Première réserve. Quoi qu’il en soit, dans son rapport de 1995, la Commission spéciale a réaffirmé que le processus budgétaire du ministère ne peut séparer tous les postes destinés à l’usage de la Réserve et qu’il éprouve en particulier de la difficulté à évaluer les coûts opérationnels ou en immobilisations partagés avec la Force régulière. Bien qu’il n’ait pas été possible jusqu’à maintenant de comptabiliser les coûts avec précision, la question est présentement examinée par le conseiller en matière de réserve auprès du Chef d’état-major des Forces terrestres(60).

En dépit de son incapacité à déterminer « le coût total et précis des Réserves », la Commission spéciale en est arrivée à la conclusion que les réservistes constituent « une bonne affaire »(61). Par ailleurs, bien qu’il soit vrai que les réservistes touchent une solde moins élevée que leurs homologues de la Force régulière, le vérificateur général « [n’a] trouvé aucune analyse pour corroborer l’hypothèse du Ministère voulant que, dans l’ensemble, la Réserve coûte sensiblement moins cher que la Force régulière pour obtenir un résultat comparable »(62) (c’est nous qui soulignons). Bien que certains contestent ces chiffres, le rapport du vérificateur général précise en outre que, selon une étude de cas, les unités de la Force régulière coûtent moins de 10 p. 100 de plus que celles de la Milice; les unités de la Réserve ne sont pas aussi rentables que celles de la Force régulière; et lorsque l’on tient compte de l’état de préparation opérationnelle dans le calcul, la Force régulière l’emporte sur la Force de réserve. Par conséquent, il pourrait être difficile de déterminer les coûts réels d’une refonte de la façon de fonctionner actuelle des Forces régulière et de réserve(63).

Selon le rapport de la Commission spéciale, un des coûts connus est celui de la formation militaire élémentaire d’une recrue de la Milice, qui est d’environ 20 000 $. Les coûts dans les autres services sont similaires. Compte tenu de ce montant et du fait qu’il est connu que l’attrition et le besoin subséquent de former de nouveaux membres du personnel viennent accroître les coûts de la Réserve, la Commission spéciale a recommandé l’instauration de bonis pour encourager les gens à servir plus longtemps dans les Réserves. À titre d’exemple, un montant forfaitaire de 2 000 $ pourrait être versé à la fin d’une période d’engagement de trois ans. Selon la Commission, « cela représenterait une économie évidente pour le contribuable canadien, le coût de la prime étant nettement moindre que le coût de formation d’une nouvelle recrue »(64).

      9. Les relations avec la Force régulière

Les tensions entre les éléments de la Force régulière et de la Réserve des Forces canadiennes (en particulier dans la Force terrestre) ont débuté lorsqu’on a établi une ligne de démarcation entre les unités de l’armée de la « force permanente » et les unités de la Milice. Cette distinction a été intensifiée par le « syndrome de la guerre de 30 jours », concept selon lequel les soldats faisant partie des unités de la Milice ne pouvaient satisfaire à des critères pertinents de déploiement dans un délai de 30 jours. Les unités de la Milice n’ont donc pas été perçues comme étant utiles à des fins de combat, et les ressources ont été orientées vers la mise en valeur des Forces régulières. Par conséquent, les capacités de la Milice se sont encore plus dégradées, les vraies différences « sont devenues chroniques » et deux cultures distinctes se sont installées(65).

Bien que les Forces régulière et de réserve collaborent désormais de plus en plus à des opérations, cette séparation persiste toujours. Selon la Commission spéciale, elle « demeure une entrave majeure à l’idéal de la Force totale »(66).  Phénomène intéressant, bien que les Réserves navale, des communications et de l’air aient en grande partie surmonté ces divisions, l’écart entre les Forces régulière et de réserve est très prononcé dans la Force terrestre(67). Les observateurs conviennent que la réconciliation entre les éléments de la Réserve et de la Force régulière dans les secteurs de l’aviation et de la marine a été rendue possible en raison de l’instauration de rôles distincts mais néanmoins complémentaires pour chacun des éléments de ces services; ce cheminement n’a pas encore eu lieu dans la Force terrestre.

Les défenseurs de la Force régulière citent les récentes vérifications des éléments de la Force terrestre menées aux États-Unis et au Canada et révélant des faiblesses importantes dans les aptitudes des officiers de réserve(68). Ils soulignent que les réservistes présentent traditionnellement un niveau inférieur de conditionnement physique et de formation, ce qui met en péril l’efficience et le moral de l’unité. De plus, les officiers et militaires du rang de la Milice ont tendance à être perçus comme étant « militairement inférieurs », avec un niveau inférieur de discipline et une expérience inadéquate(69). En toute justice, il convient de souligner que les militaires de la Force régulière ont un avantage sur leurs homologues réservistes en ce qui concerne le temps qu’ils peuvent consacrer à l’instruction et aux autres aspects militaires. De fait, l’aptitude à s’acquitter de façon professionnelle de toute tâche est directement proportionnelle au temps qu’on lui consacre(70). Toutefois, selon le major-général S.T. MacDonald, bien qu’il existe une différence entre les réservistes et les membres de la Force régulière quand une unité est constituée en vue de participer à une période d’instruction de trois mois préalable au déploiement, il ne reste cependant pas de différence appréciable à la fin de cette période. Il peut y avoir encore des différences sur le plan de l’expérience, mais en ce qui concerne les normes et les aptitudes au combat, les réservistes et les membres de la Force régulière sont « comparables », particulièrement chez les militaires du rang des grades inférieurs(71).

On peut se rendre compte que les réservistes ont une compréhension unique en son genre des collectivités et des traditions locales. Capables de mener une « double vie », les réservistes sont bien organisés, gèrent bien leur temps et possèdent ce qu’il faut pour faire face aux problèmes quotidiens. Par conséquent, selon la Commission spéciale, « la Milice […] supporte mal l’attitude de la Régulière qu’elle considère condescendante […] et maintient qu’elle a été maltraitée ou mal employée par la Régulière »(72).

Il faudra du temps pour faire disparaître cette tension entre les éléments des FC, celle-ci s’étant installée sur plusieurs décennies. Une plus grande perméabilité entre les éléments de la Régulière et de la Réserve pourrait faciliter la réconciliation. La Commission spéciale a constaté les avantages découlant des contacts entre les deux éléments et signale qu’« après une première période d’adaptation mutuelle, les réguliers et les réservistes se traitent les uns les autres, au moins dans les grades inférieurs, comme des égaux véritables membres de la Force totale »(73). Par conséquent, les membres de la Force régulière et les réservistes peuvent apprendre à connaître et à accepter de plus en plus les limites et les points forts de leurs homologues. Selon le Comité de surveillance, « le Directeur général – Réserves et cadets, signale que la permutation entre la Force régulière et la Force de réserve est une politique établie »(74). Cette initiative reconnaît que « [l]e respect mutuel vient de la collaboration dans un but commun idéalement en fonction d’une norme commune et, dans toute la mesure du possible, accompagnée d’un barème de remunération commun et d’un ensemble commun d’avantages sociaux »(75). Il est à espérer que l’instauration de normes d’instruction et d’équipement, de critères de compétence et d’un régime d’avantages sociaux identiques fera en sorte que la Réserve et la Force régulière seront davantage sur un pied d’égalité et contribuera à la mise en place de forces armées plus unifiées.

RÉSUMÉ DES CHOIX POSSIBLES ET COMMENTAIRES

Par le passé, la politique de défense du Canada a mobilisé les forces armées régulières à temps plein, la Première réserve active, la Réserve secondaire et les civils selon diverses modalités en vue d’intervenir en cas de crise à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Des avantages et des limites précises caractérisent chacun de ces secteurs en fonction de la situation dans laquelle ils se retrouvent(76).

La Force régulière est pleinement capable de s’acquitter de ses engagements accrus en temps de paix. En temps de guerre, les membres de la Force régulière exigent peu de mobilisation et peuvent atteindre l’effectif nécessaire grâce à des renforts et à un déploiement approprié. La taille relativement réduite de la Force régulière limite cependant l’étendue de ses opérations. En temps de guerre, le Canada devrait aller au-delà des étapes de l’amélioration et du déploiement de la Force régulière pour pouvoir mobiliser les effectifs voulus(77).

L’avantage que présente la mise à contribution de la Première réserve repose sur la vitesse avec laquelle celle-ci peut être mobilisée pour prendre du service. Une mobilisation de la Première réserve, outre le fait qu’elle permet d’apporter du renfort à la Force régulière, est essentielle dans les situations de défense locale exigeant une norme d’instruction inférieure à celle applicable à la Force régulière. Pour les activités de temps de guerre, cependant, il arrivera souvent que la Première réserve ait besoin de recevoir de l’instruction et d’acquérir de l’équipement et de l’expérience si l’on veut que ses effectifs puissent servir de renfort immédiat à la Force régulière. Dans le cadre de ce scénario, c’est la Force régulière qui est « désignée pour le combat » et la Première réserve qui est « en mesure de se préparer à soutenir les éléments de combat et à accroître ses effectifs en poursuivant la mobilisation »(78).

Les membres de la Réserve supplémentaire possèdent beaucoup d’instruction et d’expérience militaires. Leur nombre élevé est le reflet du problème d’attrition de la Force régulière et de la Première réserve. Les seuls coûts qui s’y rattachent sont ceux de la tenue d’une liste exacte et à jour. Toutefois, comme c’est présentement le cas au Canada, « cette liste a souvent été négligée et les militaires dont le nom y figure ne reçoivent pas d’instruction en vue de la mobilisation »(79). Autrement, la Réserve supplémentaire offrirait une importante base de mobilisation bien formée et peu onéreuse.

Enfin, la population civile du Canada ne comptant aucune expérience militaire constitue le plus vaste bassin de ressources en cas de mobilisation nationale. Toutefois, au nombre des variables limitant le recours à des civils figurent « le temps nécessaire pour les former, la perturbation de la population active, l’arrivage incertain de volontaires et les risques politiques liés à la conscription »(80).

Dans chacun des pays du monde, « la répartition proportionnelle de la population dans les catégories susmentionnées diffère »(81). Chaque État accorde un poids différent aux divers élément qui peuvent servir à des fins de mobilisation et définit les valeurs qui limiteront ses choix. Quoi qu’il en soit, de nombreux choix sont possibles. Il existe un vaste éventail de structures possibles des forces, à commencer par le bataillon de base comprenant « un rapport minimum de 10 p. 100 de militaires à temps plein et de 90 p. 100 de militaires à temps partiel »(82).

Au Canada, la conscription en temps de paix, qui est la norme dans la majorité des pays de l’OTAN (quoique bon nombre d’États soient présentement en voie de l’abandonner) ne constitue pas un choix possible. Les Canadiens ont plutôt opté pour le maintien d’une force relativement petite constituée entièrement de volontaires. Les réalités stratégiques, géopolitiques et financières récentes ont fait en sorte qu’il est de moins en moins possible de satisfaire à tous les besoins en personnel dans le cadre de la Force régulière. À l’heure actuelle, au Canada, il y a environ deux membres de la Force régulière pour un réserviste. Si l’on inclut les forces supplémentaires dans le calcul, le rapport passe à 1,4 membre de la Force régulière pour un réserviste. Au Canada, la tendance va dans le sens d’une utilisation accrue de la Force de réserve et en particulier de la Première réserve pour aboutir à une structure de Force totale(83).

Certains préconiseraient le renversement de cette tendance en soutenant que les réservistes sont encore bien loin de la participation paritaire envisagée par les fonctionnaires du gouvernement, que les réservistes et les membres de la Force régulière affectés au combat ne sont ni interchangeables ni égaux et qu’il serait imprudent de trop s’en remettre aux unités de réserve à une époque où un déploiement rapide continue de faire partie des exigences. Les partisans d’une armée permanente plus nombreuse (et on peut supposer que cela s’applique aussi à l’aviation et à la marine) soutiennent que les réserves sont inadéquates « si le Canada veut se donner une force bien formée, bien équipée et de classe mondiale qui peut servir à temps plein »(84).

D’autres voudraient que l’armée en revienne à une « structure territoriale dans le cadre de laquelle la Milice constituerait une pierre d’assise fondamentale et irrévocable »(85), affirmant que « des niveaux réduits de dotation et de préparation dans la Force régulière sont inéluctables et que les réservistes constituent le seul choix permettant de combler l’écart sur le plan des capacités »(86). Les défenseurs de la Réserve feraient rapidement remarquer que « les réserves du Canada offrent à l’heure actuelle un bon rendement par rapport à l’investissement relativement faible du gouvernement canadien dans le budget de la défense »(87) et que « les réserves donnent une plus grande flexibilité et des options à plus long terme au gouvernement »(88). Ils verraient également à mentionner que les réserves constituent la seule présence visible des Forces canadiennes dans la plupart des endroits au Canada et qu’au-delà de la valeur militaire qu’elles représentent, elles contribuent à l’atteinte de l’objectif plus général de l’unité nationale.

C’est en quelque part entre ces deux perspectives que se situe l’initiative visant à remanier la Réserve, et l’ensemble des Forces canadiennes, pour leur donner une structure qui satisfera au mieux aux besoins de défense du Canada dans les contextes financiers et sociaux actuels. Des efforts seront consentis afin de préserver les traditions dans la mesure du possible et de veiller à ce que tous les membres des Forces canadiennes soient traités comme il convient. Selon la Commission spéciale, « les réguliers et les réservistes doivent servir ensemble dans les quartiers généraux et dans les unités et [il faut explorer] la possibilité d’une carrière permettant une transition plus facile entre les Forces régulière et de réserve »(89). Il faut s’attaquer aux inégalités et aux inefficiences et les pondérer par rapport aux coûts et à l’efficience opérationnelle. Tant la Force régulière que la Réserve doivent demeurer assez souples pour s’adapter aux changements inévitables(90).

CONCLUSION

Selon la Commission spéciale sur la restructuration des réserves, « le Canada n’est pas une nation militaire. Les soldats canadiens, malgré leurs excellents états de service autant pendant les guerres que plus récemment dans les opérations de maintien de la paix, n’ont jamais été un point de mire pour le public. Cette situation a toujours existé et persiste, sauf en temps de guerre »(91).   Ce manque d’intérêt du public, auquel vient s’ajouter la tradition du Canada d’éviter de consacrer des sommes élevées à la défense en temps de paix, s’est manifesté ces dernières années sous la forme de réductions massives du budget de la Défense. La restructuration des Forces canadiennes dans ce contexte est inévitable.

Historiquement, l’armée canadienne en particulier a toujours correspondu à une variante du concept de la « Force totale ». Elle a pris la forme d’un partenariat entre les éléments des forces permanentes et de réserve et a présenté des effectifs et des capacités variés « en fonction de la situation mondiale et de notre programme national »(92). De fait, tout comme la Force régulière, les réserves ont été et continuent d’être un élément vital du secteur militaire canadien(93).

Tous les commentateurs sont d’avis que le gouvernement du Canada doit définir avec plus de précision ses attentes relativement aux diverses étapes de la mobilisation ainsi que l’importance relative des éléments de ses forces armées. Ce n’est que si le Canada se donne une stratégie efficace de mobilisation qu’il sera suffisamment prêt à défendre sa sécurité nationale.

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Nota : Vous trouverez à l’adresse électronique http://www.cfcsc.dnd.ca/irc/bib/reservf.html des sources de renseignements supplémentaires à jour en date de septembre 1996 au sujet des Réserves des Forces canadiennes.


(1) Voir Peter F. Dawson, « Canadian Military Mobilization », Armed Forces and Society, vol. 16, no 1, automne 1989, p. 38. Selon Dawson, des facteurs extérieurs déterminent largement la demande, et non la disponibilité, des forces. Ces facteurs sont la nature, l’intensité et l’orientation des menaces devant lesquelles on prévoit recourir à la force. D’après lui, il faut tenir compte du type de menace, de l’éventail des réactions exigées, du temps qui s’écoule entre la manifestation de la menace et l’obligation de mobiliser les forces, ainsi que de l’écart entre les besoins en effectifs de temps de paix et ceux de temps de guerre. Dawson soutient que le plus important de ces éléments est le changement dans la perception de la menace. Par ailleurs, bien que des facteurs internes se répercutent sur les besoins en influant sur la politique étrangère, leur incidence se fait largement sentir du côté de la disponibilité, soit l’aptitude à répondre aux besoins. Au nombre des facteurs internes figurent les coûts économiques (les dépenses en matière de défense), l’opinion publique (au sujet du besoin de défense) et la politique interne. Le plus important est celui des coûts.

(2) Dawson donne une version détaillée de l’histoire des réserves au Canada jusqu’en 1989 et offre des analyses des facteurs qui ont influé sur les diverses façons d’aborder la défense du Canada.

(3) L’expression « levée en masse » s’entend d’une situation dans le cadre de laquelle chaque citoyen « malgré son manque de formation militaire, était appelé à défendre son foyer et sa communauté contre les ennemis menaçant les jeunes colonies ». Canada, Commission spéciale sur la restructuration des réserves : Rapport, Groupe Communication Canada ? Édition, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Ottawa, 1995, p. 10 [ci-après appelée CSRR].

(4) Ibid., p. 11.

(5) Dawson (1989), p. 46 (traduction).

(6) Le concept de la Force totale est notamment ainsi défini : « Force composée de deux éléments (la Régulière et la Réserve) complémentaires qui s’appuient mutuellement et qui, ensemble, peuvent donner une armée opérationnelle intégrale en période d’urgence et de guerre. » Col. R.W. Chisolm, « Citizen Soldiers », Forum, vol. 8, p. 23-31 (automne 1993), p. 24.

Selon le Livre blanc sur la défense de 1987 : « Les Forces canadiennes sont constituées d’éléments maritimes, terrestres et aériens unifiés. Leur structure repose sur le concept de Force totale qui recrute des militaires à temps plein et à temps partiel, au sein de forces armées polyvalentes et aptes au combat. Dans cette Force totale, la composante régulière assure au gouvernement une capacité d’intervention immédiate; la Réserve, elle, est censée renforcer ou soutenir les unités de la Force régulière et, dans certains cas, accomplir des tâches que cette dernière n’exécute pas […]. Le concept prévoit également un plan d’instruction et d’équipement pour la Réserve. »

(7) Canada, Rapport du Comité spécial mixte sur la politique de défense du Canada : La sécurité dans un monde en évolution, Service des publications, Direction des publications parlementaires, 1994, p. 41.

(8) CSRR, p. 10.

(9) Canada, ministère de la Défense nationale, Comité de surveillance des changements au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Rapport d’étape – 1998, chapitre 1, p. 2; version électronique : http://www.dnd.ca/menu/press/Reports/Changes/Fr/reserv_e.htm [ci-après appelé CSCMDNFC (1998)].

(10) Canada, ministère de la Défense nationale, Comité de surveillance des changements au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Rapport d’étape – 1999, chapitre 8 (Questions relatives aux Réserves et aux Cadets), passim; version électronique :

http://www.dnd.ca/menu/press/Reports/monitor_com/Fr/reserv_e.htm [ci-après appelé CSCMDNFC (1999)].

(11) Document d’information du MDN, La Réserve, 9 décembre 1993, p. 2.

(12) CSRR, p. 20.

(13) CSCMDNFC (1999), p. 113.

(14) Dawson (1989), p. 37 (traduction).

(15) Livre blanc sur la Défense de 1994, p. 48.

(16) CSRR, p. i.

(17) CSCMDNFC (1998).

(18) CSCMDNFC (1999), p. 113-114.

(19) CSCMDNFC (1998).

(20) CSCMDNFC (1999), p. 115.

(21) Livre blanc sur la Défense de 1994, p. 48.

(22) CSRR, p. 22.

(23) Les deux autres sont la Force régulière et la Force spéciale. « La Force régulière est définie comme un élément des Forces canadiennes « formé d’officiers et de membres sans brevet d’officier enrôlés pour le service militaire continu et à plein temps ». La Force spéciale est un élément que le gouverneur en conseil peut établir en situation d’urgence ou en conséquence d’un engagement international du Canada, comme il est arrivé, par exemple, dans le cas de la guerre de Corée. » Voir Ibid., p. 13, note 3.

(24) CSRR, p. i.

(25) La Commission spéciale a recommandé en 1995 que « les districts de milice actuels soient démembrés et remplacés par sept groupes-brigade de milice; le Secteur de l’Atlantique de la Force terrestre aurait un groupe-brigade tandis que les autres secteurs auraient chacun deux groupes-brigade. Chaque groupe-brigade aurait la responsabilité de la formation et de l’administration de neuf à 11 unités ». Ibid., p. ii.

Le nombre proposé de groupes-brigade de la milice a été un des plus grands sujets de controverse pendant l’examen du rapport de la Commission spéciale par le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Le propre rapport du Comité préconise le remplacement des districts de milice par neuf plutôt que par sept groupes-brigade de la milice. On y soutient qu’en raison de la répartition de la population et de considérations d’ordre géographique, les secteurs du Centre et de l’Ouest devraient compter chacun un groupe-brigade supplémentaire. Les députés du Parti réformiste au sein du Comité ont présenté un rapport distinct dans lequel ils demandent que le Secteur de l’Ouest soit divisé afin de donner deux secteurs, l’un pour la Colombie-Britannique (avec un groupe-brigade) et l’autre pour le reste de l’Ouest du Canada.

(26) CSCMDNFC (1999), p. 115.

(27) CSRR, p. iii.

(28) Ibid., p. i.

(29) Ministre des Travaux publics et Services gouvernements du Canada, Budget des dépenses de la Défense nationale : Rapport sur le rendement pour la période se terminant le 31 mars 1998, annexe A (Force de réserve), p. A-5; [ci-après appelé TPSGC, Rapport de rendement AF98].

(30) CSRR, p. iii.

(31) CSCMDNFC (1998).

(32) CSRR, p. 56.

(33) Ibid.

(34) Ibid., p. 56-57.

(35) CSCMDNFC (1999), p. 121-122.

(36) CSRR, p. 56.

(37) Lieutenant-général C.H. Belzile, « Single Force, Multiple Problems », Forum, vol. 8, automne 1993, p. 15 (traduction).

(38) CSRR, p. 61.

(39) CSCMDNFC (1998).

(40) Buzz Nixon, « A Never-Ending Study : The Reserves », Defence Associations National Network, National Network News, vol. 4, no 3, juillet 1997; version électronique : http://www.sfu.ca/~dann/nn4-3_4.htm, p. 2.

(41) CSRR, p. 65-66.

(42) CSCMDNFC (1999), p. 112.

(43) CSCMDNFC (1998).

(44) Ibid.

(45) CSCMDNFC (1999), p. 112-113.

(46) CSRR, p. 21.

(47) CSCMDNFC (1999), p. 118.

(48) CSCMDNFC (1998).

(49) Ibid.

(50) CSRR, p. 71.

(51) CSCMDNFC (1999), p. 123.

(52) CSRR, p. 68.

(53) Document d’information du MDN, La Réserve, p. 2.

(54) TPSGC, Rapport de rendement AF98, annexe A (Force de réserve), p. A-5.

(55) CSCMDNFC (1998).

(56) CSRR, p. 61.

(57) Chisholm (1993), p. 31.

(58) BVG, Rapport de 1992, par. 18.30.

(59) Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Défense nationale, Budget des dépenses 1998-1999 : Partie III – Rapport sur les plans et les priorités, partie 11, p. 142.

(60) CSCMDNFC (1998).

(61) CSRR, p. 15.

(62) BVG, Rapport de 1992, par. 18.30.

(63) Lgén J.C. Gervais, « Moving Slowly toward Total Force », Forum, vol. 7, no 2, juin 1992, p. 13.

(64) CSRR, p. 62.

(65) Belzile (1993), p. 13.

(66) CSRR,, p. 16.

(67) Ibid.

(68) Roger Thompson, « Teaching Reservists to Fight », Forum, vol. 8, automne 1993, p. 33.

(69) CSRR, p. 16.

(70) Chisholm (1993), p. 24.

(71) Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants (CPDNAC), 9 décembre 1997, Témoignages, version électronique :

http://www.parl.gc.ca/infoComDoc/36/1/NDVA/Meetings/Evidence/NDVAEV17-F.htm.

(72) CSRR, p. 16.

(73) Ibid., p. 59.

(74) CSCMDNFC (1998).

(75) CPDNAC, Témoignages (9 décembre 1997), version électronique.

(76) Dawson (1989), p. 38-39 et 52-54.

(77) Ibid., p. 52.

(78) Ibid., p. 55 (traduction).

(79) Ibid., p. 53 (traduction).

(80) Ibid., p. 54 (traduction).

(81) Ibid., p. 39 (traduction).

(82) Belzile (1993), p. 15 (traduction).

(83) Document d’information du MDN, La Réserve, p. 7.

(84) Thompson (1993), p. 35 (traduction).

(85) Belzile (1993), p. 13 (traduction).

(86) Laurie Watson, « Canada’s Reserve : A Tale of Woe », Forum, vol. 7, no 7, février 1992, p. 19 (traduction).

(87) Chisholm (1993), p. 31 (traduction).

(88) Congrès des associations de la Défense, Institute for Security and Defence, XIIe Annual Seminar : The Future of the Reserves (Compte rendu du colloque), janvier 1996; version électronique : http://www.cda/cdai.ca/seminars/1996.htm (voir la présentation de Klepak, version électronique : http://www.cda-cdai.ca/library/klepak.htm) (traduction).

(89) CSRR, p. iii.

(90) Par exemple, selon un document du MDN intitulé « Guide de planification du commandant pour la restructuration de la Réserve de la Force terrestre (RRFT) » (4 février 1999), p. 11-12, [Traduction] « une unité n’a pas à perdre son identité du fait qu’il y a eu modification de son rôle. La conversion des unités à de nouveaux rôles (comme le passage de l’infanterie aux blindés ou à la défense aérienne) ne constitue pas un phénomène nouveau pour les Réserves. Dans la mesure du possible, l’identité et l’insigne de l’unité seront conservés même si cette dernière est affectée à un nouveau rôle dans un secteur d’activité différent. »

(91) CSRR, p. 10.

(92) Gervais (1992), p. 14 (traduction).

(93) Document d’information du MDN, La Réserve, p. 7.