Les documents qui figurent sur ce site ont été rédigés par le personnel de la Direction de la recherche parlementaire; ils visent à tracer, à l'intention des parlementaires canadiens, dans un libellé simple et facile à saisir, le contexte dans lequel chaque projet de loi gouvernemental examiné a été élaboré et à fournir une analyse de celui-ci. Les résumés législatifs ne sont pas des documents gouvernementaux; ils n'ont donc aucun statut juridique officiel et ils ne constituent ni un conseil ni une opinion juridique. Prière de noter que la version du projet de loi décrite dans un résumé législatif est celle qui existait à la date indiquée au début du document. Pour avoir accès à la plus récente version publiée du projet de loi, veuillez vous rendre sur le site parlementaire Internet à l'adresse suivante www.parl.gc.ca.

LS-364F

 

PROJET DE LOI C-31 : LOI SUR L'IMMIGRATION
ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

 

Rédaction :
Margaret Young
Division du droit et du gouvernement
Le 25 avril 2000


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-31

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 6 avril 2000 Première lecture :  
Deuxième lecture : 6 juin 2000 Deuxième lecture :  
Rapport du comité :   Rapport du comité :  
Étape du rapport :   Étape du rapport :  
Troisième lecture :   Troisième lecture :  


Sanction royale :
Lois du Canada







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

CONTEXTE

QUESTIONS GÉNÉRALES RELATIVES AU PROJET DE LOI

   A. Style

   B. Définitions (article 2)

   C. Objet de la loi (article 3)

   D. Mise en application (articles 4 à 6)

   E. Accords internationaux (articles 7 à 10)

PARTIE 1 : IMMIGRATION AU CANADA

   A. Section 1 — Formalités préalables à l’entrée et sélection (articles 11 à 14)

      1. Formalités préalables à l’entrée

      2. Sélection des résidents permanents

      3. Régime de parrainage

      4. Règlements

   B. Section 2 — Contrôle (articles 15 à 17)

   C. Section 3 — Entrée et séjour au Canada (articles 18 à 28)

      1. Entrée et séjour

      2. Autorisation d’entrer et de séjourner

      3. Droits et obligations des résidents permanents et des résidents temporaires

      4. Attestation de résidence

      5. Règlements

   D. Section 4 — Interdiction de territoire (articles 29 à 38)

   E. Section 5 — Perte de statut et renvoi (articles 39 à 49)

      1. Constat de l’interdiction de territoire

      2. Enquête par la section de l’immigration

      3. Fin du statut de résident

      4. Exécution des mesures de renvoi

      5. Effet de la mesure de renvoi

      6. Règlements

   F. Section 6 — Détention et mise en liberté (articles 50 à 55)

   G. Section 7 — Droit d’appel (articles 56 à 65)

   H. Section 8 — Contrôle judiciaire (articles 66 à 69)

   I. Section 9 — Examen de renseignements à protéger (articles 70 à 81)

      1. Examen à la demande du ministre et du solliciteur général

      2. Détention

      3. Examen dans le cadre d’une enquête, d’un contrôle de détention, d’un appel
          en matière d’immigration et d’une demande de contrôle judiciaire

   J. Section 10 — Dispositions générales (articles 82 à 87)

PARTIE 2 : PROTECTION DES RÉFUGIÉS

   A. Section 1 — Notion d’asile, de réfugié au sens de la Convention et de personne
        à protéger (articles 88 à 92)

   B. Section 2 — Réfugiés et personnes à protéger (articles 93 à 106)

      1. Demande d’asile

      2. Contrôle de la recevabilité de la demande d’asile

      3. Interruption de l’étude de la demande d’asile

      4. Procédure d’extradition

      5. Étranger sans papiers

      6. Décision sur la demande d’asile et fin de l’asile

      7. Annulation par la Section de la protection des réfugiés

      8. Appel devant la Section d’appel des réfugiés

   C. Section 3 — Examen des risques avant renvoi (articles 107 à 109)

      1. Protection

      2. Principe du non-refoulement

PARTIE 3 : EXÉCUTION

   A. Organisation d’entrée illégale au Canada (articles 110 à 114)

   B. Infractions relatives aux documents (articles 115 et 116)

   C. Infractions générales (articles 117 à 122)

   D. Produits de la criminalité (articles 123 à 125)

   E. Règles visant les poursuites (articles 126 à 129)

   F. Confiscation (article 130)

   G. Agents d’application de la loi (articles 131 à 135);
        agents de la paix (articles 136 et 137)

   H. Contraventions (article 138)

   I. Créances de sa Majesté (articles 139 à 141)

   J. Dispositions applicables aux transporteurs (articles 142 à 147)

PARTIE 4 : COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

   A. Composition de la Commission (articles 148 à 153)

   B. Siège et personnel (articles 154 et 155)

   C. Présidence de la Commission (articles 156 et 157);
        Fonctionnement de la Commission (articles 158 et 159)

   D. Attributions communes (articles 160 à 164)

   E. Dispositions qui s’appliquent aux sections individuellement (articles 165 à 170)

   F. Mesures correctives et disciplinaires (articles 171 à 180)

PARTIE 5 : DISPOSITIONS TRANSITOIRES, MODIFICATIONS CORRÉLATIVES,
MODIFICATIONS CONDITIONNELLES, ABROGATION ET ENTRÉE EN VIGUEUR
(articles 181 à 269)

COMMENTAIRE

 


PROJET DE LOI C-31 : LOI SUR L'IMMIGRATION
ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

 

Le projet de loi C-31, Loi concernant l’immigration au Canada et l’asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger (la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés), a été approuvé en première lecture par la Chambre des communes le 6 avril 2000. Le projet de loi abrogera et remplacera la Loi sur l’immigration actuellement en vigueur. Le projet de loi couvre tous les aspects non administratifs de l’immigration : la sélection des immigrants, les étrangers qui peuvent ou ne peuvent pas entrer au Canada, l’exécution de la loi, la détention et la mise en liberté, les appels, la protection des réfugiés, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, les infractions en matière d’immigration, et nombre d’autres questions techniques.

CONTEXTE

La récente réforme de l’immigration a commencé, à la fin de 1996, par la nomination d’un groupe de trois personnes chargé de revoir tous les aspects de la Loi sur l’immigration, des politiques et des usages en la matière. Ses membres ont consulté de nombreuses sources et leur rapport a été publié en janvier 1998(1). La ministre de l’époque, poursuivant ses consultations auprès du public, a produit, en janvier 1999, un document de travail qui contribué davantage à la démarche(2). À l’été de 1999, l’arrivée de quatre bateaux de migrants chinois a mis sur la sellette les systèmes canadiens d’immigration et de reconnaissance des réfugiés, une conjoncture qui a intensifié le processus d’examen et de réforme. En mars 2000, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration a apporté sa contribution au débat en déposant un rapport intitulé Protection des réfugiés et sécurité des frontières : trouver un juste milieu.

Une bonne partie de la structure de la Loi sur l’immigration en vigueur aujourd’hui date des années 70. La Commission de l’immigration et du statut de réfugié et le système de détermination du statut de réfugié ont été institués en 1989 et modifiés de façon appréciable au début de 1993. Les autres dispositions de la loi ont été modifiées au début de 1993, et à nouveau en 1995. Ainsi, même si la loi actuelle date du milieu des années 70, il n’en est pas moins vrai qu’elle a fait l’objet, depuis, de nombreuses modifications. On ne peut nier, par ailleurs, que sa complexité se soit accrue de façon notable au cours de ce processus.

QUESTIONS GÉNÉRALES RELATIVES AU PROJET DE LOI

   A. Style

Presque tout le texte du projet de loi C-31 est rédigé dans un langage plus simple que celui de la loi actuelle et le style adopté permet d’éviter les nombreux renvois par numéro d’article qui obscurcissent la compréhension de celle-ci. Les dispositions qui traitent de domaines similaires ont été regroupées. Le projet de loi devrait donc être plus facile d’accès et plus compréhensible. La terminologie a également été simplifiée, un grand nombre de termes ont été éliminés et certains termes nouveaux ont été introduits. Par exemple, le terme « étranger » (« foreign national » dans la version anglaise) désigne toute personne à l’exclusion des citoyens canadiens. Il est intéressant de noter que le terme « immigrant » n’apparaît pas dans le projet de loi, ni le terme « visiteur ». Pour la première fois, le législateur renvoie à des instructions données par le ministre qui ne sont pas des règlements.

Le projet de loi, s’il est adopté, donnera une loi beaucoup plus concise que la loi en vigueur. Un certain nombre de facteurs contribuent à cette concision, parmi lesquels les regroupements que nous venons de signaler. Un autre facteur important est l’étendue considérable des pouvoirs réglementaires prévus par le projet de loi(3). Il en résulte qu’une simple lecture de la loi ne donne pas un tableau complet du programme d’immigration et d’accueil des réfugiés.

Le fait que le législateur ait ainsi élargi le champ de la réglementation a créé une certaine confusion quant l’interprétation du contenu du projet de loi. Un grand nombre de communiqués de presse ont attiré l’attention sur des enjeux que n’aborde pas le projet de loi lui-même, mais qui sont liés aux changements réglementaires ou administratifs visés par le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration. Il faut donc faire preuve de circonspection lorsqu’on tient compte des réactions du public au projet de loi(4).

À maints égards, le projet de loi reflète la loi en vigueur, même si les importants remaniements du texte peuvent obscurcir cette réalité.

   B. Définitions (article 2)

Les différences de style entre la loi actuelle et le projet de loi sautent aux yeux. La section des définitions de la loi actuelle présente 47 définitions, alors que celle du projet de loi n’en comporte que cinq dans la version anglaise et trois dans la version française. Bien que cette simplification ait du mérite, elle ne va pas sans soulever certains problèmes. Par exemple, on ne trouve pas, dans le projet de loi, de définition de « résident permanent ». On n’y trouve pas non plus de définition de « mesure de renvoi » qui laisse entendre, comme c’est le cas dans la loi en vigueur, qu’il pourrait y avoir différentes sortes de mesures (même si pareille précision pourrait être apportée dans les règlements). Ainsi qu’il a déjà été signalé, le terme « immigrant » tomberait en désuétude. Un certain nombre de définitions clés sont fournies ailleurs dans le projet de loi, mais plusieurs ne figureraient que dans les règlements. La loi pourrait, de ce fait, devenir plus hermétique.

Deux définitions seraient nouvelles. Ainsi qu’il a été signalé ci-dessus, le terme « foreign national » (version anglaise seulement) désignerait toute personne qui n’a pas le statut de citoyen canadien. Il pourrait laisser entendre implicitement que le statut de résident permanent est en fait accidentel et peut être retiré dans des circonstances particulières. Le renvoi à la Convention contre la torture est également nouveau et devient important dans le contexte de la protection des réfugiés. L’annexe du projet de loi reprendrait la définition du terme « torture » qui figure à l’article 1 de la Convention.

   C. Objet de la loi (article 3)

L’article 3 subdiviserait l’objet de la nouvelle loi selon qu’il s’agit d’immigration ou de réfugiés. Tous les objectifs de la loi actuelle, à une exception près, seraient retenus avec quelques changements mineurs de formulation. L’exception concerne « la réalisation des objectifs démographiques […] en ce qui concerne le chiffre, le taux de croissance, la structure et à la répartition géographique de la population canadienne ». Il n’y aurait donc plus aucun lien direct entre les facteurs démographiques et l’immigration dans la nouvelle loi(5). Par contre, un nouvel objectif en matière d’immigration serait de permettre d’atteindre, grâce à l’adoption de normes uniformes et un traitement rapide, les objectifs que se sont fixés les gouvernements fédéral et provinciaux.

Les objectifs qui concernent les réfugiés seraient considérablement élargis. L’article 3 comporterait une série d’objectifs généraux : protection et réinstallation des réfugiés, mise en place d’une procédure équitable et efficace pour assurer l’intégrité du système de protection des réfugiés, importance de l’intégration des réfugiés et promotion, « à l’échelle internationale, de la sécurité et de la justice par l’interdiction du territoire aux étrangers et demandeurs d’asile qui sont de grands criminels ou constituent un danger pour la sécurité ».

La loi devrait être interprétée et appliquée de manière à promouvoir les intérêts du Canada, à encourager la responsabilisation et la transparence, à faciliter la coopération entre les gouvernements canadiens et les gouvernements et organismes étrangers et à garantir que ceux qui veulent être admis au Canada seront traités de façon conforme à la Charte canadienne des droits et libertés(6).

   D. Mise en application (articles 4 à 6)

Ces dispositions établissent que le gouverneur en conseil pourrait, sous réserve des autres dispositions de la loi, prendre les règlements d’application qui sont prévus dans la loi et ceux qui, tout en n’étant pas cités, seraient jugés nécessaires à son application. Le ministre pourrait désigner les personnes qu’il chargerait, à titre d’agents, de l’administration de la loi, bien qu’un nombre limité d’attributions, nommément désignées, ne pourraient être déléguées. Comme à l’heure actuelle, ces restrictions concerneraient des décisions pouvant avoir des conséquences graves telles que l’interdiction de territoire pour des motifs liés à l’intérêt national, le dépôt d’un certificat de sécurité et les dispositions régissant le refoulement d’une personne ayant le statut de réfugié.

   E. Accords internationaux (articles 7 à 10)

Comme dans le cadre de la loi actuelle, le projet de loi autoriserait le ministre, avec l’agrément du gouverneur en conseil, à conclure des accords avec des gouvernements étrangers pour l’application de la loi. À titre d’exemple, cette disposition lui permettrait de conclure un accord régissant le refoulement des demandeurs du statut de réfugié. Le projet de loi lui conférerait également le pouvoir de conclure des accords avec les organisations internationales; il s’agirait d’une nouvelle attribution. Le pouvoir de conclure des accords avec les provinces serait maintenu sous réserve de la publication annuelle de la liste des accords en vigueur.

L’article 9 précise les règles qui gouverneraient l’admission des résidents permanents dans une province avec laquelle un accord a été conclu. Les répondants refusés pour des motifs financiers devraient utiliser les mécanismes d’appel provinciaux et, sauf stipulation contraire, ils ne pourraient pas en appeler au titre de la loi, sauf pour des motifs d’ordre humanitaire.

Comme dans la loi actuelle, l’article 10 exigerait que le ministre consulte les provinces sur les futurs niveaux d’immigration, la répartition des immigrants au Canada (compte tenu des besoins économiques et démographiques régionaux) et les mesures d’intégration. Une nouvelle disposition autoriserait le ministre à consulter les provinces sur les orientations et les programmes en vue de faciliter la coopération et de permettre au gouvernement fédéral de prendre en considération les effets de la loi sur les provinces.

PARTIE 1 : IMMIGRATION AU CANADA

   A. Section 1 — Formalités préalables à l’entrée et sélection (articles 11 à 14)

      1. Formalités préalables à l’entrée

L’article 11 confirme le principe fondamental de la loi actuelle selon lequel l’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les documents requis par règlement. L’article 8 de la loi actuelle porte que quiconque cherche à entrer au Canada est présumé être immigrant sauf s’il fait la preuve du contraire; cette présomption, vu la double intention du paragraphe 20(4), ne serait pas maintenue. Il s’agirait d’un changement appréciable, propre à faciliter le séjour temporaire, mais légitime, des étrangers qui souhaitent demander un statut de résident permanent ou qui en ont déjà fait la demande.

      2. Sélection des résidents permanents

L’article 12 précise les trois grandes catégories d’immigrants et leurs caractéristiques essentielles. Ainsi, les étrangers seraient sélectionnés dans la catégorie « immigration économique » sur la base de leurs possibilités de s’établir avec succès sur le plan économique au Canada.

Les membres de la catégorie « regroupement familial » devraient avoir un lien de parenté avec un citoyen canadien ou un résident permanent à titre d’époux, de conjoint de fait, d’enfant ou d’autre membre de la famille prévu par règlement. Les termes « conjoint de fait » et « enfant » ne sont pas définis dans le projet de loi; leur définition est renvoyée aux règlements(7).

La troisième grande catégorie, qui s’applique aux réfugiés au sens de la Convention, et aux personnes à protéger se subdivise en quatre sous-catégories : « réfugiés au sens de la Convention – outremer », « humanitaire », « réfugiés au sens de la Convention –Canada » et « personnes à protéger ». Les termes « réfugiés au sens de la Convention » et « personnes à protéger » sont tous deux définis dans la partie 2 du projet de loi, qui traite de la protection des réfugiés.

      3. Régime de parrainage

L’article 13 dispose que tout citoyen canadien ou tout résident permanent pourrait parrainer l’entrée et le séjour d’un étranger de la catégorie « regroupement familial » et que tout groupe pourrait parrainer un étranger faisant partie des catégories « réfugiés au sens de la Convention – outremer » ou « humanitaire ». La disposition expresse établissant que l’engagement lierait le répondant et que des agents seraient désignés pour en assurer l’exécution est nouvelle.

      4. Règlements

Les règlements relatifs à cette section pourraient définir n’importe quel terme (notamment, « enfant » et « conjoint de fait ») et établir et régir tous les détails relatifs aux susdites catégories et sous-catégories d’étrangers. Comme c’est le cas actuellement, les critères de sélection pour la catégorie « immigration économique » (le « système de points d’appréciation ») seraient établis par règlement, y compris la pondération des critères et les procédures à suivre pour les appliquer. Il est important de signaler qu’on préciserait les cas où l’agent pourrait substituer aux critères son appréciation de la possibilité qu’a l’étranger de s’établir avec succès sur le plan économique au Canada(8).

Les règlements préciseraient également le nombre de demandes qui pourraient être acceptées, traitées ou approuvées annuellement, le nombre de visas qui pourraient être délivrés et les mesures à prendre en cas de dépassement. Les conditions qui pourraient être imposées à la délivrance de visas seraient établies de même que les dispositions régissant les engagements de parrainage et les sanctions pour inobservation de ceux-ci.

Les règlements permettraient en outre la désignation de catégories de personnes telles que les époux, les travailleurs étrangers ou les étudiants étrangers qui auraient le droit de s’établir au Canada lorsqu’ils seraient déjà sur son territoire.

Puisqu’on envisage de permettre aux institutions ou aux organisations étrangères de faire des recommandations au ministre, voire de prendre des décisions, il serait possible de prendre des règlements pour régir ce processus.

   B. Section 2 — Contrôle (articles 15 à 17)

Ces articles donneraient aux agents le pouvoir de procéder à un contrôle dans le cadre d’une demande présentée par des citoyens canadiens, des résidents permanents ou des visiteurs (des étrangers autres que des résidents permanents) en vue de déterminer si ces personnes peuvent entrer et séjourner au Canada. La formulation « et si, par ailleurs, il peut être interdit de territoire » (en anglais « at any time ») indiquerait que l’interdiction de territoire pourrait survenir en tout temps. L’obligation actuelle de répondre vérifiquement aux questions posées et de présenter les documents requis demeurerait. Les visiteurs devraient se soumettre, sur demande, à une visite médicale. Les pouvoirs, dont jouissent les agents, en vertu de la loi actuelle, d’intercepter des véhicules, de fouiller les passagers, de saisir les documents et d’arrêter les véhicules seraient maintenus.

En plus de régir l’application de la présente section, les règlements pourraient encadrer la mise en œuvre du contrôle et le ministre pourrait donner des instructions à cet égard.

   C. Section 3 — Entrée et séjour au Canada (articles 18 à 28)

      1. Entrée et séjour

Le projet de loi, tout comme la loi actuelle, porte que quiconque chercherait à entrer au Canada serait tenu de se soumettre au contrôle prescrit(9). Tout citoyen canadien et toute personne inscrite comme Indien en vertu de la Loi sur les Indiens aurait le droit d’entrer et de demeurer au Canada cependant que tout étranger ayant le statut de résident permanent pourrait entrer si l’agent établissait qu’il avait cette qualité et continuait à se conformer à la loi.

      2. Autorisation d’entrer et de séjourner

En vertu de ces articles, l’agent pourrait admettre quelqu’un à titre de résident permanent si ses papiers étaient en règle et il pourrait conférer à quelqu’un le statut de résident temporaire s’il était sûr de ses intentions. Ainsi qu’il a été signalé précédemment, le terme « visiteur » ne serait plus utilisé. L’introduction, dans le projet de loi, de la notion de « double intention » serait un élément nouveau important. Quiconque aurait l’intention d’obtenir le statut de résident permanent pourrait être autorisé à séjourner au Canada à titre de résident temporaire pourvu que l’agent soit convaincu que la personne en question ne visait rien d’autre, dans l’immédiat, qu’un séjour temporaire.

Comme dans la loi actuelle, l’agent pourrait délivrer un permis, révocable en tout temps, aux personnes interdites de territoires si les circonstances le justifiaient. Le ministre pourrait donner des instructions à cet effet.

L’article 22 maintiendrait l’importante latitude dont jouit le ministre de déroger aux dispositions de la loi et d’octroyer le statut de résident permanent pour des motifs humanitaires ou si l’intérêt public le justifie(10). L’obligation du ministre de prendre en considération les intérêts supérieurs de l’enfant directement touché par la décision serait nouvelle. Cette disposition reflète la décision prise en juillet 1999 par la cour Suprême du Canada dans l’affaire Baker.

Les règlements régiraient l’application des articles de la présente section.

      3. Droits et obligations des résidents permanents et des résidents temporaires

Le projet de loi préciserait les droits et les obligations des résidents permanents, une question qui, depuis des années, pose problème(11). La règle principale, qui admettrait d’importantes exceptions, imposerait à quiconque voudrait conserver le statut de résident permanent l’obligation d’être effectivement présent au Canada pendant au moins deux ans (730 jours) pour chaque période de cinq ans de résidence. Certaines personnes seraient réputées être effectivement présentes au Canada, même si elles ne s’y trouvaient pas :

  1. L’époux, le conjoint de fait ou l’enfant d’un citoyen canadien accompagnant celui-ci. Tout motif d’absence serait valable.

  2. Le résident permanent employé à temps plein par une entreprise canadienne ou par l’administration publique fédérale ou provinciale, ainsi que l’époux, le conjoint de fait et l’enfant qui l’accompagneraient.

En plus de ces dispositions précises, les règlements pourraient régir « la présence effective au Canada, [et] les circonstances dans lesquelles un étranger est réputé être effectivement présent… ». Ainsi, même si l’article 24 autorisait à considérer qu’il y a résidence en cas d’absence d’un résident permanent pour raisons d’emploi, les règlements pourraient ouvrir la porte aux travailleurs autonomes ou à ceux qui sont employés par des entreprises établies outremer, ce qui pourrait aggraver le problème des résidents permanents absents.

Ces dispositions devraient être prises en compte de concert avec celles du nouveau projet de loi sur la citoyenneté déposé devant le Parlement(12); ce projet de loi exigerait une présence effective au Canada au cours de trois des six ans qui précèdent la demande de citoyenneté.

L’article 26 aborde la question des droits qu’auraient les enfants de résidents permanents de fréquenter l’école. En général, tous les enfants devraient être autorisés à fréquenter l’école jusqu’au niveau universitaire; toutefois, si un parent n’avait pas l’autorisation de travailler ou d’étudier, l’enfant devrait obtenir une autorisation.

      4. Attestation de résidence

L’article 27 porte que le résident permanent recevrait une attestation de sa qualité, sauf si l’agent en décidait autrement(13). Le gouvernement a introduit pour la première fois le principe d’une telle carte dans le projet de loi C-86 adopté par le Parlement en 1992. Des cartes pourraient également être remises aux résidents temporaires.

      5. Règlements

Les règlements pourraient régir l’application de la présente section, y compris les définitions, les catégories de résidents temporaires telles que les étudiants et les travailleurs, et les critères de sélection. Ainsi qu’il a déjà été noté, les règlements pourraient définir de façon plus précise le concept de « présence effective ».

   D. Section 4 — Interdiction de territoire (articles 29 à 38)

Ces dispositions sont très importantes. L’interdiction de territoire pourrait résulter (sauf indication contraire) d’événements passés, présents et futurs et les motifs invoqués viseraient également l’omission. Bien que la loi actuelle fasse implicitement état de catégories d’événements emportant l’interdiction de territoire, le projet de loi les clarifierait et les simplifierait. Il propose neuf motifs d’interdiction de territoire assortis de certaines sous-catégories. Nous les examinerons dans l’ordre.

Sécurité : Le projet de loi continuerait à tenir pour des motifs d’interdiction de territoire l’espionnage, la subversion contre toute institution démocratique, les actes visant au renversement d’un gouvernement par la force(14), le terrorisme, le danger pour la sécurité du Canada, les actes de violence susceptibles d’infliger des blessures à des Canadiens ou l’affiliation à une organisation impliquée dans des activités d’espionnage, de subversion ou de terrorisme. Néanmoins, comme c’est le cas aujourd’hui, le ministre pourrait autoriser le séjour de personnes à qui ces motifs s’appliqueraient si leur présence n’était pas préjudiciable à l’intérêt national. Cette décision ne pourrait être déléguée.

Atteintes aux droits de la personne : Le projet de loi, en vertu de ce motif, continuerait à imposer l’interdiction de territoire aux auteurs de crimes de guerre et aux personnes de rang élevé au service de régimes qui violent les droits de la personne (en se livrant au terrorisme, à des atteintes graves aux droits de la personne, à des crimes de guerre ou à des crimes contre l’humanité). Actuellement, la liste de ces personnes de haut rang est dressée dans la loi; le projet de loi la renverrait aux règlements(15). Une nouvelle disposition frapperait également d’interdiction de territoire les représentants d’un gouvernement contre lequel le Canada aurait imposé ou convenu d’imposer des sanctions. Comme c’est le cas actuellement, le ministre pourrait autoriser le séjour des personnes décrites dans ce paragraphe si leur présence n’était pas préjudiciable à l’intérêt national. Cette décision ne pourrait être déléguée.

Grande criminalité : Telle que définie, la « grande criminalité » emporterait l’interdiction de territoire pour tout ressortissant étranger demandant un statut de résidence permanente ou temporaire ou, s’il était déjà au Canada, garantirait son renvoi. Une autre disposition pourrait s’appliquer au titre de la protection des réfugiés. Le tableau suivant illustre les règles proposées :

CRIMES COMMIS AU CANADA

CRIME COMMIS À L’EXTÉRIEUR
DU CANADA

Tous les étrangers :

Déclaration de culpabilité relative à une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal égal ou supérieur à 10 ans OU peine d’emprisonnement de plus de 6 mois.

Tous les étrangers :

Déclaration de culpabilité relative à une infraction commise à l’extérieur du Canada qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal égal ou supérieur à 10 ans. Réhabilitation possible.

 

Perpétration à l’extérieur du Canada d’un acte qui est une infraction là où il a été commis et qui, commis au Canada, serait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal égal ou supérieur à 10 ans. Réhabilitation possible.

Aux fins de la protection des réfugiés :

Déclaration de culpabilité relative à une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal égal ou supérieur à 10 ans ET peine d’emprisonnement d’au moins deux ans.

 

Note : Il n’y a pas de mention, dans la loi actuelle, d’une peine de prison, et la personne ne perd son droit de demander asile ou n’est déportée que si elle constitue un danger pour la sécurité publique au Canada(16).

Aux fins de la protection des réfugiés :

Déclaration de culpabilité relative à une infraction commise à l’extérieur du Canada qui, si commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal égal ou supérieur à 10 ans. Réhabilitation possible.

Note : Il faut actuellement que l’on ait conclu que la personne constitue un danger pour la sécurité publique au Canada.

Criminalité : Pour les résidents non permanents, les normes susdites s’appliquent, de même que les normes suivantes, qui visent les crimes moins graves.

CRIMES COMMIS À L’INTÉRIEUR DU CANADA – RÉSIDENTS
NON PERMANENTS

CRIMES COMMIS À L’EXTÉRIEUR DU CANADA – RÉSIDENTS
NON PERMANENTS

Déclaration de culpabilité relative à une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation (même s’il s’agit d’une mise en accusation par procédure sommaire) ou à deux infractions punissables par procédure sommaire, qui ne découlent pas des mêmes faits.

Déclaration de culpabilité relative à une infraction qui, commise au Canada, serait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou à deux infractions qui ne découlent pas des mêmes faits et qui seraient des infractions à une loi fédérale punissables par procédure sommaire. Réhabilitation possible.

Perpétration, lors de l’entrée au Canada, d’une infraction qui constitue une infraction précisée par règlement à une loi fédérale (il s’agit d’une nouvelle disposition(17)).

Perpétration d’un acte considéré comme une infraction là où il a été commis et qui, si commis au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation. Réhabilitation possible.

Le terme « réhabilitation possible » dans les tableaux précédents signifie que le ministre aurait le pouvoir de décider si la personne avait été réhabilitée au terme d’un délai réglementaire ou si elle faisait partie d’une catégorie de personnes présumées réhabilitées.

Crime organisé : L’appartenance à un groupe qui se livre à des activités criminelles organisées continuerait à emporter interdiction de territoire. La description de ce qui constitue une activité criminelle organisée comprendrait les nouvelles catégories « passage de clandestin », « trafic de personnes » et « recyclage des produits de la criminalité ». Le ministre aurait le pouvoir d’autoriser le séjour au Canada de telles personnes s’il était convaincu que leur présence ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national. Cette prérogative ne pourrait être déléguée. Une nouvelle disposition garantirait que les personnes introduites au Canada par suite d’activités criminelles organisées ne pourraient faire l’objet d’une interdiction de territoire pour ce seul motif. Cette disposition reflète l’opinion selon laquelle les personnes que les membres du crime organisé font entrer au Canada sont en fait des victimes.

Santé : Les motifs invoqués au titre de la loi actuelle continueraient à s’appliquer. Une personne serait frappée d’interdiction de territoire s’il existait des motifs de croire qu’elle représenterait un danger pour la santé ou la sécurité publiques ou un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé. Les résidents permanents ne pourraient pas être renvoyés pour ce motif.

Motifs financiers : Les motifs actuels continueraient à s’appliquer. Une personne serait frappée d’interdiction de territoire si elle n’avait ni la capacité ni la volonté de subvenir à ses propres besoins ou à ceux de toute personne à sa charge sans faire appel à l’assistance sociale. Les résidents permanents ne pourraient pas être renvoyés pour ce motif.

Fausses déclarations : Actuellement, un résident permanent peut être dénoncé s’il a été reçu sur présentation de documents frauduleux ou « grâce à des moyens frauduleux ou inopportuns ou d’une présentation erronée de faits importants ». Le projet de loi simplifie cette disposition et élargit peut-être quelque peu sa portée en précisant qu’un étranger pourrait être interdit de territoire s’il faisait, directement ou indirectement, une présentation erronée de faits importants ou les dissimulait, ce qui aurait ou pourrait avoir pour effet d’entraîner une erreur dans l’application de la loi. Si c’était le répondant qui avait fait une fausse déclaration, le ministre pourrait exercer sa discrétion. Un réfugié dont le statut aurait été modifié pour fausse déclaration tomberait également sous le coup d’une telle interdiction de territoire, qui resterait en vigueur pour une période de deux ans.

Manquement à la loi : Un étranger qui n’a pas obtenu le statut de résident permanent serait interdit de territoire s’il contrevenait à une quelconque disposition de la loi. Les résidents permanents ne pourraient être frappés d’interdiction en vertu de cette disposition générale que s’ils enfreignaient l’obligation de présence effective.

Le paragraphe 37(2) modifierait le traitement des groupes familiaux prescrit par la loi actuelle. Si les personnes à charge qui accompagnent — ou, dans les cas réglementaires, celles qui n’accompagnent pas — la personne en cause étaient interdites de territoire, le groupe familial tout entier en serait frappé.

Les règlements pourraient régir l’application de la présente section et définir les termes. Ils pourraient également établir les circonstances dans lesquelles une catégorie d’étrangers pourrait être exemptée de l’application de ces dispositions. Ces prérogatives pourraient, par exemple, être utilisées pour exempter de toute obligation médicale les réfugiés sélectionnés à l’étranger ou les membres désignés de leur famille.

   E. Section 5 — Perte de statut et renvoi (articles 39 à 49)

      1. Constat de l’interdiction de territoire

Alors que la loi actuelle est une mosaïque complexe de constats et de distinctions, le projet de loi stipule simplement que si un agent estimait qu’un étranger était interdit de territoire au Canada, il pourrait établir un rapport circonstanciel et le transmettre au ministre (lequel en déléguerait la réception comme il se doit).

Le ministre pourrait, s’il considérait que le rapport était fondé, déférer le cas à la Section de l’immigration pour la tenue d’une enquête ou, si les règlements le prévoyaient, prendre contre l’étranger une mesure de renvoi immédiate. Sous le régime de la loi actuelle, les agents de l’immigration peuvent prendre eux-mêmes, dans certaines circonstances, les mesures de renvoi. Reste à voir si la nouvelle loi leur octroiera une plus grande latitude.

      2. Enquête par la section de l’immigration

La Section d’arbitrage de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié deviendrait la Section de l’immigration et le terme « enquête » serait maintenu (le terme « inquiry » dans la version anglaise serait remplacé par « admissibility hearing »). La Section de l’immigration, au terme de l’enquête, pourrait autoriser l’entrée d’un citoyen, d’un résident permanent ou d’un résident temporaire ou prendre des mesures de renvoi.

Les modalités de l’enquête sont précisées dans le cadre d’un bref article (article 40) qui ne parle pas du statut des agents qui en sont chargés. Ceux-ci portent, sous le régime de la loi actuelle, le titre de « juges ». Les questions de procédure et les droits des parties sont couverts dans la partie 4 du projet de loi.

      3. Fin du statut de résident

Même si le statut de résident permanent n’est pas défini dans la nouvelle loi, les articles 41 et 42 traitent de la perte de ce statut. Le statut de résident permanent prendrait fin à l’obtention de la citoyenneté canadienne. Il cesserait aussi lorsque le manquement à l’obligation de résidence aurait été constaté et après qu’on aurait tenu compte des circonstances d’ordre humanitaire, y compris celles relatives à l’enfant directement touché. Il prendrait fin également lorsqu’une mesure de renvoi deviendrait exécutoire ou lorsque la demande d’asile d’un réfugié serait annulée en dernier ressort.

Les résidents temporaires perdraient leur statut à l’expiration de la période de séjour autorisé au Canada, en raison d’un manquement aux conditions rattachées à ce séjour ou à la révocation de l’autorisation de séjourner.

      4. Exécution des mesures de renvoi

En général, serait exécutoire la mesure de renvoi non susceptible d’appel. En cas de mesure susceptible d’appel, il faudrait attendre, pour que la mesure de renvoi devienne exécutoire, que toutes les procédures aient été suivies.

Les demandeurs d’asile continueraient, comme maintenant, à faire l’objet de mesures de renvoi conditionnel qui deviendraient exécutoires peu de temps après le constat d’irrecevabilité de la demande d’asile ou quand il y aurait eu décision sur la demande ou sur l’appel interjeté. Par conséquent, il n’y aurait pas automatiquement de sursis à l’exécution d’une mesure de renvoi si un demandeur d’asile dont la demande avait été refusée demandait un contrôle judiciaire(18).

Tout comme sous le régime de la loi actuelle, la mesure de renvoi exécutoire serait appliquée dès que les circonstances le permettraient. Comme c’est le cas actuellement, les personnes concernées pourraient solliciter un sursis auprès du tribunal; le ministre devrait pouvoir présenter ses observations. Le ministre pourrait préciser les pays pour lesquels une mesure de renvoi pourrait faire l’objet d’un sursis temporaire. Cette prérogative serait assujettie aux règlements; une telle liste reprendrait vraisemblablement la courte liste officieuse actuelle de pays vers lesquels le Canada ne procède habituellement à aucun renvoi et elle pourrait inclure d’autres pays susceptibles de produire des réfugiés.

      5. Effet de la mesure de renvoi

Comme c’est actuellement le cas, les personnes qui feraient l’objet d’une mesure de renvoi exécutoire ne pourraient pas revenir au Canada sans autorisation ni sans s’acquitter des obligations financières découlant des mesures de renvoi (établies par règlement). Si une personne n’ayant pas droit d’appel avait été renvoyée du Canada et si la mesure de renvoi avait été cassée à la suite d’un contrôle judiciaire, l’étranger visé pourrait revenir au Canada aux frais du ministre.

      6. Règlements

Comme dans les autres sections du projet de loi, les règlements pourraient régir l’application de la présente section. On cherche en vain, dans le projet de loi, la description des diverses catégories de mesures de renvoi que propose la loi actuelle. Il est probable que les pouvoirs généraux et particuliers que confère l’article 49 seront utilisés à cette fin.

   F. Section 6 — Détention et mise en liberté (articles 50 à 55)

À quelques exceptions près, le projet de loi C-31 maintiendrait les dispositions de la loi actuelle sur la détention. Un agent pourrait détenir un étranger, dès son entrée, pour des raisons administratives, à savoir si la procédure de contrôle était différée ou jusqu’à la tenue de l’enquête. L’agent pourrait également détenir l’étranger dès son entrée s’il soupçonnait que celui-ci était interdit de territoire pour des raisons de sécurité ou pour atteinte aux droits de la personne. Ces dispositions sont analogues à celles de la loi actuelle.

Les principaux motifs de détention continueraient d’être que la personne constitue un danger pour la sécurité publique, qu’il est peu probable qu’elle se soumette à une procédure la visant aux titres de la présente loi ou qu’elle n’a pas pu établir son identité. La structure actuelle du contrôle serait maintenue. Un agent pourrait ordonner la mise en liberté dans les 48 heures; après 48 heures ou peu de temps après, la Section de l’immigration contrôlerait les motifs justifiant la détention. Par la suite, l’étranger comparaîtrait pour un autre contrôle après sept jours, puis une fois tous les 30 jours. Dans le cadre du système actuel, les personnes détenues pour des motifs d’identité ou de sécurité et de droits de la personne sont soumises à un contrôle tous les sept jours, mais aucun passage à un contrôle aux 30 jours n’est prévu.

Le projet de loi introduirait la notion de « coopération » des personnes détenues pour défaut de fournir leur identité. Ces personnes pourraient être remises en liberté si elles coopéraient avec le ministre en lui fournissant des renseignements utiles à l’établissement de leur identité et si celle-ci était établie ou ne pouvait l’être malgré les efforts valables du ministre, ou encore si le ministre n’avait pas fait des efforts valables pour enquêter sur l’identité de l’intéressé.

Ces dispositions inciteraient fortement les personnes non identifiées à coopérer en fournissant les renseignements nécessaires aux agents. À défaut de cette coopération, elles ne seraient remises en liberté que si le ministre n’avait pas fait des efforts valables pour enquêter sur leur identité.

Actuellement, il n’y a pas de règlement sur la détention, même si la Commission de l’immigration et du statut de réfugié et le ministère ont élaboré des lignes directrices sur la détention. Le projet de loi dispose que les règlements pourraient régir les conditions de mise en liberté ainsi que les motifs et les critères s’y rapportant. Les critères relatifs au maintien en détention pourraient également être élaborés de même que toute règle spéciale pour les enfants mineurs.

Bien que la documentation relative au projet de loi établisse que les personnes entrant au Canada à titre de membres d’un réseau de contrebande organisé seraient détenues, le projet de loi ne comporte aucune disposition à cet égard. Il est vraisemblable que le législateur veut renvoyer ce motif de détention dans les règlements comme un facteur à considérer pour évaluer les risques d’évasion. Il semble toutefois que l’inclusion de cette disposition dans le projet de loi lui-même pourrait envoyer un message dissuasif beaucoup plus percutant aux contrebandiers et à leurs victimes.

   G. Section 7 — Droit d’appel (articles 56 à 65)

Tout comme dans la loi actuelle, certains groupes auraient le droit d’en appeler devant la Section d’appel de l’immigration d’un refus ou d’une mesure de renvoi alors que pour d’autres, ces droits seraient éliminés ou restreints.

En règle générale, les répondants des membres de la catégorie de la famille auraient le droit d’en appeler d’un refus; les résidents permanents et les réfugiés au sens de la Convention pourraient interjeter appel d’une mesure de renvoi tout comme les étrangers qui auraient perdu leur statut de résident permanent. Un appel pourrait porter sur une question de droit ou de fait ou sur des motifs d’ordre humanitaire. Le ministre pourrait également en appeler pour des motifs de droit ou de fait de toute décision rendue dans le cadre d’une enquête. La section devrait tenir compte de l’intérêt supérieur de tout enfant directement touché par une décision.

D’autre part :

  1. La Section d’appel de l’immigration ne pourrait tenir compte de motifs d’ordre humanitaire que si elle était convaincue que les personnes concernées étaient, au sens des règlements, des répondants et des membres de la catégorie de la famille. Cela permettrait de clarifier les dispositions en vigueur. Les répondants rejetés pour fausse déclaration ne pourraient en appeler que si ces fausses déclarations concernaient un époux, un conjoint de fait ou un enfant.

  2. Ne serait pas entendue la personne qui en appellerait de la perte du statut de résident permanente en raison du défaut de respecter les conditions de résidence. L’appel serait traité sur dossier et l’appelant pourrait présenter ses observations.

  3. Aucun appel ne pourrait être formé par l’étranger interdit de territoire pour sécurité, atteinte aux droits de la personne, grande criminalité au Canada ayant entraîné une peine d’emprisonnement d’au moins deux ans, ou criminalité organisée. Cette disposition est plus restrictive que le régime actuel (le projet de loi décrit le critère pour chacun de ces termes à la section 4).

  4. Comme c’est actuellement le cas, les personnes qui auraient été visées par un certificat de sécurité qui n’aurait pas été annulé par la Cour fédérale n’auraient pas droit à une enquête et n’auraient pas droit d’appel.

La limitation des droits d’appel en raison de la grande criminalité est une disposition qui se démarquerait radicalement du système actuel, en vigueur depuis l’adoption du projet de loi C-44 en 1995. Actuellement, les résidents permanents qui ont été déclarés coupables d’une infraction entraînant un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans ne sont pas autorisés à interjeter appel devant la Section d’appel de l’immigration si le ministre établit qu’ils constituent un danger pour le public au Canada. La procédure administrative menant à cette décision s’amorce dans les bureaux locaux et la décision est prise à Ottawa. Elle implique l’étude pondérée d’un certain nombre de facteurs concernant le crime, les circonstances et le délinquant. Cette procédure est, dans le projet de loi, remplacée par le fait objectif d’un emprisonnement d’au moins deux ans.

Autre écart par rapport à la loi actuelle : l’élimination du droit d’appel devant la Section d’appel pour les personnes interdites de territoire aux motifs de la sécurité, du crime organisé ou d’atteinte aux droits de la personne. Actuellement, à moins qu’il n’existe un certificat de sécurité, ces personnes ont le droit d’en appeler.

La Section d’appel de l’immigration ne pourrait réviser la décision rendue sur un appel que s’il y avait eu manquement aux principes de justice naturelle et si la personne concernée était toujours au Canada. Par conséquent, la production de nouveaux éléments de preuve ne pourrait justifier une révision.

   H. Section 8 — Contrôle judiciaire (articles 66 à 69)

Le contrôle judiciaire exercé par la Cour fédérale serait maintenu pour toute mesure prise dans le cadre de la loi actuelle. En vertu de celle-ci, les litiges qui concernent les décisions prises par un agent des visas outremer n’exigent pas le dépôt d’une demande d’autorisation devant la Cour fédérale. Cette disposition serait modifiée de sorte que toutes les demandes de contrôle judiciaire devraient dorénavant être autorisées. Autrement, les règles qui régissent la demande de contrôle judiciaire, et le contrôle lui-même, seraient pratiquement identiques à ce qui est prévu par la loi actuelle.

Il est important de noter que les personnes (y compris celles qui appartiennent aux nouvelles catégories décrites ci-dessus) à qui on refuserait le droit d’en appeler d’une mesure de renvoi continueraient à avoir le droit de faire une demande de contrôle judiciaire, avec l’autorisation du tribunal.

   I. Section 9 — Examen de renseignements à protéger (articles 70 à 81)

      1. Examen à la demande du ministre et du solliciteur général

La loi actuelle contient des dispositions permettant de traiter les cas de renvois fondés sur des documents confidentiels que le gouvernement tient à traiter comme tels, en tout ou en partie. Dans ces cas, le solliciteur général et le ministre de la Citoyenneté et de l’immigration préparent un rapport conjoint ou signent un certificat alléguant que la personne est interdite de territoire et précisant les motifs. S’il s’agit d’un résident permanent, le rapport est déposé devant le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité qui enquête sur les motifs fondant la décision et adresse ses conclusions au gouverneur en conseil. Ce dernier, s’il souscrit au rapport, enjoint au ministre de délivrer un certificat et la personne peut être renvoyée.

Pour les résidents non permanents, le solliciteur général et le ministre déposent à la Cour fédérale le certificat pour examen par le juge en chef ou par un juge désigné qui peut l’entériner ou l’annuler. Chaque type de procédure est assorti de dispositions particulières sur la confidentialité. Le juge peut examiner l’affaire en l’absence de la partie en cause; celle-ci reçoit alors un résumé de la preuve.

Le projet de loi C-31 éliminerait tout écart de procédure entre les résidents permanents et les autres. Les étrangers, quel que soit leur statut, recevraient un certificat établi conjointement qui a été examiné par la Cour fédérale. La plupart des dispositions relatives à cette procédure seraient identiques à celles que prescrit la loi actuelle, mais pourraient inclure en outre l’avis de danger que devrait produire le ministre pour justifier la déportation d’un réfugié. Une nouvelle disposition enjoindrait au juge de procéder, dans la mesure où les circonstances et les considérations d’équité et de justice naturelle le permettraient, sans formalisme et en procédure expéditive.

      2. Détention

Sous le nouveau régime, le résident permanent visé par le certificat mentionné ci-dessus pourrait être mis en détention si les ministres avaient des motifs raisonnables de croire qu’il constituerait un danger pour la sécurité nationale ou la sécurité d’autrui ou qu’il serait improbable qu’il comparaisse. Tout résident non permanent visé à un certificat devrait être mis en détention.

Dans les 48 heures suivant le début de la détention d’un résident permanent, le juge entreprendrait le contrôle des motifs qui la justifient, puis au moins une fois tous les six mois, ou plus fréquemment s’il le jugeait utile. La loi actuelle continuerait à s’appliquer aux autres personnes mises en détention dans ces circonstances. Ces personnes pourraient demander leur mise en liberté au ministre, si elles voulaient quitter le Canada, ou au juge, si la mesure de renvoi les visant n’avait pas été exécutée dans les 120 jours suivant la décision de la Cour fédérale sur le certificat. Le juge pourrait alors ordonner la mise en liberté si le renvoi n’était pas envisagé et si la mise en liberté ne constituait pas un danger pour la sécurité nationale ou la sécurité d’autrui.

      3. Examen dans le cadre d’une enquête, d’un contrôle de détention, d’un appel
          en matière d’immigration et d’une demande de contrôle judiciaire

Les dispositions de la loi en vigueur sur la confidentialité s’appliquant aux audiences de la Section d’appel de l’immigration, aux contrôles de la détention ou à certains contrôles judiciaires seraient regroupées; des règles de confidentialité concernant les enquêtes viendraient s’y ajouter. (Aucune disposition de cette nature ne s’applique actuellement aux enquêtes). Dans chaque cas, le ministre pourrait faire une demande de non-divulgation de l’information. Les règles énoncées pour le traitement des certificats par la Cour fédérale s’appliqueraient, avec les adaptations nécessaires, la mention de juge valant mention de la personne présidant l’audience. Dans le cadre des procédures de contrôle judiciaire, le juge ne serait pas tenu de fournir un résumé à la personne concernée, sans doute parce que celle-ci aurait déjà en main le dossier relatif à la décision.

   J. Section 10 — Dispositions générales (articles 82 à 87)

Cette section maintiendrait les dispositions actuelles établissant que des prêts peuvent être consentis. Les règlements porteraient sur les catégories de bénéficiaires et les fins auxquelles ces prêts peuvent être consentis.

La délivrance de cartes d’assurance sociale indiquant que le titulaire est tenu d’obtenir une autorisation pour occuper un emploi au Canada se poursuivrait.

L’article 84 autoriserait l’incorporation par renvoi de documents qui n’émanent pas du gouverneur en conseil, conformément à la loi en vigueur. L’incorporation ne conférerait pas aux documents valeur de règlement. Ces documents pourraient par exemple comprendre les normes externes permettant d’évaluer le niveau d’étude ou les qualifications professionnelles.

Enfin, comme le prévoit la loi actuelle, le ministre serait tenu de déposer son rapport devant le Parlement au plus tard le 1er novembre de chaque année. Ce rapport combinerait un rapport annuel et le rapport intitulé aujourd’hui « rapport sur les niveaux », lequel établit les niveaux d’immigration projetés pour l’année suivante. Pour l’année précédente, l’information fournie préciserait le nombre d’étrangers sélectionnés dans les diverses catégories, des renseignements sur les accords conclus avec les provinces, le nombre de permis délivrés, le nombre de personnes autorisées par le ministre à entrer au Canada et à y séjourner pour des motifs d’ordre humanitaire, ainsi que des renseignements sur les prêts.

PARTIE 2 : PROTECTION DES RÉFUGIÉS

   A. Section 1 — Notion d’asile, de réfugié au sens de la Convention et de personne
        à protéger (articles 88 à 92)

Cette section commence par les trois définitions suivantes : « asile », « réfugié au sens de la Convention » et « personne à protéger ». La définition de « réfugié au sens de la Convention » ne changerait pas. Le terme général « asile » décrit la protection accordée aux diverses catégories de personnes protégées en vertu de la nouvelle loi; dans la loi actuelle, seuls les réfugiés au sens de la Convention sont reconnus.

Une « personne à protéger » pourrait appartenir à une catégorie de personnes reconnues par règlement ou selon la loi. À un ajout près, cette définition refléterait étroitement la définition actuelle de « demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada ». Cette catégorie offrirait aux demandeurs du statut de réfugié que la Commission de l’immigration et du statut de réfugié n’a pas reconnus comme des réfugiés au sens de la Convention la possibilité de demander au ministère qu’il tienne compte des motifs généraux fondés sur le risque.

La définition équivalente que proposent les règlements actuels d’une « personne à protéger » est élargie dans le projet de loi par la mention des étrangers pour lesquels il existe des raisons substantielles de croire qu’ils seraient soumis à la torture s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine. Même si on tenait compte de cet ajout, le critère resterait très strict. La personne devrait être exposée à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou de peines cruels et inusités. Néanmoins, le risque devrait être de nature personnelle (au sens où d’autres personnes se trouvant dans ce pays ne seraient pas exposées au même risque) et exister en tout lieu de ce pays. Ce risque ne pourrait résulter de sanctions légitimes, sauf celles infligées au mépris des normes internationales (« persécution » et non « poursuite ») ni être lié à l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats. L’application de ces critères par les agents ministériels a donné lieu à un taux d’acceptation très bas.

L’ajout des « personnes à protéger » à la définition de « réfugiés au sens de la Convention » s’avère nécessaire si on veut regrouper la plupart des décisions de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qui sont fondées sur le risque. Cette stratégie a reçu l’appui de nombreux observateurs du système, y compris celui exprimé par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration dans ses deux derniers rapports. Ainsi, bien qu’il semble que les modifications proposées aient tendance à étendre la portée de la notion de « réfugié », elles codifient tout simplement les mécanismes dont disposent, depuis quelque temps, les demandeurs du statut de réfugié.

Les demandes d’asile pourraient, comme c’est le cas actuellement, être faites à l’extérieur ou à l’intérieur du Canada. Dans le premier cas, la demande serait traitée comme une demande d’immigration en vertu de la partie 1 de la nouvelle loi. Les demandes faites au Canada seraient adressées à la Commission de l’immigration; en cas d’accueil de leur demande, la plupart des demandeurs pourraient demander le statut de résidents permanents en vertu de la Partie 1, comme c’est le cas actuellement(19).

   B. Section 2 — Réfugiés et personnes à protéger (articles 93 à 106)

      1. Demande d’asile

Ainsi que cela se produit maintenant, une personne au Canada pourrait demander asile en vertu de la nouvelle loi si elle n’est pas sous le coup d’une mesure de renvoi. Les dispositions de la Partie 1 continueraient à s’appliquer et comprendraient, par exemple, des questions telles que la détention, les définitions relatives à l’interdiction de territoire (sécurité, grande criminalité, etc.) ainsi que le processus d’octroi de certificat décrits ci-dessus.

      2. Contrôle de la recevabilité de la demande d’asile

Le concept de la recevabilité de la demande d’asile serait maintenu et resterait de la compétence des agents ministériels. En vue d’accélérer le processus, l’agent désigné devrait prendre une décision dans le délai fixé par règlement(20). À l’issue de ce délai, si l’agent n’avait pas trouvé la demande irrecevable, s’il avait dû surseoir à son étude parce que la Section de l’immigration avait reçu un rapport négatif sur lequel elle devait statuer ou encore si la personne avait été accusée de crime grave(21), la demande serait réputée avoir été transmise à la Section de la protection des réfugiés (l’ancienne Section du statut de réfugié) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié(22).

À une importante exception près, le critère de non-recevabilité ne serait pas modifié. Ainsi, les demandes d’asile de ceux qui ont été reconnus ailleurs (et qui peuvent y être renvoyés) et au Canada, de ceux dont la demande a déjà été déclarée irrecevable ou qui se sont désistés ou qui ont retiré leur revendication,(23) de ceux qui viennent de pays désignés (c’est-à-dire considérés comme « sûrs ») et de ceux dont la demande n’est pas recevable pour des motifs de sécurité, d’atteinte aux droits de la personne, de grande criminalité ou d’activités criminelles organisées, continueraient à être irrecevables.

Selon la loi actuelle, les demandeurs qui présentent une deuxième demande après que la première a été refusée, et qui ont quitté le Canada, doivent attendre 90 jours. En vertu du projet de loi, ils ne pourraient pas s’adresser à la Commission, et ils n’auraient droit qu’à une évaluation du risque avant renvoi par un agent gouvernemental, pourvu qu’ils aient été à l’extérieur du pays depuis un an.

En ce qui concerne l’irrecevabilité pour grande criminalité, le ministre peut, selon la loi actuelle, fournir un avis à l’effet que la personne en cause constitue un danger pour la sécurité publique au Canada. La nouvelle loi ne comporterait pas cette disposition. Une demande d’asile serait à l’avenir irrecevable si le demandeur avait été déclaré coupable au Canada d’une infraction punissable par une peine d’emprisonnement égale ou supérieure à 10 ans et si la peine imposée avait été de plus de deux ans (quelles que soient les circonstances); si l’infraction avait été commise à l’étranger, elle devrait équivaloir à une infraction commise au Canada entraînant une peine maximale d’emprisonnement égale ou supérieure à dix ans.

Comme dans la loi actuelle, les règlements pourraient préciser les pays « sûrs » où les demandeurs d’asile pourraient être refoulés(24). Les facteurs dont le gouverneur en conseil devrait tenir compte en établissant une telle liste resteraient inchangés, à l’exception d’un renvoi aux pays membres de la Convention contre la torture qui se conforment aux dispositions de cette convention.

      3. Interruption de l’étude de la demande d’asile

En vertu de la loi actuelle, le concept d’irrecevabilité ne s’applique en permanence que s’il s’agit de criminalité. Le projet de loi établit que l’étude d’une demande pourrait être interrompue pour tout motif lié à l’irrecevabilité, notamment si l’information pertinente n’avait pas été portée à l’attention de l’agent avant que le cas ne soit déféré, si la personne avait été accusée d’un crime grave ou si un rapport avait été déposé à la Section de l’immigration à des fins de constat d’interdiction de territoire, notamment pour des raisons de sécurité, de grande criminalité, etc. La présentation erronée d’un fait important ou la réticence sur un fait ayant une incidence sur la recevabilité mettrait également un terme à l’étude de la demande et annulerait toute décision.

Comme à l’heure actuelle, seule la décision portant sur la première demande serait valide en cas de demandes multiples par la même personne; les demandes subséquentes ne seraient pas prises en considération ou leur étude serait interrompue.

      4. Procédure d’extradition

La procédure d’extradition relative à une infraction à une loi fédérale entraînant une peine d’emprisonnement maximale égale ou supérieure à 10 ans aurait préséance sur toute demande d’asile. Si un arrêté d’extradition était rendu, la demande d’asile faite par la personne en cause serait réputée être rejetée parce que cette personne aurait commis un crime grave de nature non politique avant son admission(25). Aucune demande d’asile ne serait autorisée une fois l’arrêté d’extradition prononcé. Toute révision de la décision serait entreprise sous le régime de la Loi sur l’extradition.

      5. Étranger sans papiers

On a fait remarquer que les demandeurs n’ayant pas coopéré à l’établissement de leur identité étaient passibles de détention. Une fois qu’elle aurait reçu la demande d’asile, la Section de la protection des réfugiés serait tenue d’examiner la question des documents. Elle devrait tenir compte du fait qu’un demandeur d’asile ne serait pas en possession des documents établissant son identité, n’aurait pas entrepris des démarches raisonnables pour les obtenir et ne pourrait fournir d’explication raisonnable de la situation, lorsqu’elle évaluerait sa crédibilité. De toute évidence, l’adoption de telles mesures dissuasives viserait à prévenir la destruction de documents et les tentatives de dissimulation de l’identité véritable.

      6. Décision sur la demande d’asile et fin de l’asile

Comme à l’heure actuelle, si la section estimait que la demande d’asile n’était pas fondée sur des motifs crédibles, elle devrait le signaler par écrit. Pareille déclaration n’aurait pas de conséquence légale, comme elle en a en vertu de la loi actuelle, mais pourrait, sur le plan administratif, laisser entendre aux agents qu’il faudrait compter le renvoi parmi les priorités.

Sous le régime de la loi actuelle, la fin de l’asile doit faire l’objet d’une demande présentée par le ministre à la Section de la protection des réfugiés. En vertu du projet de loi C-31, c’est la section elle-même qui rejetterait une demande d’asile en application des critères d’extinction du statut de réfugié, qui restent inchangés(26). Cette modification reposerait sur la présomption que la section aurait reconnu le statut de réfugié de la personne si ce statut n’avait pas pris fin. Le ministre continuerait à avoir le droit de demander la fin de l’asile en tout temps après la reconnaissance du statut de réfugié.

      7. Annulation par la Section de la protection des réfugiés

Actuellement, le ministre doit obtenir du président de la Commission l’autorisation de demander l’annulation du statut de réfugié d’un étranger. En vertu du projet de loi, cette demande d’annulation pourrait se faire de plein droit. Les critères resteraient les mêmes, sauf la fraude, qui serait supprimée des motifs invoqués dans le projet de loi. L’incidence de cette omission semble toutefois négligeable compte tenu des énoncés « présentation erronée sur un fait important ou réticence sur ce fait ». Le projet de loi ne dit rien du quorum requis pour accueillir une telle demande, qui est actuellement de trois membres; néanmoins, il résulte du paragraphe 160(3) que le président de la Commission pourrait préciser le quorum pour chaque audience.

      8. Appel devant la Section d’appel des réfugiés

Depuis l’élaboration du système de détermination du statut de réfugié au milieu des années 80, les groupes de défense des réfugiés ont critiqué vivement l’absence de tout mécanisme d’appel. Le projet de loi instituerait une nouvelle instance au sein de la Commission —  la Section d’appel des réfugiés — dont le mandat serait d’entendre les appels émanant des demandeurs évincés ou du ministre(27). L’éventail des motifs serait large : questions de droit, de fait ou mixtes. Par contre, il n’y aurait pas d’audience et l’appel serait fondé sur les comptes rendus des délibérations de la Section de la protection des réfugiés et sur les observations des parties.

La Section d’appel des réfugiés pourrait confirmer la décision originale, y substituer sa propre opinion (sauf si elle estimait qu’une audience s’imposait ou si l’appel était interjeté par le ministre et portait sur la crédibilité du demandeur) ou renvoyer l’affaire pour révision, avec toute directive jugée pertinente, à la Section de la protection des réfugiés.

   C. Section 3 — Examen des risques avant renvoi (articles 107 à 109)

      1. Protection

Sous réserve de certaines exceptions et restrictions et conformément aux règlements, les personnes qui sont sous le coup d’une mesure de renvoi exécutoire pourraient s’adresser au ministre pour demander protection(28). Les exceptions concerneraient les gens pour lesquels la décision d’extradition aurait été prise en vertu de la Loi sur l’extradition et ceux dont la demande d’asile ne pourrait être acceptée parce qu’ils pourraient être renvoyés dans un tiers pays sûr.

Si la demande était irrecevable pour d’autres motifs ou avait été abandonnée, retirée ou rejetée, le demandeur d’asile qui aurait quitté le Canada et y serait revenu devrait attendre un an avant l’examen. Il s’agirait d’un changement important par rapport à la loi en vigueur, qui permet à ceux qui quittent le Canada de présenter une deuxième demande 90 jours après la première(29). Le projet de loi n’autoriserait l’évaluation du risque qu’avant renvoi; pour les demandeurs d’asile dont la demande aurait été rejetée auparavant, ne seraient recevables que les éléments de preuves recueillis ultérieurement ou ceux qui n’étaient pas raisonnablement accessibles au moment de l’audience. Les demandeurs faisant partie de ces catégories et dont la demande serait accueillie pourraient demander un statut de résident permanent.

Les personnes dont la demande serait trouvée irrecevable au motif de la sécurité, de l’atteinte aux droits de la personne, de la grande criminalité ou de la criminalité organisée, ou qui auraient été exclues de la protection de la Convention pour des motifs graves (voir l’annexe au projet de loi), feraient l’objet d’une évaluation visant à déterminer si elles constituent un danger pour le public au Canada ou si l’autorisation de séjour serait contraire à l’intérêt national. Si la demande de protection était accordée dans de telles situations, ce serait par sursis d’exécution de la mesure de renvoi. Le renvoi ultérieur, fondé sur un changement de circonstances dans le pays d’origine du demandeur d’asile, ne serait donc pas exclu.

Pour les gens dont la demande n’est pas recevable au motif de la grande criminalité, cette étape représenterait la première évaluation du danger qu’ils constituent pour la société. Par contre, pour les gens dont la demande est jugée irrecevable pour des motifs de sécurité, d’atteinte aux droits de la personne ou d’activités criminelles organisées, cette étape représenterait la deuxième occasion où l’intérêt national serait considéré. Cette différence tient au fait que la mesure de l’intérêt national fait partie des critères d’interdiction de territoire énoncés à la section 4 de la partie 1 du projet de loi.

      2. Principe du non-refoulement

L’article 108 énonce le principe fondamental de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, à savoir le non-refoulement (non-renvoi) d’une personne vers un pays où elle craint d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques. Il faut ajouter à ces motifs le risque de torture ou d’autres peines ou traitements cruels ou inusités. Tout comme dans la loi actuelle, ce principe n’empêcherait pas le refoulement de certains groupes : les grands criminels qui menacent la société canadienne et les personnes dont la demande serait irrecevable pour des raisons de sécurité, d’atteinte aux droits de la personne ou d’activités criminelles organisées, si leur séjour au Canada était contraire à l’intérêt national, compte tenu de la nature et de la gravité des actes qu’ils ont commis et des dangers qu’ils constitueraient pour la sécurité du Canada. Les règlements régiraient les demandes de protection.

PARTIE 3 : EXÉCUTION

   A. Organisation d’entrée illégale au Canada (articles 110 à 114)

L’infraction actuelle qui consiste à organiser sciemment l’entrée au Canada de personnes non munies des documents requis serait retenue, mais elle serait assortie de pénalités plus sévères. L’auteur d’une infraction visant moins de dix personnes serait passible d’une amende maximale de 500 000 $ (au lieu de 100 000 $) ou d’un emprisonnement maximal de 10 ans (au lieu de 5), ou des deux. Une disposition nouvelle ferait passer cette pénalité, en cas de récidive, à une amende d’un million de dollars ou à un emprisonnement de 14 ans, ou aux deux peines. Les pénalités seraient également accrues pour les mises en accusation par procédure sommaire.

L’auteur de l’infraction visant un groupe de dix personnes au plus serait passible d’une amende maximale d’un million de dollars ou d’une peine d’emprisonnement à perpétuité, ou des deux. Comme sous le régime de la loi actuelle, le consentement du Procureur général du Canada serait requis avant d’engager une poursuite (mais on n’exigerait plus que ce consentement soit personnel et signifié par écrit).

Une nouvelle disposition viserait le « trafic de personnes ». Elle interdirait l’organisation de l’entrée de personnes au Canada par menace, force, enlèvement, fraude, tromperie et coercition. Quiconque accueillerait ou hébergerait ces personnes commettrait également l’infraction. Le débarquement de personnes en mer continuerait à être considéré comme une infraction.

Une nouvelle disposition établirait une liste de facteurs aggravants dont le tribunal devrait tenir compte lorsqu’il prononcerait sa sentence en vertu de ces dispositions. Des facteurs tels que le tort causé (y compris la mort), l’intervention d’une organisation criminelle, l’intention de tirer profit de l’infraction et le traitement infligé aux personnes, notamment en ce qui touche leur santé, seraient tous pertinents pour ce qui est de la sévérité de la peine infligée.

   B. Infractions relatives aux documents (articles 115 et 116)

Les dispositions portant sur les infractions relatives aux documents seraient clarifiées et leur portée étendue; des peines sévères seraient infligées. L’imposition de la peine devrait tenir compte de facteurs aggravants tels que l’intervention d’une organisation criminelle ou l’intention de tirer profit de l’infraction.

   C. Infractions générales (articles 117 à 122)

Le projet de loi maintiendrait les infractions générales suivantes : tentative d’échapper à la détention, embauche d’une personne non autorisée à travailler, présentation erronée de faits importants, refus de répondre à des questions, méfaits commis par un agent dans l’exercice de ses fonctions; toutefois, les peines seraient, en général, considérablement augmentées. L’instigation à une fausse déclaration qui, sous le régime de la loi actuelle, se limite à la demande d’asile, serait incluse ici.

   D. Produits de la criminalité (articles 123 à 125)

De nouvelles dispositions interdiraient la possession de tout bien ou produit obtenu par perpétration des principales infractions énoncées dans la Loi telles que celles qui se rapportent, notamment, à la contrebande et au trafic, aux documents et aux fausses présentations. La possession des produits du recyclage de l’argent découlant de ces infractions serait également interdite. Les agents doubles seraient protégés.

   E. Règles visant les poursuites (articles 126 à 129)

Comme c’est actuellement le cas des demandeurs d’asile arrivés directement ou indirectement au Canada en provenance du pays duquel ils cherchent à être protégés, toute poursuite intentée en raison des infractions commises à l’égard de leur arrivée et de l’examen de leur cas serait différée, ou abandonnée si l’asile était accordé. L’expression « ou indirectement » est nouvelle.

   F. Confiscation (article 130)

Cet article permettrait à un tribunal ayant déclaré une personne coupable d’une infraction d’ordonner la confiscation de tous les biens infractionnels. Les règlements, sous le régime de la nouvelle loi, régiraient des questions qui font l’objet de plusieurs dispositions de la loi actuelle.

   G. Agents d’application de la loi (articles 131 à 135);
        agents de la paix (articles 136 et 137)

Ces articles conféreraient aux agents d’exécution les pouvoirs d’exercer leurs fonctions, notamment ceux d’exiger une preuve d’identité, d’examiner les documents, de fouiller les personnes et leurs effets, de saisir des objets et des véhicules, de faire prêter serment, etc. Un certain nombre d’agents seraient des agents de la paix investis de l’autorité d’exécuter les mandats et d’arrêter les délinquants.

   H. Contraventions (article 138)

En vertu des procédures établies dans cet article et dans les règlements, les poursuites à l’égard des infractions désignées par règlement pourraient débuter par une contravention.

   I. Créances de sa Majesté (articles 139 à 141)

Ces articles établissent des mécanismes permettant au ministre de recouvrer les créances du gouvernement, notamment par saisie-arrêt. Ils faciliteraient le recouvrement des sommes dues par les répondants en défaut.

   J. Dispositions applicables aux transporteurs (articles 142 à 147)

Les mesures relatives aux transporteurs, qui s’étendent sur des pages dans la loi actuelle, seraient ramenées à six articles dans la nouvelle loi. Les règlements devraient donc être étoffés : ils définiraient les termes; établiraient les droits et les obligations des transporteurs; préciseraient les éléments permettant au ministre d’exiger d’un transporteur qu’il fournisse des installations et de l’équipement (vraisemblablement des installations de détention); éononceraient les procédures à suivre en cas de saisie d’un véhicule; etc. Une nouvelle disposition du projet de loi permettrait à une société aérienne de fournir l’information prévue sur les passagers aux agents pour leur permettre d’identifier les personnes interdites de territoire au Canada ou visées par un mandat d’arrêt. La compagnie aérienne serait tenue d’informer les passagers de la divulgation de toute information.

PARTIE 4 : COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

   A. Composition de la Commission (articles 148 à 153)

Comme l’a fait voir l’étude descriptive des dispositions du projet de loi présentée ci-dessus, le rôle de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié serait élargi et la plupart de ses sections seraient renommées. La Section d’arbitrage deviendrait la Section de l’immigration; la Section du statut de réfugié deviendrait la Section de la protection des réfugiés et un nouvel organisme d’appel, la Section d’appel des réfugiés, serait institué.

Les membres seraient toujours nommés par le gouverneur en conseil et ceux de la Section de l’immigration seraient toujours des fonctionnaires. La nouvelle loi comprendrait une nouvelle disposition exigeant des membres qu’ils ne détiennent pas de charge ni d’emploi incompatible avec leurs fonctions. Une autre nouvelle disposition accorderait l’immunité civile et pénale aux membres agissant dans l’exercice de leurs fonctions et ferait qu’ils ne seraient ni habiles à témoigner ni contraignables au civil. Les autres dispositions resteraient identiques.

   B. Siège et personnel (articles 154 et 155)

Un nouveau pouvoir du gouverneur en conseil lui permettrait d’affecter les membres de la Commission (autre que les membres de la Section de l’immigration) à un bureau de district ou à un bureau régional. En outre, le poste du directeur exécutif de la Commission — actuellement comblé par le gouverneur en conseil — serait, sous le régime de la nouvelle loi, intégré à l’effectif de la fonction publique.

   C. Présidence de la Commission (articles 156 et 157);
        Fonctionnement de la Commission (articles 158 et 159)

Les fonctions du président seraient regroupées et quelque peu élargies. En particulier, il semble que le président contrôlerait mieux la façon dont les membres exécutent leurs tâches et s’acquittent de leurs obligations, y compris l’assignation des tâches administratives. Le président disposerait du nouveau pouvoir de choisir des commissaires coordonnateurs (ce qui est actuellement une attribution du gouverneur en conseil) chargés de préciser les décisions qui serviraient de guides jurisprudentiels et d’édicter des règles de conduite pour les personnes qui comparaitraient devant la Commission. On ne trouve, dans le texte du projet de loi, aucune référence à un poste d’« avocat-conseil » à la Commission » (agent chargé de la revendication) dont il est fait mention dans la loi en vigueur.

   D. Attributions communes (articles 160 à 164)

La présente section et la suivante énoncent des droits et des règles de procédures qui seraient d’une grande importance. Une nouvelle disposition permettrait à un seul commissaire de former quorum pour l’audition d’une affaire. Sauf pour ce qui est de la Section de l’immigration, le président pourrait ordonner qu’une affaire soit entendue par un tribunal de trois commissaires. L’adoption d’une formule de tribunaux à membre unique a été proposée pour la première fois en 1995 et on s’attend à ce que cette formule simplifie considérablement le fonctionnement de la Commission.

Le rôle du représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui agit aujourd’hui à titre d’observateur seulement, prendrait de l’ampleur. Le paragraphe 161(2) du projet de loi permettrait à ce mandataire de participer aux séances touchant les demandeurs d’asile ou les étrangers à qui l’asile aurait été conféré, et d’avoir accès aux renseignements présentés en preuve et aux motifs de la décision.

Toutes les décisions devraient être motivées; elles seraient rendues oralement ou par écrit, sauf celles de la Section d’appel des réfugiés, qui seraient toujours rendues par écrit. En cas de rejet de la demande d’asile par la Section de la protection des réfugiés ou si les parties ou les règles en vigueur à la Commission l’exigeaient, la décision devrait être motivée par écrit.

   E. Dispositions qui s’appliquent aux sections individuellement (articles 165 à 170)

Actuellement, le rôle que joue le ministre (par l’entremise d’un représentant) pendant une audition portant sur le statut de réfugié est quelque peu restreint. Le projet de loi C-31 éliminerait ces restrictions. Le ministre recevrait avis de toutes les audiences et disposerait s’il comparaissait, des mêmes droits de participation que le demandeur d’asile.

Ainsi qu’il a été noté précédemment, l’appel interjeté par la Section d’appel des réfugiés devrait être formulé par écrit. Le ministre, tout comme la personne en cause, serait autorisé à présenter ses observations. En vertu d’une nouvelle disposition qui devrait renforcer la cohérence dans un système très décentralisé, les décisions sur les questions de droit prises par un tribunal de trois commissaires lieraient la Section de la protection des réfugiés. Par contre, on ignore encore si ce tribunal de trois commissaire serait la norme. La prise de décision par un tribunal constitué d’un seul commissaire ne semblerait pas de nature à favoriser la cohérence.

   F. Mesures correctives et disciplinaires (articles 171 à 180)

Ces dispositions régiraient les mesures à prendre à l’endroit des commissaires qui ne seraient plus en état de s’acquitter de leurs fonctions pour cause d’invalidité, ou qui se seraient rendus coupables de manquement à l’honneur ou à la dignité, auraient manqué aux devoirs de leur charge ou se seraient placés en situation d’incompatibilité. La plupart des dispositions du projet de loi sont identiques à celles de la loi en vigueur, à quelques exceptions près. L’une d’entre elles est que sous le régime de la nouvelle loi, l’affaire pourrait être soumise à la médiation si le ministre estimait ce recours approprié et que les parties intéressées, en plus de la partie en cause, pourraient participer à l’enquête selon les modalités établies par le juge. La décision finale, comme sous le régime de la loi actuelle, reviendrait au gouverneur en conseil, qui pourrait prendre toute mesure corrective recommandée par le juge ou en substituer une autre. Le gouverneur en conseil conserverait toutefois le droit de révoquer les commissaires. Puisque le président de la Commission serait celui à qui il reviendrait de demander la tenue d’une enquête, le maintien de cette prérogative conférerait au gouverneur en conseil la possibilité de révoquer le président si cela s’avérait nécessaire.

PARTIE 5 : DISPOSITIONS TRANSITOIRES, MODIFICATIONS CORRÉLATIVES,
MODIFICATIONS CONDITIONNELLES, ABROGATION ET ENTRÉE EN VIGUEUR
(articles 181 à 269)

Même si l’actuelle Loi sur l’immigration était abrogée, les nombreuses dispositions régissant l’examen et le contrôle des fonds d’investissement des immigrants resteraient en vigueur.

La façon de traiter les affaires en cours peut donner lieu à controverse lorsqu’une loi est remplacée. Le projet de loi C-31 prévoit qu’en règle générale toutes les affaires en instance ou en cours sous le régime de la loi actuelle seraient régies par les dispositions de la nouvelle loi et assignées à la nouvelle section compétente. Toutefois, les procédures introduites devant la Section du statut de réfugié et la Section d’appel de l’immigration sous le régime de la loi actuelle seraient, dès lors que des éléments de preuve de fond auraient été présentés, mais pour lesquelles aucune décision n’aurait été prise, régies par les dispositions de cette loi.

Les cas de réfugiés pour lesquels une audience aurait déjà commencé devant la Section du statut de réfugié ne tomberaient pas sous le régime du nouveau processus d’appel. Lorsque des décisions ont auraient été prises par la Section du statut de réfugié au moment où la nouvelle loi entrerait en vigueur, ces décisions ne seraient pas susceptibles d’appel.

Les personnes dont les appels seraient en cours de traitement à la Section d’appel de l’immigration et qui n’auraient pas les mêmes droits d’appel en vertu des dispositions de la nouvelle loi perdraient leur droit d’appel à moins qu’on ait déjà sursis aux mesures de renvoi s’appliquant à elles.

Les règlements pourraient régir la transition et porter notamment sur les catégories d’étrangers qui seraient assujetties à tout ou partie de la présente loi ou de l’ancienne loi. Ce pouvoir pourrait être utilisé dans le cas de groupes dont le nom diffère dans l’ancienne et la présente lois (« les visiteurs », par exemple) ou pour régler les situations particulières de la période de transition qui ne seraient pas couvertes de manière adéquate par la règle générale.

La plupart des modifications corrélatives consistent à modifier les renvois à la Loi sur l’immigration et à d’autres lois et à les remplacer par des renvois à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. D’autres résultent des changements qui élimineraient les fonctions du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité ou toucheraient la Loi sur la citoyenneté(30). La définition d’« infraction de criminalité organisée » figurant dans le Code criminel serait modifiée pour inclure les infractions répertoriées dans la nouvelle loi, y compris les dispositions sur la contrebande et le trafic.

COMMENTAIRE

En règle générale, les réactions de la presse au projet de loi, au moment où celui-ci a été déposé, étaient positives. La perspective d’un système de reconnaissance du statut de réfugié plus expéditif et « plus strict » a été bien reçue, tout comme la volonté de mettre un terme aux abus du système, et ce, même si certaines des propositions les plus encensées se trouvaient déjà, de fait, dans la loi actuelle. La proposition d’accroître les pénalités pour la contrebande de personnes a été louangée, bien que certaines personnes aient fait remarquer que les pénalités étaient déjà très sévères et que, de toute façon, les organisateurs étaient rarement en territoire canadien. Un certain nombre de commentateurs ont parlé d’un projet de loi équitable et raisonnable, même si certains ont laissé entendre qu’il n’allait pas assez loin. Le présumé élargissement de la portée de la protection accordée aux réfugiés a été mis en doute.

Ainsi qu’il a été noté précédemment, la plus grande partie de la couverture médiatique n’a pas distingué, néanmoins, entre les dispositions réellement contenues dans le projet de loi, celles que le gouvernement a annoncées dans le cadre des nouveaux règlements, et les changements administratifs. Les changements réglementaires apportés à la catégorie de la famille, par exemple, auraient pu l’être n’importe quand. L’annonce du fait que les vérifications de sécurité et des antécédents criminels des demandeurs du statut de réfugié auraient lieu à leur arrivée plutôt que lors de la demande de résidence permanente, comme c’est le cas actuellement, est de nature administrative. De toute évidence, il s’agit d’un changement qui aurait pu être fait n’importe quand dans le passé.

Ceux qui ont commenté le regroupement de la plupart des études du risque à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié se sont généralement montrés positifs, même si les restrictions imposées au droit d’appel ont reçu un accueil mitigé. On a noté, dans le texte du projet de loi, la grande portée des pouvoirs réglementaires, et souligné le fait que les règlements échappent davantage (sinon totalement) à l’attention du public que le projet de loi.

Les groupes de défense des réfugiés ont estimé que le resserrement des règles, particulièrement en ce qui a trait aux demandeurs du statut de réfugié, découlait d’une réaction exagérée à l’arrivée d’immigrants chinois l’été dernier et ils ont utilisé le terme « draconien ». Ces groupes se sont demandé si les nouvelles dispositions terniraient la réputation de pays d’accueil que le Canada a acquise à l’endroit des nouveaux venus. Certains se sont dits soucieux du fait que le projet de loi pourrait affaiblir les mécanismes de protection des réfugiés. Le raisonnement du ministre, qui a laissé entendre qu’il existait un lien entre les demandeurs du statut de réfugié d’une part et la criminalité et les dangers pour la sécurité d’autre part, a été décrié. Par contre, la proposition d’adoption d’un appel pouvant être logé au mérite par les réfugiés a été bien accueillie.

Voici quelques autres caractéristiques du projet de loi que les groupes de défense des réfugiés pourraient fort bien remettre en question dans les mois qui viennent :

  • la détention pour des motifs liés à l’identité pourrait, en théorie, se poursuivre pendant une longue période;

  • l’évaluation du risque devrait être menée par des agents ministériels plutôt que par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, puisque c’est au ministère que se trouve l’expertise;

  • l’interdiction qu’impose la Convention relativement à la torture est absolue; toutefois, le projet de loi n’empêcherait pas, dans certaines circonstances, le renvoi de personnes dans des pays où ils peuvent être soumis à la torture.


(1) Révision de la législation sur l’immigration. Au-delà des chiffres : L’immigration de demain au Canada, 1998.

(2) Citoyenneté et immigration Canada, De solides assises pour le 21e siècle : Nouvelles orientations pour la politique et la législation relatives aux immigrants et aux réfugiés, 1999.

(3) Bien entendu, il faut souligner que les pouvoirs habilitants de la loi actuelle sont également fort étendus.

(4) Étant donné l’importance des règlements, le gouvernement a indiqué qu’il espère en présenter une version provisoire ou un résumé avant que le Comité de la Chambre des communes n’ait fini d’étudier le projet de loi.

(5) La seule allusion à la démographie se retrouve à l’article 10(2), qui exige du ministre qu’il consulte les provinces à propos des niveaux d’immigration et de la distribution des immigrants au Canada, « compte tenu des besoins […] démographiques ».

(6) On pourrait se demander pourquoi seuls ceux qui cherchent asile feraient l’objet de cette allusion à la Charte.

(7) Le bulletin accompagnant le projet de loi dispose que le terme « enfant » inclura les personnes de moins de 22 ans (de moins de 19 ans dans la loi actuelle) et que le terme « conjoint de fait » inclura les partenaires de même sexe. Certaines nuances peuvent s’avérer nécessaires pour cette dernière définition en raison des circonstances particulières qui entourent souvent la situation d’immigration.

(8) En vertu de la loi actuelle, un agent peut accepter un candidat dont le nombre de points est juste en dessous du seuil s’il est d’avis que la cote sous-estime la capacité de la personne de s’établir avec succès au Canada. La formulation du projet de loi laisse entendre que les agents pourraient, à l’avenir, jouir d’une plus grande latitude.

(9) La loi porte que : « Sous réserve des règlements, quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se présenter devant un agent d’immigration à un point d’entrée ou à tout autre lieu désigné par l’agent principal en vue de l’interrogatoire visant à déterminer s’il est autorisé à entrer au Canada ou s’il peut y être admis ». Sous le régime du projet de loi, « quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se soumettre au contrôle visant à déterminer s’il peut être autorisé à y entrer et à y séjourner ». Il s’agit là d’un bel exemple de simplification de la formulation des dispositions de la loi actuelle.

(10) La loi actuelle confère ce pouvoir au gouverneur en conseil qui l’a indirectement délégué au ministre. Le critère de l’intérêt public est nouveau.

(11) L’article 24 de la loi actuelle stipule qu’en général, une personne perd le statut de résident permanent lorsqu’elle 1) quitte le Canada avec l’intention de cesser d’y résider en permanence; 2) séjourne à l’étranger plus de six mois par année, sauf si elle convainc un agent qu’elle n’a pas l’intention de cesser de résider au Canada en permanence. Un permis de retour peut être octroyé à un résident qui séjourne à l’étranger.

(12) Projet de loi C-16, la Loi concernant la citoyenneté canadienne, déposé à la Chambre des communes le 15 novembre 1999.

(13) L’article 194 du projet de loi établit qu’il ne faudrait pas fournir de carte à ceux qui seraient résidents permanents au moment où la nouvelle loi entrerait en vigueur.

(14) Dans la loi actuelle, les actes visant au renversement d’un gouvernement par la force doivent être perpétrés au Canada; le projet de loi éliminerait cette restriction.

(15) Si le projet de loi C-19 entrait en vigueur avant le projet de loi C-31, il y aurait renvoi à cette loi, et non au Code criminel. Il est intéressant de noter que la nouvelle disposition éliminerait la possibilité de prescrire qui serait tenu pour une personne de haut rang (voir l’article 265).

(16) Le critère « danger pour la sécurité publique » s’appliquerait à la déportation d’une personne ayant obtenu le statut de réfugié. Voir l’article 108.

(17) Cette disposition pourrait viser un nombre limité d’infractions commises à la frontière pour lesquelles un agent prononcerait immédiatement le renvoi d’une personne. À l’heure actuelle, l’agent doit laisser entrer la personne au Canada avant d’amorcer la procédure de renvoi. Un chauffeur en état d’ébriété, par exemple, pourrait être renvoyé immédiatement si cette infraction était précisée.

(18) Actuellement, la loi prévoit un sursis pour contrôle judiciaire, sauf dans certains cas particuliers.

(19) On présume que l’interdiction de demander la résidence permanente sera maintenue pour certaines catégories de personnes.

(20) Le ministère a indiqué que ce délai pourrait être de trois jours.

(21) Le sursis à l’étude de la recevabilité d’une demande d’asile pour un demandeur accusé d’une infraction entraînant une peine maximale égale ou supérieure à dix ans serait une nouvelle disposition.

(22) La restriction quant à la présomption de transfert surprend. L’information relative à la demande devrait de toute façon être transférée sous forme écrite ou électronique à la Commission.

(23) L’ajout de ceux qui se sont désistés de leur revendication est nouveau.

(24) Depuis l’inclusion de cette disposition dans la loi en 1989, aucune liste n’a été dressée.

(25) Voir l’annexe du projet de loi qui contient les clauses d’exclusion de la Convention. L’article F(b) s’appliquerait.

(26) Dans la loi actuelle, ces dispositions figurent au paragraphe 2(2).

(27) Les demandeurs pour lesquels il a été établi que les revendications ont été abandonnées ou retirées n’auraient pas droit d’appel.

(28) Mesure importante parce que les étrangers faisant l’objet d’une mesure de renvoi ne peuvent demander asile.

(29) Les personnes qui n’ont pas quitté le Canada peuvent, en théorie, recevoir plusieurs évaluations de risque si elles ne sont pas refoulées.

(30) Un certain nombre de modifications conditionnelles s’appliqueraient si le projet de loi C-16 sur la citoyenneté, et d’autres projets de loi déposés devant le Parlement, recevaient la sanction royale. Le projet de loi C-31 lui-même, une fois promulgué, serait amendé par le projet de loi C-19, la Loi sur les crimes contre l’humanité, dès qu’il deviendrait loi, en vue de refléter la terminologie utilisée dans cette dernière loi.