|
MR-149F
LA RÉGLEMENTATION DES HERBES AU CANADA :
SITUATION ET ENJEUX
Rédaction :
Gerald Lafrenière
Division du droit et du gouvernement
Nancy Miller Chenier
Division des affaires politiques et sociales
Le 6 octobre 1997
TABLE DES MATIÈRES
SITUATION
GÉNÉRALE
ENJEUX
A. Annexe 705
B. Projets de loi C-85/C-7/C-8, Loi réglementant certaines
drogues et autres substances
C. Commission du Codex Alimentarius de lONU
D. Recouvrement des coûts par limposition de droits de
permis
LA RÉGLEMENTATION DES HERBES
AU CANADA : SITUATION ET ENJEUX
Au cours de la dernière décennie,
diverses mesures prises par le gouvernement fédéral ont attiré lattention des
gens sur les herbes et les préparations dherboristerie et intensifié le débat sur
leur réglementation au Canada. Dans le présent document, nous examinons le débat depuis
le milieu des années 80 et décrivons quatre secteurs où lon juge que les
mesures prises par le gouvernement fédéral ont une incidence sur la réglementation des
herbes. Ces mesures sont les suivantes : la publication proposée dune version
révisée de lannexe 705 fondée sur une évaluation des herbes utilisées à
des fins alimentaires; ladoption de la Loi réglementant certaines drogues et
autres substances et la possibilité que celle-ci restreigne lutilisation des
herbes à des fins pharmaceutiques; la constitution du Comité du Codex sur la nutrition
et sur les aliments destinés à un régime spécial (ONU), qui vise à harmoniser le
traitement réservé aux herbes; et léventuelle mise en place du plan de
recouvrement des coûts du gouvernement fédéral en vertu duquel des droits de permis
seraient exigés des établissements qui fabriquent ou distribuent des remèdes à base
dherbes.
SITUATION
GÉNÉRALE
Le terme « herbes » est fréquemment
utilisé pour décrire à la fois la plante et les produits synthétisés à partir des
plantes. Il est difficile dobtenir des chiffres exacts, mais il y aurait
actuellement un accroissement des ventes dherbes et de lutilisation de ces
dernières au Canada. Selon des estimations, en Amérique du Nord, les remèdes à base
dherbes médicinales constitueraient une industrie de deux milliards de dollars par
année, qui connaît une croissance annuelle de 15 p. 100.
Les produits dherboristerie sont
généralement réglementés à titre daliments ou de médicaments en vertu de la Loi
sur les aliments et drogues. La désignation de ces produits dépend de laction
pharmacologique des ingrédients, de lobjectif déclaré du produit et des
allégations faites concernant son utilisation, notamment à des fins médicinales. Au
sein de Santé Canada, ces produits sont à la fois de la responsabilité de la direction
chargée de linnocuité des aliments et de celle qui est chargée de la protection
des médicaments. Certains produits, comme le cannabis et le khat, constituent des
substances contrôlées en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres
substances, laquelle prévoit des restrictions et des règles différentes.
Santé Canada est pour sa part
davis que certains de ces produits, qui sont vendus à titre daliments ayant
des propriétés médicinales, sont dangereux. La réglementation afférente à la Loi
sur les aliments et drogues exige que tout produit dherboristerie quon
commercialise en prétendant quil a des propriétés médicinales dispose dune
identification numérique de drogue (DIN) ou dun numéro grand public (GP). Ces
numéros indiquent quon a procédé à un examen de la formulation du produit, de
son étiquetage et de son mode demploi, et ils visent à garantir la véracité de
toute allégation relative au contenu ou à la santé.
Santé Canada a procédé à plusieurs
études publiques sur la réglementation des herbes. Au cours de la dernière décennie,
au moins deux comités consultatifs dexperts sur les herbes et préparations
dherboristerie, lun en 1986 et lautre en 1993, se sont penchés sur les
herbes offertes en vente à titre de denrées alimentaires. Récemment, soit en
mai 1997, le ministère a constitué le Groupe consultatif sur les remèdes à base
dherbes, quil a chargé de le conseiller sur lélaboration dun
cadre de réglementation pour ces produits. De plus, Santé Canada a publié diverses
lettres dinformation, lignes directrices et énoncés de politiques.
Le 4 octobre 1997, le ministre
de la Santé, Allan Rock, a annoncé que le Comité permanent de la santé de la
Chambre des communes serait chargé de procéder à une étude sur la réglementation des
herbes.
ENJEUX
A. Annexe 705
Les discussions publiques à ce sujet
remontent à un rapport publié en 1986 par un Comité consultatif dexperts des
herbes aromatiques et des préparations dherboristerie qui avait été créé par le
ministère fédéral de la Santé. Ce comité a étudié linnocuité et les
mécanismes réglementaires de contrôle de ces substances lorsquelles sont vendues
comme aliments. Il a établi quatre grandes catégories dherbes aromatiques et de
préparations dherboristerie, à savoir les herbes et préparations inacceptables
comme ingrédients ou denrées alimentaires, généralement acceptables comme denrées
alimentaires, acceptables comme denrées alimentaires dans certaines conditions, et
employées généralement à des fins médicinales.
En 1989, lévaluation menée par
ce comité, combinée à dautres consultations, a entraîné la publication de
lannexe 705, qui décrivait les substances qui ne peuvent être utilisées
comme ingrédients ou denrées alimentaires et les substances qui sont acceptables comme
denrées alimentaires dans certaines conditions. Ces modifications proposées à la
réglementation des aliments et drogues ont été publiées dans la Gazette du Canada,
Partie I.
Le Comité consultatif dexperts a
été reconstitué en 1993 afin détudier les préoccupations soulevées. Il a
recommandé le retrait de sept herbes aromatiques et préparations dherboristerie de
la liste des herbes et préparations « inacceptables comme denrées alimentaires »
figurant dans lannexe 705 proposée. De ces sept, cinq
labsinthe commune, le Chrysanthème-Matricaire, le grain de chouan, larmoise
commune et le millepertuis commun seraient dorénavant jugées acceptables
comme denrées alimentaires. Les deux autres la racine dhydraste du
Canada et le mahonia à feuilles de houx seraient dorénavant jugées
acceptables comme denrées alimentaires dans certaines conditions.
De 1994 à aujourdhui, le
ministère a utilisé le rapport de 1993 du Comité consultatif dexperts pour mener
des consultations auprès des représentants de lindustrie et des autres citoyens
intéressés. Le ministère reconnaît quil sagit là dune question
complexe concernant à la fois les aliments et les médicaments.
Dans le cadre de cette étude
permanente, Santé Canada a étudié dautres options que loption
réglementaire adoptée dans lannexe 705 proposée. Ainsi, le Groupe
consultatif sur les remèdes à base dherbes a été créé en mai 1997 afin de
fournir des conseils sur ladoption dun cadre de réglementation pour les
remèdes à base dherbes, et il travaille toujours à cette question.
B. Projets de loi C-85/C-7/C-8, Loi réglementant certaines
drogues et autres substances
Cette loi visait à regrouper la Loi
sur les stupéfiants et les parties III et IV de la Loi sur les aliments et
drogues et à les compléter, ainsi quà harmoniser les règlements du Canada
sur les stupéfiants, les drogues contrôlées et les drogues dusage restreint avec
ceux des autres pays. Cette mesure législative a dabord été présentée au cours
de la trente-quatrième législature (projet de loi C-85, Loi réglementant les
psychotropes); elle a été de nouveau présentée au cours de la première session de la
trente-cinquième législature (projet de loi C-7), et elle a enfin été présentée
une dernière fois (projet de loi C-8) au cours de la deuxième session de la
trente-cinquième législature. Le projet de loi a été finalement adopté en
juin 1996 et est entré en vigueur en mai 1997.
Après que les producteurs, détaillants
et consommateurs de produits naturels eurent fait entendre leurs points de vue, le projet
de loi C-7 a été amendé pour que la définition dune substance contrôlée
ninclue plus les substances ayant un effet stimulant, déprimant ou hallucinogène.
Ces intervenants continuent toutefois à sopposer à lélargissement des
pouvoirs réglementaires parce quils soutiennent que ces derniers pourraient être
utilisés afin dimposer dautres restrictions aux herbes.
Selon Santé Canada, les herbes et
produits dherboristerie sont réglementés en vertu des pouvoirs conférés par la Loi
sur les aliments et drogues et non en vertu de la Loi réglementant certaines
drogues et autres substances. Comme nous lavons déjà mentionné, certaines
préparations dherboristerie sont toutefois déjà contrôlées en vertu de cette
dernière loi et sont nommément mentionnées dans les annexes de celle-ci.
C. Commission du Codex Alimentarius de lONU
La Commission du Codex Alimentarius de
lONU vise à harmoniser les normes internationales sur les aliments afin de
protéger les consommateurs contre la fraude et les dangers pour la santé, à garantir
ladoption de méthodes sécuritaires dans lindustrie alimentaire et à
faciliter le commerce international des aliments et produits alimentaires.
En 1997, le Comité sur la nutrition et
sur les aliments destinés à un régime spécial de la Commission du Codex a étudié les
préoccupations relatives aux herbes et préparations dherboristerie qui sont
vendues à titre daliments et qui pourraient se révéler dangereuses. Il a
déclaré que la toxicité des herbes constituait essentiellement un problème de
sécurité nayant aucune conséquence nutritionnelle et il a recommandé que les
autorités nationales établissent des listes de plantes pouvant se révéler dangereuses
sur le plan toxicologique.
Comme le Canada est lun des
151 pays membres, il est libre dadopter ou de rejeter les normes, lignes
directrices et recommandations formulées par la Commission. Les milieux de
lherboristerie craignent que le Canada cède aux pressions commerciales
internationales, mais Santé Canada souligne que lOrganisation mondiale du commerce
ne dispose pas des pouvoirs voulus pour obliger les pays à appliquer une recommandation
du Codex.
D. Recouvrement des coûts par limposition de droits de
permis
Quand le projet de loi C-95, Loi
constituant le ministère de la Santé, a été adopté en 1996, Santé Canada a été
autorisé à imposer des frais aux utilisateurs pour certains services quil fournit
à des clients externes. Conformément à la politique du Conseil du Trésor dans ce
domaine, les droits de permis visent à recouvrer partiellement ou totalement le coût de
la prestation de services ministériels. La loi de 1996 ne précise pas les types de
services auxquels ces droits pourraient sappliquer, pas plus que les utilisateurs
qui pourraient devoir les acquitter.
À compter de juillet 1997, les
fabricants, distributeurs et importateurs de remèdes à base dherbes devaient payer
des droits de permis annuels à Santé Canada afin de lui permettre de recouvrer le coût
des inspections des installations. Ces inspections visaient à sassurer que les
produits à base dherbes seraient préparés selon certaines normes appelées «
bonnes pratiques de fabrication (BPF) ». Il sagit là dexigences
uniformes imposées à toutes les installations souhaitant fabriquer, conditionner,
importer, distribuer ou tester des médicaments au Canada.
Les intervenants de lindustrie des
herbes ont soutenu que ces droits, estimés à 1,5 p. 100 de leurs ventes
annuelles brutes, rendraient leurs opérations marginales non rentables et les forceraient
à cesser leurs activités.
Lorsquil a annoncé le
4 octobre dernier que le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes
procéderait à une étude de la réglementation des herbes, le ministre de la Santé,
Allan Rock, a déclaré que lentrée en vigueur de la réglementation sur les
droits de permis serait suspendue pour une période indéfinie.
|
|