BP-185F

RÉGIME CANADIEN DE PROTECTION DES RÉFUGIÉS

Rédaction :
Benjamin R. Dolin, Margaret Young
Division du droit et du gouvernement
Juillet 1993
Révisé en octobre 2002


TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

LA COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

L’ACCÈS AU RÉGIME

   A.  Admissibilité à présenter une demande d’asile

   B.  Contrôle judiciaire et mesures de renvoi à la suite de la sélection préalable

L’AUDIENCE

   A.  Renvoi à la section de la protection des réfugiés de la CISR

   B.  Nature de l’audience

   C.  La décision et ses conséquences

   D.  Annulation et constat de perte de l’asile

APPELS DES DÉCISIONS DE LA SECTION DE LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

STATUT DE RÉSIDENT PERMANENT POUR LES
DEMANDEURS DONT LA DEMANDE EST ACCUEILLIE

   A.  Statut de personne protégée accordé par la CISR

   B.  Examen des risques avant renvoi

OPÉRATIONS DE LA COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

ENJEUX ACTUELS

   A.  Report de la mise sur pied de la Section d’appel des réfugiés

   B.  L’Entente sur les tiers pays sûrs

   C.  Renvoi des réfugiés déboutés

JURISPRUDENCE EN MATIÈRE DE PROTECTION DES RÉFUGIÉS

   A.  Singh et autres c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] 1 R.C.S. 177

   B.  Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689

   C.  Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982

   D.  Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1

   E.  Ahani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 2

   F.  Law Society of British Columbia c. Mangat, 2001 CSC 67

ANNEXE 1 – REVENDICATION DU STATUT DE RÉFUGIÉ AU CANADA, 1989-2001

ANNEXE 2 – PROCESSUS DE RECONNAISSANCE DU STATUT DE RÉFUGIÉ

ANNEXE 3 – VERSION FINALE – ENTENTE CONCERNANT LES TIERS PAYS SÛRS

 


RÉGIME CANADIEN DE PROTECTION DES RÉFUGIÉS

CONTEXTE

Bien que le Canada ait signé la Convention relative au statut des réfugiés (et le Protocole y afférent) en 1969, la procédure d’examen des revendications du statut de réfugié présentées au Canada est restée peu structurée et a laissé place à une certaine discrétion jusqu’à l’entrée en vigueur, en 1978, de l’actuelle Loi sur l’immigration.  À l’époque, le nombre de demandes présentées chaque année était peu élevé et le régime en vigueur était adéquat sur le plan administratif, même si ses critiques soulignaient que les demandeurs n’avaient pas la possibilité de se faire entendre.

Le nombre de revendications s’est cependant mis à augmenter dans les années 1980, en partie à cause du nombre croissant de véritables réfugiés dans le monde, mais aussi parce que, selon certains, le régime canadien alors en place, en raison de sa lourdeur, permettait aux gens de venir au Canada et d’y rester pendant de longues périodes plus facilement qu’en passant par la filière normale.  À mesure que le nombre de revendications a crû – passant de 3 450 en 1981 à 6 100 en 1983, puis à 25 000 en 1987 – il est devenu évident que le régime, dans sa conception initiale, ne répondait plus aux besoins.  De plus, en avril 1985, la Cour suprême du Canada a déclaré inconstitutionnel un élément important du régime, ajoutant encore ainsi aux problèmes structurels(1).  Manifestement, une réforme s’imposait de toute urgence.

La réforme a soulevé une telle controverse qu’il a fallu quatorze mois pour faire adopter le projet de loi au Parlement; conséquemment, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié et le nouveau système de reconnaissance du statut de réfugié ne sont finalement entrés en vigueur que le 1er janvier 1989.  Le système a ensuite été modifié par des mesures législatives adoptées en 1992 et en 1995; il a de nouveau été modifié en 2002 par la nouvelle Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés(2).

Le régime canadien de protection des réfugiés doit tenir compte d’un certain nombre d’éléments(3).  Tout d’abord, la loi doit respecter l’esprit de la Convention des Nations Unies relative au statut de réfugié et du protocole y afférant, lesquels interdisent aux pays signataires de renvoyer quiconque, de quelque façon que ce soit, à la frontière d’un territoire où sa vie ou sa liberté seraient menacées du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses options politiques.  Ensuite, la loi doit respecter les obligations contractées par le Canada dans la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  La Charte canadienne des droits et libertés est aussi d’une importance cruciale.  Comme nous l’avons mentionné, la Cour suprême du Canada a déclaré, en 1985, que la Charte protège les revendicateurs du statut de réfugié, et depuis cette date beaucoup de décisions importantes touchant la substance et les procédures de la loi sur les réfugiés et la protection ont été rendues.

En même temps, la loi qui s’applique à l’arrivée soudaine de revendicateurs du statut de réfugié doit être suffisamment rigoureuse pour contrer l’impression que le Canada n’exerce pas de contrôles à ses frontières.  Le gouvernement a longtemps craint qu’en l’absence de contrôle, il verrait l’appui de la population pour les programmes d’immigration et de réfugiés s’effriter.  De plus, à la suite des événements du 11 septembre 2001, certains ont plaidé en faveur de mesures qui répondraient aux craintes exprimées par les Américains que leur pays est plus vulnérable à cause des faiblesses qu’ils perçoivent dans le régime canadien de protection des réfugiés.

Le gouvernement est d’avis qu’il est également essentiel de contrôler le nombre de demandeurs du statut de réfugié au Canada, étant donné le nombre élevé de revendicateurs potentiels dans le monde(4).  Ainsi, décourager, par divers moyens, l’arrivée de nouveaux revendicateurs au Canada est un objectif important du gouvernement(5).  La contradiction entre le fait que le Canada possède un système de reconnaissance du statut de réfugié qui est reconnu comme l’un des meilleurs au monde et celui de faire des tentatives rigoureuses pour bloquer l’accès à ce système est réel et insoluble.

La Loi sur l’immigration précédente renfermait des dispositions qui ne touchaient que les revendications du statut de réfugié au sens de la Convention.  Au fil du temps, d’autres motifs de protection se sont ajoutés au règlement et aux pratiques administratives de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), et ont été imposées par la jurisprudence.  La nouvelle Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés a consolidé ce large éventail de motifs par l’emploi du terme « demande d’asile ».  Ceux dont la demande est acceptée sont appelés « personnes protégées », qu’il s’agisse d’un « réfugié au sens de la Convention » ou d’une « personne à protéger ».  La compétence en matière de décision sur la protection reste divisée entre la Commission de l’immigration et du statut de réfugié et le ministère, mais la nouvelle Loi a élargi le mandat de la Commission.

Il convient aussi d’examiner le processus de détermination du statut de réfugié au pays dans le contexte plus vaste où le Canada vient en aide aux réfugiés :

LA COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

Au Canada, toutes les questions d’ordre quasi judiciaire ayant trait à l’immigration sont confiées à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR, ou la Commission), le plus grand tribunal administratif au Canada(6).  La Commission a son siège social dans la région de la capitale nationale, mais ses opérations sont décentralisées dans des bureaux répartis d’un bout à l’autre du pays.

La CISR se compose de la Section de la protection des réfugiés, de la Section de l’immigration, de la Section d’appel de l’immigration et de la Section d’appel des réfugiés.  La Section de la protection des réfugiés statue sur les demandes d’asile présentées au Canada.  La Section de l’immigration, elle, fait enquête sur certaines catégories de personnes dont on suppose qu’elles sont interdites de territoire au Canada ou qu’elles peuvent en être renvoyées en vertu de la loi; elle procède également à des contrôles des motifs de détention des personnes détenues aux termes de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.  La Section d’appel de l’immigration entend, pour sa part, les appels des demandes de parrainage rejetées par les agents de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), les appels de certaines mesures de renvoi prises contre des résidents permanents, ainsi que les appels interjetés par des résidents permanents qui ont fait l’objet d’un constat, hors du Canada, du manquement à leur obligation de résidence et les appels par CIC des décisions de la Section de l’immigration lors d’une enquête.  La mise sur pied de la quatrième section, la Section d’appel des réfugiés, a été reportée; lorsque le processus sera mis en place, cette Section tranchera les appels de décisions rendues par la Section de la protection des réfugiés(7).

La Commission est dirigée par un président nommé par le Gouverneur en conseil et par un directeur exécutif.  Le Gouverneur en conseil nomme les membres de toutes les sections, sauf les membres de la Section de l’immigration, lesquels sont des fonctionnaires.  Les nominations faites par le Gouverneur en conseil peuvent l’être pour une période maximale de sept ans, et les membres peuvent être nommés de nouveau.  Il existe un processus précis pour déposer les membres en cas d’incapacité, de mauvaise conduite ou de conflit d’intérêts.  Le processus a été mis en branle une fois, en 1994, mais l’affaire a été réglée juste avant que l’enquête ne débute.

La CISR fait rapport au Parlement par l’entremise du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.

 L’ACCÈS AU RÉGIME(8)

    A.  Admissibilité à présenter une demande d’asile

Le droit de présenter une demande d’asile au Canada n’est pas universel.  Les critères d’admissibilité sont appliqués par les agents d’immigration (employés de Citoyenneté et Immigration Canada) qui peuvent empêcher que les demandes soient déférées à la Commission.  La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés renferme une nouvelle disposition prévoyant que l’agent statue sur la recevabilité de la demande dans les trois jours ouvrables suivant la réception de la demande.  Si aucune décision n’est rendue dans ce délai, la demande (à quelques exceptions près) est réputé avoir été déférée.  Le contrôle sécuritaire est désormais entrepris au moment du dépôt de la demande(9).

La question de l’admissibilité reste en suspens.  Si les demandes de protection déférées à la Section de la protection des réfugiés sont plus tard déclarées irrecevables, les procédures devant la Commission prennent fin, ou les décisions déjà rendues sont annulées.  Si la décision d’irrecevabilité exige la tenue d’une enquête relative à l’interdiction de territoire ou le prononcé d’une décision par un tribunal, les procédures sont suspendues jusqu’à la conclusion de l’enquête ou jusqu’à ce que la décision soit rendue.

Les demandes des personnes visées par une mesure de renvoi et celles des demandeurs appartenant aux catégories ci-dessous ne peuvent pas être déférées à la Commission :

À l’instar de l’ancienne, la nouvelle Loi énonce quatre facteurs que le gouverneur en conseil doit prendre en considération pour désigner les pays vers lesquels les demandeurs peuvent être renvoyés sans examen sur la protection :

En ce qui a trait à ce dernier facteur, l’une des difficultés qui a jusqu’à maintenant empêché la mise en œuvre des dispositions sur les pays sûrs est le fait qu’il n’existe aucune disposition, en droit international, pour obliger les pays inscrits sur ces listes à accepter le retour de la plupart des demandeurs si le pays n’a pas donné son consentement.

Les événements du 11 septembre 2001 ont incité le Canada et les États-Unis à conclure une entente définissant le pays qui serait responsable de l’examen de demande dans les cas où le demandeur est arrivé par l’autre pays(13).  Au début de juillet 2002, une version préliminaire de l’entente était prête pour consultation; la version finale a été paraphée à la fin d’août et elle entrera en vigueur une fois que les mécanismes nécessaires auront été mis en place(14).  Pour justifier le renvoi dans d’autres pays de personnes même s’il est fort possible qu’elles soient d’authentiques réfugiés, le Canada s’appuie sur le principe qu’il n’est tenu de protéger que ceux pour qui il n’existe pas d’autre refuge et qu’il n’est pas le seul pays capable et susceptible de protéger les réfugiés.

L’entente englobe le principe général qu’une demande doit être examinée par le premier des deux pays dans lequel le demandeur est effectivement présent.  Elle couvre uniquement les arrivées aux postes frontières terrestres et des exceptions sont prévues pour les cas suivants(15) :

Dans le cadre d’une autre entente, dont les États-Unis auraient fait une condition préalable à la conclusion de l’entente principale, le Canada acceptera de réétablir un maximum de 200 personnes à la demande des Etats-Unis(16).

La politique de renvoi incorporée à la Loi vise à décourager les personnes en quête d’asile de quitter, pour des raisons de convenance personnelle, un pays où elles sont en sécurité parce qu’elles croient, par exemple, que les perspectives d’emploi sont meilleures au Canada ou qu’il serait plus facile de s’y faire admettre comme réfugiés.  Le gouvernement a toujours été convaincu que ce genre de démarche relève non pas de la protection des réfugiés mais de l’immigration.  Les revendicateurs qui viennent au Canada après avoir été rejetés par un autre pays entrent aussi dans cette catégorie.

 Les défenseurs des droits des réfugiés tant au Canada qu’aux États-Unis ont toujours été et restent farouchement opposés aux dispositions sur les tiers pays sûrs.  En plus d’y être opposés en principe – ils prétendent que de telles ententes affaiblissent la protection accordée aux réfugiés et n’améliorent pas l’efficience administrative des gouvernements en cause – ils croient qu’à beaucoup d’égards, le régime canadien est plus juste envers les demandeurs.  Ils soulignent les taux de détention plus élevés aux États-Unis – où les réfugiés sont souvent détenus dans les mêmes établissements que des criminels – la possibilité restreinte de travailler en attendant la tenue de l’audience, les contraintes temporelles relatives à la présentation d’une demande et l’interprétation de la Convention sur les réfugiés, qui est plus restrictive aux États-Unis qu’au Canada.  Par ailleurs, les demandeurs d’asile au Canada ont un meilleur accès à l’aide juridique et à l’aide sociale, au besoin.

Les défenseurs des droits des réfugiés prédisent des impasses des deux côtés de la frontière lorsque les agents devront tenter de déterminer s’il est possible de vérifier les liens familiaux qui permettraient l’entrée au pays.  Ils craignent en outre que les demandeurs ne fassent appel à des réseaux d’immigration clandestine pour entrer au pays illégalement puisque l’entente s’applique uniquement aux points d’entrée terrestres.  Une fois au Canada, les personnes arrivées illégalement pourront présenter une demande sans craindre d’être renvoyés aux États-Unis.

   B.  Contrôle judiciaire et mesures de renvoi à la suite de la sélection préalable

Des mesures de renvoi conditionnelles sont délivrées à l’égard des personnes dont la demande est déterminée recevable par la CISR.  Ces mesures entrent en vigueur s’il y a désistement ou retrait de la demande ou si la demande est rejetée et que tous les autres recours sont épuisés par exemple, lorsqu’une demande d’autorisation d’introduire une instance de contrôle judiciaire est rejetée ou qu’une demande d’examen des risques avant renvoi est rejetée.  Évidemment, si le statut de personne protégée est accordé au demandeur, les mesures sont nulles et non avenues.

Les demandeurs jugés inadmissibles à un déféré à la Commission et visés par des mesures de renvoi peuvent demander à la Section de première instance de la Cour fédérale l’autorisation de solliciter le contrôle judiciaire tant de l’ordonnance de renvoi que de la décision de l’agent d’immigration concernant leur admissibilité.  La décision d’autoriser ou non la demande de contrôle judiciaire est prise par un juge unique, qui n’appelle habituellement pas les parties à comparaître.  Le refus d’autoriser une demande de contrôle judiciaire est sans appel.

Les motifs justifiant un contrôle judiciaire sont énoncés dans la Loi sur la Cour fédérale; ils sont identiques à ceux qui justifient un contrôle des décisions de la Section du statut de réfugié, à savoir que l’organisme ou la personne :

Les demandeurs qui y sont autorisés peuvent en appeler de la décision par contrôle judiciaire de la Section d’appel de la Cour fédérale.  L’appel d’une décision de la première instance à la Section d’appel de la Cour fédérale est autorisé uniquement si le juge de la Section de première instance atteste, au moment de rendre son jugement, qu’une question grave d’importance générale est en cause et énonce la question.

L’AUDIENCE

    A.  Renvoi à la section de la protection des réfugiés de la CISR

Les demandeurs jugés admissibles à présenter une demande d’asile (ou qui sont jugés admissibles à l’expiration du délai de trois jours) sont déférés à la Section de la protection des réfugiés (SPR) pour qu’une décision soit prise sur leur demande.  L’agent d’immigration doit transmettre à la SPR certains renseignements sur le demandeur et sur sa demande.  Les demandeurs reçoivent un formulaire de renseignements personnels à remplir, sur lequel ils doivent expliquer le fondement de leur demande; le formulaire doit ensuite être expédié à la SPR.  Les demandeurs doivent en outre fournir les pièces d’identité et titres de voyage qu’ils ont en leur possession (ou qu’ils peuvent obtenir par la suite).  Le ministre (par l’intermédiaire d’un représentant) peut demander de recevoir tous les renseignements et documents fournis par le demandeur.

   B.  Nature de l’audience

Sous le régime de la Loi précédente, la participation du ministre à une audience pouvait être limitée.  Aujourd’hui, toutefois, le ministre a le droit de recevoir un avis de l’audience et, sur avis au demandeur de son intention d’intervenir, il peut participer pleinement dans tous les cas, même s’il est fort probable que cela soit, à toutes fins utiles, impossible étant donné les ressources disponibles.

La Loi donne instruction à la SPR et à toutes les sections de traiter toutes les procédures dont elle est saisie de manière aussi informelle et aussi rapide que les circonstances et les règles de l’équité et de la justice naturelle le permettent.  La SPR peut admettre toute information généralement connue ou toute information ou opinion dans les limites de ses connaissances spécialisées; si elle a l’intention d’utiliser cette information, elle doit en donner avis au demandeur qui peut alors faire des observations ou apporter des preuves relatives à l’information.  La Section n’est liée par aucune règle juridique ou technique de présentation de la preuve et peut fonder sa décision sur les éléments qu’elle juge dignes de foi en l’espèce, à la condition que la preuve en soit faite au cours de la procédure.

La Section doit habituellement tenir une audience pour déterminer si la demande d’asile doit être accueillie ou rejetée, mais elle peut accueillir une demande sans audience si le ministre n’a pas donné avis de son intention d’intervenir.  C’est ce que l’on appelle le processus accéléré, et il se fonde sur l’opinion d’un agent de protection des réfugiés (un employé du de la Commission) que :

Sous le régime de la Loi précédente, les audiences étaient tenues devant un tribunal composé de deux personnes et, à quelques exceptions près, une décision partagée constituait l’acceptation de la demande.  En vertu de la nouvelle Loi, un seul membre entendra les demandes, sauf si le président est d’avis que le tribunal doit se composer de trois membres(17). (Cette disposition s’applique également à la Section d’appel des réfugiés et à la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration.) Si la demande est entendue par trois membres, la décision est prise à la majorité.

L’agent de protection des réfugiés (APR) participe aux audiences de détermination du statut de réfugié en faisant la catégorisation initiale des revendications et en compilant les renseignements pertinents pour le membre qui entendra le cas.  Les APR sont considérés être impartiaux puisqu’ils n’ont aucun intérêt dans l’issue des cas et que leur rôle n’est ni de contester ni d’appuyer la demande d’asile.  Ils peuvent interroger les demandeurs et leurs témoins et ils peuvent eux-mêmes appeler des témoins.

Les audiences pour déterminer l’acceptation ou le refus des demandes d’asile se déroulent habituellement à huis clos, mais elles peuvent être publiques, à moins qu’une audience publique n’ait de fortes chances de mettre en péril la vie, la liberté ou la sécurité d’une personne ou de créer un risque réel et important d’injustice ou de divulgation de renseignements ayant trait à la sécurité publique(18).  Que l’audience se déroule ou non à huis clos, un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a le droit d’y assister et de faire des observations par écrit.

Les demandeurs et le ministre ont le droit d’être représentés par le conseiller de leur choix.  Quoique la Commission ne paie pas les honoraires des conseillers(19), l’aide juridique est offerte dans un certain nombre de provinces.  Il n’est pas nécessaire que le conseiller soit un avocat(20).  Même si la Loi prévoit que le règlement peut déterminer qui est autorisé à représenter, conseiller ou consulter les demandeurs sur les questions d’immigration ou de protection, il n’existe actuellement pas de règlement stipulant qui peut se présenter devant la Commission en tant que conseiller(21).

Les demandeurs d’asile et le ministre ont le droit de convoquer des témoins à l’audience, notamment des témoins experts.  Un préavis doit être donné au ministre (s’il comparaît) et à la Commission relativement aux témoins que le demandeur se propose de faire entendre, entre autres sur l’objet et la teneur de leur témoignage et sur la relation qu’ils peuvent avoir avec le demandeur(22).

Les personnes qui présentent une demande d’asile ont l’obligation de fournir des pièces d’identité et d’autres documents à la Commission.  La Loi donne instruction à la SPR de tenir compte, s’agissant de la crédibilité du demandeur, du fait que n’étant pas muni de papiers d’identité acceptables, le demandeur ne peut raisonnablement en justifier la raison ou expliquer pourquoi il n’a pas pris les mesures voulues pour s’en procurer.

Les audiences se déroulent habituellement de manière informelle et non contradictoire.  Elles deviennent toutefois contradictoires lorsqu’un représentant du ministre intervient.  Le membre a la responsabilité de contrôler les procédures et peut exiger que la preuve et les observations portent sur des questions précises.

   C.  La décision et ses conséquences

La demande est accueillie si la SPR conclut que le demandeur a qualité de réfugié au sens de la Convention ou est une personne à protéger.  Si la demande est rejetée, la Loi donne instruction au décideur de faire état dans sa décision du fait qu’il n’a été présenté aucun élément de preuve crédible ou digne de foi sur lequel la décision aurait pu se fonder(23).  Si telle est la conclusion, le demandeur d’asile ne bénéficie pas d’office d’un sursis des mesures de renvoi pour demander un contrôle judiciaire.  Il lui reste possible d’obtenir un sursis mais il doit en faire la demande à la Cour fédérale, et la décision est prise au cas par cas.

Toutes les décisions finales doivent être étayées de motifs.  La politique de la Commission favorise les décisions orales délivrées à la fin de l’audience.  Toutefois, des motifs écrits doivent être donnés pour toute décision rejetant une demande, si une partie en fait la demande, et dans les situations autres que celles qui sont prévues dans le règlement de la SPR.

   D.  Annulation et constat de perte de l’asile

                        L’annulation et la perte de l’asile sont deux processus distincts.

                        Le ministre peut demander à la SPR de déterminer que l’asile est perdu(24).  La perte de l’asile se produit dans les situations suivantes :

Le ministre peut également demander à la SPR d’annuler la protection accordée à un réfugié si la décision ayant accueilli la demande d’asile résulte, directement ou indirectement, de représentations erronées en ce qui a trait à des documents ou des faits pertinents ou à la non présentation de tels documents ou faits.  La SPR peut rejeter la demande si elle estime qu’il y avait d’autres éléments de preuve suffisants dont il a été tenu compte au moment de la décision initiale pour justifier l’asile.  Les motifs de la décision portant annulation doivent obligatoirement être énoncés par écrit.

L’autorisation de demander le contrôle judiciaire, par la Cour fédérale, d’une décision de la Section du statut de réfugié peut être sollicitée par l’invocation des mêmes motifs que ceux qui sont exposés ci-dessus.

En conséquence de la jurisprudence créée sous le régime de la Loi précédente, les nouvelles règles prévoient que le demandeur ou le ministre peut demander la réouverture d’une demande d’asile qui a fait l’objet d’une décision ou d’un désistement ou, dans le cas d’une personne protégée, la réouverture d’une demande relative à la perte ou à l’annulation de l’asile.  Un critère s’applique à toutes les demandes de réouverture : y a-t-il eu omission d’observer un principe de justice naturelle(26)?

APPELS DES DÉCISIONS DE LA SECTION DE LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés institue un nouveau mécanisme d’appel des décisions de la SPR, à savoir la Section d’appel des réfugiés (SAR).  Toutefois, en avril 2002, il a été annoncé que la mise sur pied de cette section était reportée « en raison de la surcharge du système »(27).  En mai 2002, le ministre Coderre a promis, au cours de l’assemblée générale annuelle du Conseil canadien pour les réfugiés, que la SAR serait mise en place d’ici un an(28).  Une fois la SAR en place, des comités de trois membres se pencheront sur les cas dont il aura été déterminé qu’ils ont valeur de précédent, et les décisions des comités auront la même valeur qu’une décision d’un tribunal d’appel par rapport à celle d’un tribunal de première instance.  Un seul membre entendra les autres appels présentés à la SAR.

Jusqu’à ce que les dispositions sur la SAR entrent en vigueur, les procédures existantes sont suivies, c’est-à-dire que le demandeur débouté peut demander à la Section de première instance de la Cour fédérale d’autoriser un contrôle judiciaire(29).  Le processus est identique à celui qui est décrit ci-dessus sous la rubrique « Contrôle judiciaire et mesures de renvoi à la suite de la sélection préalable », c’est-à-dire que si la permission d’en appeler est accordée, la Section de première instance de la Cour fédérale entendra l’affaire et s’il est attesté qu’une question grave d’importance générale est en cause, la Cour d’appel fédérale entendra un appel de l’ordonnance de la Section de première instance.  Il est possible d’interjeter appel à la Cour suprême du Canada, sur permission de cette dernière, des décisions rendues dans les quelques affaires qui se rendent à la Section d’appel de la Cour fédérale.

STATUT DE RÉSIDENT PERMANENT POUR LES
DEMANDEURS
DONT LA DEMANDE EST ACCUEILLIE

   A.  Statut de personne protégée accordé par la CISR

Les personnes dont il a été déterminé qu’elles sont des personnes à protéger peuvent demander le statut de résident permanent dans les six mois de la détermination(30).  Le demandeur principal peut inclure dans sa demande les membres de sa famille qui sont au Canada.  Les membres de la famille qui se trouvent à l’extérieur du Canada peuvent aussi être inclus et un visa de résident permanent peut leur être délivré par des missions à l’étranger pendant l’année qui suit la date à laquelle le demandeur devient résident permanent.

                        Le demandeur interdit de territoire pour l’un des motifs ci-après n’a pas le droit de demander la résidence permanente :

Si une personne protégée ne peut fournir les papiers d’identité habituellement requis pour une demande de résidence permanente, il existe un autre moyen d’établir son identité.  Le demandeur peut fournir des papiers d’identité acceptables émis hors du Canada avant son entrée au Canada ou, s’il y a de bonnes raisons pour lesquelles cela est impossible, il peut satisfaire à l’exigence en faisant une déclaration solennelle sur son identité, accompagnée d’une déclaration solennelle attestant de son identité faite soit par une personne qui le connaissait ou qui connaissait un membre de sa famille avant leur entrée au Canada, ou par un représentant d’une organisation au Canada qui représente les personnes de la même nationalité.

   B.  Examen des risques avant renvoi

En plus du statut de personne protégée qui peut être accordé par la CISR, la Loi prévoit maintenant un processus appelé examen des risques avant renvoi (ERAR) qui permet à la plupart des personnes de demander la protection à des fonctionnaires spécialisés du ministère avant d’être renvoyées du Canada.  Par exemple, un revendicateur du statut de réfugié dont la demande a été rejetée par la SPR peut demander la protection pour le motif qu’il existe nouveaux éléments de preuve, ou des preuves qu’il n’était pas possible ou raisonnable de fournir lors de l’audience originale.

Dans beaucoup de cas, les critères pour déterminer le risque sont larges : les motifs prévus dans la Convention sur les réfugiés, dans la Convention contre la torture ainsi que les risques d’être tué ou de subir des traitements ou des peines cruels ou inusités.  Si la protection est accordée, les personnes visées peuvent demander la résidence permanente.  Dans des cas précis, notamment si le demandeur est interdit de territoire au Canada pour des raisons de sécurité, pour criminalité organisée ou grande criminalité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux, les critères sont plus restreints et une décision favorable entraîne uniquement sursis de la mesure de renvoi.  Pour prendre une décision dans les cas de ce genre, il faut tenir compte des questions relatives au danger pour le public au Canada pour des motifs de criminalité ou de sécurité, ainsi que de la nature et de la gravité des infractions commises par le demandeur.

Le règlement stipule des délais stricts pour la présentation d’une demande de protection et des observations(31).  Habituellement, la décision en matière d’ERAR est prise sans qu’il y ait audience, mais le règlement énonce les facteurs qui déterminent si la tenue d’une audience est requise.  Ces facteurs sont les suivants:

Même si la demande d’ERAR est rejetée, le demandeur peut encore présenter une demande pour rester au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire.  Une telle demande peut être présentée à CIC en tout temps, mais elle n’entraîne pas sursis d’une mesure de renvoi.

OPÉRATIONS DE LA COMMISSION DE L’IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

La Commission a connu de nombreuses modifications depuis sa création en 1989.  Étant donné qu’en 2001, le nombre de revendications du statut de réfugié déférées à la Section du statut de réfugié a été supérieur à 44 000 et que cette dernière a procédé à près de 23 000 instructions approfondies, il est intéressant de souligner qu’à l’origine, elle a été dotée de ressources suffisantes pour tenir chaque année environ 7 500 instructions approfondies, en fonction d’un total de 18 000 demandes(32).  Les rédacteurs originaux de la loi qui créait la Commission ont présumé qu’un grand nombre de demandes seraient éliminées aux étapes initiales parce qu’elles ne seraient pas crédibles et que des ententes sur les tiers pays sûrs auraient pour résultat le renvoi immédiat de beaucoup de demandeurs vers les pays par lesquels ils étaient arrivés(33).

La proportion de demandes accueillies par la Commission a varié d’un maximum de 86 p. 100 au cours de sa première année d’opération à un minimum de 53 p. 100 en 1987.  Le taux actuel est de 58 p. 100 et il s’est maintenu pour les trois dernières années.

ENJEUX ACTUELS

   A.  Report de la mise sur pied de la Section d’appel des réfugiés

Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, la mise sur pied d’un mécanisme interne d’appel à la CISR a été retardée.  Les groupes de défense des droits des réfugiés ont réagi avec colère à l’annonce de cette nouvelle.  Quand des inquiétudes ont été exprimées relativement à la réduction de la taille du comité chargé d’entendre les demande de protection, qui est passée de deux membres à un seul, le ministère a souvent rappelé que la SAR est un mécanisme de contrôle de qualité.  Au point où en sont les choses, les demandeurs peuvent uniquement être entendus par un comité composé d’un seul membre et doivent obtenir l’autorisation de la Cour fédérale pour en appeler de la décision de ce membre.  Selon certaines organisations de réfugiés, la SAR devait être un compromis qui aurait permis aux membres du Parlement et aux groupes de revendication de s’accommoder des dispositions plus strictes de la nouvelle Loi.  Le directeur exécutif du Conseil canadien pour les réfugiés a émis le commentaire suivant sur le report de la mise sur pied de la SAR : « Cela ressemble à une manœuvre détournée pour échapper à l’examen par le Parlement »(34).

   B.  L’Entente sur les tiers pays sûrs

Aux dires de CIC, il est probable que la récente version de l’entente sur laquelle le Canada et les États-Unis se sont entendus entrera en vigueur au début de 2003.  Comme nous en avons fait état précédemment, cette entente a provoqué des critiques.  Plus particulièrement, certains avancent qu’elle affaiblira la protection accordée aux réfugiés et causera une augmentation du passage de clandestins tout en créant une nouvelle procédure administrative longue et onéreuse à nos points d’entrée frontaliers terrestres.  Les partisans de l’entente soulignent la participation du HCNUR et la garantie que les personnes renvoyées en vertu de l’entente ne peuvent pas être renvoyées vers le pays de leur domicile sans que leur demande ait été entendue.  Ils prétendent que de cette façon, les personnes qui ont véritablement besoin de protection ne subiront pas de répercussions graves.  En outre, la diminution possible du nombre de demandes au Canada pourrait représenter des économies significatives.

   C.  Renvoi des réfugiés déboutés

Il ne fait pas de doute que les questions touchant les renvois reçoivent une grande attention du public.  Dans certains cas, les mesures de renvoi ne sont pas exécutées; dans d’autres, les retards sont souvent perçus comme étant anormalement longs; et dans d’autres cas, les individus sont renvoyés mais réussissent par la suite à revenir au Canada.  Dans certains cas, les causes du retard ou les motifs de la non-exécution des mesures de renvoi sont clairs et faciles à comprendre; par exemple, les renvois vers un pays peuvent faire l’objet d’un moratoire temporaire à cause des conditions dangereuses dans ce pays.  Par contre, les retards ou la non-exécution des mesures de renvoi peuvent être plus difficiles à expliquer dans d’autres cas.  Des particuliers peuvent échapper à l’arrestation, malgré le fait qu’ils sont inscrits dans des banques de données partout au pays.  Il peut être difficile d’obtenir des documents de voyage du pays vers lequel le demandeur sera renvoyé, et cette difficulté sera accrue s’il a réussi à cacher son identité ou même sa citoyenneté.

En plus des difficultés ci-dessus, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration a fait état d’un autre problème grave dans un rapport de 1998(35).  Le comité est arrivé à la conclusion que Citoyenneté et Immigration Canada souffrait d’une grave manque de données sur l’exécution, ce qui rendait impossible la tâche de suivre efficacement les personnes faisant l’objet ou pouvant faire l’objet de mesures de renvoi.  Tout en rappelant que la modernisation des systèmes informatiques avait commencé, le comité recommandait, entre autres, que le ministère accorde la plus haute priorité à l’élaboration d’outils informatiques modernes capables de soutenir sa fonction d’exécution.

JURISPRUDENCE EN MATIÈRE DE PROTECTION DES RÉFUGIÉS

Nous donnons ci-dessous un sommaire de certains des cas les plus importants dans ce domaine du droit.  Le nombre de litiges en matière d’immigration au Canada est relativement élevé; par conséquent, nous ne faisons référence qu’aux décisions les plus importantes.

   A.  Singh et autres c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] 1 R.C.S. 177

Le ministre de l’Emploi et de l’Immigration, après avoir reçu l’avis du comité consultatif sur le statut de réfugié (CCSR)(36), avait décidé qu’aucun des membres d’un groupe de demandeurs n’était un réfugié au sens de la Convention.  La Commission d’appel de l’immigration a rejeté les demandes subséquentes de réexamen du statut sans avoir procédé à une audience, comme le stipulait la loi en vigueur à l’époque.  Il fallait déterminer si les appelants pouvaient invoquer la Charte canadienne des droits et libertés pour contester le processus et, dans l’affirmative, s’il y avait violation de leur droit à la sécurité de la personne telle qu’elle n’était pas conforme aux principes de justice fondamentale.  La Cour a statué, à la majorité :

C’est l’arrêt Singh qui a mené à la création de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié.

   B.  Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689

M. Ward, ancien membre d’une organisation terroriste de l’Irlande du Nord, avait été condamné à mort par cette organisation pour avoir aidé des otages à s’échapper.  Il avait présenté une revendication du statut de réfugié au Canada, alléguant que le Royaume-Uni et l’Irlande ne pouvaient pas le protéger.  La Cour suprême a étudié diverses questions juridiques ayant trait à la définition de réfugié au sens de la Convention dans cet arrêt fondamental, et a statué comme suit :

En fin de compte, l’affaire a été renvoyée à la Commission pour réexamen conformément aux directives de la Cour.

   C.  Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982

M. Pushpanathan était entré au Canada et avait revendiqué le statut de réfugié, mais sa demande n’avait fait l’objet d’aucune décision car il s’était vu reconnaître le statut de résident permanent en application d’un programme administratif.  Il avait ultérieurement été arrêté au Canada et accusé de complot en vue de faire le trafic d’un stupéfiant.  Au moment de son arrestation, il faisait partie d’un groupe qui avait en sa possession une quantité d’héroïne dont la valeur marchande était d’environ 10 millions de dollars.  Il avait été condamné à huit années d’emprisonnement.  En 1991, alors qu’il bénéficiait d’une libération conditionnelle, M. Pushpanathan a renouvelé sa demande de reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention.  La Commission a décidé qu’il n’était pas un réfugié en raison de l’exclusion prévue à la section Fc) de l’article premier de la Convention, qui prévoit que les dispositions de la Convention ne s’appliquent pas aux personnes qui « se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies ».

La Cour suprême du Canada a statué à la majorité que la décision de la Commission était erronée et accueilli l’appel de M. Pushpanathan.  La Cour a déclaré que la section Fc) de l’article premier s’applique lorsqu’il y a consensus en droit international sur des agissements particuliers qui sont tenus pour être des violations suffisamment graves et soutenues des droits fondamentaux de la personne pour constituer une persécution, ou qui sont explicitement reconnus comme contraires aux buts et aux principes des NU.  Le complot en vue de faire le trafic d’un stupéfiant n’est donc pas une violation visée par la section Fc) de l’article premier.

L’affaire a été renvoyée à la CISR pour réexamen où un nouvel argument a été avancé contre le demandeur.  Il a été allégué que la demande de M. Pushpanathan était irrecevable en vertu de la section Fc) de l’article premier parce qu’il s’adonnait au trafic de stupéfiants au bénéfice d’un groupe terroriste, les Tigres tamoul(37).  Même si M. Pushpanathan a nié savoir que les fonds provenant du trafic de stupéfiants étaient envoyés aux Tigres, la Commission a déterminé que sa demande était irrecevable.  La Cour fédérale a maintenu cette décision en octobre 2002, et déclaré que le critère pour déterminer s’il y a « des raisons sérieuses de croire » (expression utilisée dans la Convention sur les réfugiés) qu’une personne a commis des crimes que la Cour suprême considérerait être des motifs suffisants pour satisfaire aux exigences de la section Fc) de l’article premier exige une norme de preuve peu élevée.  L’appartenance antérieure à une organisation terroriste ou la participation directe ne constitue pas une exigence.  Il est possible que cette affaire soit portée en appel devant la Cour d’appel fédérale.

    D.  Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1

L’arrêt Suresh, et l’affaire similaire Ahani (voir ci-dessous), traitent de mesures d’expulsion prises contre des demandeurs qui ont allégué qu’ils risquaient la torture s’ils étaient renvoyés dans leurs pays d’origine.  Le Canada a ratifié la Convention contre la torture (CCT) qui interdit explicitement aux États membres de renvoyer des personnes dans des pays où elles seront soumises à la torture.  Le paragraphe 3.1 stipule : « Aucun État partie n’expulsera, ne refoulera, ni n’extradera une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture ».  Les États ne sont pas supposés être capables dévier de cette interdiction absolue.  Le paragraphe 2.2 de la CCT se lit comme suit : « Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture ».  En outre, la Cour suprême du Canada a maintenu à l’unanimité, lorsqu’elle s’est penchée sur la question, que l’interdiction de renvoyer une personne dans un pays où elle risque la torture est également la norme internationale, c’est-à-dire le droit international coutumier.

Toutefois, un article de l’ancienne Loi sur l’immigration était en contradiction directe avec cette affirmation : il permettait l’expulsion vers un pays où la vie d’une personne aurait été en danger si elle était interdite de territoire pour certains motifs précisés et s’il était déterminé qu’elle représentait un danger pour la sécurité du Canada.  (Il en est toujours ainsi en vertu de la nouvelle Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, qui est entrée en vigueur le 28 juin 2002.) Essentiellement, la loi canadienne prévoit que dans certaines situations, des personnes peuvent être expulsées vers un pays où elles risquent la torture.

Il a été allégué que M. Suresh était un membre et un agent de financement des Tigres tamoul.  Même si la Cour a accueilli le pourvoi et ordonné une nouvelle audition pour réexaminer les motifs de l’expulsion, elle a maintenu que la loi est valide.  La nouvelle audition devrait être conforme aux principes de justice fondamentale énoncés à l’article 7 de la Charte, et la Cour a suggéré que « la ministre doit généralement refuser d’expulser le réfugié lorsque la preuve révèle l’existence d’un risque sérieux de torture ».  La Cour exprime comme suit son opinion restrictive relativement aux circonstances dans lesquelles l’expulsion pourrait se faire :

Nous n’excluons pas la possibilité que, dans des circonstances exceptionnelles, une expulsion impliquant un risque de torture puisse être justifiée, soit au terme du processus de pondération requis par l’art. 7 de la Charte soit au regard de l’article premier de celle-ci. [...] Dans la mesure où le Canada ne peut expulser une personne lorsqu’il existe des motifs sérieux de croire qu’elle sera torturée dans le pays de destination, ce n’est pas parce que l’article 3 de la CCT limite directement les actions du gouvernement canadien, mais plutôt parce que la prise en compte, dans chaque cas, des principes de justice fondamentale garantis à l’art. 7 de la Charte fera généralement obstacle à une expulsion impliquant un risque de torture.

   E.  Ahani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 2

Dans cette affaire similaire à l’affaire Suresh (voir ci-dessus), il était allégué que l’appelant était un assassin formé par les services du renseignement iraniens.  La Cour a déterminé que l’appelant n’avait pas établi qu’il courait un risque sérieux de torture s’il était retourné en Iran.  L’appel a par conséquent été rejeté.

À la suite du jugement, M. Ahani a entrepris de nouvelles procédures demandant un sursis des mesures d’expulsion jusqu’à ce que le Comité sur les droits de l’homme des Nations Unies ait étudié son cas.  Les tribunaux de première instance ont rejeté sa demande et la Cour suprême du Canada a refusé d’entendre son appel.

   F.  Law Society of British Columbia c. Mangat, 2001 CSC 67

M. Mangat était un conseiller en immigration à Vancouver.  Même s’il n’était pas membre du Barreau de la Colombie-Britannique, lui et d’autres employés de sa firme agissaient à titre ce conseillers dans diverses procédures en matière d’immigration.  La Law Society of Alberta Colombie-Britannique a déposé une demande d’injonction permanente contre M. Mangat et ses associés pour les empêcher de pratiquer le droit en contravention à la loi de la Colombie-Britannique sur l’exercice du droit (Legal Profession Act).  Les conseillers ont reconnu qu’ils exerçaient le droit au sens prévu dans cette loi, mais ils ont prétendu qu’ils y étaient autorisés par l’ancienne Loi sur l’immigration qui permettait (comme le fait la nouvelle Loi) à des personnes autres que des avocats de comparaître devant la CISR au nom de leurs clients.

La Cour suprême du Canada a statué que puisque la représentation de personnes par des conseillers devant la CISR a des incidences fédérales et provinciales, les lois, règles et règlements fédéraux et provinciaux coexisteront dans la mesure où il n’y a pas de conflit.  En cas de conflit, les dispositions législatives fédérales auront préséance, conformément à la théorie de la primauté, sauvegardant ainsi le contrôle par le Parlement sur les tribunaux administratifs qu’il crée.

Des personnes autres que des avocats peuvent par conséquent se présenter devant la CISR (quoique au moment où l’affaire a été entendue par la Cour suprême du Canada, M. Mangat avait terminé des études en droit et était devenu membre du Barreau).


ANNEXE 1

REVENDICATIONS DU STATUT DE RÉFUGIÉ AU CANADA, 1989-2001

 

Année

Nombre de demandes

Demandes adjugées par la CISR après une audience

Désistements, retraits
et autres

Décisions favorables de la CISR (en % des demandes non retirées ou abandonnées)

 

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

 

 

12 092

21 046

29 008

31 345

35 702

22 375

26 409

26 009

22 721

23 897

29 450

34 289

44 075

 

 

 5 599

13 177

27 520

27 600

25 868

21 928

13 755

16 715

19 086

23 183

22 373

24 204

22 951

 

133

394

1 394

1 866

4 920

3 694

3 388

5 277

5 751

6 211

5 609

4 710

5 467

 

 

4 840 (86 %)

10 429 (79 %)

19 913 (72 %)

17 610 (64 %)

14 203 (55 %)

15 298 (70 %)

 9 704 (71 %)

 9 619 (58 %)

10 038 (53 %)

12 929 (56 %)

12 984 (58 %)

14 003 (58 %)

13 383 (58 %)

Sources :      Statistiques compilées à partir de données fournies aux auteurs par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, Déterminations du statut de réfugié par la SRR, année civile.

REMARQUE : Il y a deux méthodes de calcul du taux de reconnaissance des réfugiés au sens de la Convention, et elles produisent des résultats bien différents.  Dans le tableau ci-dessus, le nombre de demandes retirées, abandonnées ou autres est soustrait du calcul du taux de reconnaissance.  On pense que cette méthode donne un reflet plus exact du taux de reconnaissance des demandes sérieuses, c’est-à-dire de celles qui ont donné lieu à une audience.  De nombreuses demandes sont présentées dont les auteurs disparaissent par la suite.  Il peut être trompeur de considérer que ces demandes ont fait l’objet d’une décision défavorable.

Par contre, la Commission inclut les demandes ayant fait l’objet d’un désistement, d’un retrait ou autres dans le calcul du taux de reconnaissance.  Selon cette méthode, les taux de reconnaissance de la Commission sont les suivants :

1989 – 84 %

1990 – 77 %

1991 – 69 %

1992 – 60 %

1993 – 46 %

1994 – 60 %

1995 – 57 %

1996 – 44 %

1997 – 40 %

1998 – 44 %

1999 – 46 %

2000 – 48 %

2001 – 47 %


ANNEXE 2(1)

PROCESSUS DE RECONNAISSANCE DU STATUT DE RÉFUGIÉ

 

 

*     Le demandeur d’asile ou CIC peuvent présenter une demande d’autorisation de contrôle judiciaire à la Cour fédérale du Canada de toute décision rendue par la Section de la protection des réfugiés.

(1)     Source : Site Web de la CISR.


ANNEXE 3

Version finale

ENTENTE CONCERNANT LES TIERS PAYS SÛRS

Le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d’Amérique
(inverser l’ordre dans le texte du gouvernement américain) (ci-après appelés les parties)

CONSIDÉRANT que le Canada est partie à la Convention relative au statut des réfugiés (la « Convention ») signée à Genève, le 28 juillet 1951, et au Protocole relatif au statut des réfugiés signé à New York, le 31 janvier 1967 (le « Protocole »), et que les États-Unis sont partie au Protocole, et réaffirmant leur obligation d’offrir protection aux réfugiés présents sur leur territoire, conformément à ces instruments;

RECONNAISSANT en particulier les obligations légales internationales des parties en vertu du principe du non-refoulement énoncé dans la Convention et dans le Protocole, ainsi qu’en vertu de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (la « Convention contre la torture ») signée à New York, le 10 décembre 1984, et réaffirmant leurs obligations mutuelles de faire respecter les droits humains et les libertés fondamentales.

RECONNAISSANT et respectant les obligations de chaque partie découlant de ses propres lois et politiques en matière d’immigration;

SOULIGNANT que les États-Unis et le Canada administrent chacun un régime généreux de protection des réfugiés, et évoquant leur tradition d’assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées outre frontières, en accord avec les principes de solidarité sur lesquels repose le système international de protection des réfugiés, et convaincus que la coopération et le partage de la responsabilité concernant les demandeurs d’asile peuvent être améliorés;

SOUHAITANT préserver le droit d’asile en tant qu’instrument indispensable de protection internationale des réfugiés, et résolus à renforcer l’intégrité de cette institution ainsi que le consensus public dont elle dépend;

CONSTATANT que des demandeurs d’asile peuvent arriver à la frontière terrestre du Canada ou des États-Unis en venant directement du territoire de l’autre partie où ils auraient pu obtenir protection effective;

PERSUADÉS que, conformément aux avis du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et de son Comité exécutif, les ententes conclues entre les États peuvent renforcer la protection internationale des réfugiés en facilitant un traitement ordonné des demandes d’asile par la partie à laquelle en incombe la responsabilité et en appliquant le principe du partage de la responsabilité;

CONSCIENTS qu’un tel partage de la responsabilité doit permettre en pratique d’identifier les personnes qui ont besoin de protection internationale et d’éviter les violations indirectes du principe fondamental de non-refoulement, et donc déterminés à sauvegarder, pour chaque demandeur d’asile qui vient à relever de leur juridiction et dont la demande est recevable, l’accès à une procédure d’examen complète et équitable de manière à garantir que les protections prévues par la Convention, le Protocole et la Convention contre la torture soient effectivement offertes;

Sont convenus des dispositions qui suivent :

Article premier

   1. Dans la présente entente,

A.  « dernier pays de séjour » désigne le pays, soit le Canada ou les États-Unis, dans lequel le demandeur d’asile était présent immédiatement avant de présenter sa demande d’asile à un point d’entrée frontalier.

B.  « membre de la famille » désigne l’époux, le fils, la fille, les parents, le tuteur légal, les frères et sœurs, les grands- parents, les petits-enfants, l’oncle, la tante, le neveu et la nièce.

C.  « demande d’asile » désigne une demande qu’une personne présente à l’une ou l’autre partie afin d’obtenir sa protection conformément à la Convention ou au Protocole, à la Convention contre la torture ou pour d’autres motifs de protection, en conformité avec les lois de chaque partie.

D.  « demandeur d’asile » désigne toute personne qui demande l’asile dans le territoire de l’une des parties.

E.  « processus de reconnaissance du statut de réfugié » désigne l’ensemble des mesures législatives et des pratiques et procédures administratives et judiciaires auxquelles a recours le gouvernement national de chaque partie pour rendre ses décisions sur les demandes d’asile.

F.  « mineur non accompagné » désigne un demandeur d’asile non marié qui n’a pas atteint l’âge de dix-huit ans et qui n’a ni mère, ni père, ni tuteur au Canada ou aux États-Unis.

   2.   Chaque partie applique la présente entente aux membres de la famille et aux mineurs non accompagnés           en conformité avec ses propres lois.
Article 2
La présente entente ne s’applique pas aux demandeurs d’asile qui sont citoyens du Canada ou des États-Unis, ou qui, n’ayant pas de pays de nationalité, sont des résidents habituels du Canada ou des États-Unis.

Article 3

   1.  En vue de garantir à chaque demandeur d’asile l’accès à un processus de reconnaissance du statut de         réfugié, aucune partie ne doit renvoyer dans un tiers pays une personne dont la demande d’asile lui a été         confiée aux termes de l’article 4 tant qu’une décision n’a pas été rendue au sujet de la demande.

   2.  Aucune partie ne doit renvoyer un demandeur d’asile retourné dans son dernier pays de séjour en vertu         de la présente entente vers un tiers pays, aux termes de tout autre accord sur les tiers pays sûrs ou d’une         désignation réglementaire.

Article 4

   1.  Sous réserve des paragraphes 2 et 3, la partie représentant le dernier pays de séjour doit examiner,         conformément aux règles de son processus de reconnaissance du statut de réfugié, la demande d’asile         présentée par toute personne à un point d’entrée frontalier pendant la période de validité de la présente         entente.

   2.  C’est la partie représentant le pays d’arrivée, et non celle qui représente le dernier pays de séjour, qui         est responsable de l’examen de la demande d’asile d’une personne visée à l’article premier, lorsqu’elle         établit que cette personne, soit :

a.  a, sur le territoire de la partie représentant le pays d’arrivée, au moins un membre de      sa famille auquel le statut de réfugié a été reconnu qui a obtenu un statut juridique,      autre que celui de visiteur, sur le territoire de la partie représentant le pays d’arrivée;

b.  a, sur le territoire de la partie représentant le pays d’arrivée, au moins un membre de      sa famille qui a dix-huit ans révolus et dont la demande d’asile a été jugée recevable      par cette même partie et est en instance;

c.  est un mineur non accompagné;

d.  est arrivée sur le territoire de la partie représentant le pays d’arrivée :

i.  soit en possession d’un visa d’un autre titre d’admission valide émis par cette même partie, autre qu’une autorisation de transit;

ii.   soit n’étant pas assujettie, au regard de cette partie seule, à l’obligation d’obtenir un visa.

   3.  La partie représentant le dernier pays de séjour ne doit pas être obligée d’accepter de reprendre un        demandeur d’asile tant que la partie représentant le pays d’arrivée n’a pas rendu une décision définitive        sur sa demande, conformément à la présente entente.

   4.  Aucune partie ne doit revoir une décision attestant qu’une personne peut faire l’objet d’une dispense en         vertu de la présente entente.

Article 5

Dans les cas où, aux fins de l’exécution d’une mesure de renvoi, l’une des parties doit faire transiter une personne par le territoire de l’autre partie, les parties conviennent de ce qui suit :

a.  Toute personne qui, pendant qu’elle est en transit aux États-Unis aux fins de son renvoi      du Canada, présente une demande d’asile aux États-Unis, sera retournée au Canada      afin que sa demande d’asile soit examinée dans le cadre du processus de      reconnaissance du statut de réfugié du Canada.

b.  Toute personne qui, pendant qu’elle est en transit au Canada aux fins de son renvoi      des États-Unis, présente une demande d’asile au Canada :

i.  doit être autorisée à poursuivre sa route vers le pays de renvoi si sa demande     d’asile a été rejetée par les États-Unis; ou

ii.  si elle n’a pas présenté de demande d’asile aux États-Unis, doit être     retournée aux États-Unis afin que sa demande d’asile soit examinée dans le     cadre du processus de reconnaissance du statut de réfugié des États-Unis.

 Article 6

Nonobstant toute autre disposition de la présente entente, chacune des parties peut, à son gré, décider d’examiner une demande d’asile qui lui a été présentée si elle juge qu’il est dans l’intérêt public qu’elle agisse ainsi.

Article 7

Les parties peuvent :

   a.  sous réserve des lois et règlements nationaux, échanger l’information qui s’avérera nécessaire à la mise         en œuvre efficace de la présente entente; cette information ne sera pas divulguée par la partie qui la         reçoit sauf si cela est prévu par ses lois et règlements nationaux.  Les parties veilleront à ce que         l’information ne soit pas échangée ou divulguée de façon à mettre en danger le demandeur d’asile ou sa         famille dans leur pays d’origine;

   b.  échanger régulièrement de l’information sur les lois, les règlements et les pratiques associés à leurs         processus respectifs de reconnaissance du statut de réfugié.

Article 8

   1.  Les parties doivent élaborer des procédures de fonctionnement normalisées afin de faciliter la mise en         ouvre de la présente entente.  Cela comprend les avis qu’une partie doit envoyer à l’autre partie avant le         renvoi, dans le dernier pays de séjour, d’un demandeur d’asile aux termes de la présente entente.

   2.  Ces procédures doivent comprendre des mécanismes pour régler les différends relatifs à l’interprétation         et à l’application des modalités de la présente entente.  Si ces mécanismes se révèlent inefficaces, les         questions seront réglées par la voie diplomatique.

   3.  Les parties conviennent de revoir les dispositions et la mise en œuvre de la présente entente.  Les         premières discussions à cet égard auront lieu entre les représentants des deux parties au plus tard 12         mois après la date d’entrée en vigueur de l’entente.  Les parties doivent inviter le HCR à participer à ces         discussions.  Elles doivent collaborer avec le HCR concernant le suivi de la présente entente et chercher         à obtenir l’avis des organisations non gouvernementales.

Article 9

Le cas échéant, chacune des parties doit donner suite à la demande d’aide présentée par l’autre partie et s’efforcer, de la manière qu’elle estime justifiée dans les circonstances, de faciliter le réétablissement des personnes dont le besoin de protection a été établi.

Article 10

   1.  La présente entente doit entrer en vigueur lorsque les parties se seront informées mutuellement, par un         échange de notes, qu’elles ont terminé les procédures internes nécessaires pour mettre en vigueur la         présente entente.

   2.  Une partie peut résilier la présente entente moyennant un avis écrit de six mois à l’autre partie.

   3.  Une partie peut, moyennant un avis écrit à l’autre partie, suspendre l’application de la présente entente         pour au plus trois mois.  Une telle suspension peut être renouvelée pour des périodes additionnelles d’au         plus trois mois.  Une partie peut, avec l’accord de l’autre partie, suspendre une partie quelconque de la         présente entente.

   4.  Les parties peuvent convenir de toute modification ou ajout à la présente entente.  Une fois accepté et         approuvé, conformément aux procédures légales applicables de chacune des parties, une modification ou         un ajout devient partie intégrante de la présente entente.


(1)     Singh et autres c. Canada (Ministre de l’emploi et de l’Immigration), [1985] 1 R.C.S. 177.  Dans cet arrêt, la Cour a déclaré que l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés s’applique à quiconque est effectivement présent au Canada.  Voir plus loin, dans la section intitulée « Jurisprudence en matière de protection des réfugiés », un sommaire de cet arrêt important.

(2)     L.C. 2002, ch. 27, dont la plus grande partie est entrée en vigueur le 28 juin 2002.

(3)     Les réfugiés et les membres d’autres groupes accueillis pour motifs humanitaires peuvent aussi demander la protection en faisant une demande hors du Canada; ceux qui sont sélectionnés viennent au Canada en tant que résidents permanents.

(4)     Le nombre de revendications du statut de réfugié au Canada depuis 1989 est mentionné à l’Annexe 1.

(5)     Les moyens utilisés sont, notamment, l’exigence d’obtenir un visa de visiteur pour les personnes de pays d’où sont originaires de nombreux revendicateurs du statut de réfugié, l’imposition d’amendes et de frais aux transporteurs qui amènent au Canada des personnes sans papiers et un réseau d’agents de contrôle de l’immigration à l’étranger qui collaborent avec les lignes aériennes en vue d’empêcher les personnes sans papiers valides de prendre place à bord des avions.

(6)     Le site Web de la commission de l’immigration et du statut de réfugié se trouve à www.irb.gc.ca.

(7)     Le lecteur trouvera sous la rubrique « Enjeux actuels » un aperçu des problèmes relatifs au report de la mise en place de la Section d’appel des réfugiés.

(8)     Le schéma de l’Annexe 2 donne un aperçu du processus de détermination du statut de réfugié.

(9)     Auparavant, les contrôles sécuritaires étaient entrepris lorsque le demandeur déposait une demande de résidence permanente.

(10)   Auparavant, un demandeur pouvait présenter une nouvelle demande après avoir séjourné à l’extérieur du Canada pendant 90 jours.  Cette exigence ne s’appliquait pas aux demandes ayant fait l’objet d’un désistement.  Désormais, une fois que six mois se sont écoulés depuis son départ du Canada, une personne peut uniquement demander un examen des risques avant renvoi (voir ci-dessous).  Par conséquent, il n’est plus possible de présenter des demandes répétées à la Commission.

(11)   Auparavant, pour qu’un demandeur soit interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains, le ministre devait être d’avis qu’il serait contraire à l’intérêt public que la demande soit recevable.

(12)   Auparavant, l’opinion relative au danger public s’appliquait aussi aux déclarations de culpabilité au Canada; aujourd’hui, une peine d’emprisonnement de deux ans ou plus sert de base pour déterminer la grande criminalité en ce qui a trait à une déclaration de culpabilité au Canada.

(13)   Une tentative précédente, au milieu des années 1990, avait échoué.

(14)   Quelque 36 p. 100 des demandes d’asile au Canada sont présentées par des demandeurs qui arrivent des États-Unis par voie terrestre.

(15)   Le texte de l’entente est reproduit à l’Annexe 3.

(16)   L’article 9 de l’entente stipule : Le cas échéant, chacune des parties doit donner suite à la demande d’aide présentée par l’autre partie et s’efforcer, de la manière qu’elle estime justifiée dans les circonstances, de faciliter le réétablissement des personnes dont le besoin de protection a été établi.  Certains ont avancé que ces personnes seront celles détenues par les États-Unis dans des territoires autres que le leur.

(17)   Pour ce qui est de la SPR, le président a délégué cette décision au vice-président et aux vice-présidents adjoints ou à un membre coordonnateur s’il n’y a pas de vice-président adjoint à cet endroit.

(18)   Un membre du public peut faire une demande pour qu’une audience soit publique, ou la SPR peut prendre cette décision de son propre chef.

(19)   La Commission verse par contre des honoraires et rembourse les dépenses d’une personne qu’elle désigne pour représenter un mineur ou une personne incapable d’apprécier la nature des procédures.

(20)   La Law Society of British Columbia a contesté sans succès le fait que des conseillers en immigration puissent se présenter devant la CISR (voir Law Society of British Columbia c. Mangat, [2001] CSC 67; cet arrêt est discuté plus loin sous la rubrique « Jurisprudence en matière de protection des réfugiés »).

(21)   Le 3 octobre 2002, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a mis sur pied un comité consultatif sur les consultants en immigration; le comité est chargé de cerner les différents problèmes – tant au Canada qu’à l’étranger – et de faire des recommandations au ministre.

(22)   Les dispositions du règlement sur la divulgation de la teneur des témoignages sont nouvelles.

(23)   Auparavant, la conclusion qu’aucun élément de preuve crédible n’avait été présenté à l’appui de la demande signifiait qu’une décision partagée du tribunal composé de deux membres était rendue contre le demandeur et non en sa faveur.  À la suite des modifications apportées, cette approche n’est plus possible étant donné que le tribunal est désormais constitué d’un seul membre.

(24)   Cette disposition s’applique, que l’asile ait été accordé par la Commission ou par un agent des visas à l’étranger.

(25)   En pratique, ces critères s’appliqueraient uniquement si les raisons qui ont fait demander l’asile n’existent plus à une date rapprochée de celle où l’asile est accordé (puisque la plupart des demandeurs dont la demande est accueillie obtiennent le statut de résident permanent au cours des six à douze mois qui suivent la décision de la SPR).  Une exception s’applique si le demandeur prouve qu’il y a des raisons impérieuses tenant à des persécutions, à la torture ou à des traitements ou peines antérieures, de refuser de retourner dans le pays qu’il a quitté.  Cette exception reconnaît que certaines expériences sont si terribles que forcer une personne à retourner dans le pays serait cruel.

(26)   Les règles énoncent en outre les procédures à suivre pour reconvoquer une audience ou demander le dépôt de documents une fois que l’audience est terminée mais avant que la décision ne soit rendue.

(27)   CIC, Communiqué de presse, « La mise sur pied de la Section d’appel des réfugiés est retardée », 29 avril 2002.

(28)   Conseil canadien pour les réfugiés, Communiqué de presse, « CRR invite le premier ministre à fixer une date pour la procédure d’appel concernant les réfugiés », 22 mai 2002.

(29)   Le ministre peut également demander l’autorisation de demander le contrôle judiciaire d’une décision de la SAR, qu’il ait ou non participé à la procédure.

(30)   Aux conditions suivantes : tous les appels et contrôles judiciaires sont épuisés et le statut de personne protégée n’a pas été révoqué pour quelque motif que ce soit; le demandeur n’a pas été reconnu comme réfugié au sens de la Convention par un pays dans lequel il serait autorisé à retourner, il n’est pas citoyen d’un pays où il ne risque pas d’être persécuté, il n’a pas résidé en permanence dans un pays où il n’était pas persécuté et dans lequel il serait autorisé à retourner.

(31)   Un sursis des mesures de renvoi est accordé d’office au demandeur qui dépose sa demande dans le délai requis.  Par contre, la demande qui n’est pas déposée dans le délai requis et les demandes subséquentes n’entraînent pas sursis de la mesure de renvoi.

(32)   L’Annexe 1 donne un aperçu du nombre des demandes et des décisions depuis 1989.

(33)   L’étape du processus originalement conçue pour éliminer les demandes non crédibles a été supprimée en 1992 parce qu’elle était inefficace; comme nous l’avons mentionné précédemment, l’entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis a été approuvée par le Cabinet et en octobre 2002, son approbation par le gouvernement américain était toujours attendue.

(34)   « Coderre to Delay Plan for Refugee Appeal Division », The Globe and Mail, 29 avril 2002, page A6 (traduction).

(35)   Immigration : Détention et renvois, juin 1998.

(36)   Le CCSR, prédécesseur de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, prenait connaissance de la transcription des entrevues avec les revendicateurs et faisait des recommandations au ministre.

(37)   Le mouvement des Tigres de libération de l’Eelam Tamoul s’adonne à des activités terroristes dans le cadre de la guerre qu’elle livre pour l’indépendance de l’État tamoul au Sri Lanka.