PRB 00-26F

 

RECHERCHE SUR LES CELLULES SOUCHES
DE L'EMBRYON HUMAIN

 

Rédaction :
Sonya Norris
Division des sciences et de la technologie
novembre 2000


 

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

CELLULES SOUCHES

EMBRYONS UTILISÉS À DES FINS DE RECHERCHE

L'EXPÉRIENCE BRITANNIQUE

L'EXPÉRIENCE AMÉRICAINE

L'EXPÉRIENCE EUROPÉENNE

LA POSITION AUSTRALIENNE

PRATIQUES DE RECHERCHE CANADIENNES

CONCLUSION


RECHERCHE SUR LES CELLULES SOUCHES
DE L'EMBRYON HUMAIN

Introduction

Les embryons, comme le tissu fœtal, sont utilisés depuis toujours en recherche médicale. Par le passé, on obtenait ces tissus lors d’avortements thérapeutiques et parfois spontanés. Aujourd’hui cependant, avec la fécondation artificielle, les embryons sont créés en laboratoire et peuvent servir aux tous premiers stades du développement à des fins de recherche.

Depuis qu’on peut créer des embryons humains aux seules fins de la recherche, cette pratique suscite passablement de controverse, en particulier en Grande-Bretagne et aux États-Unis, et elle est surtout liée à l’utilisation des cellules souches embryonnaires. Dans ce texte, « embryon » s’entend des embryons produits en laboratoire, et seulement aux premiers stades de développement, c’est-à-dire de moins de 14 jours.

Cellules souches

Les cellules souches sont des cellules indifférenciées qui peuvent théoriquement devenir n’importe quel type de cellule (multipotente) : nerveuse, sanguine, hépatique, etc. Les cellules souches retirées des embryons sont reconnues comme multipotentes alors que celles que l’on retrouve chez les adultes ne pourraient se transformer qu’en certaines cellules. Cependant, des travaux récents donnent à penser que les cellules souches des adultes peuvent être « reprogrammées » pour former n’importe quel tissu. La possibilité d’obtenir par ces cellules n’importe quel tissu ou organe transplantable aiguillonne la recherche à leur sujet.

Embryons utilisés à des fins de recherche

Le débat sur la recherche portant sur les embryons humains concerne généralement l’utilisation d’embryons « de trop », qui sont détruits après avoir perdu leur utilité pour la fécondation in vitro ou d’autres méthodes de reproduction. De nombreux scientifiques prétendent que les embryons ne sont jamais produits aux seules fins de la recherche. Cette distinction est perçue comme fallacieuse par certains, qui signalent qu’il est très facile de produire des embryons en « surnombre » pour la fécondation assistée, avec l’intention d’en avoir beaucoup de reste pour la recherche sur les cellules souches.

L’expérience britannique

En plus d’accréditer et d’inspecter les cliniques de fertilité de Grande-Bretagne, la Human Fertilisation and Embryology Authority (HFEA) accrédite et contrôle également la recherche sur les embryons. La HFEA a été créée après l’adoption de la Human Fertilisation Act en 1990. Chaque projet de recherche qui fait intervenir des embryons humains doit obtenir un permis et doit répondre aux critères d’un objectif de recherche acceptable, nécessitant absolument le recours aux embryons.

La HFEA donne des permis pour le recours aux embryons dans la recherche qui porte sur :

  • l’infertilité;

  • les maladies congénitales;

  • les fausses couches;

  • la contraception;

  • les diagnostics génétiques préimplantatoires.

La Loi permet la création d’embryons aux seules fins de la recherche mais interdit les recherches suivantes sur des embryons :

  • recherche sur les embryons de plus de 14 jours;

  • implantation d’embryons humains chez des organismes non humains;

  • clonage par transfert du noyau chez l’embryon;

  • modifications génétiques.

La HFEA ne fait aucune référence précise à la recherche sur les cellules souches à l’aide d’embryons, et aucune autre loi britannique en vigueur ne la réglemente. En octobre 2000, un projet de loi sur la recherche sur les cellules souches, qui aurait autorisé le recours aux embryons à cette fin, a été défait au Parlement.

L’expérience américaine

Les mesures législatives fédérales visent surtout les questions soulevées par le débat sur l’avortement et font intervenir des moratoires volontaires et le refus de financer certaines activités de recherche, dont la recherche utilisant des embryons. Au niveau fédéral, la loi actuelle interdit que des fonds fédéraux servent à faire du tort à un embryon humain. Les préoccupations éthiques visent avant tout le statut moral de l’embryon.

En août 2000, le Président a annoncé de nouvelles directives pour les nouveaux Instituts nationaux de la santé permettant, pour la première fois, que des fonds fédéraux servent à la recherche sur des embryons humains. Les directives permettent la recherche sur les cellules embryonnaires prélevées sur des embryons congelés destinés à l’élimination. La destruction de ces embryons n’est pas permise par les protocoles de recherche financés par le fédéral. Les cellules souches devront être extraites d’embryons par des chercheurs financés par le secteur privé, qui les passeraient ensuite aux scientifiques financés par le fédéral.

L’expérience européenne

Dans plusieurs pays de l’Union européenne, la recherche sur les embryons est interdite; dans d’autres, elle est très limitée. Le Groupe européen sur l’éthique en sciences et dans les nouvelles technologies de la Commission européenne a émis son avis sur la question en novembre 2000. Il estime qu’un pouvoir central devrait exercer un contrôle public strict sur les pays qui permettent la recherche sur les embryons. Le Groupe a également indiqué que la création d’embryons à des fins de recherche sur les cellules souches est inacceptable d’un point de vue éthique.

Le Groupe juge en outre que le clonage thérapeutique est inacceptable. Il indique que s’il est efficace de créer un embryon par transfert nucléaire pour obtenir des cellules souches multipotentes identiques au profit d’un malade qui a besoin d’une transplantation d’organe ou de tissu, d’autres sources de cellules souches (le malade lui-même) sont également prometteuses et ne sont pas aussi moralement contestables.

La position australienne

Aucun territoire australien n’interdit la recherche sur les embryons. Dans certains États de l’Australie (Victoria, Australie de l’Ouest et Australie du Sud), toute recherche destructive sur les embryons est interdite.

Pratiques de recherche canadiennes

L’Énoncé de politique des trois conseils : éthique de la recherche avec des êtres humains a été produite conjointement en 1998 par le Conseil de recherches médicales, le Conseil national de recherches en sciences et en génie et le Conseil de recherches en sciences humaines. Les nouveaux Instituts canadiens de recherches en santé ont adopté cette politique.

Le fondement éthique de la recherche scientifique affirme qu’on ne peut pas créer d’embryons à des fins de recherche, que seuls les embryons en « surnombre » provenant des efforts de fertilisation peuvent servir. Ces embryons ne peuvent être utilisés en recherche que dans les 14 premiers jours et doivent avoir été obtenus avec le consentement des donneurs sans indemnisation financière. L’altération génétique de ces embryons est interdite.

La politique affirme également qu’il n’est pas éthique de faire des recherches qui impliquent : le développement de l’embryon hors de la mère; le clonage des êtres humains par n’importe quel moyen, y compris le transfert de noyaux de cellules somatiques; la formation de chimères (hybrides animal-homme); le transfert d’embryons entre l’homme et une autre espèce.

Ce cadre éthique ne mentionne pas précisément la recherche sur les cellules souches mais les critères qu’il énonce ne l’interdiraient pas. Comme dans l’Union européenne, cette politique ne permet pas la recherche sur les cellules souches embryonnaires qui font intervenir le clonage thérapeutique, parce que le transfert de noyaux de cellules somatiques est inacceptable.

Les protocoles de recherche sont approuvés par les institutions, hôpitaux et universités, qui les accueillent. Le Conseil national d’éthique en recherche chez l’humain (CNERH) supervise les comités d’éthique pour la recherche de ces établissements. Les comités et le Conseil suivent les directives établies dans l’Énoncé de politique des trois conseils.

Conclusion

Le recours aux embryons comme source de cellules souches multipotentes fait l’objet d’un débat depuis peu dans de nombreux pays. C’est une question émotive pour ceux qui le condamnent parce qu’assimilable à l’avortement. Ceux qui y voient un potentiel thérapeutique défendent la recherche sur les cellules souches embryonnaires avec autant de passion. À terme, le débat sur l’utilisation des embryons comme source de cellules souches pourrait s’avérer inutile, quand les chercheurs auront réussi assez bien à rendre multipotentes les cellules souches issues des muscles, du cerveau et du sang des adultes.