Direction de la recherche parlementaire


LS-422F
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PROJET DE LOI C-39 : LOI SUR LE YUKON

 

Rédaction :
Mary C. Hurley
Division du droit et du gouvernement
Le 3 avril 2002


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-39

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 31 octobre 2001 Première lecture : 4 décembre 2001
Deuxième lecture : 5 novembre 2001 Deuxième lecture : 12 décembre 2001
Rapport du comité : 28 novembre 2001 Rapport du comité : 7 mars 2002
Étape du rapport : 3 décembre 2001 Étape du rapport :  
Troisième lecture : 3 décembre 2001 Troisième lecture : 27 mars 2002


Sanction royale : 27 mars 2002
Lois du Canada 2002, chapitre 7







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

HISTORIQUE

   A. Évolution politique et transfert d’attributions

   B. Intérêts autochtones

   C. Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien – Programme des affaires du Nord

   D. Accord de transfert au Yukon d’attributions relevant du Programme des affaires du Nord

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A. Gouvernement (articles 4 à 37)

      1. Pouvoir exécutif (articles 4 à 9)

      2. Pouvoir législatif (articles 10 à 27)

      3. Comptes publics du Yukon (articles 31 à 37 [art. 70 à 75])

   B. Biens réels, eau et ressources pétrolières et gazières (articles 45 à 53)

      1. Gestion et maîtrise (articles 45 à 48)

      2. Restrictions (articles 49 à 53)

   C. Modification législative (article 56)

   D. Abrogations (articles 279 à 284)

   E. Entrée en vigueur (article 285)

COMMENTAIRE

ANNEXE I : LOI SUR LE YUKON, ARTICLES 17 À 22

ANNEXE II : ENTENTES SUR L’AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE
DES PREMIÈRES NATIONS DU YUKON

ANNEXE III : ACCORD DE TRANSFERT AU YUKON D’ATTRIBUTIONS
RELEVANT DU PROGRAMME DES AFFAIRES DU NORD


PROJET DE LOI C-39 : LOI SUR LE YUKON*

Le projet de loi C-39, qui doit remplacer l’actuelle Loi sur le Yukon, a été déposé à la Chambre des communes le 31 octobre 2001 et adopté sans amendement le 3 décembre 2001 après avoir franchi sans encombre toutes les étapes de son étude à la Chambre.  Déposé au Sénat le 4 décembre, le projet de loi a été étudié par le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles et renvoyé au Sénat sans amendement le 7 mars 2002.  Il a ensuite été adopté par le Sénat avant de recevoir la sanction royale le 27 mars.

HISTORIQUE

   A. Évolution politique et transfert d’attributions

En 1870, le Décret en conseil sur la Terre de Rupert et le Territoire du Nord-Ouest rendait officielle l’admission de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest au sein du Canada, conformément à l’article 146 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de l’Acte de la Terre de Rupert de 1868.  La Loi de 1870 sur le Manitoba, qui a créé le Manitoba à partir d’une partie de la Terre de Rupert, a également appelé Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.) le reste de ce territoire, à l’égard duquel le Parlement devait exercer une autorité législative entière aux termes de la Loi constitutionnelle de 1871.

Le Yukon est devenu un district judiciaire des T.N.-O. en 1895, et en 1898, au moment de la ruée vers l’or, le Territoire du Yukon (Yukon) a été découpé à même les T.N.-O. pour constituer un territoire distinct en vertu de la Loi sur le territoire du Yukon de 1898.  Selon cette loi, le gouvernement du Yukon consistait en un commissaire, nommé par le gouverneur en conseil et chargé de l’administration du territoire – sous les directives du gouverneur en conseil ou du ministre de l’Intérieur d’alors –, et d’un Conseil d’au plus six membres, également nommés par le gouverneur en conseil, pour le seconder dans son administration.  La loi de 1898accordait au commissaire en conseil les mêmes pouvoirs de prendre des ordonnances que ceux que possédait le lieutenant-gouverneur des T.N.-O., agissant sur les conseils et avec le consentement de son assemblée législative.  En 1908, les modifications apportées à la Loi sur le Yukon transformèrent le Conseil en un corps élu.

Bien que l’administration du Yukon ait maintenu en place la structure axée sur le commissaire, cette charge a évolué au fil du temps, à mesure que le gouvernement territorial devenait plus responsable et exerçait des fonctions plus nombreuses.  Voici quelques faits marquants de son évolution :

L’actuelle Loi sur le Yukon, modifiée au fil des ans, énonce les pouvoirs d’ordonnance du commissaire en conseil du Yukon, qui sont semblables à certains égards mais non équivalents aux pouvoirs de légiférer des assemblées législatives provinciales en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867 (par. 17-22, voir l’annexe 1).  Dans presque tous les cas, la prise des ordonnances au Yukon est également assujettie à la Loi sur le Yukon et à d’autres lois fédérales.

En particulier, le gouvernement du Yukon n’a pas de pouvoirs législatifs et administratifs analogues à ceux des provinces en ce qui concerne les terres publiques, les ressources naturelles et les eaux dans le Territoire.  Bien que la Loi sur le Yukon ait été modifiée à différentes reprises, elle n’a pas subi d’examen majeur depuis le début des années 1950 et, à certains égards, elle ne reflète pas avec exactitude la pratique du gouvernement dans le Territoire.  Le projet de loi C-39 permet de régler ces deux difficultés.

   B. Intérêts autochtones

Au cours des dernières décennies, des groupes autochtones ont défendu des revendications territoriales globales dont l’influence sur l’évolution des structures gouvernementales du Yukon se fait encore sentir.  Jusqu’à présent, le Yukon a été touché par les règlements suivants :

Les ententes énumérées bénéficient de la protection constitutionnelle en tant que traités modernes aux termes de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Les PNY qui ont conclu une entente territoriale disposent également d’ententes distinctes d’autonomie gouvernementale, comme il est prévu dans l’Accord-cadre définitif(1).  Le gouvernement du Yukon est signataire des deux séries d’ententes et les deux ont été ratifiées par des lois fédérales(2) et territoriales(3).  Jusqu’à présent, la protection de l’article 35 n’a pas été accordée aux pouvoirs d’autonomie gouvernementale des PNY.

Selon leurs ententes d’autonomie gouvernementale respectives, les PNY peuvent exercer un pouvoir de légiférer dans un certain nombre de domaines (annexe 2).  Les ententes prévoient également, entre autres choses, le maintien en vigueur de toutes les lois d’application générale, les exceptions à cette application et la résolution des cas d’incompatibilité entre les lois(4).

Le mandat de négociation du Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC) pour la finalisation de ces ententes a expiré le 31 mars 2002.  Le 1er avril 2002, le ministre a annoncé que la signature de protocoles d’entente avait officiellement mis un terme aux négociations avec quatre des six PNY qui n’avaient pas encore signé d’ententes.  Pour ce qui est des deux derniers groupes, le processus devrait se terminer vers la mi-avril.

   C. Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien – Programme des affaires du Nord (5)

Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien s’acquitte de ses responsabilités dans le Nord en vertu de la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien principalement par l’intermédiaire des programmes et services offerts par le Programme des affaires du Nord (PAN), lesquels peuvent être regroupés sous deux grandes rubriques : appuyer l’évolution politique et le développement économique du Nord par la gestion des intérêts fédéraux et promouvoir le développement durable des ressources naturelles du Nord.

Les responsabilités du PAN sont d’élaborer des politiques et des lois concernant l’évolution politique du Nord, ainsi que de négocier des ententes de transfert d’attributions avec les gouvernements territoriaux.  Le PAN voit notamment à l’élaboration de politiques et de lois relatives à la gestion des ressources aquatiques, minérales et autres et de lois de mise en œuvre des dispositions visant la gestion des ressources contenues dans les ententes de règlement des revendications territoriales.  Le PAN a aussi pour rôle de s’occuper des aspects stratégiques et opérationnels de la gestion du pétrole et du gaz du Nord au large des côtes, ainsi que d’élaborer des politiques et des programmes se rapportant à l’environnement et à la conservation dans le Nord (nettoyage des sites de déchets dangereux, changements climatiques, etc.). 

Les bureaux régionaux et les bureaux de district du PAN s’occupent de la gestion courante des opérations dans les domaines susmentionnés.  Ils jouent notamment un rôle de premier plan dans la gestion des ressources – y compris la délivrance de droits et d’intérêts, l’évaluation des ressources, les inspections et les activités de mise en application, les évaluations et la surveillance environnementales, la délivrance d’approbations réglementaires et le contrôle du respect des lois et des politiques fédérales se rapportant au développement durable.  Au Yukon, la gestion des incendies relève également du PAN.  Toutefois, le PAN n’est plus seul à assumer la responsabilité de la mise en valeur et de l’utilisation des ressources, puisqu’il doit travailler en collaboration avec les divers conseils de gestion de l’environnement et des ressources qui ont été mis sur pied par suite du règlement des revendications territoriales globales ainsi que de la mise en application des ententes sur l’autonomie gouvernementale dans le Nord.

Le PAN compte plus de 550 employés, dont 240 employés permanents au Yukon.

   D. Accord de transfert au Yukon d’attributions relevant du Programme des affaires du Nord

Le Canada et le Yukon ont discuté longtemps du transfert d’attributions concernant les ressources naturelles du Territoire.  Voici les principales étapes qui ont mené au présent accord de transfert :

Le 29 octobre 2001, des discussions basées sur les principes énoncés dans le Protocole conduisent à la signature par le Canada et le Yukon de l’Accord de transfert au Yukon d’attributions relevant du Programme des affaires du Nord (ATA).  Par cet accord, le Canada s’engage à présenter une mesure législative – le projet de loi C-39 – pour abroger et remplacer la Loi sur le Yukon « afin que la [nouvelle] législature dispose des compétences nécessaires pour légiférer à l’égard des terres publiques, des eaux et de la disposition de tout droit dans ces terres publiques ou à l’égard des eaux ».  Le Canada s’engage aussi à abroger la Loi sur l’extraction de l’or dans le Yukon, la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur les eaux du Yukon et leurs règlements; l’abrogation de la Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon prendra effet à une date fixée par décret du gouverneur en conseil (chapitre 2 : Transfert de responsabilités). 

En contrepartie, le Yukon s’engage à adopter, avant la date de l’entrée en vigueur du transfert, des lois qui reflètent les lois fédérales abrogées et à prendre des règlements qui reflètent les règlements d’application de ces lois.  Si la loi prévue sur l’évaluation des activités de développement n’est pas encore entrée en vigueur dans son intégralité, le gouvernement du Yukon doit faire adopter une loi qui reflète les dispositions de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale et préparer des règlements qui reflètent les règlements pris en application de cette loi (chapitre 2).

Conformément à l’Entente de financement préétabli Canada-Yukon, le Canada fournira chaque année une aide financière permanente d’environ 34 millions de dollars au gouvernement du Yukon; ce montant correspond au financement actuel du PAN pour le Yukon et des activités qui s’y rattachent.  Un financement de transition sera aussi assuré pendant un certain nombre d’années au titre des coûts dans divers secteurs : mise en œuvre de la législation provisoire sur l’environnement, lutte contre les incendies, nettoyage des sites contaminés, ressources humaines, activités forestières, intégration informatique, etc.  En outre, le gouvernement du Yukon peut retenir chaque année 3 millions de dollars sur les recettes d’exploitation des ressources sans compromettre l’entente de financement.  Les recettes excédant ce montant réduisent d’autant l’aide financière annuelle (chapitre 7 : Transferts financiers).

L’ATA est entré en vigueur le jour de sa signature.  La date prévue du transfert effectif des responsabilités du PAN au gouvernement du Yukon est le 1er avril 2003.  Les PNY ont eu des réactions mixtes au processus de transfert et à son échéancier(6).

Un résumé d’autres éléments de l’ATA est présenté à l’annexe 3.

DESCRIPTION ET ANALYSE

Le projet de loi C-39 comprend un préambule, 285 articles, qui sont pour la plupart des modifications à d’autres lois, et deux annexes.  Le résumé non exhaustif qui suit traite des aspects importants du projet de loi, en se référant aux rubriques; il exclut les modifications aux autres lois, ainsi que les dispositions transitoires et de coordination, et considère surtout les nouvelles dispositions importantes.

   A. Gouvernement (articles 4 à 37)

Certaines dispositions qui figurent ici modernisent la langue relative aux structures gouvernementales du Yukon pour qu’elle corresponde mieux à la pratique du gouvernement responsable au Yukon.  D’autres apportent des changements de fond aux pouvoirs législatifs du Yukon, qui se rapprocheront de ceux des provinces en vertu des articles 92, 92A et 95 de la Loi constitutionnelle de 1867.  D’autres enfin apportent des changements mineurs aux structures prévues à la Loi actuelle.

      1. Pouvoir exécutif (articles 4 à 9)

Dans le projet de loi C-39 comme dans la Loi actuelle, le commissaire du Yukon est nommé par le gouverneur en conseil et doit suivre les instructions écrites du gouverneur en conseil ou du ministre (art. 4).  Cette exigence doit être révoquée après 10 ans (art. 68).  Contrairement à la Loi actuelle, la nouvelle ne désigne pas le commissaire comme « le premier dirigeant du territoire ».  Les membres du Conseil exécutif (cabinet territorial) sont nommés par le commissaire (art. 8). 

      2. Pouvoir législatif (articles 10 à 27)

Le projet de loi C-39 maintient le Conseil actuel en tant qu’Assemblée législative du Yukon (art. 10), sans fixer le nombre minimum ou maximum d’élus comme le fait la Loi actuelle; le commissaire en conseil de la Loi actuelle est maintenu sous le nom de Législature du Yukon (LY), composé du commissaire et de l’Assemblée législative (art. 17).

La principale disposition habilitante du projet de loi (art. 18) autorise la LY à adopter des lois – plutôt que les ordonnances actuelles – dans les domaines énumérés au même article.  La plupart sont ceux de la Loi actuelle, en langue plus moderne, et concernent la plupart des domaines de compétence provinciale.  Les ajouts les plus notables portent sur la compétence sur les eaux intérieures et le dépôt de déchets dans ces eaux (al. 18(1)n)) et sur les « biens réels domaniaux » administrés par le commissaire (al. 18(1)q)), y compris l’aliénation des droits sur les eaux et les biens.  D’autres ajouts visent la conservation de la faune (al. 18(1)m)) l’immigration (al. 18(1)p)) et la conclusion d’accords intergouvernementaux (al. 18(1)u)). 

Le projet de loi C-39 accroît également beaucoup le pouvoir de la LY sur les ressources naturelles non renouvelables du Yukon.  Un changement apporté en 1998 à la Loi actuelle a donné au Yukon de vastes pouvoirs législatifs sur le pétrole et le gaz dans le territoire et la « zone adjacente »(7); le projet de loi étend cette responsabilité à toutes les ressources naturelles non renouvelables, aux ressources forestières et à l’énergie électrique, et la taxation de ces ressources (art. 19).

Comme la Loi actuelle, le projet de loi C-39 indique explicitement que les dispositions affirmant le pouvoir législatif de la LY ne lui confèrent pas des pouvoirs plus étendus que ceux consentis aux provinces par la Loi constitutionnelle de 1867 (art. 20).  Par exception à cette règle générale, la LY sera habilitée, lorsqu’elle exercera ses pouvoirs afin de mettre en oeuvre des accords avec les PNY, à adopter des lois relatives aux « Indiens et aux terres réservées aux Indiens », un domaine de responsabilité fédérale selon le paragraphe 91(24), qui échappe à la compétence des provinces (art. 21).

Une nouvelle « mesure de réserve », analogue aux dispositions constitutionnelles applicables aux provinces, autorise le gouverneur en conseil à ordonner au commissaire de refuser de sanctionner un projet de loi adopté par la LY, auquel cas il ne peut devenir loi qu’avec la sanction du gouverneur en conseil, pas plus d’un an plus tard (art. 24).  Comme la Loi actuelle, le projet de loi C-39 permet au gouverneur en conseil de désavouer une loi du Yukon dans l’année qui suit son adoption (art. 25).  Le projet de loi reformule également la disposition de la Loi actuelle pour ce qui est de la primauté : en cas d’incompatibilité, les lois fédérales l’emportent sur celles du Yukon (art. 26). 

      3. Comptes publics du Yukon (articles 31 à 37 [art. 70 à 75]) 

La plupart des dispositions regroupées ici se basent sur la Loi actuelle et la mettent à jour.  Celles qui visent les fonctions du vérificateur général du Canada, qui demeure celui du Yukon en vertu du projet de loi C-39, comprennent des éléments nouveaux.  Ainsi, afin de garantir l’obligation du gouvernement du Yukon de rendre compte de la gestion des fonds publics, le vérificateur est autorisé à faire enquête à cette fin sur tout aspect des activités du gouvernement du Yukon (art. 35).  Une autre disposition donne au vérificateur le pouvoir, à la demande du commissaire, de faire enquête et de faire rapport à l’Assemblée législative sur des questions concernant les finances du gouvernement, ses biens publics, ou toute personne ou organisation ayant reçu ou sollicité l’aide financière du gouvernement du Yukon (art. 36). 

Le projet loi C-39 comporte aussi des modifications différées en vertu desquelles le vérificateur général du Canada pourra être remplacé dans l’avenir par celui du Yukon, nommé par le commissaire avec le consentement du Conseil exécutif.  Les articles pertinents, y compris les dispositions garantissant l’indépendance du titulaire de la charge, entreraient en vigueur à une date fixée par le gouverneur en conseil [art. 70 à 75, art. 285]. 

   B. Biens réels, eau et ressources pétrolières et gazières (articles 45 à 53)

      1. Gestion et maîtrise (articles 45 à 48)

Ces articles, en particulier les articles 45 et 48, sont des éléments clés du transfert d’attributions.

En vertu de la Loi actuelle, le commissaire dispose de la « gestion » et de la « maîtrise » de certaines terres prescrites et peut les utiliser ou les aliéner en conservant les recettes de l’aliénation.  Le projet de loi C-39 étend considérablement la gestion et la maîtrise pour inclure (1) « les biens réels domaniaux » – définis comme : « les biens-fonds, mines et minéraux du Yukon qui appartiennent à Sa Majesté du chef du Canada » et « les domaines, droits, titres de propriété ou intérêts que détient Sa Majesté dans les biens réels du Yukon »(8) – et (2) le pétrole et le gaz de la zone adjacente(9).  Le projet de loi permet au commissaire d’utiliser ou d’aliéner ces biens et de conserver le produit de l’aliénation, mais seulement avec le consentement du Conseil exécutif.  Le petit nombre de biens réels domaniaux à exclure de la maîtrise du commissaire fera l’objet d’une liste du gouverneur en conseil (art. 45).

La Loi actuelle ne permet pas au commissaire ou au commissaire en conseil d’exercer le pouvoir sur les eaux du Yukon.  Cependant, la Loi sur les eaux du Yukon autorise le ministre fédéral à déléguer plusieurs des attributions prévues à cette loi au ministre territorial responsable des eaux.  Le projet de loi C-39 – tout en énonçant que les droits relatifs aux « eaux » du Yukon (définies comme « l’ensemble des eaux internes de surface et souterraines »(10)) sont dévolus à la Couronne fédérale – donne au commissaire la gestion et la maîtrise de ces droits.  Comme dans le cas des biens réels domaniaux, le commissaire peut, avec le consentement du Conseil exécutif, les exercer ou encore les aliéner et conserver le produit de l’aliénation (art. 48)(11).

      2. Restrictions (articles 49 à 53)

En général, les dispositions regroupées sous cette rubrique – que certains ont appelées « dispositions de reprise » – donnent au gouvernement fédéral, dans les circonstances prescrites, le pouvoir de restreindre la gestion et la maîtrise du commissaire sur les biens réels domaniaux, le pétrole et le gaz dans la zone adjacente ainsi que sur les eaux et les déchets déposés dans les eaux.  Certaines reprennent des éléments de la Loi actuelle (par. 49(2) et 50(2)), alors que d’autres maintiennent la compétence fédérale sur des questions d’intérêt spécial pour le gouvernement fédéral – ententes territoriales ou intérêt national, dont la sécurité nationale – qui sont actuellement énoncées dans la Loi sur les terres territoriales, la Loi sur l’extraction de l’or dans le Yukon, la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon et la Loi sur les eaux du Yukon (par. 49(1) et 50(1), art. 51).  Le projet de loi C-39 rend inapplicable la première loi au Yukon et révoque les trois autres.  En vertu du projet de loi, le Ministre est tenu de respecter certaines procédures relativement à la prise d’un décret d’interdiction visant des intérêts ou activités sur les biens réels domaniaux ou les terres de la zone adjacente, et les eaux ou les déchets déposés dans les eaux (art. 52).  Le projet de loi limite ce genre de décret à une durée de cinq ans (art. 53).

   C. Modification législative (article 56)

Le projet de loi C-39 exige que le Ministre consulte le Conseil exécutif avant de déposer un projet de loi modifiant ou abrogeant la Loi du Yukon, et autorise l’Assemblée législative à proposer des changements à la Loi au Ministre. 

   D. Abrogations (articles 279 à 284)

Le projet de loi abroge la Loi sur le Yukon actuelle, en conformité avec l’ATA.  Il abroge également la Loi sur l’extraction de l’or dans le Yukon, la Loi sur l’extraction du quartz dans le Yukon, la Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon et la Loi sur les eaux du Yukon.

   E. Entrée en vigueur (article 285)

Le projet de loi C-39 entre en vigueur en trois étapes et à trois dates, la principale partie, qui remplace la Loi sur le Yukon, prenant effet en premier.  Les dispositions concernant la création du poste de vérificateur général au Yukon et l’abrogation de la Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon pourraient, éventuellement, entrer en vigueur plus tard.

COMMENTAIRE

Le projet de loi C-39 constitue une étape importante dans l’évolution législative du Yukon et le transfert des responsabilités fédérales au Territoire.

Le projet de loi a suscité peu de réactions au sud du 60e parallèle.  Pendant qu’il était étudié par le Parlement, cinq des six PNY qui n’avaient pas encore signé d’entente sur leurs revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale ont exprimé certaines préoccupations d’ordre juridique et constitutionnel à son sujet et soutenu essentiellement que le transfert d’attributions ne devrait pas avoir lieu tant qu’on n’aurait pas finalisé leurs ententes(12).

Comme il a été signalé plus tôt, quatre des six PNY ont signé des protocoles d’entente avec les gouvernements fédéral et territorial le 1er avril 2002, ce qui met fin aux négociations relatives à leurs revendications territoriales et à leur autonomie gouvernementale.  La rédaction des quatre ententes et leur ratification par toutes les parties auront lieu d’ici la fin de mars 2003, c’est-à-dire avant le transfert d’attributions.  Pour les deux autres groupes, le processus menant aux protocoles devrait être terminé vers la mi-avril 2002.

En plus des questions soulevées par les PNY, la collectivité francophone du Yukon a demandé des garanties que ses droits linguistiques seront protégés suffisamment après le transfert d’attributions.


*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur.  Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.

Ce résumé législatif est la version revue d’un document intitulé Projet de loi C-39 : Loi sur le Yukon : Survol, rédigé en novembre 2001.

(1)  Un accord de principe d’autonomie gouvernementale parafé par les représentants des Gwich’in, des Inuvialuit et des gouvernements du Canada et des T.N.-O. en octobre 2001 constitue le fondement des négociations entreprises pour conclure une entente définitive concernant une administration publique régionale pour la région de Beaufort-Delta des T.N.-O.

(2)  Loi sur le règlement des revendications territoriales des Premières nations du Yukon, L.C.1994, ch. 34; Loi sur l’autonomie gouvernementale des Premières nations du Yukon, L.C. 1994, ch. 35. La Loi sur l’Office des droits de surface du Yukon (L.C. 1994, ch. 43) traduit l’engagement fédéral, dans l’Accord-cadre définitif, de promulguer une loi de mise en vigueur établissant un Conseil des droits de surface.

(3)  Loi sur l’autonomie gouvernementale des Premières nations du Yukon, L.Y. 1993, ch. 5; Loi approuvant les ententes finales avec les Premières nations du Yukon, L.Y. 1993, ch. 19.

(4)  À cet égard, les lois fédérales et territoriales sur l’autonomie gouvernementale prévalent en cas d’incompatibilité ou de conflit avec d’autres lois fédérales ou territoriales, alors que les lois sur les ententes définitives [revendications territoriales] et les règlements connexes prévalent sur les lois fédérales ou territoriales d’autonomie gouvernementales qui sont incompatibles.

(5)  Cette section s’inspire en grande partie de la page du Programme des Affaires du Nord du site Web du MAINC
(http://www.ainc-inac.gc.ca/ps/nap/intro_f.html).

(6)  Dans une résolution adoptée le 4 octobre 2001, le CPNY affirme l’appui conditionnel qu’accorde chacun des membres au transfert – c’est-à-dire sous réserve de la ratification de son accord définitif et de son accord d’autonomie gouvernementale.

(7)  La « zone adjacente » est définie à l’article 2 comme la « zone située à l’extérieur du Yukon, entre celui-ci et la limite septentrionale décrite à l’annexe 2 ».

(8)  Voir art. 2.

(9)  La gestion du commissaire est assujettie au projet de loi C-39 et à l’article 37 de la Loi sur le pipe-line du Nord.  Cette loi prévoit la construction d’un gazoduc à partir de l’Alaska et du Nord du Canada en vertu d’un accord canado-américain. L’article 37 de cette loi autorise le gouverneur en conseil à transférer des terres sous la maîtrise du commissaire au ministre responsable du gazoduc pour la construction de celui-ci.

(10)  Voir art. 2.

(11)  Les eaux des aires fédérales de conservation sont exclues.  En outre, la maîtrise du commissaire est soumise au projet de loi et à tout autre droit relatif aux eaux accordé sous le régime d’une loi fédérale, et elle ne s’applique pas au droit d’utilisation des eaux pour la production de forces hydrauliques visées par la Loi sur les forces hydrauliques du Canada.

(12)  Les groupes affiliés au CPNY étaient la Première nation de Carcross/Tagish et la Première nation de White River; les groupes non affiliés au CPNY étaient la Nation kaska, qui représente le Conseil Dena de Ross River et la Première nation de Liard, et la Première nation de Kwanlin Dun.


ANNEXE I

LOI SUR LE YUKON, ARTICLES 17 À 22

 

 

 

 

 

 


ANNEXE II

ENTENTES SUR L’AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE
DES PREMIÈRES NATIONS DU YUKON

En prenant comme modèle l’Entente sur l’autonomie gouvernementale de la Première nation des Gwitchin Vuntut, les ententes sur l’autonomie gouvernementale des Premières nations du Yukon prévoient d’attribuer à celles-ci un pouvoir législatif qui :


ANNEXE III

ACCORD DE TRANSFERT AU YUKON D’ATTRIBUTIONS
RELEVANT DU PROGRAMME DES AFFAIRES DU NORD

RÉSUMÉ PARTIEL

   A.  Chapitre 1 : Dispositions générales

   B.  Chapitre 2 : Transfert de responsabilités

   C.  Chapitre 3 : Ressources humaines

   D.  Chapitre 4 : Propriétés, biens meubles, contrats et dossiers du PAN

   E.  Chapitre 5 : Ressources forestières

   F.  Chapitre 6 : Environnement

   G.  Chapitre 8 : Application de l’Accord


(1)  À savoir les terres et les droits réels dans les terres du Yukon appartenant au Canada, y compris les ressources forestières, certaines mines et certains minéraux, ainsi que le lit des cours d’eau.

(2)  À savoir les eaux internes de surface et souterraines, à l’exception les eaux des parcs nationaux et de certains autres emplacements prescrits.

(3)  Selon l’inventaire des sites figurant à l’Annexe H de l’ATA, 402 sites on fait l’objet de mesures correctives, 244 sites ne demandent aucune mesure corrective, 143 sites appellent une évaluation et 91 sites exigent des mesures correctives.