Direction de la recherche parlementaire


MR-118F

 

PROJET DE SOCIÉTÉ

Rédaction  Kristen Douglas
Division du droit et du gouvernement

Le 28 janvier 1994


 

TABLE DES MATIÈRES

 

PHASE I :  DE NOVEMBRE 1992 À JUIN 1993

PHASE II :  DE JUIN À DÉCEMBRE 1993

CONCLUSION


 

PROJET DE SOCIÉTÉ

 

Le Projet de Société est un partenariat d'organisations bénévoles, commerciales, autochtones et gouvernementales qui cherchent à favoriser la transition du Canada au développement durable. Il a été créé lors d'une réunion multipartite qui s'est tenue en novembre 1992 et au cours de laquelle les participants ont discuté des suites que le Canada devait donner à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), qui a eu lieu en juin 1992 à Rio de Janeiro, au Brésil, et qu'on appelle communément le Sommet de la Terre. Il a alors été convenu qu'il fallait un processus national pour faire progresser dans la voie du développement durable tous les Canadiens ainsi que leurs gouvernements, leurs entreprises et leurs autres organismes.

Avant la CNUED, un secrétariat national avait coordonné les activités des ministères et organismes fédéraux participants, comme l'Agence canadienne de développement international (ACDI), Affaires extérieures Canada et Environnement Canada et facilité la participation des organismes non gouvernementaux (ONG) par l'entremise du Comité de participation du Canada. En prévision du démantèlement du secrétariat en novembre 1992, le ministre de l'Environnement d'alors, Jean Charest, a invité les représentants de plusieurs secteurs de la société canadienne, y compris ceux qui ont été actifs à Rio, à se réunir pour mettre au point le genre de processus ouvert et global qui puisse servir à coordonner les activités devant se dérouler à l'échelle nationale dans la foulée du Sommet de la Terre. À cette première assemblée des intervenants nationaux, les participants se sont entendus sur un ensemble de principes directeurs et de caractéristiques du Projet de Société.

Voici quels sont ces principes et caractéristiques:  le processus doit être transparent, global et axé sur la responsabilisation; les intervenants doivent se tenir responsables de la contribution de leur secteur au développement durable; il doit y avoir de la coopération entre les secteurs; il faut qu'il y ait une vision commune et des liens entre la stratégie et l'action; et le Canada doit être un pays modèle dans la mise en oeuvre du développement durable à l'échelle mondiale.

Après avoir franchi deux phases de six mois ponctuées par des assemblées des intervenants nationaux, le Projet de Société s'est engagé dans une troisième phase. Ses travaux sont coordonnés par son directeur avec l'aide d'un secrétariat fourni par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie (TRNEE) et sont exécutés par des bénévoles issus des secteurs participants. Le financement des deux premières phases a été assuré par le Conseil canadien des ministres de l'Environnement (CCME), Environnement Canada, le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), l'Institut international du développement durable (IIDD) et la Table ronde nationale. À la troisième assemblée, qui a eu lieu en décembre 1993, le financement futur du Projet de Société était incertain.

Le Projet de Société a pour but premier de formuler une stratégie nationale de développement durable, un des engagements que le Canada a pris à Rio en signant Action 21, le plan d'action mondial en matière de développement durable. Action 21 est un inventaire volumineux (40 chapitres) des questions de développement durable, y compris des programmes d'action et des estimations de coûts. Il aborde les problèmes environnementaux, comme les transferts de technologie, les changements climatiques et l'évacuation des déchets dangereux, de façon sectorielle. Comme les participants au Projet de Société font partie d'un réseau d'organismes, de collectivités et de particuliers qui se livrent déjà à des activités destinées à concrétiser les engagements d'Action 21, ils sont en mesure de se renseigner les uns les autres sur les progrès et les retards enregistrés à l'échelle nationale. Le Projet de Société peut établir des liens entre ces initiatives et développer celles-ci ainsi que favoriser la prise d'autres mesures.

Selon le dernier paragraphe d'un document préparé pour la troisième assemblée des intervenants nationaux qui a eu lieu les 16 et 17 décembre 1993, le Projet de Société est

[...] un regroupement d'organisations gouvernementales et non gouvernementales canadiennes qui collaborent pour la promotion du développement durable et la transition vers celle-ci. Nous constituons un réseau de réseaux, un lien entre des égaux convaincus qu'ensemble, on peut atteindre certains buts que, séparément, on n'atteindrait jamais(1).

 

PHASE I: DE NOVEMBRE 1992 À JUIN 1993

La première phase du Projet de Société a surtout visé à trouver des moyens d'appliquer l'esprit de Rio aux activités de développement durable des intervenants et à apprendre à faire travailler un groupe aussi nombreux et divers de façon productive. Un groupe de travail a été chargé d'amorcer le travail et de faire rapport à l'assemblée suivante. Composé de gens qui ne se connaissaient pas tous, ce groupe a passé beaucoup de temps à apprendre à travailler ensemble, à forger des consensus et à saisir la nature exacte du défi qu'il devait relever.

Le groupe de travail s'est divisé en trois comités: le Comité des voies et moyens, le Comité de la vision et du processus et le Comité des documents et de l'information. Le Comité des voies et moyens était chargé de répondre aux besoins pratiques du Projet de Société (financement, lieu et ordre du jour des réunions et autres questions de coordination). Le Comité de la vision et du processus était chargé de préparer une étude générale sur la planification du développement durable, y compris le canevas d'un plan national de développement durable. Quant au Comité des documents et de l'information, sa mission était de faire rapport sur l'état d'avancement des engagements que le Canada a pris à la CNUED et de mettre au point un système national de partage de l'information.

À la deuxième assemblée des intervenants nationaux, les comités ont rendu compte de leurs activités de la première phase. Le Comité de la vision et du processus a déposé son étude générale, qui comportait le canevas d'un plan de développement durable en cinq parties. Le Comité des documents et de l'information avait terminé plusieurs volets importants de son examen chapitre par chapitre des suites données par le Canada à Action 21 et avait constitué, à l'IIDD à Winnipeg, une grande banque de données à long terme sur les activités et les initiatives de développement durable d'un océan à l'autre.

Les intervenants ont recommandé que le Projet de Société poursuive pendant six autres mois ses travaux, lesquels seraient examinés à la troisième assemblée. Le groupe de travail a remis le rapport qu'il avait préparé pour l'assemblée après la Phase I à l'ambassadeur du Canada pour le développement durable afin qu'il le distribue à la première réunion de la Commission des Nations Unies sur le développement durable, où il a reçu un accueil favorable. Le groupe a estimé qu'il fallait encourager d'autres secteurs à se joindre au processus afin de le rendre plus national et plus représentatif et diversifier autant que possible les sources de financement. Un certain nombre de participants ont déclaré qu'il fallait prendre des mesures plus concrètes dans la Phase II.

PHASE II: DE JUIN À DÉCEMBRE 1993

Dans la Phase II, le groupe de travail, dont la composition avait changé quelque peu, a poursuivi les travaux autorisés par les intervenants nationaux à la deuxième assemblée. À la troisième assemblée, qui a réuni la plupart des intervenants du début et des représentants de plusieurs secteurs jusque-là non représentés, plusieurs projets ont abouti.

Le Comité des documents et de l'information a distribué sur papier et sur disque informatique l'évaluation complète qu'il avait faite des mesures que le Canada a prises à la suite du Sommet de Rio au regard des chapitres d'Action 21. Il a également distribué des renseignements sur les activités de développement durable d'organisations gouvernementales, communautaires, commerciales et non gouvernementales d'un océan à l'autre. Tous ces documents ont exigé beaucoup d'efforts de la part de bénévoles et d'experts-conseils pendant les deux premières phases du Projet de Société.

Le Comité de la vision et du processus, rebaptisé Comité de l'élaboration du processus, avait poursuivi ses travaux sur le processus de planification du développement durable. Dans son rapport, il tenait pour acquis, comme en ont convenu les intervenants, que le Projet de Société offre une excellente occasion de concerter une stratégie de développement durable dans des délais très serrés. Les participants ne se sont pas entendus sur la question de savoir s'il valait mieux mettre l'accent sur des mesures concrètes ou sur le dialogue et la planification. Le comité a proposé que le Projet de Société prépare un premier projet d'une stratégie nationale de développement durable.

Trois nouveaux comités ont également présenté leur rapport. Le Groupe de travail sur les compétences en matière d'environnement avait commencé à étudier les chevauchements intergouvernementaux dans l'industrie pétrolière et gazière en vue de mesurer les effets des conflits inter- et intragouvernementaux sur les coûts et la compétitivité. Avec l'appui de l'industrie, le groupe de l'appui avait demandé à Stephen Kennett, de l'Institut canadien du droit des ressources, de préparer une étude générale et organisé un atelier en octobre. Il comptait présenter son rapport à la quatrième assemblée des intervenants nationaux en juin 1994.

Établi pour aider le secteur des industries vertes à croître pour répondre à la demande nationale et internationale, le Groupe de travail sur l'industrie verte a rencontré des représentants du secteur pour déterminer comment le Projet de Société pourrait aider à promouvoir l'exportation de technologies relatives aux substances destructrices de la couche d'ozone. Après avoir organisé deux ateliers dans la Phase II, le groupe de travail avait entrepris de dresser un plan de travail destiné à aider ce secteur à répondre aux exigences du Protocole de Montréal. Les frais de ce groupe de travail seront payés, entre autres, par l'industrie.

Un troisième comité, le Groupe de travail sur la stratégie de communication, a mis l'accent sur la nécessité de convaincre les Canadiens qu'il faut faire du développement durable une priorité. Il a proposé une stratégie de communication en neuf points, dont le financement n'avait pas encore été assuré et qu'on tentera d'obtenir dans la Phase III.

Un groupe d'intervenants a proposé d'établir un Service jeunesse pour le développement durable. Il avait établi pour cette initiative des critères et des objectifs qu'il a l'intention de lier à la proposition analogue du plan d'action du gouvernement libéral Pour la création d'emplois. Pour la relance économique. Là encore, le budget nécessaire n'avait pas été obtenu.

La Phase II avait également pour objectif d'augmenter les efforts de rapprochement avec les groupes autochtones nationaux et internationaux. Comme on avait déploré, après la Phase I, le manque de participation des autochtones au Projet de Société, un rapport provisoire sur les efforts de rapprochement a été déposé à la troisième assemblée. Tous les organismes autochtones qui ont participé aux préparatifs de la CNUED ont été rejoints et ont manifesté un intérêt considérable. Les peuples autochtones ont indiqué toutefois qu'ils ne voulaient pas participer au Projet de Société comme « minorités » ou « groupes désavantagés » ni même comme simples intervenants. Ils ont demandé qu'on reconnaisse leur droit inhérent à l'autodétermination et leur histoire remarquable sur le plan de la protection de l'environnement. Il a été proposé de créer un centre de ressources et un groupe de travail chargé de dresser un plan autochtone de développement durable.

Dans le discours que la ministre de l'Environnement, Mme Sheila Copps, a prononcé à la troisième assemblée, elle a formulé trois recommandations: 1) qu'on dresse une liste de mesures concrètes priorisées, 2) qu'on maintienne l'appui de la base, et 3) que le Projet de Société trouve moyen de soutenir ses activités dans des circonstances financières difficiles. Elle a souligné la nécessité de faire du développement durable un mode de vie pour tous les Canadiens et déclaré que les travaux du Projet de Société étaient essentiels à cet effort. Son secrétaire parlementaire, Clifford Lincoln, qui a assisté à toute l'assemblée, s'est déclaré lui aussi en faveur de la continuation du Projet de Société.

CONCLUSION

Pendant sa première année d'existence, le Projet de Société a contribué grandement à la mise en oeuvre participative et pratique des engagements que le Canada a pris à Rio. Ceux qui y participent le considèrent comme un bon moyen de faciliter les initiatives des membres et d'autres intervenants d'un océan à l'autre. On pourrait améliorer le processus, par exemple, en élargissant la représentativité des intervenants. La Table ronde nationale continuera de fournir son aide, surtout sur le plan de la promotion et du secrétariat, mais les besoins du Projet de Société en matière de stabilité financière à long terme n'ont pas encore été satisfaits. À l'échelle internationale, on considère que cette initiative place le Canada à « 'avant-garde de la concertation »(2), mais il reste à voir si elle peut faire une contribution vraiment efficace et durable à la transition au développement durable.


(1) Projet de Société, Volume 1: Aperçu du Projet de Société, produit pour la Troisième assemblée des intervenants nationaux, 16 et 17 décembre 1993, Ottawa, p. 13.

(2) Centre for Our Common Future, The Bulletin, numéro 19, mars 1993 (traduction).