BP-275F L'UNION ÉCONOMIQUE : UNE
COMPARAISON DES
Rédaction :
TABLE
DES MATIÈRES LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE ET SES INSTITUTIONS B. Principales institutions décisionnelles de la Communauté européenne LUNIFICATION ÉCONOMIQUE DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE B. Europe 1992 : le plan du marché unique 1. Suppression des barrières physiques 2. Suppression des barrières techniques c. Libre circulation des travailleurs et des professionnels d. Marché commun pour les services 3. Suppression des barrières fiscales C. Union économique et monétaire COMPARAISON
DU TRAITÉ INSTITUANT LA CEE ET DE A. Interdiction des barrières intérieures 1. Les propositions du gouvernement canadien 2. Les règles de la Communauté économique européenne B. Exceptions à linterdiction des barrières intérieures 1. Les propositions du gouvernement canadien 2. Règles de la Communauté économique européenne a. Exceptions à la libre circulation des biens b. Exceptions à la libre circulation des personnes c. Exceptions à la libre circulation des services d. Exceptions à la libre circulation des capitaux COMPARAISON
DU PROCESSUS DINTÉGRATION DU TRAITÉ INSTITUANT A. Les propositions du gouvernement canadien B. Intégration économique dans la Communauté européenne LAMÉLIORATION
DES RÈGLEMENTS CONCERNANT A. Les propositions du gouvernement canadien B. Le règlement de la Communauté économique européenne COORDINATION
ET HARMONISATION DES POLITIQUES A. Les propositions du gouvernement canadien B. Les propositions de la Communauté économique européenne
L'UNION ÉCONOMIQUE
: UNE COMPARAISON DES Le 24 septembre 1991, le gouvernement canadien a publié un document de 60 pages, Bâtir ensemble lavenir du Canada ? Propositions, conçu pour servir de point de départ aux discussions sur lavenir politique et économique du Canada. Parmi les propositions les plus controversées se trouvent celles qui visent à supprimer les barrières et restrictions économiques internes et à renforcer la coordination et lharmonisation des politiques macro-économiques. Ces idées de promotion de lintégration économique du Canada ont été davantage précisées dans le document Le fédéralisme canadien et lunion économique : partenariat pour la prospérité, paru le 26 septembre. Alors que le Canada fait depuis peu face à une possibilité réelle de morcellement politique et peut-être économique, la Communauté européenne, de lautre côté de locéan Atlantique, est en train de mettre en place un ambitieux programme pour intégrer 12 marchés nationaux en un seul marché intérieur qui devrait mener en bout de ligne à une union économique et politique. Les leçons que pourrait tirer le Canada de lintégration européenne ont été illustrées dans La Communauté européenne : un modèle politique pour le Canada?, lun des documents de référence qui accompagnaient les propositions du gouvernement. Bien quil y ait des différences évidentes sur le plan politique entre le modèle confédéral de la CE et la fédération canadienne, la CE peut donner certaines leçons au Canada en matière dintégration de léconomie. Vu les similarités entre le plan de marché unique de la CE et les propositions du gouvernement canadien en vue dune union économique, le gouvernement fédéral devrait écouter ces leçons avec attention. Dans la première partie du présent document, nous donnons des renseignements sur la CE, sur ses origines et sur les principales institutions décisionnelles qui la composent. Dans la deuxième partie, nous résumons le programme « Europe 1992 » et le programme de création dune « Union économique et monétaire » (UEM) visant la réussite de lintégration économique de la CE. Dans la troisième partie, nous comparons les propositions du gouvernement canadien pour lunion économique au processus dintégration européenne. LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE ET SES INSTITUTIONS La Communauté européenne se compose de trois communautés : la première, la Communauté européenne du charbon et de lacier (CECA), a été instaurée par le traité de Paris (1951) dans le but dunifier les marchés du charbon et de lacier de la Belgique, de la France, de lItalie, du Luxembourg, des Pays-Bas et de lAllemagne de lOuest; la deuxième, la Communauté européenne de lénergie atomique (CEEA ou Euratom) a été formée par ces six mêmes pays dans le traité de Rome (1957) et elle vise à coordonner et à favoriser le développement de lénergie nucléaire à des fins pacifiques; la troisième, la Communauté économique européenne (CEE), instituée en 1957 par un autre traité de Rome, vise la création dun marché commun qui jetterait les bases dune union politique et économique. Même si, sur le plan juridique, ce sont trois communautés distinctes, elles partagent maintenant les mêmes institutions et disposent dun budget commun. Sur le plan politique, elles sont considérées comme une seule « communauté européenne ». Pour comprendre le processus de lunification européenne, il est utile davoir certaines connaissances des institutions et des procédures de prise de décision de la Communauté européenne. Dans la partie suivante de ce document, nous abordons les principales institutions de la CE et nous traitons de leur rôle respectif dans le processus décisionnel de la Communauté. Il importe de savoir que la CE est un regroupement de pays qui ont choisi dêtre soumis à institutions supranationales. Les institutions de la CE ne peuvent pas agir indépendamment dune majorité des États membres. Il y a une énorme différence entre la CE, où le gouvernement na pas le pouvoir de recueillir des recettes directement par des impôts, et la fédération canadienne, où le gouvernement central possède ses propres pouvoirs fédéraux, très étendus, et peut agir indépendamment des gouvernement qui le composent. B. Principales institutions décisionnelles de la Communauté européenne La Commission européenne, qui regroupe 17 membres nommés par accord des États membres et qui compte plus de 15 000 employés, est linitiative de la politique communautaire, la gardienne des traités et la protectrice de lintérêt communautaire. La Commission a pour mandat de présenter des propositions, qui font lobjet dune étude et dun vote des autres organismes décisionnels. Ainsi, la Commission a présenté un Livre blanc « Lachèvement du marché intérieur » (« Europe 1992 ») et a la responsabilité de rédiger les textes de loi nécessaires pour mettre ce programme en oeuvre. La Commission a aussi la responsabilité de gérer et de superviser les traités, ainsi que de faire respecter les règles des traités par les gouvernements et les sociétés. (Pour des raisons de concurrence, la Commission a récemment bloqué lachat, par un consortium européen, de la société De Havilland, constructeur canadien daéronefs.) Il a été dit que la Commission propose et que le Conseil dispose. Les initiatives de la Commission sont étudiées par le Parlement européen et font ensuite lobjet dun vote du Conseil des ministres, qui représente directement les gouvernements des États membres. Théoriquement les membres du Conseil sont les ministres des Affaires étrangères des gouvernements des États membres mais dans les faits, les membres changent selon les sujets abordés. Par exemple, lorsquil est question dagriculture, chaque pays délègue à la réunion le ministre ou le sous-ministre de lAgriculture. La présidence du Conseil est exercée à tour de rôle par chaque État membre pour une durée de six mois. Même si le traité instituant la CEE a proposé le principe du vote majoritaire du Conseil des ministres pour la plupart des questions, aux termes du compromis dit « du Luxembourg », tout État membre avait le droit de sopposer à une décision qui allait à lencontre de ses intérêts nationaux essentiels. Cest ainsi que les États membres ont eu le droit dopposer leur veto aux propositions avec lesquelles ils nétaient pas daccord. Les modifications que lActe unique européen a apportés au traité instituant la CEE se sont traduits par un plus grand recours au vote majoritaire par le Conseil des ministres. La « majorité qualifiée » au Conseil des ministres est de 54 voix sur 76. Les voix sont pondérées comme suit : Royaume-Uni, Allemagne, France et Italie, 10 voix chacun, Espagne, 8 voix, Belgique, Grèce, Pays-Bas et Portugal, 5 voix chacun, Danemark et Irlande, 3 voix chacun, et Luxembourg, 2 voix. Même si les 518 membres qui composent le Parlement européen sont maintenant élus directement par les électeurs des États membres, celui-ci na pas le pouvoir de présenter des lois ou même de rejeter ou de modifier les propositions de la Commission si le Conseil des ministres décide de ne pas en tenir compte. Le Parlement européen a essentiellement un rôle de consultation; il étudie les propositions de la Commission et les commente. Le Parlement a toutefois le pouvoir de rejeter les budgets proposés et, par une majorité des deux tiers, de provoquer la démission de la Commission. Il ne faut pas confondre le Conseil européen, qui comprend les chefs des gouvernements des États membres, avec le Conseil des ministres. Le traité initial instituant la CEE ne prévoyait pas le Conseil européen; celui-ci a été créé lors du sommet de Paris en 1974, où il a été convenu que les chefs dÉtat et leurs ministres des Affaires étrangères ainsi que le Président de la Commission et lun des vice-présidents de la Commission se réuniraient régulièrement. Intégré par la suite à lActe unique européen, le Conseil européen fournit lélan politique nécessaire pour organiser des conférences intergouvernementales sur des réformes majeures telles que le programme dun marché unique, lunion économique et monétaire et lunion politique. LUNIFICATION ÉCONOMIQUE DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE Bien que le traité de Rome de 1957 établissant la Communauté économique européenne ait envisagé lélimination des barrières internes à la libre circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux (les quatre libertés), lévolution vers ce but sest faite lentement une fois les tarifs et les quotas internes supprimés en 1968. En fait, à la fin des années 70 et au début des années 80, la montée du chômage intérieur combinée à la concurrence de lExtrême-Orient a conduit à un accroissement du protectionnisme chez les États membres. En 1985, la Commission de la Communauté européenne a présenté au Conseil européen un Livre blanc, « Lachèvement du marché intérieur », qui proposait plus de 300 directives (nombre réduit à 279 par la suite) destinées à briser les obstacles du marché intérieur à la pleine réalisation des quatre libertés. Ces barrières internes ont été regroupées en catégories physiques, techniques ou financières selon leur nature, et la solution proposée a commencé à être connue sous le nom de « Europe 1992 » à cause de léchéance du 31 décembre 1992 pour la mise en place complète du plan. LActe unique européen (AUE), la première révision importante du traité instituant la CEE, avait pour but détablir le marché interne et dapporter au traité les changements nécessaires pour permettre la présentation et ladoption du programme « Europe 1992 ». LAUE a facilité le processus décisionnel en prévoyant lutilisation du vote à majorité qualifiée pour les mesures qui concernent létablissement et le fonctionnement du marché interne. Des exceptions ont été faites pour les dispositions financières et pour les dispositions relatives à la liberté de circulation des personnes, ainsi quaux droits et aux intérêts de la main-doeuvre. Une autre caractéristique importante de lAUE a été dincorporer dans le traité de la CEE le principe de la « reconnaissance mutuelle ». Larticle 100 B du traité demande à la Commission de recenser, en 1992, les dispositions législatives, réglementaires et administratives qui nont pas fait lobjet dune harmonisation. Le Conseil peut décider, à la majorité qualifiée, que des dispositions en vigueur dans un État membre doivent être reconnues comme équivalentes à celles quapplique un autre État membre. Enfin, lAUE a jeté les bases de propositions dunion économique et monétaire et dunion politique qui ont été présentées par la suite. B. Europe 1992 : le plan du marché unique 1. Suppression des barrières physiques
2. Suppression des barrières techniques
c. Libre circulation des travailleurs et des professionnels
d. Marché commun pour les services
3. Suppression des barrières fiscales
C. Union économique et monétaire Un plan en trois étapes a été établi pour lunion monétaire et économique de la CE. Au cours de la première étape, les politiques monétaires et économiques seraient coordonnées plus étroitement, et les devises de la Grande-Bretagne, du Portugal et de la Grèce se joindraient au Système monétaire européen (SME). Au cours de la deuxième étape, les variations des devises seraient contrôlées plus étroitement, un système européen de Banques Centrales (SEBC) serait établi, et les politiques macro-économiques seraient coordonnées par le Conseil européen formé des chefs des États membres et des gouvernements. Au cours de la troisième étape, les taux de change seraient fixés une fois pour toutes, et les unités monétaires nationales seraient remplacées par une devise commune. À lintérieur du SEBC, la Banque centrale européenne (BCE) déterminerait la politique monétaire. La CE définirait des lignes directrices que les États membres seraient tenus de suivre pour leurs politiques budgétaires. COMPARAISON
DU TRAITÉ INSTITUANT LA CEE ET DE A. Interdiction des barrières intérieures 1. Les propositions du gouvernement canadien Le gouvernement canadien propose que larticle 121 de la Constitution soit modifié de manière à ce que soient interdits les lois, les pratiques ou les programmes fédéraux ou provinciaux qui créent des barrières ou des restrictions à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux. Les deux premières parties de larticle 121 proposé se lieraient comme suit :
2. Les règles de la Communauté économique européenne Larticle 3 du traité établissant la Communauté économique européenne stipule que les activités de la Communauté comprendront :
LActe unique européen, qui traite de lintégration du marché intérieur (« Europe 1992 »), a modifié larticle 8A du traité instituant la CEE. Cet article stipule ce qui suit : « Le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions du présent traité ». Larticle 5 exige des États membres quils assument leurs obligations en vertu du traité et quils « sabstiennent de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation des buts du présent traité ». Les obligations des États membres en ce qui concerne les quatre libertés (biens, personnes, services et capitaux) sont précisées dans le traité : libre circulation des marchandises (articles 9-37); libre circulation des personnes (articles 48-58); libre circulation des services (articles 59-66); libre circulation des capitaux (articles 67-73). Larticle 95 du traité interdit limposition de taxes plus élevées sur des produits dautres États membres que sur les produits intérieurs similaires. Les mesures intérieures dimposition ne peuvent pas non plus fournir une protection indirecte contre les autres produits. Larticle 2 du projet de traité établissant lunion économique et monétaire modifierait les objectifs du traité de la CEE afin de préciser que la Communauté a pour mandat de réaliser lunion économique et monétaire. Pour des États souverains, un traité est linstrument juridique principal visant à contrôler les comportements des gouvernements nationaux. Ainsi, les signataires du traité de Rome ont consenti à la libre circulation entre les États membres de la CE des biens, des personnes, des services et des capitaux. Dans une fédération comme le Canada, la Constitution représente le premier instrument juridique auxquels doivent se conformer les gouvernements qui la composent. La protection existante pour le marché commun canadien tient principalement à deux articles de la Constitution. Le premier, larticle 121, prévoit que « Tous articles du crû, de la provenance ou manufacture daucune des provinces, seront, à dater de lunion, admis en franchise dans chacune des autres provinces ». Premièrement dans sa forme actuelle, larticle 121 de la Constitution du Canada ne traite que de la libre circulation des biens entre les provinces, et ne comprend pas la circulation des services, de la main-doeuvre et des capitaux. Deuxièmement, on sait pas très bien non plus si larticle 121 actuel sapplique aux biens fabriqués à létranger en plus de ceux produits dans les provinces. Troisièmement, larticle semble sappliquer aux droits, mais non aux barrières non tarifaires. Quatrièmement, il semble créer des obligations pour les gouvernements provinciaux, mais non pour le gouvernement fédéral. La deuxième protection pour le marché commun du Canada est assurée par larticle 91 de la Constitution, qui confère au gouvernement fédéral une autorité législative exclusive sur « la réglementation du trafic et du commerce ». Même si les tribunaux canadiens ont interprété cet article comme donnant au gouvernement fédéral des compétences exclusives sur le commerce international et interprovincial, cela a été circonscrit par les pouvoirs constitutionnels exclusifs accordés aux provinces sur « la propriété et les droits civils dans la province » et sur « toutes les matières dune nature purement locale ou privée dans la province ». Ces dispositions ont permis aux provinces dériger toute une série de barrières non tarifaires au commerce interprovincial. La proposition du gouvernement visant à renforcer la clause de marché commun de la Constitution et dinterdire expressément les mesures fédérales ou provinciales limitant les quatre libertés donnerait vraisemblablement aux tribunaux canadiens un rôle plus actif dans lélimination des barrières économiques internes. Les tribunaux des États-Unis et de la Communauté européenne ont influé de façon significative sur lintégration des marchés. Dans la Communauté européenne, lexécution des obligations des États membres énoncées dans le traité de Rome se fait en vertu des lois de la CE, et la Cour européenne de justice a montré quelle était lune des forces les plus puissantes de lintégration du marché intérieur de la CE. Un exemple frappant est le cas du Cassis de Dijon. La Cour européenne de justice a décrété dans ce cas que lAllemagne de lOuest ne pouvait pas empêcher limportation de cette liqueur française simplement parce quelle ne contenait pas le minimum requis de 32 p. 100 dalcool pour porter lappellation liqueur selon les normes ouest-allemandes. Cette décision a joué un rôle important dans lélimination dautres barrières commerciales déguisées au sein de la CE, telle que la loi allemande sur la pureté de la bière allemande et le règlement italien exigeant que les pâtes alimentaires soient fabriquées exclusivement à partir de blé dur. Il y a de nombreux autres cas où la Cour européenne a éliminé, par ses décisions, les obstacles du marché. Contrairement à la modification proposée concernant la Constitution du Canada, le traité instituant la CEE ne désigne pas la CEE comme étant une « union économique ». Cependant, les modifications proposées au traité instituant la CEE par la Commission prévoient que la Communauté ait pour mandat den arriver à une union économique et monétaire. B. Exceptions à linterdiction des barrières intérieures 1. Les propositions du gouvernement canadien Le gouvernement a proposé que linterdiction des barrières commerciales admette des exceptions pour les politiques dexpansion régionale ou les lois que le Parlement déclarerait dintérêt national. Les paragraphes 121(3) et 121(4) proposés de la Constitution stipulent ce qui suit :
2. Règles de la Communauté économique européenne a. Exceptions à la libre circulation des biens Larticle 36 du Traité CEE permet des interdictions ou des restrictions relatives à léchange des biens là où elles sont « justifiées par des raisons de moralité publique, dordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique ou de protection de la propriété industrielle et commerciale ». Ces interdictions ou restrictions ne peuvent constituer un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée des échanges entre États membres. b. Exceptions à la libre circulation des personnes Le paragraphe 43(3) du traité CEE permet aux États membres dexclure de leur territoire des personnes « pour des raisons dordre public, de sécurité publique et de santé publique ». La discrétion des États membres dans lapplication de la disposition relative à lordre public est limitée par la loi de la CE. La conduite dun individu doit constituer une menace authentique et grave à lordre public et affecter un des intérêts fondamentaux de la société. Par exemple, des maladies, telles que la tuberculose, la syphilis, la toxicomanie et les troubles mentaux profonds pourraient être interprétés comme menaçants pour la santé publique. La conduite dun individu pourrait également amener un État membre à lui interdire laccès à son territoire pour des raisons dordre public si cette conduite représente une menace authentique et grave à la sécurité publique et affecte un des intérêts fondamentaux de la société. Le paragraphe 48(4) énonce que la liberté de mouvement des travailleurs établie dans larticle 48 ne sapplique pas à lemploi dans ladministration publique. c. Exceptions à la libre circulation des services Les services ne sont considérés comme tels, selon lintention du traité, que sils ne tombent pas sous le coup des dispositions relatives à la libre circulation des biens, des capitaux et des personnes. Il en résulte donc que les États membres peuvent appliquer des restrictions à la vente de services sur leur territoire par des étrangers. Ainsi, des restrictions peuvent être appliquées pour des motifs dordre public, de santé publique ou de sécurité publique comme dans le cas de la libre circulation des personnes. Des restrictions pourraient également sappliquer là où le fournisseur de services accomplit des activités qui sont liées, même à titre occasionnel, à lexercice de lautorité publique (article 55). d. Exceptions à la libre circulation des capitaux Actuellement, le traité instituant la CEE autorise un État membre à prendre des mesures de protection quand des mouvements de capitaux entraînent des perturbations dans le fonctionnement du marché des capitaux (article 73) ou quand des difficultés surviennent dans la balance des paiements (articles 108 et 109). Cependant, les modifications proposées au traité instituant lunion économique et monétaire interdiraient les restrictions à la circulation des capitaux. (On na pas encore étudié la possibilité dabroger les articles 68 à 73). Larticle 100 A du traité, qui a été amendé par lActe unique européen, renferme au paragraphe 4 une dérogation à lharmonisation des lois et règlements où un « État membre estime nécessaire dappliquer des dispositions nationales justifiées par des exigences importantes visées à larticle 36 ou relatives à la protection du milieu de travail ou de lenvironnement [ ] ». (Veuillez noter la référence antérieure à larticle 36 concernant les exceptions à la libre circulation des biens.) LÉtat membre doit signaler à la Commission européenne les dispositions nationales qui dérogent à lharmonisation des lois prévues à larticle 100 A. La Commission doit confirmer les dispositions nationales après avoir établi quelles ne constituent pas un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée sur le commerce. Larticle 8 C du traité instituant la CEE enjoint la Commission de tenir compte « [ ] de lampleur de leffort que certaines économies présentant des différences de développement devront supporter au cours de la période détablissement du marché intérieur » au moment de rédiger ses propositions préliminaires pour un marché unique. Toute dérogation doit être temporaire et nuire le moins possible au fonctionnement du marché intérieur. Même si elles semblent nombreuses, les dérogations au principe du marché commun dans le traité instituant la CEE ont tendance à avoir des motifs précis (par exemple la santé et la sécurité, lenvironnement, etc.). La Cour européenne de justice, qui décide en dernier lieu des dérogations qui sont acceptables, a interprété ces exceptions sévèrement. Dans un certain nombre de cas où un État membre a invoqué, par exemple, la santé et la sécurité comme motifs pour restreindre les importations, la Cour a qualifié ces dérogations dinjustifiées. Par contre, dans la proposition du gouvernement canadien, les exceptions sont moins nombreuses mais de nature plus générale. Les exceptions concernant le développement régional et les lois proclamées dans lintérêt national laissent amplement place à la déviation par rapport au principe dunion économique. Lexigence voulant que les exceptions pour les lois proclamées dans lintérêt national soient ratifiées par les provinces au moyen de la formule 7/50 met un frein à lutilisation de cette dérogation. Même si le traité instituant la CEE ne permet pas la non-participation lorsquil y a entente à ce sujet, une modification proposée au traité de la CEE ayant trait à lunion économique et monétaire constituerait un fait nouveau dans les lois régissant la Communauté. Sur un vote de la majorité qualifiée du Conseil des ministres (avec lapprobation dau moins huit États membres), les États membres qui connaissent des difficultés économiques seraient autorisés, pour une période limitée, à ne pas participer pleinement à létape finale de lunion économique et monétaire. COMPARAISON
DU PROCESSUS DINTÉGRATION DU TRAITÉ INSTITUANT A. Les propositions du gouvernement canadien Le gouvernement propose de doter le Parlement canadien dun nouveau pouvoir constitutionnel qui lui donnerait le droit exclusif de légiférer pour assurer le fonctionnement efficace de lunion économique. Cependant, les lois ne seraient pas en vigueur tant quelles nauraient pas été approuvées par les gouvernements dau moins les deux tiers des provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population de toutes les provinces. De plus, lassemblée législative de nimporte quelle province pourrait déclarer, par une résolution appuyée par 60 p. 100 de ses membres, que ces lois ne sappliquent pas dans la province, bien quune telle déclaration deviendrait nulle après trois ans, à moins quun délai plus court soit spécifié dans la déclaration. Le gouvernement propose également la formation dun « Conseil de la Fédération » qui ratifierait les lois établies en vertu de ce nouveau pouvoir constitutionnel. Bien que les propositions gouvernementales ne le précisent pas textuellement, le Conseil serait formé de représentants de chaque province, et lapprobation provinciale requise (par au moins deux tiers des provinces) viendrait de ce Conseil. En attendant lentrée en vigueur du nouvel article 121 de la Constitution le 1er juillet 1995, le gouvernement propose que le Conseil de la Fédération soit utilisé par les gouvernements pour tout problème de barrière intérieure. B. Intégration économique dans la Communauté européenne Comme nous lavons expliqué précédemment, la Commission européenne est chargée dinstituer les lois de la CE, tandis que le Parlement européen étudie les propositions et les met aux voix. Le pouvoir dadopter la proposition ou de la rejeter réside cependant entre les mains des États membres eux-mêmes, qui sont représentés au Conseil des ministres. Bien que ce processus législatif sapplique aux lois qui tombent sous la juridiction des traités de la CE, les mesures nécessitant la modification des traités, notamment lActe unique européen, lUnion économique et monétaire et lUnion politique européenne, sont dabord soumises aux chefs des gouvernements aux réunions du Conseil européen. Cet organisme organise alors des conférences intergouvernementales autorisées dans le but délaborer les modifications à apporter aux traités. Les traités modifiés entrent en vigueur après avoir été ratifiés par les assemblées législatives des États membres. Les lois de la CE visant à faire entériner les propositions sont présentées par la Commission et suivent le processus législatif de la CE. Prenons, par exemple, le programme « Europe 1992 ». La création de ce plan coïncide avec le « Livre blanc de la Commission sur lachèvement du marché intérieur » publié par la Commission européenne et présentée au Conseil européen en 1985. Malgré les objections de la Grande-Bretagne, du Danemark et de la Grèce, le Conseil européen a décidé, aux voix, de la tenue dune conférence intergouvernementale afin de rédiger les modifications habilitantes au traité instituant la CEE. Le résultat de cette conférence, lActe unique européen, a été signé et ratifié par les 12 États membres et est entré en vigueur en 1987. Les paramètres du traité instituant la CEE étant suffisamment élargis, la Commission européenne a entrepris dincorporer les 279 mesures du Livre blanc aux lois de la CE. À ce moment-ci, plus des deux tiers des propositions ont franchi le processus législatif prescrit et ont été adoptées par le Conseil des ministres. À peu près les deux tiers des mesures visant le marché unique exigent une majorité qualifiée au Conseil (54 votes sur un total de 76). Les mesures ayant trait à lharmonisation des taxes, à la libre circulation des personnes et aux droits et intérêts des personnes employées peuvent encore être bloquées au Conseil des ministres par un seul État membre. Le programme de marché unique est largement mis en application par les Directives de la CE, cest-à-dire des instruments légaux qui nentrent pas en vigueur dans un État membre tant et aussi longtemps quils nont pas été transposés en lois nationales. En mai 1991, les trois quarts environ des directives adoptées par le Conseil des ministres avaient été transposées en lois nationales. Les propositions relatives au marché unique sont aussi appliquées par le truchement des règlements de la CE, qui lient directement les États membres sans nécessiter ladoption de lois au niveau interne. Un autre instrument légal, les décisions, sont les instructions de la Commission de la CE; elles lient entièrement les gouvernements, les entreprises ou les personnes à qui elle sont adressées. La création dun nouveau pouvoir constitutionnel qui donnerait au Parlement le droit de légiférer pour assurer le fonctionnement efficace de lunion économique canadienne permettrait au gouvernement fédéral dinstituer un régime de marché unique pour le Canada largement inspiré d« Europe 1992 ». La ratification de ces mesures par les gouvernements provinciaux au sein dun nouveau Conseil de la Fédération daprès la règle 7/50 peut se comparer à lobligation législative de la CE davoir une majorité qualifiée au Conseil des ministres. Il convient de noter, cependant, que les États membres de la CE se sont réservés le droit dopposer leur veto à certaines mesures dinstitution du marché unique. La proposition canadienne exclut pareille possibilité. Il serait possible pour une province, aux termes de la proposition canadienne, de déroger aux lois adoptées en vertu du pouvoir de lunion économique pour une période maximale de trois ans. Le traité instituant la CEE, par contraste, ne donne pas au États membres loption de dérogation temporaire par simple vote de lassemblée nationale. Cependant, avec lassentiment du Conseil des ministres, les États membres qui connaissent des difficultés économiques seraient autorisés à ne pas participer temporairement à létape finale de lunion économique et monétaire. Comme nous lavons dit précédemment, lActe unique européen de la CE a obligé la Commission, au moment où celle-ci élaborait son plan dachèvement du marché intérieur, à prendre en considération la nécessité pour les pays membres mois développés de bénéficier de dérogations temporaires. Il est sous-entendu, cependant, que cette dérogation doit reposer sur des justifications bien fondées et quelle doit être approuvée par la Commission. LAMÉLIORATION
DES RÈGLEMENTS CONCERNANT A. Les propositions du gouvernement canadien Le document du gouvernement reconnaît les coûts inutiles quimpose aux institutions financières canadiennes (et, partant, aux consommateurs) le chevauchement des règlements fédéraux et provinciaux. Par exemple, une société de fiducie ou de prêt incorporée au niveau fédéral ou au niveau provincial et exerçant ses activités dans tout le pays pourrait devoir respecter dix ou onze réglementations pour ses opérations pancanadiennes. Le document précise que
En ce qui concerne la réglementation des valeurs mobilières, le gouvernement est prêt à envisager une approche par laquelle toutes les autorités compétentes pourraient déléguer, en tout ou en partie, leur réglementation à un organisme géré conjointement. Dautres approches comprennent des « [ ] mesures fédérales-provinciales plus formelles visant à coordonner les approches à la réglementation, à la négociation internationale et à la détermination de normes relatives aux valeurs mobilières ». B. Le règlement de la Communauté économique européenne La libéralisation des marchés financiers en vertu du programme de 1992 sappuie sur trois principes. Le premier principe, lharmonisation, exige des États membres quils harmonisent les normes essentielles de suffisance de capital de solvabilité, et dexigences comptables pour les institutions financières. Le deuxième principe, la reconnaissance mutuelle, signifie que les États membres doivent avoir une confiance mutuelle dans leur application des normes essentielles décidées par le Conseil. Le troisième principe, le contrôle par le pays dorigine, signifie que la surveillance de la vente de services financiers incombera surtout aux autorités du pays dorigine de linstitution financière. (Le contrôle par le pays hôte continuera à sappliquer en ce qui concerne la liquidité des institutions de crédit et les mesures ayant une influence sur les exigences relatives à la politique monétaire et aux réserves des opérations des institutions de crédit sur le marché des valeurs mobilières.) Lexigence relative à la libre circulation des capitaux au-delà des frontières découle de ces trois principes. Le but ultime de ces mesures de libéralisation est de permettre à une institution financière de vendre des services financiers outre-frontière ou détablir des succursales sur le territoire des autres États membres sans quil y ait chevauchement ou dédoublement réglementations. Les principes de lharmonisation, de la reconnaissance mutuelle et du contrôle par le pays dorigine sappliqueraient à la réglementation des services bancaires, des services dinvestissement et, par la suite, des services dassurance. Aux termes du régime de la CE, les banques et les sociétés de construction (essentiellement des institutions de dépôts) qui se conforment aux normes harmonisées de suffisance de capital et de solvabilité recevraient un « permis bancaire unique » qui les autoriserait à vendre un menu défini des services bancaires nimporte où dans la Communauté, pourvu que leurs pays dattache (dispensateur de chartes) ninterdise pas loffre de tels services. Les services autorisés par le permis bancaire unique pourraient être offerts dans un pays membre, même dans les cas où le pays daccueil nautorise pas ses propres sociétés à les offrir. Il pourrait sensuivre des cas où des sociétés à charte étrangère vendent des services financiers que des sociétés à charte nationale ne sont pas autorisées à vendre. Il va sans dire que des pressions seront exercées sur les pays qui définissent leurs services bancaires plus étroitement pour quils harmonisent leurs services avec le menu des services autorisés par le permis bancaire unique. Autrement, il pourrait en résulter un désavantage pour les sociétés à charte nationale. Étant donné que les propositions canadiennes sur lamélioration de la réforme du secteur financier ne sont pas détaillées, il est difficile de déterminer comment le gouvernement entend faire appliquer au Canada les principes dharmonisation, de reconnaissance mutuelle et de contrôle par le pays dorigine. Une possibilité serait dadopter presque tel quel le modèle de la CE et dautoriser les institutions à vendre partout au Canada une gamme précise de services financiers basés sur lacceptation par toutes les provinces de certaines normes de prudence. Comme dans la CE, les instances autorisant la vente dun nombre plus restreint de services financiers par une institution seraient encouragées par des pressions concurrentielles à harmoniser leurs services avec ceux qui sont autorisés par le permis unique. Linconvénient de cette solution serait toutefois de constituer une ingérence dans les compétences provinciales. Une autre interprétation du modèle de la CE appliqué au Canada a été offerte dans le rapport publié en mai 1990 par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, et intitulé Canada 1992 : Vers un marché national des services financiers. Ce système prévoit aussi un consensus sur les principales normes de prudence (harmonisation), sur la réglementation principale par la province conférant la charte (contrôle par le pays dorigine) et sur la reconnaissance mutuelle de cette réglementation par les autres provinces. La principale différence entre ce modèle d« instance désignée » et le plan de la CE est lobligation pour la province dorigine davoir un permis et le respect du menu de services autorisés par la province dorigine. Une illustration du modèle de linstance désignée aidera à mieux comprendre son application. Supposons quune compagnie de fiducie constituée au Québec, qui autorise la vente dassurances sur les lieux des institutions de dépôt, fait aussi des affaires en Ontario, où la vente dassurance sur les lieux nest pas autorisée. Aux termes du modèle dinstance désignée, la compagnie de fiducie naurait pas le droit de vendre de lassurance sur les lieux en Ontario. Elle ne pourrait faire en Ontario que ce quune société constituée en Ontario est autorisée à faire. Par contre, le Québec accorderait aux compagnies de fiducie menant des activités au Québec mais constituées en dehors de la province les mêmes privilèges dont bénéficient les firmes constituées au Québec. Le principal avantage du modèle dinstance désignée par rapport au statu quo, cest que la réglementation incomberait principalement à linstance constituante. Dans le cas de la compagnie de fiducie québécoise faisant des affaires en Ontario, le Québec régirait les normes relatives au capital et à la solvabilité que doit respecter la firme, et lOntario ne tenterait pas de chevaucher cette réglementation. De plus, contrairement au modèle de la CE, chaque province pourrait maintenir ses propres règles de conduite à lintérieur de sont territoire, sans être contrainte de les harmoniser à un menu précis de services financiers. COORDINATION
ET HARMONISATION DES POLITIQUES A. Les propositions du gouvernement canadien Le gouvernement propose de mettre au point des procédures budgétaires fédérales et provinciales plus ouvertes et plus visibles qui comprendraient :
Le gouvernement propose de mettre au point avec les provinces des lignes directrices afin daméliorer la coordination des politiques financières et lharmonisation des politiques financières avec la politique monétaire du Canada. On pourrait demander, par exemple, que les budgets soient équilibrés sur toute la période du cycle financier. (Un budget équilibré pourrait être défini de manière à exclure les dépenses de formation de capital.) Ces lignes directrices seraient établies sous forme de lois en vertu des nouveaux pouvoirs économiques proposés. Par conséquent, cette proposition aura besoin de laccord dau moins sept des dix provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population. Le gouvernement propose létablissement dun organisme indépendant pour surveiller et évaluer les politiques macro-économiques des gouvernements fédéral et provinciaux. La Loi sur la Banque du Canada serait modifiée afin détablir clairement que le mandat de la Banque est de parvenir à la stabilité des prix et de la maintenir. Les régions du Canada seraient représentées au Conseil dadministration de la Banque du Canada par des personnes nommées par le gouvernement fédéral après consultation avec les gouvernements provinciaux. Des comités consultatifs régionaux seraient créés pour donner leur avis aux administrateurs de la Banque à propos des conditions économiques régionales. La nomination du Gouverneur de la Banque du Canada serait sujette à ratification par le Sénat. Pour améliorer la transparence de la politique monétaire, le Gouverneur de la Banque du Canada serait tenu de comparaître régulièrement devant le Parlement. On lui demanderait également de rencontrer les ministres fédéral et provinciaux des Finances pour donner des opinions sur la situation économique et sur linteraction entre la politique monétaire et la politique financière. B. Les propositions de la Communauté économique européenne LActe unique européen incorpore dans le traité instituant la CEE lobjectif de parvenir à une union économique et monétaire. Larticle 102 A exige des États membres quils coopèrent « en vue dassurer la convergence des politiques économiques et monétaires nécessaires au développement ultérieur de la Communauté ». Le rapport du Comité Delors, publié en avril 1989, a établi un plan en trois étapes pour la réalisation de lunion économique et monétaire. Le Conseil européen a souscrit aux conclusions du rapport à sa réunion tenue à Madrid, en juillet 1989. À la réunion du Conseil européen tenue à Rome en octobre et en décembre 1990, 11 des 12 membres ont convenu de suivre la conception de lunion économique et monétaire proposée par le plan Delors et de convoquer une conférence intergouvernementale. (Le Royaume-Uni est le seul pays à sêtre opposé au plan de lunion.) Étape 1 Durant la première étape de lunion économique et monétaire, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1990, les politiques monétaires et économiques des États membres doivent être coordonnées plus étroitement. Les plans monétaires et économiques doivent être soumis à la Commission de la CE et à ECOFIN (Comité des ministres de léconomie et des finances). Les devises de la Grande-Bretagne, du Portugal et de la Grèce sont censées être intégrées au Système monétaire européen (SME). On laissera les devises fluctuer dans les limites dune fourchette établie à plus ou moins 2,5 p. 100 du taux central. Étape 2 La deuxième étape est censée commercer le 1er janvier 1994. La situation des devises serait contrôlée plus étroitement, une Banque centrale européenne et un Système européen de Banques centrales (SEBC) semblable au Federal Reserve System en vigueur aux États-Unis seraient établis et commenceraient à établir une politique monétaire valable pour toute la CE. Les politiques macro-économiques seraient coordonnées par le Conseil européen, qui établirait des lignes directrices pour chacun des pays et déciderait des correctifs appliqués aux États membres qui accusent un déficit budgétaire excessif. Étape 3 La data précise du début de cette étape na pas encore été établie. Les taux de change seraient fixés de façon permanente, et les unités monétaires nationales seraient remplacées par une devise commune. La BSCE/SEBC établirait la politique monétaire de la CE. La Commission européenne soumettrait des lignes directrices pluriannuelles (normalement, pour trois à cinq ans) au Conseil européen relativement aux questions ci-après;
Dans les cas où un État membre naurait pas mis en application de directives pluriannuelles, la Commission pourrait recommander au Conseil les redressements à apporter à la politique. Une aide financière pourrait être offerte aux pays membres en difficulté. Larticle 104 A proposé interdirait le financement des déficits budgétaires au moyen de laide directe du Système européen des banques centrales ou par un accès privilégié donné par les autorités publiques au marché des capitaux. La Communauté ne serait pas autorisée à garantir la dette publique dun État membre. Les États membres seraient tenus déviter les déficits budgétaires excessifs. La politique monétaire serait établie par la majorité des membres du Conseil de la Banque, selon la formule « une personne, un vote ». Le Conseil de la Banque comprendrait les douze gouverneurs des banques centrales nationales ainsi que les six membres de Conseil exécutif de la BCE, y compris le président. Les membres du Conseil exécutif de la BCE seraient nommés pour une période de huit ans par le Conseil européen après que le Conseil de la Banque aurait donné son opinion. Le Parlement européen serait également consulté pour la nomination du président et du vice-président. Dans un nombre restreint de cas clairement définis ayant trait à des décisions sur le capital, au transfert des actifs en réserve et des profits de la BCE, un système de pondération des votes est proposé. Les membres du Conseil exécutif ne voteraient pas, et les votes des gouverneurs des banques centrales nationale seraient pondérés daprès limportance relative de léconomie de chaque État membre. Selon le projet de loi pour le Système européen des banques centrales (SEPC) et la Banque centrale européenne (BCE), lobjectif principal du Système sera de maintenir la stabilité des prix. Cependant, le deuxième objectif se lit comme suit : « Sans nuire à lobjectif de la stabilité des prix, le Système appuiera la politique économique générale de la Communauté». Bien que les BCE/SEBC seraient responsables des opérations de change, les décisions concernant le régime de taux de change seraient prises conjointement avec le Conseil ECOFIN. La mise en application de létape finale de lunion économique et monétaire dans les pays membres en difficulté financière pourrait être retardée temporairement, avec lassentiment du Conseil des Ministres. Les propositions canadiennes pour la coordination et lharmonisation des programmes économiques semblent incorporer les aspects ci-après du plan de la CE pour réaliser lunion économique et monétaire :
Aux termes des propositions canadiennes, le seul mandat de la Banque du Canada serait datteindre et de maintenir la stabilité des prix. Le premier objectif de la Banque centrale européenne (BCE) serait de maintenir la stabilité des prix. Néanmoins, le deuxième objectif de la BCE, soit appuyer la réalisation de la politique économique de la Communauté, soulève des questions quant à la latitude donnée à la Banque de poursuivre lobjectif de la stabilité des prix. Il pourrait y avoir conflit dobjectifs si la BCE était appelée à appuyer la politique économique en réduisant le chômage, par exemple, tout en devant en même temps maintenir la stabilité des prix. En outre, les taux de change seraient déterminés en partie dans larène politique, conformément aux lignes directrices énoncées par le Conseil des ministres (ECOFIN). Ici encore, il y a un risque de conflit dobjectifs pour la banque centrale. Bien que le gouvernement compte accroître la représentation régionale au sein du Conseil dadministration de la Banque du Canada, il ne parle pas dautoriser le Conseil à participer à la formulation de la politique monétaire. En ce moment, celle-ci est décidée par le Gouverneur de la Banque du Canada, après consultation du premier sous-gouverneur et avec les conseils du personnel de la Banque; le Conseil dadministration peut être consulté à propos de la situation économique régionale, mais il a peu dinfluence directe sur la politique monétaire du pays. Par contraste, la représentation régionale se ferait sentir beaucoup plus à la BCE. Le projet de loi pour la BCE indique que la politique monétaire dans la CE serait décidée par un vote majoritaire du Conseil de la Banque, qui comprendrait les douze gouverneurs des banques centrales nationales et les six membres du Conseil exécutif. Depuis les années 30, on sest rendu compte que les politiques commerciales égocentriques nuisent en dernière analyse à ceux qui les pratiquent. Bien quil soit théoriquement possible pour un grand pays daméliorer son sort en érigeant des barrières commerciales, ces gains peuvent être annulés si dautres pays emboîtent le pas; il en résulte une baisse de la production économique mondiale. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le Canada et dautres pays ont utilisé le GATT et des accords commerciaux séparés afin dabaisser les barrières internationales au commerce. Pourtant, malgré des progrès à léchelle internationale, le marché interne canadien demeure fragmenté par de nombreuses barrières commerciales inter-provinciales. Outre quelles sont un anachronisme maintenant que le pays progresse vers le libre-échange avec les États-Unis et le Mexique, les barrières intérieures sont coûteuses pour le Canada sur le chapitre des emplois et de la production économique. Les propositions du gouvernement canadien enchâsseraient dans la loi le principe de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux et interdirait les lois qui contreviennent à ce principe. Cependant, lexpérience de la CE montre quil ne suffit pas de transformer le principe des quatre libertés en loi pour supprimer les barrières intérieures; une approche active est également nécessaire. Par conséquent, la CE a introduit un programme législatif (« Europe 1992 ») qui vise directement les derniers obstacles au marché intérieur. Les propositions du gouvernement canadien admettent elles aussi que lajout dune clause de marché commun dans la Constitution pourrait ne pas viser toutes les barrières commerciales. Le gouvernement propose donc que le Parlement ait le pouvoir de passer des lois destinées à supprimer ces obstacles. (Le gouvernement a peut-être lintention dintroduire une espèce de programme « Canada 1992 » pour intégrer complètement le marché intérieur canadien.) Comme celles de la CE, ces lois seraient sujettes à ratification par une majorité spécifique dÉtats-provinces membres réunis en « Conseil ». Les propositions canadiennes admettent aussi des exceptions au principe des quatre libertés pour des motifs spécifiques dexpansion régionale ou de péréquation. De plus, les gouvernements pourraient soustraire une loi de lapplication de la clause du marché commun en la faisant déclarer dintérêt national par le Parlement et, par conséquent, sujette à ratification par sept des dix provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population. En outre, une province qui nest pas daccord avec des lois adoptées par le Parlement en vertu du pouvoir de la nouvelle union économique pourrait unilatéralement sen dégager par une déclaration appuyée par 60 p. 100 de lassemblée législative provinciale. Par contraste, les barrières commerciales au sein de la CE doivent être justifiées par des motifs précis, tels que la santé et la sécurité; à lheure actuelle, le traité instituant la CEE ne permet pas à une nation dexercer une option de refus, soit en obtenant laccord dune majorité des États membres, soit par un vote majoritaire de sa propre assemblée législative nationale. Cependant, le projet de traité pour lunion économique et monétaire permettrait aux États membres en difficulté financière de déroger temporairement à lapplication de la dernière étape de lunion, avec laccord du Conseil des Ministres. Les propositions canadiennes visant lamélioration de la réglementation des institutions financières sont empruntées du programme « Europe 1992 », qui a établi les principes de lharmonisation, de la reconnaissance mutuelle et du contrôle par le pays dorigine. Lapplication de ces principes, qui ont été adaptés au contexte canadien dans un rapport publié en mai 1990 par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce serait une étape significative de la réduction de chevauchement et de la duplication de la réglementation de notre pays. Comme la CE, le gouvernement canadien propose daméliorer la coordination et lharmonisation des politiques financières. Avec laccord des gouvernements provinciaux (sept provinces et 50 p. 100 de la population), le gouvernement canadien serait capable détablir des lignes directrices contraignantes en vue de limiter le recours, par les gouvernements, au financement au moyen de déficits. À linstar de la CE, un organisme serait chargé de la surveillance et de lévaluation de la politique macro-économique des gouvernements. En ce qui concerne la politique monétaire, le Canada possède déjà une banque centrale et une devise unique, choses que la CE se propose dintroduire. Le gouvernement canadien propose de confier à la Banque du Canada le but unique de parvenir à la stabilité des prix et de la maintenir. Même si ce but serait également lobjectif principal de la Banque centrale européenne, dautres buts, subordonnés au premier, et potentiellement conflictuels, sont aussi proposés. Une incertitude demeure quant aux pouvoirs que le gouvernement canadien sattend à voir exercer par les directeurs de la Banque du Canada en vertu des nouvelles règles. Le fait daccepter une représentation régionale plus efficace alignerait la Banque du Canada sur la Banque centrale européenne, où 12 des 28 membres du Conseil seraient des gouverneurs des banques centrales nationales nommés directement par chacun des États membres. Rien nindique, cependant, que le gouvernement canadien propose que le Conseil dadministration de la Banque du Canada joue un rôle actif dans la formulation de la politique monétaire, dans le sens proposé pour les membres du Conseil de la Banque centrale européenne. En conclusion, bien quil existe des différences considérables entre le système politique de la CE et celui du Canada, le gouvernement canadien a de toute évidence tiré des leçons des plans dintégration économique de la Communauté européenne. Non seulement les propositions du gouvernement renforceraient-elles le marché commun canadien en veillant à la concrétisation des quatre libertés, mais elles ouvriraient la porte à une pleine union économique grâce à la coordination et à lharmonisation des programmes fiscaux. À première vue, certaines propositions peuvent sembler radicales, mais lorsquelles sont examinées à la lumière des plans de la Communauté européenne qui, après tout, est une association dÉtats souverains, elles ne semblent pas exagérées. Belford, J. (éd.). Law and Practice under the GATT and Other Trading Arrangements The European Community: The Single Market. New York, Oceana Publications, 1989. Borchardt, Klaus-Dieter. Lunification européenne : création et développement. Luxembourg, Office des publications officielles des communautés européennes, février 1987. Brealey, Mark et Conor Quigley. Completing the Internal Market of the Suropean Community 1992 Handbook. London, Graham & Trotman, 1989. Buhart, Jacques et Dennis Burton. Legal Aspects of the Single European Market A Working Guide to 1992. London, Euromoney Publication PLC, 1989. Bulletin des communautés européennes, supplément 2/91. Conférences intergouvernementales : contributions de la Commission. 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