BP-337F

PROJET DE FUSION DES LIGNES AÉRIENNES
CANADIEN ET D'AMR : LA DÉCISION DE
L'OFFICE NATIONAL DES TRANSPORTS

 

Rédaction : 
Margaret Smith
Division du droit et du gouvernement
Juin 1993


 

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

COMPÉTENCE DE L'OFFICE

QUESTIONS EXAMINÉES PAR L'OFFICE

ANALYSE ET CONCLUSIONS DE L'OFFICE

   A. L'exigence de propriété canadienne

   B. La concurrence

   C. L'incidence sur le service aérien international

   D. La répercussion sur Gemini

   E. L'effet sur l'emploi

   F. L'incidence sur le développement économique régional

   G. Des services de transport accessibles

   H. La santé et la sécurité

CONCLUSION

 


PROJET DE FUSION DES LIGNES AÉRIENNES
CANADIEN ET D'AMR : LA DÉCISION DE
L'OFFICE NATIONAL DES TRANSPORTS

 

INTRODUCTION

Le 27 mai 1993, l'Office national des transports («l'Office») a conclu à l'unanimité que l'acquisition projetée, par Aurora Investments Inc. («Aurora»), filiale à part entière d'AMR Corporation («AMR»), d'une participation avec droit de vote de 25 p. 100 et d'un intérêt financier d'un tiers dans les Lignes aériennes Canadien International Ltée («Lignes aériennes Canadien») n'est pas contraire à l'intérêt public(1), pas plus que ne l'est la restructuration projetée des Lignes aériennes Canadien.

Dans le présent document, nous exposons les motifs de cette décision.

COMPÉTENCE DE L'OFFICE

En vertu de la Loi de 1987 sur les transports («la Loi»), les personnes qui désirent se porter acquéreurs d'un intérêt ou accroître leur intérêt dans une entreprise de transport au Canada doivent d'abord en informer l'Office national des transports, qui publie un avis de la proposition. Si l'Office ne reçoit pas d'avis d'opposition dans le délai réglementaire, il n'examine pas le projet d'acquisition. Par contre, s'il reçoit un tel avis, il est alors tenu de faire l'étude de la proposition.

Dans le cadre de son examen, l'Office doit décider si l'acquisition projetée est contraire à l'intérêt public au sens que lui donne la Loi, qui le définit en partie comme étant un intérêt conforme à la politique nationale des transports établie au paragraphe 3(1). Ce paragraphe établit que la politique nationale comprend la mise en place d'«[...] un réseau sûr, rentable et bien adapté de services de transport viables et efficaces [...]» et énumère les points dont l'Office doit tenir compte en regard de cette politique, y compris des exigences légales et constitutionnelles.

Selon l'une de ces exigences légales, les titulaires de licences canadiennes et de certaines licences internationales de transport aérien doivent être «Canadiens», au sens que donne à ce mot le paragraphe 67(1) de la Loi: «[...] Citoyen canadien ou résident permanent au sens de la Loi sur l'immigration; la notion englobe également les administrations publiques du Canada ou leurs mandataires et les personnes ou organismes, contrôlés de fait par des Canadiens, dont au moins soixante-quinze pour cent, ou tel pourcentage inférieur des actions assorties du droit de vote désigné par règlement du gouverneur en conseil sont détenues et contrôlées par des Canadiens».

Aux yeux de l'Office, l'exigence légale d'être Canadien est un facteur déterminant de l'intérêt public. Si, à son avis, l'acquisition projetée entraîne une perte de contenu canadien, aux termes de la Loi, l'Office doit déclarer la proposition contraire à l'intérêt public.

QUESTIONS EXAMINÉES PAR L'OFFICE

Dans le cas présent, l'examen de l'Office a porté sur l'acquisition projetée, par Aurora, d'une participation dans les Lignes aériennes Canadien, ainsi que l'acquisition projetée, par les Lignes aériennes Canadien, d'une participation dans trois des lignes d'apport de PWA Corporation («PWA»). Cette dernière transaction fait partie de la restructuration projetée de l'entreprise exigée dans la première transaction.

L'acquisition projetée, par Aurora, des Lignes aériennes Canadien repose sur une série complexe d'ententes et de plans, dont un accord d'actionnariat privilégié, une convention des actionnaires, une entente touchant la prestation de services et la commercialisation, un plan de réaménagement des effectifs, un plan de restructuration de la dette et de l'aide gouvernementale.

Dans le cadre de l'accord d'actionnariat privilégié projeté, moyennant le versement de 246 millions de dollars comptants, Aurora achèterait des actions avec droit de vote et sans droit de vote et acquerrait une participation avec droit de vote de 25 p. 100 ainsi qu'un intérêt financier d'environ un tiers dans les Lignes aériennes Canadien. Toutefois, Aurora ne pourrait détenir plus d'un certain pourcentage d'actions à droit de vote, de sorte que les Lignes aériennes Canadien demeurent canadiennes au sens de la Loi.

La convention des actionnaires porte sur la régie interne des Lignes aériennes Canadien. Entre autres choses, elle prévoit que les Lignes aériennes Canadien auraient un conseil d'administration composé de huit administrateurs, dont six seraient désignés par PWA (un de ces administrateurs représenterait les employés) et deux, par Aurora.

Certaines décisions de l'entreprise exigeraient l'approbation d'une majorité des administrateurs, tandis que d'autres auraient à être approuvées par une majorité d'entre eux, y compris par au moins un administrateur nommé par Aurora. Parmi les questions exigeant l'approbation d'un administrateur d'Aurora, on compte le plan d'immobilisations et de financement annuel de la société, la déclaration de dividendes excédant un certain montant, l'engagement à faire des dépenses d'immobilisations, la vente d'avoirs et les fusions, des placements en actions et des acquisitions. La convention comporte également des dispositions ayant trait au transfert des actions des Lignes aériennes Canadien.

Les Lignes aériennes Canadien et AMR signeraient une entente de prestation de services de 20 ans en vertu de laquelle AMR fournirait des services dans le domaine de l'établissement des prix et de la gestion de la production, de la planification de l'exploitation, de l'exploitation du service aérien international, de la fourniture d'aliments et de boissons, des réservations, des opérations au sol, de la planification de la capacité, des services techniques et des services comptables. Les Lignes aériennes Canadien auraient ainsi accès à la technologie, aux bases de données et aux systèmes de soutien de la gestion élaborés par AMR et American Airlines. Les Lignes aériennes Canadien pourraient mettre fin à l'entente touchant la prestation de services, à leur gré, durant cette période de 20 ans. Les Lignes aériennes Canadien et American Airlines pourraient également conclure des accords de réciprocité en matière de marketing afin de permettre aux passagers d'une ligne aérienne d'accumuler des points pour grands voyageurs de l'autre transporteur et d'utiliser les crédits ou de réclamer les prix en utilisant les services de l'autre transporteur.

La plupart des employés des Lignes aériennes Canadien ont adhéré à un plan d'investissement dans le cadre duquel une partie de leur salaire (jusqu'à concurrence de 207 millions de dollars étalés sur quatre ans) leur serait versée sous forme de droits d'acquisition d'actions ordinaires de PWA. Les conventions collectives seraient prolongées jusqu'au 31 mars 1995, et les augmentations salariales se limiteraient à des montants pouvant être contrebalancés par des gains de productivité.

Le plan de restructuration de la dette, s'il est approuvé par les créanciers, se traduirait par une réduction de la dette à long terme des Lignes aériennes Canadien, de ses obligations contractuelles de location-acquisition et de bail d'exploitation, ainsi que d'autres obligations.

Le gouvernement fédéral a garanti à PWA un prêt de 50 millions de dollars pour financer un fonds de roulement et d'autres frais d'exploitation; les gouvernements de l'Alberta et de la Colombie-Britannique ont également promis une aide financière.

ANALYSE ET CONCLUSIONS DE L'OFFICE

Comme nous l'avons déjà mentionné, l'Office devait décider si l'acquisition projetée était contraire à l'intérêt public. Il a donc étudié les critères suivants de détermination de l'intérêt public.

   A. L'exigence de propriété canadienne

Pour être réputé canadien aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi, le transporteur doit satisfaire à deux exigences. Tout d'abord, s'il s'agit d'une société, au moins 75 p. 100 de ses actions à droit de vote, ou un pourcentage inférieur précisé par le gouverneur en conseil, doivent être détenus et contrôlés par des Canadiens. Ensuite, le contrôle de fait doit être exercé par des Canadiens.

Pour ce qui est de la première exigence, l'Office a conclu qu'au moins 75 p. 100 des actions à droit de vote des Lignes aériennes Canadien seraient détenues et contrôlées par des Canadiens. Aurora détiendrait au plus 25 p. 100 des actions à droit de vote du transporteur, les 75 p. 100 qui restent étant détenus par PWA, qui demeurerait canadienne.

Ensuite, l'Office a cherché à savoir si le contrôle de fait des Lignes aériennes Canadien continuerait d'être exercé par PWA ou s'il serait transféré à Aurora. Il a donc étudié toutes les ententes faisant partie de la transaction projetée.

L'Office a conclu que l'acquisition projetée, par Aurora, d'un intérêt financier d'un tiers dans les Lignes aériennes Canadien ne représenterait pas, comme telle, un transfert du contrôle de fait à Aurora. Il a également jugé que le droit d'Aurora de désigner deux membres du conseil d'administration des Lignes aériennes Canadien était normal et raisonnable et qu'il ne faisait pas craindre que le contrôle passe à Aurora.

L'exigence selon laquelle certaines décisions affectant l'entreprise doivent être approuvées par un des administrateurs d'Aurora troublait quelque peu l'Office. S'agissait-il simplement de protéger l'investissement d'Aurora, ou cela reviendrait-il à transférer le contrôle à Aurora? Parmi les questions exigeant l'approbation d'Aurora, on compte le plan d'immobilisations et de financement annuel des Lignes aériennes Canadien, qui, entre autres, seraient tenues de présenter un échéancier mensuel de toutes les dépenses d'immobilisations et des mouvements de trésorerie et de l'endettement prévus. Elles seraient aussi obligées de faire approuver par Aurora les dividendes annuels excédant 5 millions de dollars et les dépenses d'immobilisations liées au service aérien dépassant 30 millions de dollars. Enfin, il leur faudrait obtenir un aval lorsque la somme annuelle réunie des dépenses d'immobilisations, de l'endettement, des ententes, des contrats, de la location de biens immobiliers, d'arrangements et d'engagements excède 50 millions de dollars.

L'Office a fait remarquer que les parties n'ont pas l'intention d'appliquer cette disposition aux charges d'exploitation courantes, ni à l'exploitation au jour le jour du service aérien. Tout en admettant qu'une telle exigence enlèverait une certaine marge de manoeuvre aux Lignes aériennes Canadien, il a estimé que cette restriction ne constituait pas un transfert de contrôle à Aurora.

La convention des actionnaires prévoit que PWA et Aurora auraient un droit de premier refus à l'achat de nouvelles actions des Lignes aériennes Canadien. De nouvelles offres seraient faites aux deux actionnaires en fonction de leurs portefeuilles courants. Chaque actionnaire aurait aussi un droit de premier refus à l'achat des actions de l'autre, mais Aurora ne pourrait pas détenir suffisamment d'actions à droit de vote pour enlever aux Lignes aériennes Canadien leur caractère canadien au sens de la Loi. L'Office a jugé que les droits réciproques de premier refus étaient des arrangements courants et qu'ils ne sous-entendaient pas l'exercice d'une «influence indue ou déterminante» par Aurora sur les Lignes aériennes Canadien.

L'Office a conclu que les ententes concernant les points pour grands voyageurs entre les parties ne soulevaient pas de questions de propriété.

Comme nous l'avons fait remarquer plus tôt, l'entente touchant la prestation des services entre les Lignes aériennes Canadien et AMR viserait essentiellement des systèmes informatisés de soutien, et les services conçus par American Airlines seraient destinés à aider les Lignes aériennes Canadien à gérer et à planifier leur exploitation. Les Lignes aériennes Canadien pourraient mettre fin à l'entente sur versement à AMR de tous les frais de lancement non récupérés, sur remboursement de toute réduction des coûts de capacité résultant de la perte du contrat et la valeur nette des bénéfices anticipés par AMR pour le reste de la durée du contrat. De plus, les Lignes aériennes Canadien seraient tenues de racheter les actions détenues par Aurora.

Un témoin s'est inquiété de ce que, en confiant la prestation de tels services à AMR, les Lignes aériennes Canadien se trouvent à céder une part du contrôle à AMR à l'égard de certaines fonctions névralgiques, puisqu'elles devraient se fier aux données fournies par celle-ci pour prendre leurs décisions. D'autres ont fait remarquer qu'il n'est pas inhabituel de confier de tels services à contrat et que cette pratique se répand parce qu'elle donne aux plus petites entreprises accès à des systèmes perfectionnés qu'elles ne pourraient mettre sur pied elles-mêmes.

L'Office a donc conclu que, bien que l'entente touchant la prestation des services accroisse, dans une certaine mesure, la dépendance des Lignes aériennes Canadien à l'égard d'AMR, cette dépendance était inévitable dans les circonstances et aurait été la conséquence de toute entente passée pour confier les services à contrat. L'Office a conclu que même s'il y aurait effectivement une certaine forme de dépendance, celle-ci ne serait pas si forte qu'elle constitue une cession du contrôle à AMR.

Par conséquent, l'Office a pu conclure que la série d'ententes composant la transaction entre les Lignes aériennes Canadien et Aurora n'entraînerait pas un transfert de contrôle de fait à Aurora; les Lignes aériennes Canadien demeureraient canadiennes au sens de la Loi.

   B. La concurrence

La politique nationale des transports précise que la prestation de services de transport viables et efficaces passe par la concurrence et le jeu des forces de marché.

L'Office a entendu de nombreux témoignages concernant l'effet qu'aurait la transaction projetée sur la concurrence. Ainsi, Air Canada a témoigné que cette transaction lui nuirait considérablement. D'aucuns ont prétendu que le Canada ne pouvait faire vivre deux transporteurs nationaux, alors que d'autres ont soutenu le contraire. Des porte-parole des Lignes aériennes Canadien ont dit estimer que, si l'acquisition par Aurora n'avait pas lieu, le transporteur aérien ferait probablement faillite.

L'Office a convenu qu'une faillite de Lignes aériennes Canadien était nettement une probabilité si elles ne pouvaient mener à terme la transaction conclue avec Aurora. De plus, si les Lignes aériennes Canadien fermaient leurs portes, il en irait de même pour la majorité de leurs lignes d'apport, et Air Canada, à moins de faire l'objet de contrôles ou de restrictions, dominerait le marché.

L'Office a examiné la possibilité que de nouvelles lignes aériennes puissent rivaliser avec Air Canada, mais il a conclu que toute nouvelle concurrence serait locale. L'Office a également estimé que la transaction avec Aurora ne menacerait pas la position d'Air Canada dans le secteur du transport transfrontalier.

L'Office a par conséquent conclu que la transaction avec AMR, en améliorant les perspectives financières des Lignes aériennes Canadien et en multipliant considérablement ses chances de survie, favoriserait la concurrence.

   C. L'incidence sur le service aérien international

On a prétendu que la transaction entre les Lignes aériennes Canadien et Aurora irait à l'encontre de l'intérêt public, car elle permettrait à American Airlines de mettre la main sur les réseaux des Lignes aériennes Canadien dans les pays du Pacifique. L'Office a fait remarquer, toutefois, qu'en vertu du droit canadien actuel, American Airlines ne pourrait acquérir un tel contrôle et il a donc conclu que la transaction projetée avec Aurora n'était pas contraire à l'intérêt public, dans l'optique du service aérien international.

   D. La répercussion sur Gemini

Vers la fin des années 80, Air Canada et les Lignes aériennes Canadien ont regroupé leurs systèmes informatisés de réservation, ce qui a donné naissance au réseau Gemini. Une entente subséquente a donné à Gemini le droit exclusif de gérer les systèmes internes de réservation des deux lignes aériennes. L'entente relative à Gemini comprenait aussi la création d'une société en commandite à laquelle participaient les deux lignes aériennes. Dans le cadre de la transaction projetée avec Aurora, toutefois, les Lignes aériennes Canadien seraient obligées de résilier leur contrat d'accueil passé avec Gemini ou encore de dissoudre la société en commandite et de confier ce contrat à SABRE, réseau appartenant à American Airlines.

Gemini a soutenu que ces dispositions seraient contraires à l'intérêt public et qu'elles lui causeraient un grand tort — perte d'emplois, paralysie du développement économique régional dans le secteur des télécommunications, perte de concurrence dans le secteur des systèmes de réservation informatisés et obstacle à la croissance de l'achalandage dans le secteur du transport aérien. Gemini a également prétendu qu'en cas de résiliation du contrat d'accueil avec les Lignes aériennes Canadien, elle perdrait les recettes d'accueil et les rentrées des agences de voyages, ainsi que sa «fonctionnalité» et la stabilité pour laquelle elle est bien connue sur le marché.

L'Office a conclu que la transaction avec Aurora aurait effectivement une incidence sur Gemini, mais qu'elle ne détruirait pas le réseau et que par conséquent, elle ne serait pas contraire à l'intérêt public.

   E. L'effet sur l'emploi

La transaction avec Aurora entraînerait la perte directe de 1 271 emplois aux Lignes aériennes Canadien, tandis que les effectifs d'AMR aux États-Unis augmenteraient d'environ 500. Si les Lignes aériennes Canadien devaient faire faillite, quelque 15 000 emplois seraient perdus.

L'Office a conclu que la disparition des Lignes aériennes Canadien entraînerait beaucoup plus de pertes d'emplois que l'entente touchant la prestation de services conclue avec AMR. Bien que d'autres emplois puissent être appelés à disparaître aux Lignes aériennes Canadien en raison de la fourniture d'autres services par AMR, l'Office s'est dit convaincu que la transaction projetée avec Aurora n'était pas contraire à l'intérêt public. Il a fait remarquer, cependant, qu'il suivrait de très près l'évolution des liens entre les Lignes aériennes Canadien et Aurora et qu'il s'opposerait à l'«impartition» supplémentaire de services, si elle était susceptible de se traduire par un transfert de contrôle à AMR.

   F. L'incidence sur le développement économique régional

Les opposants à la transaction ont soutenu qu'elle nuirait à certaines régions du pays. De plus, la rationalisation des réseaux défavoriserait, à leur avis, les personnes habitant dans de petites localités. D'autres ont laissé entendre que la région de Montréal perdrait des emplois si la transaction était approuvée car, pour maintenir sa compétitivité, Air Canada devrait, tôt ou tard, former une alliance avec un autre grand transporteur américain. Air Canada a, par ailleurs, soutenu que la transaction ferait baisser l'achalandage dans les aéroports canadiens.

Les parties à la transaction, par contre, ont soutenu que la survie des Lignes aériennes Canadien était essentielle aux économies régionales de certaines parties de l'Alberta et de la Colombie-Britannique. La disparition du transporteur entraînerait des pertes considérables d'emplois directs, et de nombreux autres seraient indirectement touchés.

L'Office a conclu que la disparition des Lignes aériennes Canadien nuirait à toutes les régions du Canada. À son avis, les régions comptant plus d'un service de transport aérien seraient probablement privées de concurrence, et les aéroports canadiens seraient sous-utilisés. Par conséquent, il a jugé que l'acquisition projetée n'est pas contraire à l'intérêt public, dans l'optique de son incidence sur le développement économique régional.

   G. Des services de transport accessibles

Des groupes représentant les personnes handicapées estimaient que l'acquisition réduirait le service à cette clientèle — les vols pourraient être réacheminés via les plaques tournantes américaines, et le nombre de vols directs diminuerait. De la sorte, les personnes handicapées auraient, selon eux, à consacrer plus de temps à leurs déplacements, ce qui aggraverait leurs problèmes de santé. L'Office a conclu, cependant, que la transaction ne créerait pas d'obstacles pour les personnes handicapées.

   H. La santé et la sécurité

Selon certains témoins, la transaction susciterait des préoccupations en matière de santé et de sécurité. L'Office a fait remarquer qu'aucune preuve ne lui avait été présentée pour établir que les Lignes aériennes Canadien avaient l'intention de confier la maintenance des aéronefs à contrat à American Airlines. Il a indiqué que rien, par ailleurs, n'a établi que, même si l'impartition avait lieu, les normes de sécurité seraient compromises. L'Office a donc conclu que la transaction projetée n'était pas contraire à l'intérêt public, du point de vue de la santé et de la sécurité.

CONCLUSION

Aux termes de la Loi, le Conseil des ministres peut revenir sur une décision de l'Office. Une requête en ce sens, présentée par Air Canada, a cependant été rejetée.

Bien que cette décision donne le feu vert à la transaction entre les Lignes aériennes Canadien et AMR, cette dernière ne la conclura pas tant et aussi longtemps que les Lignes aériennes Canadien n'auront pas coupé tous les liens avec Gemini. Une décision rendue par le Tribunal de la concurrence à cet égard est actuellement en appel. Entre-temps, les Lignes aériennes Canadien tentent de régler à l'amiable avec leurs partenaires de Gemini.


(1) AMR Corporation est une société anonyme des États-Unis. Sa principale filiale est American Airlines Inc. qui exploite le système informatisé de réservation SABRE.