BP-421F
LA RÉVOLUTION DE L'INFORMATION
ET LES
Rédaction :
TABLE
DES MATIÈRES
LES
SOCIÉTÉS TRANSNATIONALES ET LES LES
RÉSEAUX PLANÉTAIRES : INVESTISSEMENT ÉTRANGER DIRECT LE
RÉGIME DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX ET LACCORD GÉNÉRAL LES
NORMES TECHNIQUES ET LUNION INTERNATIONALE DES
LA RÉVOLUTION DE LINFORMATION
ET LES
Les technologies employées par les sociétés de télécommunications et de télévision par câble, au Canada et ailleurs, se transforment rapidement. Les services que ces sociétés offrent évoluent aussi, par voie de conséquence. Les entreprises nont plus exclusivement recours, comme moyens de transmission, aux câbles coaxiaux ou en fil de cuivre. De plus en plus leurs réseaux sont faits de câbles à fibre optique, qui acheminent linformation par lumière pulsée, et de réseaux sans fil, qui utilisent le spectre électromagnétique. LInternet, un réseau de réseaux informatiques offrant une foule de nouvelles applications époustouflantes, révolutionne lui aussi la transmission de linformation en complétant les réseaux de communications classiques et en rivalisant avec eux. Ces développements technologiques favorisent également la mondialisation du commerce. Associés aux nouveaux moyens de transport relativement bon marché, les services et les technologies de communication de pointe amènent une multiplication des échanges commerciaux au-delà des frontières nationales. De plus, une fraction disproportionnée de ces échanges sont réalisés par des sociétés multinationales ou, plus précisément, transnationales, dont les décisions en matière dinvestissements semblent de plus en plus être prises en fonction de motifs économiques plutôt que des accidents de lhistoire ou de la géopolitique. Ce contexte nouveau recèle pour le Canada un lourd défi : celui de maintenir sa compétitivité internationale malgré les menaces qui pèsent sur sa part sectorielle traditionnelle des investissements. La « révolution de linformation » peut savérer une lame à deux tranchants. Ce défi ne concerne pas uniquement les personnes physiques ou morales, mais également le gouvernement fédéral qui, à titre de responsable exclusif des télécommunications et de la radiodiffusion au Canada, doit mettre en place des lois qui correspondent aux conditions sociales, culturelles, politiques et économiques existantes. La disparition des technologies qui caractérisent les situations de « monopole naturel » et la restructuration des activités de télécommunications et de radiodiffusion en fonction dun contexte mondial, plutôt que national, suppose une réforme correspondante des politiques gouvernementales. Celles-ci doivent dorénavant offrir de nouvelles règles de base aux sociétés de télécommunications et de télédistribution quelles soient en place depuis un certain temps ou nouvellement arrivées sur le marché qui exercent des activités à la fois sur les scènes nationale et internationale. Cette formulation des politiques est dune importance extrême. Dans le présent document, nous brossons un tableau des nouvelles télécommunications internationales et offrons quelques réflexions sur la réponse des institutions politico économiques et les faits nouveaux qui sy rattachent à léchelle internationale. LES
SOCIÉTÉS TRANSNATIONALES ET Les avancées technologiques récentes dans le domaine des télécommunications, ainsi que les avions améliorés, les réseaux aériens libéralisés et restructurés « en étoile », les alliances entre transporteurs aériens et terrestres internationaux (partage de dénominations, harmonisation des programmes pour grands voyageurs) et les conteneurs pour transport intermodal contribuent tous à la mondialisation des marchés(1). Il importe également de citer les grands catalyseurs de la révolution de linformation. Celle-ci, qui nous mène vers une société axée sur linformation, ne sera certainement pas la moindre des révolutions sociales que lhumanité ait connues. La Révolution industrielle sest accompagnée de changements institutionnels : statuts de régie dentreprise, règles concernant la responsabilité limitée, libéralisation des codes de liberté contractuelle, apparition dun marché des valeurs mobilières et regroupement des capitaux matériels et financiers, qui visaient à profiter des nouvelles techniques de production fondées sur les économies déchelle. Ce sont les entreprises modernes qui ont constitué le principal outil de coordination de ces progrès. Toutefois, le fait que les réseaux de chemins de fer et de communications aient été restreints aux marchés nationaux et, à certains égards, assujettis à des conditions de monopole naturel a imposé des limites à cette révolution. Ainsi les réseaux internationaux de transports et de communications sont nés dun « collage » de réseaux des pays développés sur une grille internationale aux articulations minimales et monopolistiques. Manifestement, cette structure naccordait pas grande importance à lefficience économique. Ce sont dautres pressions économiques et politiques qui allaient rectifier la situation. Depuis quelque temps, toutefois, les innovations en matière de transports et de communications ont forcé la production à léchelle des entreprises à déborder les limites des marchés nationaux et des monopoles naturels. Par exemple, les services de transmission de la voix et des données, ou encore les divertissements, anciennement chasses gardées respectives des compagnies de téléphone, de satellite et de télévision par câble, peuvent aujourdhui être assurés sur les installations des uns ou des autres, depuis que tous ces secteurs ont adopté les technologies numériques. La disparition des limites traditionnelles entre les télécommunications, la télévision par câble et linformatique annonce la convergence des services de transport de linformation sur une même « autoroute de linformation ». Nous assistons à la disparition du monopole naturel avec linstauration dune compétition indirecte, principalement attribuable aux technologies nouvelles de transmission. La concurrence directe ne pourra sexercer quaprès une déréglementation totale. De plus, les technologies les plus récentes en matière de télécommunications facilitent lapparition (certains disent la réapparition) de canaux de distribution dun nouveau genre, comme la publicité directe, les nouvelles stratégies de marketing et de vente et les systèmes de vente au détail directement à lentrepôt. Les sociétés peuvent ainsi mieux profiter des systèmes nouveaux « stockage au moment adéquat », échanges de données électroniques et réservations davion informatisées, ainsi quachats et transactions bancaires électroniques) pour améliorer la chaîne de distribution traditionnelle « fabriquant-grossiste-détaillant » ou pour la contourner lorsque cest possible économiquement. Les systèmes de distribution plus directs, rendus possibles par les technologies modernes de linformation, transcendent évidemment les frontières nationales et permettent de ménager des économies qui contribueront très certainement à la compétitivité du secteur des affaires. Ces innovations, associées aux changements institutionnels citons notamment la réussite des négociations de lUruguay Round et la conclusion du nouveau GATT (Accord général sur les tarifs et le commerce) et la signature de lALÉNA (Accord de libre-échange nord-américain) donnent un élan au commerce, à la concurrence et aux échanges internationaux et augmentent la richesse des pays. Ainsi, aujourdhui, les sociétés de pointe font lacquisition de leurs intrants de production à léchelle du monde, profitant à la fois des prix les plus bas, de la meilleure qualité et de la plus haute fiabilité. Elles ont également recours au stockage en temps adéquat et aux systèmes de fabrication flexibles(2) pour produire et mettre en marché de manière plus efficace des marques de commerce fondées sur des produits de sociétés mères, dans un marché international dont les goûts sont très hétérogènes. La reconnaissance des marques de commerce peut vraisemblablement devenir internationale maintenant que les services de radiodiffusion peuvent être offerts sur les marchés mondiaux plus économiquement. Prises ensemble, ces techniques de marketing et de production restructurées rendent les communications intrasociétés et intersociétés plus cruciales que jamais. Il en résulte une augmentation du commerce international et intrasociété, particulièrement dans le secteur des services de télécommunications. En 1993, le trafic international des télécommunications a atteint 47,7 milliards de minutes. Cela ne représente guerre plus de neuf minutes par personne à léchelle mondiale, mais 46,5 minutes si lon ne tient compte que des pays à revenu élevé. Le plus important toutefois, cest peut-être le fait que le taux annuel moyen composé de croissance des télécommunications internationales sest établi à 14 p. 100 au cours de la période 1983-1993 soit une augmentation environ deux fois plus importante que celle des télécommunications nationales dans la plupart des pays industrialisés(3). En valeur marchande, les pays de lOrganisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont tiré des télécommunications internationales des recettes de lordre de 35,9 milliards de dollars US en 1992, soit environ 9 p. 100 des recettes totales des transporteurs de télécommunications dans ces pays(4). Manifestement, ces statistiques permettent de constater que les nouvelles technologies des télécommunications poussent les institutions politico-économiques à la mondialisation. LES
RÉSEAUX PLANÉTAIRES : INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS DIRECTS La mort des monopoles naturels dans les services de télécommunications a également amené de nombreux pays à libéraliser graduellement leurs marchés nationaux, cest-à-dire à déréglementer les prix et laccès aux marchés et à privatiser les anciennes compagnies publiques de téléphone. Ces politiques favorisant la concurrence ont ouvert beaucoup de débouchés à de nouvelles sociétés qui, à leur tour, ont provoqué une demande de services plus nombreux et nouveaux. Si les nouveaux venus dans lindustrie sont dorigine nationale, les concurrents nationaux nouveaux les plus importants et les plus imposants sont les sociétés de télécommunications ayant leur siège à létranger. Il faut se rappeler que les sociétés nationales constituent une source de capitaux plus coûteuse à cause du risque financier plus grand quelles supposent et parce quelles sont souvent encombrées par une courbe dapprentissage gestionnel marquée et prolongée. Les sociétés ayant leur siège à létranger, en revanche, avec des investissements directs et indirects, ainsi quhorizontaux et verticaux, apportent quasi immédiatement une concurrence effective dans le pays daccueil. Grâce à linvestissement étranger direct (IED), la société créée dans le pays daccueil reçoit des capitaux, lesquels saccompagnent généralement dune technologie importée, de divers degrés de savoir-faire technologique et dune expérience de gestion. Il sagit là dun capital actif et concret, par opposition au capital institutionnel passif, de sorte que ces liens de grande valeur sont généralement en corrélation directe avec le niveau de propriété étrangère en cause. Dans les télécommunications, linvestissement indirect, le plus souvent, signifie une alliance, mais il comporte parfois une participation en capital par le truchement dune coentreprise. Dans le cas dun investissement horizontal, lIED ou lalliance ne prévoirait que des services conjoints complémentaires de télécommunications, tandis quun investissement vertical pourrait comprendre un contenu multimédias et des services de distribution, du matériel de télécommunications ou des produits électroniques (matériel et logiciel). De tels investissements apportent de nombreux avantages au pays daccueil. Par exemple :
Laccès à un marché étranger offre à la société investisseuse des avantages à la fois stratégiques et non stratégiques en matière doffre et de demande. Les investissements axés sur le marché facilitent généralement une prestation offerte directement au client plutôt que par lentremise dune tierce partie. De plus, les sociétés reçoivent des subventions du pays daccueil sous la forme dun traitement réglementaire plus favorable que celui qui est accordé aux grandes sociétés nationales de téléphone. Les investissements axés sur les coûts permettent généralement de répartir plus largement les dépenses de recherche-développement et déviter les quotes-parts de répartition excessives et discriminatoires(6). La grande force motrice des alliances internationales est apparemment la demande croissante de services de communications « sans coupure » à léchelle mondiale. Les sociétés transnationales cherchent à remplacer leurs réseaux privés de télécommunications internes dont on a dit quils formaient une mosaïque de services distincts mais semblables procurés au moyen de matériels de transmission incompatibles avec ceux des pays daccueil, construits en fonction de normes différentes. Les alliances entre les compagnies de télécommunications mondialement connues, qui rattachent leurs produits et services complémentaires, permettent aux sociétés transnationales dacheter au même endroit des produits et services de communications internes et externes, qui sont intégrés sur le plan des systèmes et relativement peu compliqués à utiliser. Certains observateurs citent également des avantages liés à une protection contre les variations des taux de change, qui est implicite lorsque les prix sont fixés dans une seule devise(7). La société Bell Canada Limitée explique comme suit son alliance dans le groupe « Concert », dont le point de départ est MCI et British Telecom (BT) :
La figure 1 présente
un organigramme de lalliance Concert. Source : TeleGeography, Inc., TeleGeography 1995 : Global Communications Traffic Statistics & Commentary, p. 10. La société AT&T Canada déclare ce qui suit au sujet de son partenariat, WorldPartners, dont lorganigramme est présenté à la figure 2 :
La troisième des alliances dirigées par les grandes sociétés internationales est la Phoenix Alliance, dirigée par la société Sprint. Son organigramme est présenté à la figure 3. Normalement, une alliance internationale ne devrait pas réunir des sociétés de grande et de petite taille. Toutefois, cela ne signifie pas que les alliances internationales soient réservées aux géants de lindustrie, ni quelles doivent être absolument denvergure mondiale. La société Clearnet Communications Inc. semble avoir réussi à constituer un partenariat continental :
Source: TeleGeography, Inc., TeleGeography 1995: Global Communicaitons Traffic Statistics & Commentary, p. 8. Source : TeleGeography, Inc., TeleGeography 1995: Global Communications Traffic Statistics & Commentary, p. 12. LE
RÉGIME DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX ET LACCORD GÉNÉRAL Laugmentation de la demande en télécommunications internationales et la libéralisation des télécommunications nationales forcent les pays, particulièrement ceux qui ont des sorties nettes annuelles persistantes de biens, à examiner le régime actuel des échanges en matière de télécommunications. À ce sujet, il est intéressant dexaminer lhistoire des télécommunications internationales. Dès le début, ces dernières ont été considérées comme un prolongement des télécommunications nationales. Tout ce qui touchait aux interconnexions, aux normes techniques et aux tarifs constituait la chasse gardée de lUnion internationale des télécommunications (UIT). LUIT, qui fait maintenant partie du système de Nations Unies (ONU) et qui compte beaucoup plus de membres signataires que lONU elle-même, a été formée, en 1932, par la fusion de lUnion télégraphique internationale (la plus ancienne organisation internationale encore en existence puisquelle date de 1865) et de la Convention radiotélégraphique internationale. Les politiques relatives aux télécommunications internationales se sont donc élaborées dans une atmosphère de consultation et de coopération entre les ministères et organismes des États membres de lUIT. Les fonctionnaires de lUIT nétaient pas spécialistes du commerce, mais des spécialistes des télécommunications. Ils nont donc pas accordé la primauté aux grands enjeux du commerce international, mais aux régimes réglementaires intérieurs et aux politiques nationales relatives aux télécommunications. Cest ainsi que les télécommunications internationales en sont venues à refléter les objectifs réglementaires des États membres de lUIT, lesquels étaient dictés par les conditions économiques qui régnaient lorsque les techniques restaient assujetties aux monopoles naturels et aux externalités de réseau(11). Généralement, les compagnies nationales de téléphone monopoleuses, supervisées par des organes de réglementation nationaux, fixaient donc les prix des télécommunications internationales en fonction dune politique voulant que les services interurbains soient financés par les services locaux, seules les quotes-parts de répartition étant négociées avec les États membres de lUIT. Bref, les taxes de perception, en raison notamment des quotes-parts de répartition, sont excessives et discriminatoires(12). En effet :
Une importante déréglementation se produit actuellement dans de nombreux pays. Les figures 4 et 5 montrent nettement que les forces de la concurrence ont fait baisser les tarifs des services internationaux. Les tarifs des clients professionnels dans les pays de lOCDE qui ont laissé jouer la concurrence dans leurs marchés des télécommunications ont baissé en moyenne de 8,6 p. 100 entre 1990 et 1994, entraînant les tarifs correspondants des pays non déréglementés, lesquels sont tombés de 3,1 p. 100. En revanche, les tarifs résidentiels moyens nont diminué que de 3,1 p. 100 dans les pays libéralisés de lOCDE, tandis quils ont augmenté de 8,7 p. 100 dans les pays non libéralisés. Il importe de signaler dautres changements importants : plus la distance parcourue par lappel est grande plus le déclin du prix international est important; le rapport entre les redevances dutilisation et les redevances fixes a diminué dans les pays où les redevances totales ont décliné et il a augmenté dans ceux où les redevances totales sont plus élevées. Si ces contournements aboutissent, dans une certaine mesure, à des structures internationales de prix plus rationnelles, ils ne suffisent pas. Autrement, nous ne verrions pas de différence de prix importante et persistante entre les pays où le marché des télécommunications est libéralisé et ceux où il ne lest pas. Ces derniers ne sont pas motivés à réformer leurs tarifications internationales. En effet, leurs compagnies de téléphone monopoleuses continuent de rapporter gros grâce à des prix élevés et à des quotes-parts de répartition avantageuses, car leurs réseaux téléphoniques sont indispensables pour effectuer les raccordements. De plus, les procédures de lUIT prévoient des négociations secrètes et bilatérales sur la production en coopération de services internationaux de télécommunications, les revenus étant partagés par les fournisseurs des États membres. Ces méthodes rendent improbables lapparition dun mouvement de rationalisation des prix.
Source : OCDE, Perspectives des communications 1995, p. 74 et 76.
Certes, les politiques de ce genre semblaient logiques à lépoque des monopoles, mais elles subissent de grandes pressions dans lactuel contexte de concurrence mondiale. Avec lapparition du choix et de la concurrence dans le domaine des télécommunications, les contournements antiéconomiques apparaissent comme un moyen dépingler les taxes de perception et les quotes-parts de répartition qui ne sont pas proportionnées aux coûts des services. Les stratégies du « rappelle-moi » que les consommateurs utilisent, généralement à lintérieur des familles ou des compagnies, ainsi que les services « appelez chez vous directement » et « un chez-vous ailleurs » offerts par de nombreuses compagnies visent à éviter les prix excessifs. Donc, les télécommunications se font de manière antiéconomique, et tous les consommateurs, quils proviennent de pays libéralisés ou réglementés, en souffrent. Cela signifie que les avantages commerciaux non-exploités ne pourront être tirés que dans un forum plus vaste qui englobera dautres biens et services. Lendroit approprié pour réformer les politiques tarifaires en matière de télécommunications internationales est la table des négociations sur lAccord général sur le commerce des services (appelé GATS, pour General Agreement on Trade in Services) élaboré dans le cadre de lOrganisation mondiale du commerce (OMC). Le GATS donne aux pays la possibilité de moduler la portée, lampleur et le rythme du commerce international des télécommunications, par le truchement du groupe de négociation sur les télécommunications de base (NGBT), qui regroupe des pays de lOCDE et plusieurs grands pays en voie de développement. Le NGBT pourrait servir dinstance pour lélaboration dententes multilatérales sur lélargissement du régime commercial en matière de services de télécommunications. On pourrait y étudier des questions comme laccès aux marchés, le traitement du client le plus favorisé et la transparence dans la réglementation. Le délai prévu pour la conclusion de lentente a récemment été prolongé dun an; la date limite est maintenant le 30 avril 1997. Pour le Canada, un accord multilatéral offrirait trois avantages par rapport à un accord régional, comme lALÉNA. Premièrement, les chances de résoudre les déséquilibres commerciaux avec les pays dont on sait quils perçoivent des quotes-parts de répartition excessives seraient meilleures. Deuxièmement, les participants profiteraient dun pouvoir de négociation plus équilibré, cest-à-dire que le poids proportionnel des États-Unis diminuerait dans les accords bilatéraux ou régionaux. Troisièmement, le Canada serait mieux placé pour obtenir la réalisation de son vieux souhait : léquivalence approximative ou la réciprocité sélective (plutôt que la réciprocité identique ou symétrique), pour ce qui concerne la concurrence effective et léquité dans les échanges. Les États-Unis, dont les compagnies de téléphone sont beaucoup plus grosses, ont toujours prôné le contraire. LES
NORMES TECHNIQUES ET LUNION INTERNATIONALE La perspective dune autoroute de linformation omniprésente repose sur la possibilité dinterconnexion et dinteropérabilité des systèmes et réseaux, qui elle-même sappuie sur des normes internationales convenues pour certains aspects techniques (et non tous) de ces systèmes et réseaux. À lheure actuelle, les installations et réseaux de télécommunications ne se rendent pas tous partout. Il est vrai que la plupart des réseaux téléphoniques nationaux sont interconnectés et interopérables. Un appel téléphonique lancé au Canada sur un appareil Touch-Tone, connecté à un commutateur numérique au Canada, et passant par un central manuel pour atteindre un poste téléphonique à cadran dappel dans une campagne chinoise est possible. La même chose est vraie dInternet et de nombreux systèmes téléphoniques nationaux de lensemble du monde. Les systèmes de télévision par câble ne sont pas tous interopérables, toutefois. De même, les produits et services multimédias ne sont pas tous interchangeables et les ordinateurs IBM et Apple ne sont pas tous interconnectables. Les réseaux mondiaux de télécommunications doivent reposer sur des normes internationales établies par une instance qui regroupe, dans lidéal, tous les pays désireux dutiliser une autoroute de linformation nationale. Il faut que ces normes soient élaborées rapidement afin de réduire la possibilité que des avantages et des désavantages techniques permanents ne surgissent pour certains participants de lindustrie. Les normes doivent être claires et souples, de manière à pouvoir saccommoder des nouveaux types dinformation et des progrès. Malheureusement, aucun organisme ne peut à lui seul assumer une telle mission. Même la simple fixation des normes relatives aux nouveaux matériels de télécommunications sest avérée trop difficile pour une seule institution. À lheure actuelle, un certain nombre dorganismes travaillent dans ce domaine. LOrganisation internationale de normalisation et la Commission électronique internationale sont deux organisations industrielles internationales indépendantes reconnues par les Nations Unies comme organes consultatifs pour létablissement de normes relatives à linterconnexion des ordinateurs. Le TINA (Telecommunications Information and Networking Architecture consortium), le Digital Video Broadcasting Group et le Digital Audio Visual Council participent tous à lélaboration de normes pour les interfaces multimédias. Quant au Groupe dexperts pour le codage dimages animées (MPEG), il élabore les normes relatives à la compression numérique. Depuis ses premiers balbutiements, il y a plus dun siècle, lUIT et les organismes qui lont précédée ont réussi à fixer les normes relatives aux télécommunications internationales. Pendant la majeure partie du XXe siècle, toutefois, ce rôle nétait guère prioritaire, car lévolution technologique était relativement lente. Lorsque le contexte dans lequel fonctionnait lUIT était composé dun ensemble de monopoles nationaux, dans lesquels les services internationaux finançaient les services locaux, lorganisme se contentait dexaminer létablissement des normes une fois tous les quatre ans. Sa réglementation ne visait à normaliser que les interfaces et les frontières entre les matériels de télécommunications dédiés. Souvent, ces règlements volontaires étaient adoptés en cas de nécessité seulement et sur la base du plus petit commun dénominateur jugé acceptable par les États membres. Dans de telles circonstances, lUIT a réussi à être la première institution internationale de fixation des normes en matière de télécommunications, comme le prouve létendue de ladhésion à ses normes. Toutefois, au cours des deux dernières décennies, lUIT na pas su sadapter suffisamment rapidement au rythme de lévolution des télécommunications, en tout cas pas assez pour répondre aux besoins de certains de ses membres, particulièrement les pays qui ont libéralisé leurs marchés. Dun seul coup, il aurait fallu des normes améliorées et nouvelles; cest encore vrai aujourdhui et ce le sera demain. La structure administrative et la vaste diversité politique des membres savèrent un handicap pour lorganisme, qui na pas su répondre à la demande. Cest ainsi que sont nées de très compétentes organisations régionales de normalisation (ORN), comme lInstitut européen des normes de télécommunications (ETSI), le Comité T1 de lExchange Carriers Standards Association (T1) des États-Unis et le Comité de la technologie des télécommunications (TTC) du Japon. Elles assument le rôle traditionnel de lUIT. Ces ORN présentent plusieurs avantages par rapport à lUIT, car elles fixent les normes rapidement et de manière fiable, en grande partie grâce à leur taille plus petite et à lhomogénéité de leur composition. De plus, elles se sont montrées capables de sentendre sur des normes communes en se réunissant et en concluant des ententes à lextérieur de lUIT. Lors de sa conférence plénipotentiaire de 1992, à Kyoto (Japon), lUIT a donné des signes visibles dune possible réforme. Les États membres ont adopté un plan stratégique quinquennal qui fixait les priorités de ses trois nouveaux bureaux internes, fruits dune réorganisation : Radiocommunication, Développement et Normalisation. Par-là, lorganisme reconnaissait : la nécessité de sorienter davantage vers le client; le fait que lévolution technologique rapide est véritablement en train de forger un réseau planétaire global; et le fait que le milieu daction sest élargi de manière à englober toute lindustrie des communications, y compris des alliances de compagnies de télécommunications, dont le but est de fournir des services planétaires concurrentiels sans coupure. LUIT a réorganisé son processus de normalisation : désormais la production dune norme ne demande que 18 mois, en moyenne. Au cours des trois dernières années, lUIT a abattu un travail équivalant en gros à celui quelle avait accompli au cours des 20 années précédentes(14). Ces progrès permettent denvisager que lUIT soit maintenant en mesure de répondre aux forces de la concurrence. Qui plus est, il semble que WorldTel, un établissement bancaire créé en 1995 sous les auspices de lONU avec un capital initial de 50 millions de dollars US, commencera à investir sur une base commerciale afin de mettre en place des installations de télécommunications modernes dans les pays du tiers monde. WorldTel, appuyé par beaucoup de grandes compagnies de téléphone des pays industrialisés, devra obtenir la collaboration des organismes de télécommunications situés dans les pays membres de lUIT avant de procéder à un investissement. Cela devrait permettre dalléger considérablement les inquiétudes des pays en voie de développement qui, jusquà maintenant, freinent les efforts que fait lUIT pour établir à point nommé les normes que demande lautoroute de linformation. Il semble néanmoins que la prééminence de lUIT en matière de normalisation soit révolue à jamais. Les ORN mettront toujours moins de temps à établir des normes, parce quelles sont au service dintérêts moins nombreux et moins larges. Ces intérêts peuvent être considérés comme un tendon dAchille, toutefois, puisque la concurrence à lintérieur et entre les ORN peut prendre une place démesurée, si les participants à une ORN estiment pouvoir tirer un avantage particulier en ne coopérant plus. Cela peut se produire même si ladoption dune norme commune suppose un avantage collectif pour tous les participants. Seule une organisation comme lUIT peut surmonter un tel problème. Malgré son passé en dents de scie, lUIT devrait pouvoir récupérer une place de premier plan sur la scène de la normalisation, en trouvant son créneau stratégique, grâce à son leadership et à la réputation quelle a acquise en réussissant à recueillir la coopération des ORN. Allison and Humphreys et al. Global Telecoms Business Yearbook 1995. 1995. 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(6) La compagnie du téléphone qui est à lorigine dun appel international impose son propre tarif aux clients, lequel dans lindustrie sappelle taxe de perception. Comme la première compagnie du téléphone a besoin de passer par une compagnie étrangère pour « raccorder » (compléter) lappel, elle doit verser une redevance à la seconde compagnie. Cettre redevance, qui, souvent, est négociée bilatéralement entre les États membes de lUIT, sappelle « quote-part de répartition ». Habituellement, elle est partagée à raison de 50/50, malgré le fait que le coût du lancement dun appel est plus élevé que sa conduite à terme. (7) Hudson Janisch et David Ujimoto, Foreign Ownership and International Alliances: Implications for Domestic Regulation, manuscrit inédit, novembre 1995, p. 4. (8) Bernard Courtois, Bell Canada Limitée, Sénat du Canada, Délibérations du comité sénatorial permanent des transports et des communications, Première session de la trente-cinquième législature, 1994-1995, fascicule no 36, p. 17. (9) James Meenan, Société AT&T Canada, Sénat du Canada, Délibérations du comité sénatorial permanent des transports et des communications, Première session de la trente-cinquième législature, 1994-1995, fascicule no 35, p. 5. (10) Robert C. Simmonds, Clearnet Communications Inc., Sénat du Canada, Délibérations du comité sénatorial permanent des transports et des communications, première session de la trente-cinquième législature, 1994-1995, fascicule no 33, p. 8 et 15. (11) Un avantage dont profitent les membres existants dun réseau par suite de ladjonction dautres membres est appelé avantage économique externe ou «externalité positive». Dans lintérêt de lefficience économique, cette externalité peut représenter une condition nécessaire pour lintervention dun gouvernement. Une telle intervention, quelle quen soit la forme, devrait être linstrument le moins coûteux pour obtenir les objectifs visés, lesquels tiendraient également compte des contrats conclus avec le secteur privé; lavantage économique externe ne pourrait être inférieur à ce coût. (12) Voir OCDE, Tarifs des télécommunications internationales : pratiques et procédures de taxation, 1994. (13) Michael Kedar, GeoReach Telecommunications Inc., Sénat du Canada, Délibérations du comité sénatorial permanent des transports et des communications, Première session de la trente-cinquième législature, 1994-1995, fascicule no 32, p. 6 et 7. (14) Donald J. MacLean, «A New Departure for the ITU, An Inside View of the Kyoto Plenipotentiary Conference», Telecommunications Policy, vol. 19, no 3, 1995, p. 186. |