BP-442F
LES CIBLES EN MATIÈRE D'INFLATION
Rédaction :
TABLE DES MATIÈRES
LOPPOSITION À TOUT NOUVEL ABAISSEMENT DES CIBLES FIXÉES A. Maintenir les cibles courantes B.
Relever les cibles LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA STABILITÉ DES PRIX A. Les avantages de la stabilité des prix B. Les coûts de la stabilisation des prix POURQUOI LA TRANSITION À UNE FAIBLE INFLATION A ÉTÉ SI COÛTEUSE
LES CIBLES EN MATIÈRE DINFLATION APRÈS 1998 :
La Banque du Canada et le gouvernement du Canada se sont engagés à garantir la stabilité des prix dans le cadre de leur politique monétaire, et la Banque sefforce à lheure actuelle de maintenir entre 1 et 3 p. 100 par année le taux dinflation « de base ». De nouveaux objectifs en matière dinflation devront bientôt être fixés, les objectifs actuels venant à échéance à la fin de 1998. La Banque et le gouvernement doivent sentendre sur une définition plus concrète de la stabilité des prix et se doter des moyens dy parvenir. Au moment de se fixer un ensemble dobjectifs en matière dinflation, la Banque et le gouvernement devront se demander si la politique actuelle a bien servi les Canadiens, sil est possible de laméliorer en sorientant plus rapidement vers une stabilité des prix ou si cette politique était erronée et sil faut, par conséquent, en changer. Il est indéniable que la mauvaise performance du Canada sur le plan macro-économique au cours des années 90 entrera en ligne de compte : sagit-il du résultat dune mauvaise politique monétaire? du coût temporaire dune politique essentiellement bonne? du coût inutile dune politique dont la mise en oeuvre est déficiente? ou dune conséquence qui na rien à voir avec la politique monétaire? Il nest pas facile dapporter des réponses à ces questions, et la politique monétaire est une question qui reste très controversée. Certains, tel lancien gouverneur de la Banque du Canada, John Crow, insistent pour que lon finisse la tâche entreprise en réalisant une véritable stabilité des prix. Dautres, tel le professeur Pierre Fortin, demandent aux responsables de cette politique de reconnaître quils ont commis une erreur grave et coûteuse et veulent quils laissent linflation croître légèrement de manière à retrouver une partie des emplois perdus en raison des mesures imposées à léconomie canadienne par la Banque du Canada. Dans cette étude, nous faisons état du débat qui a lieu à lheure actuelle au pays en matière de politique monétaire et de ses conséquences sur lavenir de la politique monétaire de la Banque. LOPPOSITION À TOUT NOUVEL ABAISSEMENT DES CIBLES FIXÉES Nous examinons ci-dessous les principaux arguments des critiques de la Banque du Canada qui sopposent à tout nouvel abaissement des cibles en matière dinflation. Le premier argument consiste à dire, après examen des avantages dune faible inflation et des coûts de mise en oeuvre dune politique visant ce but, que les cibles fixées devraient rester les mêmes. Le deuxième, lui, consiste à affirmer que les coûts dune faible inflation sont élevés, ce qui amène à conclure que les cibles en la matière devraient être relevées et non pas abaissées. La discussion fait abstraction de lhypothèse jusqualors courante selon laquelle une inflation élevée est garante dune baisse permanente du taux de chômage. Ce principe découlant de la « courbe de Phillips » a aujourdhui été pratiquement abandonné par les analystes sérieux de la politique monétaire et ne joue plus aucun rôle significatif dans le débat sur la question. A. Maintenir les cibles courantes Certains économistes soutiennent que les coûts temporaires liés à une poursuite de la désinflation dépasseront vraisemblablement les avantages permanents qui pourraient en découler. Il faut faire preuve dune extrême rigueur en matière monétaire pour réduire linflation, tout particulièrement lorsquelle est déjà très faible. Une inflation plus faible peut certes présenter de véritables avantages, mais qui peuvent être largement compensés par les coûts de la mise en oeuvre de cette politique. Cest tout particulièrement le cas si un certain nombre de ces coûts deviennent permanents. En raison dun phénomène que lon appelle hystérésis, ceux qui, en raison de la rigueur monétaire, perdent leur emploi et sont au chômage pendant longtemps peuvent aussi subir une dépréciation de leurs compétences professionnelles, devenant ainsi non employables de manière permanente. Ce résultat risque davantage de se produire en présence dune forte rigueur monétaire attribuable à un ratio de sacrifice élevé (soit le degré de rigueur nécessaire pour parvenir à une réduction dun point de pourcentage de linflation) ou si les responsables de la politique sefforcent de parvenir à une forte réduction de linflation sur une courte période. Les tenants de cette analyse estiment quil ne faut pas rabaisser davantage les cibles fixées par la Banque du Canada en matière dinflation si les coûts dune désinflation plus poussée, quelle soit temporaire ou permanente, sont supérieurs aux avantages. Il ne sensuit pas pour autant, cependant, que ces commentateurs considèrent quil faut relever ces cibles. Cette analyse naccorde aucun avantage à une inflation plus élevée et les coûts de la désinflation passée ne sont pas récupérés. On peut en conclure que la Banque du Canada naurait jamais dû ramener linflation à 1,5 p. 100 par année mais quune fois ce seuil atteint, il ny a rien à gagner à le relever à nouveau. Le critique le plus constant de la politique monétaire actuelle de la Banque du Canada est le professeur Pierre Fortin, et il la bien montré lors du discours annuel quil a prononcé en tant que président de lAssociation canadienne déconomique(1). Selon lui, le Canada traverse la pire récession économique de son histoire depuis la crise des années 30, son économie ayant perdu 850 000 emplois par rapport à la période davant la récession. Il explique cette situation en disant que la stabilité des prix recherchée de manière exclusive par la Banque du Canada dans le cadre dune politique monétaire rigoureuse a donné lieu à des taux dintérêt élevés qui ont mené à la crise budgétaire du début des années 90 puis, par la suite, à une contraction budgétaire ayant encore accentué les difficultés économiques du pays(2). Selon cette thèse, les mauvais résultats du marché du travail au Canada sont non seulement destructeurs mais totalement inutiles; la politique monétaire américaine (qui entraîne actuellement une inflation denviron 3 p. 100 par an) procure pratiquement tous les avantages liés à une faible inflation tout en permettant à léconomie dêtre une véritable machine à procurer des emplois, le plein emploi étant assuré. Le professeur Fortin estime quil faudrait relever légèrement les cibles canadiennes en matière dinflation, dans une fourchette de 2 à 4 p. 100, la politique monétaire visant à maintenir le taux dinflation à environ 3 p. 100 par année. Il affirme que cette légère augmentation par rapport au taux dinflation actuel, qui se situe entre 1,5 et 2 p. 100, aurait des avantages significatifs pour léconomie canadienne. Ces propositions partent au départ dun raisonnement différent de celui que lon a évoqué dans la section précédente. Elles sappuient non pas tant sur les coûts de la réduction de linflation que sur les coûts du maintien permanent dun faible taux dinflation. Selon cette thèse, ces coûts seraient encore plus élevés en présence dune véritable stabilité des prix et il serait possible de sattaquer au coût élevé de la politique monétaire actuelle en relevant légèrement le taux moyen dinflation. Daprès ce point de vue, linflation peut constituer un outil précieux dajustement économique en permettant aux entreprises de réduire leurs coûts réels de production sans avoir à prendre des mesures dans ce sens. Il sagit là du principe consistant à « graisser les rouages de léconomie », qui a été avancé par léconomiste américain James Tobin en 1972, et qui est décrit ci-après(3). Quelle que soit la conjoncture économique, la situation des entreprises varie considérablement. Certaines font face à une demande de plus en plus forte et dautres, à une demande qui diminue. Certaines deviennent plus productives, dautres moins. Certaines sont rentables, dautres sont au bord de la faillite. Par conséquent, les salaires réels des travailleurs évoluent à des rythmes différents; certains augmentent alors que dautres chutent. La répartition de ces changements correspond généralement à une courbe symétrique, comme une courbe normale. Les entreprises non concurrentielles dans la conjoncture actuelle doivent réduire leurs coûts, et cela se traduit généralement par une réduction des coûts de main-doeuvre. En période dinflation modérée et de croissance de la productivité, il nest pas trop difficile dy parvenir. Ainsi, en présence dune inflation de 5 p. 100 et dune croissance de 1 p. 100 de la productivité de la main-doeuvre, une entreprise qui pratique un gel des salaires bénéficie dune baisse de 6 p. 100 de ses frais de main-doeuvre en termes réels au bout dun an. Même si elle accorde à ses employés une augmentation de salaire de 1 p. 100, il lui restera encore une réduction réelle de 5 p. 100 de ses frais de main-doeuvre. Tobin, Fortin et dautres analystes soutiennent que les salaires nominaux sont « résistants » à la baisse. Le maximum que peuvent faire les entreprises cest de geler les salaires, de sorte que la souplesse des marchés du travail est sérieusement compromise lorsque le taux dinflation est proche de zéro. La difficulté est encore plus grande lorsque la productivité de la main-doeuvre naugmente que lentement. Dans ce cas, la courbe de distribution de lévolution des salaires perd sa symétrie; trop peu de travailleurs se voient appliquer lindispensable réduction de salaires en termes réels et il en résulte une augmentation du chômage. Les paramètres institutionnels renforcent encore la rigidité nominale des salaires. Les salaires minimums sont rarement réduits, voire jamais. Lorsque intervient une législation en matière déquité salariale, il est par ailleurs impossible de réduire les salaires, ce qui dans certains cas peut éventuellement gêner ladaptation de la main-doeuvre. Prenons le cas, par exemple, dune entreprise qui doit réduire de 5 p. 100 ses frais réels de main-doeuvre pour rester concurrentielle et dont la productivité de la main-doeuvre augmente de 1 p. 100 chaque année. Avec une inflation de 5 p. 100 par année, cette entreprise peut augmenter les salaires de 1 p. 100 et réussir quand même à réduire comme prévu de 5 p. 100 ses coûts de main-doeuvre en termes réels. Avec une inflation de 3 p. 100 par année, un gel des salaires ne réduira ses coûts de main-doeuvre réels que de 4 p. 100 par année, ce qui loblige à pratiquer des mises à pied pour obtenir le 1 p. 100 supplémentaire. Avec une inflation de 1 p. 100 par année seulement, le gel des salaires namènera quune réduction réelle de 2 p. 100 des coûts réels de main-doeuvre, les 3 p. 100 supplémentaires devant être obtenus par des mises à pied. Il est évident que cette entreprise devra mettre davantage de travailleurs à pied lorsque linflation est de 1 p. 100 que lorsquelle est de 3 p. 100. De plus, le nombre total dentreprises devant recourir à des mises à pied augmente à mesure que le taux dinflation tend vers zéro. Parallèlement, à mesure que la croissance de la productivité de la main-doeuvre diminue, les entreprises doivent effectuer des mises à pied plus nombreuses pour réduire leurs coûts de main-doeuvre. Cette conclusion part de lhypothèse que lon réduit rarement les salaires nominaux. Une étude récente de la Brookings Institution(4) arrive à la même conclusion. Cette étude sappuie sur des données historiques où lon nobserve pratiquement aucun cas de diminution de salaire et sur des enquêtes indiquant quune forte proportion de salariés et demployeurs considèrent que les diminutions de salaires sont injustes, quelles portent atteinte au moral des employés et quelles ne sont justifiées que dans des cas exceptionnels tels que la faillite imminente de lentreprise. Cette étude reprend par ailleurs des statistiques canadiennes recueillies par le professeur Fortin au début des années 90 sur de grandes conventions collectives ne comportant aucun ajustement en fonction du coût de la vie où lon voit que très peu de ces conventions comportaient des réductions de salaire alors quun fort pourcentage prévoyaient des gels salariaux. Les implications de ces statistiques nincitent pas à loptimisme. Selon le professeur Fortin et les chercheurs de la Brookings, la rigidité à la baisse des salaires nominaux est une caractéristique permanente des marchés du travail, quelle que soit la conjoncture économique. Les travailleurs et les employeurs hésitent tout autant à diminuer les salaires en période de faible inflation quen période dinflation élevée. Un taux dinflation proche de zéro entraîne une augmentation permanente du chômage. De lavis du professeur Fortin, la politique pratiquée par la Banque du Canada a coûté à léconomie canadienne plus de 500 000 emplois(5), et si elle nest pas modifiée, ces emplois seront perdus à jamais. Par ailleurs, plus cette politique est maintenue longtemps, plus on risque, selon lui, de voir ce chômage devenir irréversible, car les travailleurs mis à pied finissent par perdre leurs compétences professionnelles. Fortin signale quavant la dernière récession, 62,5 p. 100 des personnes âgées de 15 ans et plus étaient employées dans léconomie canadienne comme dans léconomie américaine. À mesure que lon entrait dans la récession, ce pourcentage a diminué plus rapidement et plus fortement au Canada quaux États-Unis. Aujourdhui, le marché du travail américain a totalement surmonté la récession, ce qui nest pas le cas au Canada. Différents facteurs peuvent expliquer la mauvaise performance du marché du travail au Canada. Le professeur Fortin passe en revue la mondialisation et le libre-échange, lévolution technologique, lincertitude politique au sujet du Québec, les salaires minimums et la syndicalisation, concluant toutefois que tous ces facteurs ne permettent pas dexpliquer la situation. Laugmentation des prélèvements obligatoires sur les salaires ne contribue pas à un renforcement du chômage permanent parce quelle est finalement répercutée sur les travailleurs sous la forme dune diminution des salaires réels (bien quelle ait pu entraîner une certaine partie de laugmentation observée du chômage si les faibles taux dinflation ont ralenti cet ajustement). Fortin conclut quil ny a quune seule véritable explication de la différence entre la performance américaine et celle du Canada : la politique américaine a maintenu linflation plus proche de 3 p. 100 au cours des années 90, ce qui a permis au marché du travail américain de conserver une grande souplesse; la politique monétaire de la Banque du Canada a maintenu linflation proche de 1,5 p. 100, ne laissant pas de souplesse au marché du travail canadien. 1. Remise en cause des statistiques Différentes critiques ont été faites au sujet des statistiques à lappui de lhypothèse de la rigidité des salaires. Des années 60 aux années 80, les économies nord-américaines se sont caractérisées par un niveau dinflation élevé et (ou) une forte croissance de la productivité de la main-doeuvre. Labsence de réductions des salaires nest pas surprenante; on y aurait vu une injustice alors que les salaires moyens augmentaient très rapidement. Il faut être très prudent lorsquon fait des extrapolations entre cette période et une période caractérisée par une faible inflation. On peut concevoir quil soit moins rare denregistrer des baisses de salaires lorsque la moyenne des salaires naugmente que très lentement. Des études portant sur des périodes antérieures ont conclu que la flexibilité des salaires était en fait très grande(6). Ainsi, Robert Gordon, commentant létude de la Brookings Institution, signale que les salaires américains ont baissé de 17 p. 100 entre 1929 et 1933(7). De plus, certains prétendent que les enquêtes ne sont pas des plus fiables, car on sait que les personnes interrogées ont tendance à cacher des renseignements très personnels et délicats et quil leur est bien plus facile de rapporter quune de leurs connaissances a subi une réduction de salaire que davouer quelles en ont fait elle-même les frais(8). Par ailleurs, une étude portant sur les gains de 5 000 familles américaines depuis 1968 corrobore mal lhypothèse de la rigidité des salaires(9). Dans le cas de la plupart des travailleurs, la courbe de distribution de lévolution des salaires nest pas asymétrique au détriment des réductions de salaires, tout à fait à lopposé de ce quaffirme létude de la Brookings Institution. Les cas de stagnation des salaires ne représentent que 7 p. 100 de léchantillon alors que 17 p. 100 des répondants ont subi une réduction de leur salaire nominal au cours dune année donnée. Surtout, rien natteste la présence dune illusion monétaire; en loccurrence, les personnes interrogées se rendaient compte des effets de linflation sur les prix et salaires. Les statistiques du professeur Fortin apparaissent plus solides dans la mesure où elles concernent le contexte canadien, à faible inflation; il nen reste pas moins quelles ne sont pas aussi convaincantes quelles napparaissent à première vue. La principale critique porte sur le fait que les conventions négociées dans la fonction publique représentent une très grande part de son échantillon (60 p. 100), soit bien plus que limportance de ce secteur au sein de léconomie. Surtout, 90 p. 100 des gels de salaires concernaient la fonction publique(10). Les gouvernements ne se comportent pas comme les employeurs du secteur privé. De plus, ces statistiques appartiennent à la période des « journées Rae » de lOntario, durant laquelle le gouvernement de lOntario a eu recours à des congés non payés pour réduire les coûts réels de main-doeuvre. Le professeur Fortin considère par ailleurs les contrats pluriannuels comportant un gel des salaires au cours de la première année comme des exemples de gel des salaires alors que ce sont plutôt des exemples daugmentation de salaire. Cette façon de procéder augmente lincidence des gels de salaires et confère une importance démesurée au point zéro. Mais quoi quil en soit, il faut traiter ce genre de statistiques avec prudence. La théorie économique parle de taux de salaire, nominaux ou réels, mais il est bien difficile de cerner cette notion dans la pratique. Force est donc de se contenter dapproximations imparfaites. La plupart des travailleurs ne sont pas syndiqués, ne travaillent pas pour de gros employeurs et ne sont pas visés par de grandes conventions collectives, ce qui fait que celles-ci ne reflètent pas nécessairement ce qui se passe sur lensemble du marché du travail. De plus, ces statistiques ont tendance à ne refléter que les taux horaires et non pas les salaires. Ainsi, lorsquune entreprise ayant des coûts de main-doeuvre élevés fait faillite ou met à pied un certain nombre de ses employés, ceux-ci vont ensuite être embauchés par des employeurs qui paient des salaires moindres dans le même secteur ou dans des secteurs différents (cas, par exemple, dun ancien employé dEaton qui va travailler chez WalMart). La souplesse des salaires peut se manifester de bien des façons. Les études révèlent que les personnes qui changent demploi ou qui touchent un salaire présentent une plus grande variabilité sur le plan de la rémunération que celles qui conservent le même emploi ou qui sont payées à lheure(11). Une étude récente de Statistique Canada révèle que 19 p. 100 des employés canadiens ont fait des heures supplémentaires au cours du premier trimestre de lannée 1997 et que 60 p. 100 dentre eux lont fait sans être rémunérés(12). En soi, ce chiffre ne renseigne pas sur la flexibilité des salaires, ce qui nempêche pas que la rémunération effective des employés évolue en fonction du nombre dheures supplémentaires quils font sans être payés. Dans la mesure où les politiques daustérité et (ou) les réductions deffectif dues à la récession ont entraîné une augmentation des heures supplémentaires non payées, il y a là une réduction des salaires exprimés en termes réels. De même, on peut réduire les avantages sociaux, faire faire le travail à lextérieur, etc. Aucun de ces effets nest saisi dans les données sur les conventions collectives. John Crow fait valoir en outre que le Canada est largement ouvert sur lextérieur, 40 p. 100 environ de son PIB provenant du commerce international. Par le jeu de la variabilité des taux de change, même des salaires rigides lorsquils sont exprimés en dollars canadiens peuvent se révéler très souples en termes réels lorsquils sont exprimés en devises étrangères(13). Les arguments en faveur dune légère augmentation du taux dinflation au Canada ne sont probablement avancés que par une minorité danalystes de léconomie canadienne. Il est clair, toutefois, que la mauvaise performance du marché canadien de lemploi a besoin dêtre expliquée, et le professeur Fortin sest efforcé de le faire. Ses détracteurs estiment que ses arguments ne sont pas suffisamment solides pour que lon modifie lorientation de la politique monétaire, et pourtant il faudra aborder la question lorsquon débattra des cibles en matière dinflation après 1998. En plus des problèmes susmentionnés, dautres difficultés se posent lorsque lon compare les statistiques du chômage entre les États-Unis et le Canada. Le Centre for the Study of Living Standards a conclu que la moitié seulement de la différence entre les taux de chômage canadien et américain sexpliquait par les facteurs cycliques, lautre moitié résultant, à parts égales, de différences de mesures et de lintervention de facteurs structurels. Dautres analystes, dont le professeur Herb Grubel, accordent une plus grande importance aux facteurs structurels, relevant par exemple que les modifications récemment apportées à lassurance-emploi du Canada nallégeront pas les taux de chômage avant plusieurs années. Enfin, une étude récente de Statistique Canada semble indiquer que la baisse du taux dactivité de la population pourrait refléter une hausse de lincidence de la retraite anticipée et non pas un aussi grand découragement des travailleurs quon lavait cru précédemment(14). À première vue, lidée dune légère augmentation de linflation pour graisser les rouages de léconomie apparaît acceptable. Elle renvoie à une économie se comportant comme une machine, qui a besoin dun peu dhuile pour bien tourner. La légère augmentation de linflation que propose le professeur Fortin, qui la ferait passer de 1,5 ou 2 p. 100 à 3 p. 100 par an, napparaît pas comme particulièrement radicale ni controversée. Elle part cependant du principe que les travailleurs, trompés par le fait quils croient gagner plus que ce nest le cas en réalité, conserveront des emplois quils abandonneraient autrement. Cest en cela que la thèse de la rigidité des salaires est difficile à accepter. Elle suppose que les travailleurs et que les employeurs font preuve dune attitude irrationnelle et dune incroyable paresse intellectuelle. On peut à la limite imaginer que les travailleurs refuseraient une réduction de salaire lorsque linflation baisse inopinément et que le phénomène a des chances dêtre passager. Il est par contre bien plus difficile de croire que les travailleurs refuseraient une telle réduction durant une période où linflation a toutes les chances de demeurer faible et le chômage élevé. Pour beaucoup, une baisse de salaire vaudrait encore mieux que le chômage lorsque les emplois se font rares. Un autre économiste américain connu, Paul Krugman, appuie la thèse du professeur Fortin en proposant un modeste compromis pour rapprocher les tenants de la stabilité des prix, et les partisans de la croissance et de la libération de largent. Il rejette lhypothèse jusqualors couramment acceptée selon laquelle il est possible de réduire le chômage à long terme en augmentant linflation. Il se réfère à un « principe de bon sens » selon lequel les gens ne se laissent pas tromper par linflation et peuvent tout aussi bien calculer un gain de salaire en termes réels si linflation est de 10 p. 100 que si elle lest de 5 p. 100. À son avis, « tout prouve que cette hypothèse est la bonne »(15). Tout de suite après, il affirme toutefois que seul un travailleur « hyper-rationnel » est en mesure de se rendre compte quun gain de salaire inférieur au taux dinflation équivaut à une diminution du salaire nominal. Il est certain quun travailleur qui sait que 8 moins 10 font -2 sait aussi que 1 moins 3 donne le même résultat. De plus, étant donné ce que lon sait aujourdhui de lexactitude des mesures des prix, on peut dire que la différence entre les taux dinflation américain et canadien nest pas grande, et pourtant on lui accorde une grande influence sur les marchés du travail. Ce serait vraiment ironique si lon sapercevait un jour que le chômage élevé au Canada sexplique non pas par la politique monétaire, mais par limprécision de lindice des prix à la consommation. Par ailleurs, les conflits de travail (mesurés en journées perdues en raison des grèves) diminuent nettement lorsque linflation est faible. On peut en déduire que les travailleurs ne subissent pas les effets de lillusion monétaire et quils sont au contraire conscients des conséquences dune inflation élevée et de la différence entre un salaire nominal et un salaire réel. La question nest pas de savoir si les travailleurs acceptent volontiers une diminution des salaires nominaux - ce nest évidemment pas le cas; lorsquils lacceptent, ils le font de mauvaise grâce. Sont-ils davantage prêts, par contre, à accepter une diminution de leur salaire en période dinflation élevée? Les statistiques sur les grèves montrent quil nen est rien. De plus, si linflation « trompe » les travailleurs en les incitant à conserver des emplois dont la rémunération diminue en termes réels, est-ce une bonne chose? Certains secteurs sont en déclin alors que dautres sont florissants. Les salaires réels diminuent dans les premiers cas et augmentent dans les seconds, ce qui fait comprendre aux travailleurs que les perspectives sont meilleures ailleurs. Si linflation brouille ce message, la main-doeuvre ne migrera pas vers les secteurs plus productifs. LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE LA STABILITÉ DES PRIX Certains économistes affirment quil faut se diriger résolument vers une véritable stabilité des prix. Ils croient que si la faible inflation enregistrée aujourdhui est bien préférable à celle qui a eu cours pendant les années 70 et 80, des progrès peuvent encore être faits. De leur point de vue, il est désormais évident que même une inflation faible ou modeste impose des coûts énormes et durables à la société et quelle peut donc lui porter préjudice à long terme. En fait, nombre des maux économiques actuels au Canada peuvent, à leur avis, être attribués aux deux décennies dinflation élevée que le pays a connues. Par contre, les coûts liés à la réduction de linflation, selon ces mêmes économistes, sont relativement faibles et de courte durée. Tout dabord, il est utile dexaminer ce que lon entend exactement par stabilité des prix. À première vue, cest une notion dont la définition paraît relativement simple - cest labsence dinflation à long terme ou encore la constance de lensemble des prix sur de nombreuses années. Toutefois, le niveau de lensemble des prix ainsi que les taux dinflation sont des notions économiques qui, dans la pratique, sont représentées par des critères de mesures imparfaits, le plus connu étant lindice des prix à la consommation (IPC). On reconnaît de manière générale que lindice des prix à la consommation surestime le degré dinflation. Cela sexplique de différentes façons. LIPC ne reflète quavec lenteur les véritables habitudes dachat des consommateurs de sorte que les effets de la substitution de produits moins coûteux peuvent être masqués. Les indices de prix ont par ailleurs tendance à ne pas suffisamment tenir compte des améliorations apportées aux produits, ce qui contribue là aussi à surestimer le taux dinflation. Par ailleurs, les indices peuvent omettre les nouveaux produits, ce qui ne leur permet pas de rendre compte des importantes diminutions de prix et des améliorations de qualité que lon enregistre au tout début des cycles de production. La Banque du Canada ainsi que la plupart des économistes canadiens considèrent que lIPC comporte une erreur systématique de 0,5 p. 100 par an au maximum, même si certains dentre eux, et en particulier Pierre Fortin, situent cette erreur à un niveau un peu plus élevé(16). Aux États-Unis, cette distorsion vers le haut est généralement considérée comme étant supérieure à celle du Canada. La commission Boskin a récemment conclu que lon pouvait raisonnablement estimer cette distorsion vers le haut de lIPC américain à 1,1 p. 100 par année, à lintérieur dune fourchette pouvant se situer entre 0,8 et 1,6 p. 100(17). La stabilité des prix peut aussi être considérée comme un état desprit. Elle a été décrite, soit comme « un climat de confiance dans labsence prévue dinflation », par John Crow(18), soit comme une situation « dans laquelle les gens ne tiennent pas compte de linflation dans leurs décisions » selon une formule attribuée tant à Paul Volcker quà Alan Greenspan(19). Autrement dit, il y a stabilité des prix lorsque les particuliers et les entreprises prennent des décisions de consommation en fonction de lintérêt véritable de la dépense et non pas parce quils ont peur que les prix augmentent; lorsque les familles achètent une maison parce que cest ce dont elles ont besoin et parce quelles peuvent se le permettre et non pas pour se prémunir contre linflation; lorsque les particuliers peuvent prendre avec confiance des décisions dinvestissement à long terme sans sinquiéter de leur pouvoir dachat dans lavenir; lorsque les employés ne sinquiètent pas de savoir si leurs conventions à long terme contiennent des clauses dindemnité de vie chère; lorsque les personnes âgées ne se préoccupent pas de savoir si leurs pensions sont indexées et lorsque les contribuables ne sont pas lésés par une fiscalité non indexée sur linflation. Cette façon de voir a lavantage de ne pas dépendre de lexactitude de lIPC, auquel on fait moins confiance à mesure quévolue la structure de léconomie. Étant donnée limportance de plus en plus grande que prennent les services dans léconomie, il devient de plus en plus difficile de définir une unité de production(20). Si toutefois la Banque du Canada doit continuer à asseoir la mesure de linflation sur lIPC, il est probable que pour atteindre la stabilité des prix, il faudrait ramener la cible de maîtrise de linflation à moins de 1 p. 100 par an. Par conséquent, la Banque du Canada sefforce à lheure actuelle de parvenir à un taux dinflation faible, et non à la stabilité des prix. A. Les avantages de la stabilité des prix La stabilité des prix procure des avantages à léconomie parce quelle épargne à la société les coûts associés à linflation. On croyait autrefois que seuls des taux très élevés ou une inflation soudaine entraînaient des coûts significatifs. Aujourdhui, les analyses et les données recueillies donnent à penser que même des taux faibles et stables dinflation peuvent être coûteux, ce que soulignent les tenants de la stabilité des prix. Léconomie de marché moderne est axée sur la spécialisation et les échanges (largent étant un bien intermédiaire qui permet déchanger ce quon produit contre ce que lon veut consommer). Du fait de linflation anticipée, le coût de la détention de largent augmente et les particuliers sont amenés à réduire les quantités quils possèdent de ce bien intermédiaire. Linflation agit donc de ce fait comme une taxe, augmentant le coût des transactions et laissant moins de ressources pour produire dautres biens. La consommation, linvestissement et le travail fourni sont donc réduits en conséquence. Selon un principe bien établi en finances publiques, il ne faut pas taxer les biens intermédiaires, et pourtant cest justement ce que fait linflation. Léconomie de marché sappuie fortement par ailleurs sur les signaux envoyés par le système des prix, qui donne un grand nombre dinformations sur quoi, comment, quand et où produire. Linflation (de même dailleurs que la déflation) compromet lexactitude des signaux envoyés par les prix dont les gens se servent en tant que consommateurs, producteurs et investisseurs. Lorsquun prix en particulier change dans un contexte de stabilité des prix, on sait que certaines conditions sous-jacentes ont été modifiées, que ce soit au niveau de loffre ou de la demande. Par contre, lorsquun prix change en période dinflation, on nen connaît pas la cause; il peut sagir dune réaction à retardement du fait de linflation, ou dune réaction anticipée en prévision de linflation. Leffet le plus pernicieux de linflation est probablement celui qui touche la formation de capital. La formation de capital a des répercussions profondes et bien connues sur la productivité de la main-doeuvre, les revenus réels et la croissance économique. Les impôts sappliquant aux rendements nominaux et non réels des investissements, et les rendements nominaux ayant tendance à augmenter avec linflation, même une augmentation modeste de linflation peut entraîner une chute considérable du rendement après impôts des investissements dont dépendent les investissements en capital. Ainsi, lorsquon fait passer linflation de 3 p. 100 à zéro, on augmente de 35 p. 100 le rendement réel après impôts attendu(21). Une telle augmentation peut avoir une incidence significative sur la formation de capital et sur la croissance économique, les effets cumulés étant considérables à long terme. On peut en conclure que lon a payé en fait très cher les taux dinflation bien supérieurs à 3 p. 100 par année qui ont eu cours précédemment. Peter Howitt estime quau bout du compte la valeur du surcroît de croissance découlant dune inflation ramenée de 3 p. 100 à zéro pourrait sélever à quelque 85 p. 100 du PIB courant(22). Daprès une étude américaine, réalisée par le professeur Martin Feldstein, le fait de ramener linflation de 2 p. 100 par année à zéro conférerait à terme un avantage dont la valeur actualisée équivaudrait à environ 35 p. 100 du PIB actuel des États-Unis(23). Le calcul de Feldstein sappuie sur les dommages que cause linflation à lépargne et à linvestissement, étant donné que les rendements « fictifs » sont imposés, tant au niveau des entreprises quà celui des particuliers. Même si certaines dispositions du régime fiscal tendent à réduire limposition dans un contexte inflationniste, tout bien considéré les taux dimposition réels augmentent. Aux États-Unis, linflation a par ailleurs tendance à faire augmenter la demande de logement; elle entraîne non seulement une réduction du rendement procuré par les différentes formes dépargne concurrentes, mais en outre, étant donné que les Américains peuvent déduire de leurs impôts les intérêts hypothécaires nominaux et non les intérêts réels, linflation réduit par ailleurs le coût après impôts du logement. (Cette déduction fiscale nexiste pas au Canada.) En plus dabaisser la formation de capital en général, linflation détourne par ailleurs les investissements des usines et des machines, qui sont sources de croissance, pour les diriger vers limmobilier, qui ne lest pas. Linflation influe par ailleurs sur les décisions prises par la main-doeuvre et incite les individus à sengager dans les secteurs financiers, qui (en raison de linflation) peuvent être extrêmement lucratifs, de préférence aux secteurs techniques et scientifiques, qui en fin de compte profitent davantage à la société et favorisent la croissance de léconomie(24). Les estimations dHowitt sont plus élevées que celles de Feldstein en raison surtout du fait quelles tiennent compte des signaux envoyés par les prix, qui sont faussés par linflation, ainsi que de la diminution du rendement des investissements qui en découlent. Même lorsquelle est parfaitement anticipée, linflation influe sur les profits déclarés et sur le rendement réel après impôts des investissements, mais les distorsions varient dun secteur et dune entreprise à lautre. Ainsi, par exemple, linflation entraîne une surestimation des profits des entreprises dont le ratio stocks/ventes est élevé et dont le capital amortissable est important, mais sous-estime les profits des entreprises ayant un fort niveau dendettement. En conséquence, les investisseurs sont moins en mesure de prendre des décisions informées sur la rentabilité des différentes entreprises et des différents secteurs de léconomie et ils pourront très bien investir dans des secteurs offrant des rendements faibles et négliger des secteurs procurant des rendements élevés. Les fluctuations de linflation ne font quaggraver les difficultés, les états financiers publiés ne donnant aux investisseurs que des indications inexactes et ambiguës. Ces coûts dus à linflation sont permanents. Certains dentre eux peuvent être allégés par une fiscalité indexée, mais il serait difficile de mettre en place une indexation des revenus de placement. Aucun pays na dailleurs jamais mis en oeuvre une fiscalité qui sapparente à un système dindexation intégrale, ce qui de toute façon ne ferait peut-être quentraîner des distorsions supplémentaires des comportements économiques. Surtout, ce nest pas seulement la fiscalité, mais aussi les investisseurs, qui sont trompés par linflation, et lindexation de la fiscalité ne résoudra pas nécessairement leurs problèmes. Feldstein estime ces avantages procurés par la stabilité des prix à environ 1 p. 100 du PIB par an. Le coût ponctuel de la suppression dune inflation de 2 p. 100, qui se monte à environ 5 p. 100 du PIB courant, pourrait être compensé par ses avantages dans un délai de six à neuf ans, selon le moment choisi. Par la suite, la stabilité des prix pourrait continuer à procurer chaque année des avantages sans que les coûts correspondants. Howitt évalue ces avantages annuels à un montant supérieur denviron 50 p. 100. Selon ce point de vue, les coûts de linflation sont considérés comme étant diffus dans lensemble de léconomie, se traduisant de différentes manières qui ne sont pas toujours apparentes. Cette thèse soppose fortement à celle de Fortin, selon laquelle les coûts de la stabilité des prix se présentent sous la forme dun chômage plus élevé et (ou) de taux dactivité plus faibles. Ces statistiques sont publiées mensuellement et sont suivies de près par les analystes, les médias, les politiciens et les électeurs. De nombreux facteurs ont influé sur la croissance et la productivité depuis la Deuxième Guerre mondiale, notamment lévolution démographique, la part plus importante prise par le secteur des services, le rôle accru du secteur public et les progrès technologiques. Comme nous venons de le signaler, toutefois, linflation réduit lefficacité de léconomie ainsi que son taux de croissance. Le lecteur trouvera dans le graphique qui suit les courbes correspondant à quatre décennies dinflation et dévolution de la productivité dans lindustrie manufacturière. Lévolution aléatoire de la productivité dune année sur lautre peut masquer des tendances à long terme. Pour remédier à cette volatilité, ce graphique fait état des moyennes mobiles sur cinq ans de ces deux variables. On y constate une faible inflation et une croissance élevée de la productivité au cours des années 50 et 60. Deux décennies dinflation croissante sont caractérisées par ailleurs par une diminution à long terme de la productivité, jusquen 1982 environ, après quoi la productivité augmente avec la diminution de linflation. Le même schéma se reproduit au cours des années 90. Le cycle économique joue certes un rôle dans ce schéma, mais les chiffres corroborent lopinion selon laquelle linflation est préjudiciable à léconomie. Leffet cumulé sur plus de 20 ans est, à nen pas douter, important. Ces chiffres confirment aussi que certains coûts de linflation se traduisent par une activité économique prise en compte dans le PIB et, comme le PIB est considéré comme un indicateur du bien-être économique général, ils sont ainsi comptabilisés à tort comme des avantages et non comme des coûts. La même chose se produit pour une bonne partie des coûts de la réglementation. Si, par exemple, une réglementation augmente les coûts de production des automobiles, elle pourra éventuellement avoir pour effet dabaisser le PIB. Surtout, il faut bien voir que le supplément de main-doeuvre et dautres facteurs de production exigés par la production de lautomobile compteront tous comme des activités économiques. Si le véhicule qui en résulte nest pas supérieur à celui qui serait produit en labsence de la réglementation, et si les caractéristiques induites par la réglementation viennent remplacer celles que les consommateurs auraient autrement choisies, tous ces facteurs de production sont gaspillés. Or, la méthode de calcul du PIB nen tient pas compte. Il en va de même en période dinflation; les entreprises et les ménages sont obligés de recourir à un plus grand nombre de financiers, de comptables et de conseillers juridiques à la seule fin de composer avec linflation et non pour faciliter la production des biens et des services souhaités. Le PIB, toutefois, ne fait pas la distinction entre les différentes finalités de lutilisation des services financiers. Si, au lieu de consacrer 1 000 $ à de courtes vacances, une famille les dépense pour ne pas être débordée par linflation (conseils financiers, ouvrages sur les stratégies dinvestissement, frais supplémentaires de magasinage pour trouver des aubaines, etc.), le PIB reste au même niveau, mais sa composition est modifiée et de toute évidence cette famille sen sort moins bien. Linflation impose aussi des coûts à la société sous la forme des conflits de travail. En période dinflation élevée, les journées de grève sont plus nombreuses quen période de faible inflation. Au début des années 80, par exemple, le nombre de journées de grève a été de trois à huit fois plus élevé quaujourdhui, même si le taux de chômage était lui aussi élevé à lépoque.
B. Les coûts de la stabilisation des prix Il ne suffit pas de recenser les avantages dune faible inflation ou de la stabilisation des prix; encore faut-il que les coûts dune politique monétaire axée sur ces objectifs justifient quon la poursuive. Il pourrait être tout à fait rationnel de renoncer à ces avantages si leur prix est trop prohibitif ou sils ne se feront sentir que dans un avenir éloigné alors quil faut les payer dès maintenant. Nous examinons ci-dessous les coûts de la désinflation. Le premier argument que lon oppose à une politique monétaire « désinflationniste » (soit une politique qui réduit le taux dinflation) est quelle a presque toujours pour effet de ralentir lactivité économique et daugmenter le chômage temporairement. Lamplitude de ces coûts peut varier considérablement. Toutefois, les coûts de la désinflation sont temporaires alors que, si lon en croit le professeur Fortin et dautres économistes, les coûts plus controversés du maintien dun faible taux dinflation sont permanents. Les coûts temporaires de transition sexpliquent par deux grandes raisons. La première, cest que les prix ont tendance à être fixés de manière nominale, en fonction des attentes en matière dinflation. Il est onéreux de modifier le prix des articles et les entreprises ne veulent pas le faire constamment. Par conséquent, si les prix ont été fixés pour 1997 en tablant sur une inflation de 3 p. 100 et que cette inflation ne soit finalement que de 2 p. 100, les prix fixés seront trop élevés. Ces prix trop élevés peuvent coûter cher aux entreprises, mais modifier les prix des articles peut être encore plus coûteux. De plus, toute une gamme de prix sont fixés dans des contrats à long terme. Si les prix ont été fixés en tablant sur une inflation plus élevée que celle qui se dégage finalement, les entreprises et les travailleurs sont désavantagés vis-à-vis de la concurrence. Toutefois, sil fallait résilier ou renégocier ces contrats, les frais de transactions seraient substantiels. La désinflation peut aussi être coûteuse parce que les agents économiques nintègrent que lentement la politique désinflationniste de la banque centrale dans leurs attentes et peuvent sattendre à une inflation de 5 p. 100 alors même que la banque centrale poursuit un objectif de stabilité des prix; le cheminement qui mène à la stabilité des prix nen devient que plus lent et plus difficile. Il se peut même quune chute de linflation ne modifie pas les attentes si elle est considérée comme une aberration dans la longue tradition inflationniste du Canada plutôt que comme le reflet du nouveau contexte monétaire. Le problème qui se pose est celui de lampleur et de la durée du surcroît de chômage qui résulterait dune tentative pour ramener en permanence linflation de 1,5 p. 100 par année, par exemple, à 0,5 p. 100 (ce qui supposerait pour le Canada une stabilité des prix). Certains analystes estiment quétant donné que les coûts de la désinflation sont élevés et quils augmentent relativement plus vite que linflation ne baisse, il serait moins coûteux de faire les choses graduellement. La population met du temps à shabituer à un nouveau régime monétaire et, plus elle a vécu longtemps dans un contexte inflationniste, plus il lui faut du temps pour se persuader que la politique a changé(25). Les coûts de la désinflation du début des années 80 nétaient certes pas négligeables, mais ils se sont révélés bien inférieurs aux estimations données par les modèles traditionnels basés sur la courbe de Phillips. Michael Boskin affirme que dans léconomie américaine linflation a été réduite de manière permanente de six points de pourcentage au début des années 80, à un coût de 12 p. 100 du PIB réparti sur plusieurs années. Cela correspond à un ratio de sacrifice de 2 pour 1 alors que les modèles keynésiens traditionnels prévoyaient des ratios de sacrifice allant de 4 pour 1 à 10 pour 1(26). Les estimations canadiennes sétalent entre environ 2,3 pour 1 et 5 pour 1(27). Le professeur Fortin laisse entendre toutefois que le Canada paie un prix énorme à la désinflation sous la forme du chômage permanent causé par lhystérésis (décrite précédemment). Il affirme que lorsque la banque centrale cherche à réduire rapidement linflation, cet effet peut être très prononcé et donner naissance à des ratios de sacrifice très élevés. Toutefois, la plupart des autres analystes ne voient pas véritablement de manifestations de ce phénomène au Canada(28). Deux caractéristiques de la politique monétaire de la banque centrale peuvent contribuer à réduire de manière substantielle les coûts de transition. La première est la transparence, qui consiste à permettre aux observateurs de voir et de comprendre les objectifs et les initiatives de la banque centrale. La seconde est la crédibilité, soit la mesure dans laquelle les observateurs estiment que la banque centrale respectera les engagements quelle a pris. Toutefois, ni lune ni lautre de ces caractéristiques ne sont nécessairement présentes. Ainsi, le préambule de la Loi sur la Banque du Canada demande à la Banque de faire diverses choses, dont certaines sont jugées aujourdhui contradictoires, ce qui fait que la transparence devient plus difficile. La crédibilité est encore plus aléatoire. Si les responsables des banques centrales accusent aujourdhui linflation de tous les maux, ils lont pourtant laissé atteindre des niveaux relativement élevés pendant presque trois décennies. La crédibilité des banques centrales actuelles repose sur la perception quelles sont différentes de celles dhier, qui malgré leurs belles paroles nont finalement pas respecté leurs engagements. Toutefois, les banques centrales ne sont pas toujours des institutions autonomes. Leurs dirigeants pourront parfois souhaiter promouvoir la stabilité des prix alors que leur autorité de tutelle nen a aucunement lintention. Au Canada, cest en fin de compte le gouvernement fédéral qui est responsable de la politique monétaire. Même si lon cherche, en organisant régulièrement des rencontres entre le ministre des Finances et le gouverneur de la Banque du Canada, à sassurer que la Banque et le gouvernement « accordent leurs violons », il appartient finalement au gouvernement démettre une directive adressée au gouverneur. Donc, dans certains cas, cest le gouvernement responsable qui doit être crédible, tout autant que la banque centrale. Au Canada, les cibles dinflation fixées conjointement contribuent à la transparence étant donné quil sagit du seul objectif bien défini et annoncé à lavance de la politique monétaire de la Banque. Elles renforcent aussi la crédibilité, puisquelles sont fixées non seulement par la Banque mais aussi par le gouvernement du Canada, et témoignent donc dun certain engagement à appliquer une politique budgétaire propre à maintenir la stabilité des prix. La longue tradition inflationniste du Canada fait de la crédibilité un élément crucial de la création des attentes en matière dinflation. Toute une génération sest habituée à linflation, et il serait difficile de la convaincre que la stabilité des prix est devenue désormais la norme. Tout renversement de la politique de la banque centrale amènerait les observateurs à remettre en cause la crédibilité des engagements en faveur de la stabilité des prix. Cest précisément la raison pour laquelle tant de gens hésitent à appuyer les solutions préconisées par Fortin en labsence de preuves tangibles en faveur de sa thèse. Si lon assouplissait la politique monétaire, et si cela se révélait être une erreur, les coûts de transition initiaux auraient été vains et les coûts de rétablissement de la stabilité des prix seraient encore plus élevés quils ne létaient à lorigine. Linflation est essentiellement un phénomène monétaire, et toute modification substantielle la concernant doit saccompagner dune modification de la politique monétaire; toutefois, les contraintes budgétaires du gouvernement lient la politique budgétaire à la politique monétaire, et peuvent donc influer directement sur celle-ci. Tout au moins, toute modification apportée à la politique budgétaire est susceptible de remettre en cause la crédibilité des engagements pris par la banque centrale en faveur de la stabilité des prix(29). En termes simples, un déficit se finance soit en vendant au secteur privé des obligations portant intérêt, soit en imprimant de largent. Si, comme ce fut le cas pendant la majeure partie des années 80 et 90, les taux dintérêt sont supérieurs à la croissance de léconomie, les déficits de fonctionnement des gouvernements font augmenter le ratio de la dette au PIB et placent dans une situation impossible tout gouvernement déjà surchargé de dettes. La capacité de financer dautres déficits au moyen dobligations est alors compromise, ce qui accroît la probabilité quil faille recourir à la création dargent pour financer ce type de politique budgétaire. Une politique budgétaire sappuyant sur de gros déficits est donc incompatible avec la rigueur monétaire. Cest précisément la situation dans laquelle se trouvait le Canada entre le milieu des années 80 et le milieu des années 90. Les taux dintérêt ont largement dépassé les taux de croissance de léconomie dans les années 90. Le budget de fonctionnement du gouvernement était soit déficitaire, soit trop faiblement bénéficiaire pour limiter la croissance du ratio de la dette au PIB Par conséquent, les marchés considéraient la politique budgétaire comme impossible à soutenir à long terme. Alors même que la Banque du Canada parlait de stabilité des prix, la politique budgétaire du gouvernement ne concordait pas avec le rythme dexpansion monétaire exigé par la stabilité des prix. La politique monétaire de la Banque allait-elle mettre un frein à une politique budgétaire impossible ou cette dernière allait-elle contrecarrer la politique de stabilité des prix de la Banque? Dans ce dernier cas, la politique anti-inflationniste de la Banque risquait de mener à davantage dinflation parce quen relevant les taux dintérêt à court terme sans prendre dautres mesures financières compensatoires, on aggraverait les déficits publics et on exacerberait le manque de cohérence de la politique. Si la banque centrale finissait par se rallier à la politique budgétaire axée sur les déficits, il deviendrait nécessaire dadopter une politique monétaire plus inflationniste. Les deux politiques nétaient pas compatibles à long terme et lon pouvait se demander laquelle dentre elles allait simposer. Aujourdhui, la forte baisse du déficit et laugmentation de lexcédent de fonctionnement ont rendu la politique budgétaire bien plus compatible avec la politique monétaire de la Banque du Canada axée sur la stabilité des prix. Il a fallu cependant de nombreuses années pour ce que cela devienne évident. POURQUOI LA TRANSITION À UNE FAIBLE INFLATION A ÉTÉ SI COÛTEUSE La piètre performance de léconomie canadienne au cours des années 90 nécessite une explication. Le professeur Fortin y voit le coût permanent dune inflation faible. Ses critiques affirment quaucun élément concluant ne vient appuyer cette thèse. Ils insistent sur les avantages potentiels de la stabilité des prix et déconseillent aux responsables dabandonner les avantages si chèrement acquis que procure la faible inflation actuelle. Ils affirment entre autres que les taux de chômage élevés à lheure actuelle représentent encore en partie les coûts temporaires de la désinflation. À première vue, cette affirmation est difficile à accepter. Après tout, le Canada connaît une faible inflation depuis 1991. Cela devrait être suffisamment long pour que lon ait pu absorber les coûts de transition. Il ne faut pas oublier, cependant, que cette période de faible inflation suit plus de deux décennies dinflation élevée. La crédibilité des politiques de la Banque du Canada nétait donc pas gagnée davance au début des années 90. Comme la fait remarquer récemment M. Thiessen :
Avec le recul, nous pouvons fixer assez précisément le moment à partir duquel la Banque sest intéressée pour la première fois à la stabilité des prix. Pendant la deuxième moitié des années 80, alors que lexpansion monétaire préparait une augmentation de linflation, le nouveau gouverneur de la Banque du Canada, John Crow, a évoqué la nécessité de stabiliser les prix. Sa déclaration la plus importante à ce sujet figure dans la conférence commémorative Eric J. Hanson prononcée à Edmonton le 8 janvier 1988, et lon considère aujourdhui que ce fut un point tournant dans la politique monétaire canadienne. M. Crow sest engagé, au nom de la Banque, à maintenir à terme la stabilité des prix, séloignant en cela des simples déclarations faites jusque-là par la Banque en ce qui a trait aux maux dus à linflation, qui sétaient révélées être davantage des voeux pieux que lannonce dune politique concertée. À lépoque, la conférence de M. Crow na pas semblé marquer un véritable tournant dans la politique monétaire. Les marchés financiers avaient déjà entendu cette chanson. Labsence de calendrier dexécution, de cibles et de mesures concernant les prix ont par ailleurs contribué à faire douter de lengagement nouveau de la Banque à stabiliser les prix. De plus, les prévisions faites dans les budgets fédéraux de 1988 à 1990 ne montraient pas que le gouvernement fédéral prévoyait un véritable changement en matière dinflation. Il était dailleurs nécessaire de prévoir dans les budgets des taux dinflation élevés pour justifier les prévisions de recettes(31). Trois ans plus tard, dans le budget fédéral de 1991, le gouverneur et le ministre des Finances ont conjointement annoncé la fixation de cibles de réduction de linflation : 3 p. 100 à la fin de 1992, 2,5 p. 100 vers le milieu de lannée 1994 et 2 p. 100 à la fin 1995. Une marge dun point au-dessus et au-dessous des cibles fixées a par ailleurs été établie afin dautoriser une légère latitude dans la conduite de la politique monétaire pour pallier les à-coups temporaires que connaît à loccasion le système financier. Aucune cible navait été fixée à lépoque au-delà de 1995, mais on avait décrété que la stabilité des prix (lobjectif final de cette politique désinflationniste) correspondait à un rythme daugmentation des prix « nettement au-dessous de 2 p. 100 »(32). Selon le gouverneur adjoint Charles Freedman, il était évident que lon avait lintention de réduire encore linflation après 1995(33). De plus, au tout début de lopération, la Banque avait recommandé, sur la proposition du gouvernement fédéral, que lon modifie la Loi sur la Banque du Canada afin de préciser expressément que la banque centrale devait avoir exclusivement comme objectif la stabilité des prix. Cette proposition a toutefois été repoussée par un comité parlementaire en février 1992, limitant en cela la portée de lengagement de la Banque vis-à-vis de cet objectif. Lorsquil est devenu gouverneur de la Banque du Canada à la fin de 1993, M. Thiessen a, en compagnie du ministre des Finances Paul Martin, reporté les objectifs fixés en matière dinflation jusquen 1998, conservant la fourchette cible de 1 p. 100 à 3 p. 100 plutôt que de la rabaisser, contrairement à ce qui avait été proposé à lorigine. Les observateurs du marché ont reçu pendant plusieurs années des messages contradictoires au sujet de lorientation future de la politique monétaire. Les budgets fédéraux nont commencé à prévoir une baisse de linflation quen 1991. Pire encore, la conduite effective de la politique budgétaire était incompatible avec la stabilité des prix. Après lallocution prononcée par M. Crow à Edmonton en 1988, le ratio de la dette fédérale nette au PIB a progressé de plus dun tiers. Ce nest quaujourdhui quil a été stabilisé et quon peut avoir lassurance quil va beaucoup diminuer. La politique budgétaire nappuie pas la politique monétaire sur un autre point encore. Avec une inflation inférieure à 3 p. 100, le système dimposition des revenus des particuliers a dans les faits été désindexé. Or, un système désindexé procure des recettes substantielles au gouvernement en période dinflation, mais il ne procure aucun avantage en période de prix stables. En rétablissant la pleine indexation de la fiscalité, le gouvernement renoncerait à tout gain financier tiré de linflation(34), rendant ainsi plus crédible tout engagement à stabiliser les prix. Comme le gouvernement nest pas intervenu dans ce sens, il continue davoir de bonnes raisons de maintenir un certain niveau dinflation pour des considérations dordre budgétaire. Enfin, il est possible que la Banque du Canada ait contribué par ailleurs à exacerber les coûts de la désinflation, non par sa politique mais par la façon dont celle-ci a été appliquée. On peut lire dans une publication de lInstitut C.D. Howe que le fait que la Banque se serve des taux dintérêt et des taux de change comme indicateurs de la situation monétaire la amenée à plusieurs reprises à resserrer inutilement sa politique monétaire alors quil ny avait aucune menace de recrudescence de linflation(35). Tous ces éléments nous font penser que les coûts de la désinflation ont été plus élevés que nécessaire. Maintenant que la Banque est crédible dans sa lutte contre linflation et que la politique budgétaire appuie finalement la stabilité des prix, des réductions supplémentaires des cibles en matière dinflation pourraient se révéler moins coûteuses. Le fait que le Canada peut de toute évidence mener une politique dinflation inférieure à celle des États-Unis avec des taux dintérêt nominaux inférieurs a aussi son importance. La Banque du Canada comme le gouvernement du Canada visent tous deux la stabilité des prix. Même si nous avons aujourdhui des taux dinflation inférieurs à ce quils ont été pendant des décennies, la plupart des commentateurs conviendraient quon ne peut pas encore crier victoire. Pour fixer les cibles en matière dinflation après 1998, le gouvernement tiendra sans aucun doute compte de la performance de léconomie au cours des années 90. Que déduire de cette performance? Trois possibilités viennent à lesprit. La première, à savoir que léconomie a été fortement influencée par des problèmes qui ne dépendaient pas de la politique monétaire, dont la solution réside dans dautres formes dintervention gouvernementale, nest pas traitée ici. Les deux autres possibilités correspondent à deux conceptions de la politique monétaire. La première est celle de Pierre Fortin : une politique monétaire conçue pour maintenir linflation à un bas niveau a imposé des coûts importants et permanents à léconomie. La seconde, cest que le chômage élevé des années 90 est survenu en raison du fait que les attentes en matière dinflation ont mis du temps à réagir à la baisse des taux, et que lengagement de la Banque du Canada à maintenir une faible inflation manquait à lorigine de crédibilité. Malheureusement, ces deux conceptions de la politique monétaire peuvent avoir des répercussions analogues sur léconomie, et un coup doeil rapide sur les indicateurs macro-économiques ne suffit pas à les départager. Ces deux explications concurrentes se démarqueront lune de lautre avec le temps. Le professeur Fortin avance que les coûts de la politique actuelle sont permanents, alors que les tenants de la thèse opposée pensent que ces coûts sont temporaires. Si la forte expansion économique actuelle se poursuit, cest la deuxième explication qui bénéficiera dune plus grande crédibilité. (1) Pierre Fortin, « The Great Canadian Slump », Revue canadienne déconomique, vol. XXIX, no 4, novembre 1996. (2) Pierre Fortin, « Raise the Inflation Target and Let Canada Recover », The Globe and Mail (Toronto), 26 septembre 1996. (3) J. Tobin, « Inflation and Unemployment », American Economic Review, vol. 62, 1972. (4) George A. Akerlof, William T. Dickens et George L. Perry, « The Macroeconomics of Low Inflation », Brookings Papers on Economic Activity, no 1, 1996. (5) Comité permanent des finances de la Chambre des communes, Témoignages, 10 octobre 1996. (6) A.L. Marty et D.L. Thornton, « Is There a Case for Moderate Inflation? », Federal Reserve Bank of St.. Louis, Review, vol. 77, no 4, juillet-août 1995. (7) R.J. Gordon, « Comment », Brookings Papers on Economic Activity, no 1, 1996. (8) N.G. Mankiw, « Comment », Ibid. (9) K.J. McLaughlin, « Rigid Wages? », Journal of Monetary Economics, vol. 34, no 3, décembre 1994. (10) Ces chiffres sont cités par David Laidler dans les Témoignages du Comité des finances de la Chambre des communes, 10 octobre 1996, p. 36. (11) D. Card et D. Hyslop, « Does Inflation Grease the Wheels of the Labour Market? », dans C.D. Romer et D.H. Romer (éd.), Reducing Inflation: Motivation and Strategy, National Bureau of Economic Research, Studies in Business Cycles, no. 30, Chicago, The University of Chicago Press, 1997. (12) B. Little, « Canadians Work Overtime - For Free », Globe and Mail (Toronto), 15 juillet 1997. (13) J. Crow, « A Comment », dans D. Laidler (éd.), Where do We Go From Here: Inflation Targets in Canadas Monetary Policy Regime, Policy Study 29, Institut C.D. Howe, 1997. (14) E. Beauchesne, « Labor Force Dropouts Not Necessarily Discouraged Workers », Ottawa Citizen, 12 juin 1997. (15) Paul Krugman, « Stable Prices and Fast Growth: Just Say No », The Economist, 31 août 1996, p. 20. (16) Cité par Michael Parkin, « Monetary Policy and the Future of Inflation Control in Canada: An Overview of the Issues », dans D. Laidler (éd.) (1997). (17) Advisory Commission to Study the Consumer Price Index, sous la présidence de Michael J. Boskin, Toward a More Accurate Measure of the Cost of Living, Washington (D.C.), rapport final au Comité des finances du Sénat, 4 décembre 1996. (18) John Crow, « A Comment », dans Laidler (éd.) (1997). (19) George A. Kahn, « Symposium Summary », Achieving Price Stability, Federal Reserve Bank of Kansas City, 1996. (20) Alan Greenspan, « Opening Remarks », dans Achieving Price Stability (1996). (21) Ce calcul suppose un rendement réel de 5 p. 100 et un taux dimposition de 30 p. 100, et part de lhypothèse que les rendements nominaux augmentent pleinement en fonction de laugmentation de linflation. Si les rendements nominaux naugmentent que de 80 p. 100 de linflation prévue, le fait de ramener linflation de 3 p. 100 à zéro augmente de 60 p. 100 les rendements réels prévus après impôts. (22)
Peter Howitt, « Low Inflation and the Canadian Economy »,
dans D. Laidler (dir.) (1997). (23) M. Feldstein, « The Costs and Benefits of Going from Low Inflation to Price Stability », ocument de travail 5469, Cambridge (Mass.), National Bureau of Economic Research, 1996. (24) Howitt, dans Laidler (éd.) (1997), p. 38. (25) M. King, « How Should Central Banks Reduce Inflation? -- Conceptual Issues », dans Achieving Price Stability (1996). (26) M.J. Boskin, Reagan and the Economy - The Successes, Failures and Unfinished Agenda, San Francisco, Institute for Contemporary Studies, 1987, p. 88-89. (27) Kevin Dowd, « The Costs of Inflation and Disinflation », Cato Journal, vol. 14, no 2, automne 1994, p. 323. (28) J. Selody, The Goal of Price Stability: A Review of the Issues, rapport technique no 54, Banque du Canada, 1990. (29) N. Wallace et T.J. Sargent, « Some Unpleasant Monetarist Arithmetic », dans T.J. Sargent, Rational Expectations and Inflation, Harper & Row Publishers, 1986. (30) Banque du Canada, Rapport sur la politique monétaire, novembre 1996. Cette citation liminaire est tirée dun discours prononcé par le gouverneur devant la Chambre de commerce de London (Ontario) en juin 1996. (31) G. Debrelle, « The Ends of Three Small Inflations: Australia, New Zealand, and Canada », Analyse de politiques, vol. XXII, no 1, 1996. (32) D.E.W. Laidler et W.B.P. Robson, The Great Canadian Disinflation: The Economics and Politics of Monetary Policy in Canada, 1988-93, Institut C.D. Howe, Policy Study, 1993. (33) C. Freedman, « The Canadian Experience with Targets for Reducing and Controlling Inflation », dans L. Leiderman et L.E.O. Svensson, Inflation Targets, Londres, Centre for Economic Policy Research, 1995. (34) J.D. Konieczny, « The Optimal Rate of Inflation: Competing Theories and Their Relevance to Canada », dans Economic Behaviour and Policy Choice under Price Stability, compte rendu dune conférence qui sest tenue à la Banque du Canada en octobre 1993. (35) K.J. Boessenkool, D.E.W. Laidler et W.B.P. Robson, « Devils in the Details: Improving the Tactics of Recent Canadian Monetary Policy », C.D. Howe Institute Commentary, no 79, avril 1996. |