PRB 98-7F

 

LE RENOUVEAU DE LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE :
LA RELÈVE

 

Rédaction :
Jack Stilborn
Division des affaires politiques et sociales
Novembre 1998


 

TABLE DES MATIÈRES

 

VUE D’ENSEMBLE  —  LE RENOUVEAU DE LA FONCTION PUBLIQUE

   A. Enjeu

   B. Contexte

   C. Principales initiatives

   D. Analyse

   E. Examen par le Parlement

   F. Sensibilisation du public

LES RÉFORMES RÉALISÉES DANS QUELQUES AUTRES PAYS

FONCTION PUBLIQUE 2000

LA RELÈVE — RAISON D’ÊTRE

LA RELÈVE — PLAN D’ACTION DÉTAILLÉ

LA RELÈVE — RAPPORTS D’ÉTAPE SUR LES PRINCIPALES INITIATIVES

   A. Recrutement, équité en matière d’emploi et maintien de l’effectif

   B. Rémunération

   C. Norme générale de classification (NGC)

   D. Réforme de la dotation

   E. Fierté et reconnaissance

   F. Relations de travail

   G. Programmes de perfectionnement d’ensemble

   H. Valeurs et éthique

   I. Autres mesures pangouvernementales

   J. Mesures prises dans les ministères

LA RELÈVE — ANALYSE

   A. Enjeux conceptuels
      1. Problèmes et symptômes
      2. Essence et limites de La Relève
      3. Effectif et structures

   B. Questions stratégiques
      1. Volonté politique
      2. Traitement des erreurs
      3. Équité interne
      4. Logique administrative
      5. Reddition des comptes et mesure du rendement

   C. Conclusion

MESURES PARLEMENTAIRES

LISTE BIBLIOGRAPHIQUE


LE RENOUVEAU DE LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE
LA RELÈVE

 

VUE D’ENSEMBLE — LE RENOUVEAU DE LA FONCTION PUBLIQUE

   A. Enjeu

Dans son rapport annuel de 1997 sur la fonction publique, la greffière du Conseil privé a informé le premier ministre qu’une « crise tranquille » grondait parmi les fonctionnaires de l’État. Pour toute une série de raisons, la fonction publique est vue par un nombre croissant d’employés, et par les employés potentiels, comme un milieu de travail assez peu attirant.

Selon le rapport, ce problème, risque d’empêcher l’administration publique d’attirer, de conserver et de motiver le personnel dont elle aura besoin au cours des années à venir et il pourrait, à terme, empêcher celle-ci de satisfaire aux attentes des décideurs politiques et du grand public.

Le gouvernement a répondu en annonçant une série de mesures touchant les ressources humaines de la fonction publique, regroupées sous l’appellation générale de « La Relève ». Il s’agissait avant tout de construire « une institution moderne et vigoureuse, capable d’utiliser pleinement les talents de ceux qui la composent », et possédant les compétences et la motivation nécessaires pour relever les défis de l’avenir.

   B. Contexte

Dans la plupart des pays industrialisés, au cours des années 80, les pressions financières (et le poids plus ou moins grand de facteurs idéologiques et autres) ont entraîné la restructuration et l’allégement des secteurs publics, avec les problèmes inévitables que cela suppose aux chapitres des relations de travail et du moral des employés.

Dans l’administration publique canadienne, dès le début des années 80, les cadres moyens ont commencé à faire état de leur frustration face à une réglementation centralisée excessive et au fait que les organismes de services communs étaient insensibles à leurs besoins. Le processus « Fonction publique 2000 », lancé en 1989, devait entraîner une vaste transformation de la culture de l’administration publique, y compris une délégation d’autorité, pour « laisser les gestionnaires gérer », améliorer la prestation des services au public et offrir les mêmes normes d’efficience et d’efficacité que le secteur privé. Vers le milieu des années 90, on s’entendait largement pour reconnaître que le programme n’avait pas répondu aux attentes qu’il avait suscitées, notamment par suite des mesures prises au cours de cette période pour réduire le déficit et les effectifs.

En 1997, dans son Quatrième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada, la greffière du Conseil privé a soutenu qu’une décennie de réduction des effectifs et d’inattention relative à la gestion des ressources humaines avait entraîné une « crise tranquille » dans l’administration publique. Le problème comportait plusieurs dimensions, notamment un moral à la baisse, de l’insatisfaction et un manque de motivation dans l’ensemble du personnel, un accroissement des départs parmi les groupes possédant des compétences clés sur les plans technique et gestionnel, et des préoccupations croissantes quant à la capacité de la fonction publique d’attirer et de retenir les personnes possédant les compétences qui seront nécessaires à l’avenir.

   C. Principales initiatives

Dans son rapport, la greffière a annoncé un premier train d’initiatives axées principalement sur les hauts fonctionnaires, qui prévoyait, entre autres, un perfectionnement accéléré des cadres supérieurs, la création d’un bassin de sous-ministres adjoints potentiels possédant les compétences voulues, des nominations de sous-ministres adjoints à un niveau plutôt qu’à un poste (pour faciliter la mobilité et le perfectionnement) et la mise sur pied d’un groupe de travail chargé d’étudier la rémunération des cadres supérieurs. Elle a également annoncé qu’on mettrait l’accent sur les groupes responsables des politiques, des communications et de certaines autres fonctions, et qu’on procéderait un examen des programmes de recrutement externe.

Dans son rapport, la greffière a aussi annoncé la tenue de consultations pangouvernementales, en vue de cerner les besoins et de lancer des initiatives au sein des divers ministères ainsi que d’étendre les initiatives d’ensemble, au besoin. Ce processus allait aboutir à l’élaboration d’un plan d’action détaillé, endossé par les sous-ministres en juillet 1997, qui énumérait les principales initiatives de La Relève, encore en cours aujourd’hui.

Les initiatives d’ensemble (à gestion centralisée) sont les suivantes :

  • Stratégie de recrutement, d’équité en matière d’emploi et de maintien du personnel (regarnir et conserver une main-d’oeuvre compétente et représentative).

  • Rémunération (réviser la rémunération des cadres supérieurs, négocier les conventions collectives et résoudre les problèmes relatifs à l’équité salariale et aux pensions).

  • Norme générale de classification (remplacer les multiples classifications d’emploi par un ensemble de catégories simplifiées).

  • Réforme de la dotation (remettre le pouvoir de dotation aux ministères et l’assouplir).

  • Fierté et reconnaissance (renforcer les programmes internes de reconnaissance et la sensibilisation externe).

  • Relations de travail (négocier les conventions collectives et améliorer les relations de travail en général).

  • Programmes de perfectionnement des cadres (agrandir le bassin des cadres supérieurs et renforcer les programmes de relève des cadres).

  • Valeurs et éthique (maintenir un dialogue constant au sujet des valeurs et promouvoir les valeurs fondamentales).

Ces projets ont été présentés soit comme des priorités immédiates, à l’égard desquelles des progrès pourraient être accomplis en quelques mois, soit comme des engagements à long terme. Outre cela, La Relève comprend :

  • Une série d’initiatives supplémentaires à l’échelle de la fonction publique, qui font suite aux consultations de 1997.

  • Une vaste gamme d’initiatives actuellement en cours au sein des ministères.

   D. Analyse

La grande question est de savoir non pas si les projets prévus dans le cadre de La Relève seront réalisés, mais s’ils auront des effets concrets. Il serait toutefois prématuré de tirer des conclusions, puisque l’initiative est en cours depuis moins de deux ans. C’est un délai relativement court, compte tenu de la complexité de l’entreprise et de la nature des objectifs visés.

Néanmoins, il est d’ores et déjà possible de recenser un certain nombre de points forts et de points faibles, dont les conséquences relatives pourraient influer fortement sur les résultats de La Relève.

  • L’accent mis sur l’action immédiate a permis de prendre quelques mesures immédiatement et de donner à l’entreprise plus d’éclat symbolique. Toutefois, faute d’une étude en profondeur des causes sous-jacentes des problèmes que connaît la fonction publique, l’entreprise pourrait rencontrer des difficultés graves. On pourrait, par exemple, perdre une énergie précieuse à soigner les symptômes plutôt que les maux, ou encore ne pas s’attacher suffisamment à l’éventuelle nécessité de modifier les structures et le mode de direction.

  • La Relève a reçu un appui enthousiaste de la classe politique. Sa réussite à long terme reste toutefois tributaire du maintien de cette volonté, et il n’est pas certain que l’administration publique puisse influer sensiblement sur ce que le public pense des fonctionnaires, ou que les pouvoirs en place puissent maintenir leur appui sans l’approbation l’opinion publique.

  • Dans certains cas, les nombreuses mesures que comporte La Relève pourraient aller à l’encontre les unes des autres. En revanche, si l’on adoptait une approche moins globale, on pourrait laisser de côté des initiatives indispensables, ou compromettre la tentative visant à transformer complètement la culture de l’administration publique.

  • On ne sait pas très bien si la reddition des comptes, l’un des engagements compris dans La Relève, portera sur la façon de régler les problèmes ciblés par celle-ci, ou simplement sur la façon de mettre en oeuvre les plans et projets.

Pour un examen plus détaillé, voir « La Relève — Analyse ».

   E. Examen mené par le Parlement

Au cours de la dernière législature, au moment du lancement de La Relève, le Comité permanent des opérations gouvernementales a tenu des audiences sur le programme. Il a ensuite remis un bref rapport dans lequel il a demandé au Parlement de suivre le dossier de près. La Relève n’a toutefois suscité qu’un intérêt restreint par la suite, même si un certain nombre de parlementaires continuent de surveiller son déroulement.

   F. Sensibilisation du public

La Relève n’a pas reçu une attention très considérable de la part des universitaires et des spécialistes des politiques publiques. Pourtant, l’entreprise a fait l’objet d’un nombre considérable de documents d’information, qu’il s’agisse de rapports pangouvernementaux, ou de publications des ministères, sans parler du site Internet qui lui est consacré.

LES RÉFORMES RÉALISÉES DANS QUELQUES AUTRES PAYS

Au cours des vingt dernières années, les gouvernements de la plupart des pays industrialisés ont fait face à des déficits de plus en plus graves dans leur secteur public respectif et à un scepticisme croissant du public quant à l’efficacité des programmes gouvernementaux. Le ressentiment populaire a été d’autant plus aigu que le secteur privé multipliait les mises à pied et que le chômage augmentait. Les médias et la classe politique accusaient alors de plus en plus les fonctionnaires d’être indifférents, flegmatiques et trop payés.

Dans la plupart des pays industrialisés, les pressions financières (et quelques autres facteurs, à des degrés divers) ont donné lieu à des compressions sensibles dans le secteur public.

  • Au Royaume-Uni, entre 1978 et 1995, le gouvernement a réduit de 28 p. 100 l’effectif du secteur public, dans le cadre d’une vaste restructuration (programme « Next Steps ») en vertu de laquelle les trois quarts des fonctionnaires ont été mutés dans des organismes aux fonctions et aux objectifs de rendement étroitement définis.

  • En Nouvelle-Zélande, une crise monétaire survenue en 1984 a déclenché le programme de restructuration le plus radical jamais entrepris dans le secteur public, puisque la taille de celui-ci a été réduite de 60 p. 100 entre 1984 et 1995, par suite de mesures diverses : retraites anticipées, licenciements, privatisations, recours accru aux entrepreneurs à contrat (y compris des contrats de cinq ans pour certains cadres du niveau de sous-ministre) et création d’organismes commercialisés (State-Owned Enterprises).

  • En Australie, entre 1986 et 1995, la taille de la fonction publique a été réduite de 17 p. 100, en vertu d’un programme pangouvernemental (programme d’amélioration de la gestion financière) qui visait avant tout la rentabilité opérationnelle, la délégation du pouvoir et une meilleure reddition des comptes, axée avant tout sur les résultats, dans le cadre d’une structure ministérielle (réformée). (Voir Commission de la fonction publique, document cité dans la Liste bibliographique.)

Au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande surtout, il a fallu que ces réformes structurelles et ces réductions de personnel soient imposées, car les syndicats de fonctionnaires s’y opposaient fortement. Elles ont donc engendré de vastes problèmes au niveau du moral des employés. Toutefois, au fur et à mesure que les réformes avançaient, divers facteurs (attention plus grande à la gestion des ressources humaines, précision accrue des objectifs organisationnels et des objectifs de rendement, sentiment de fournir un meilleur service au public, etc.) semblent avoir débouché sur une satisfaction plus grande, chez une partie des employés du moins.

FONCTION PUBLIQUE 2000

Vers le début des années 80, les mesures prises au cours des années 70 pour renforcer la mainmise des organismes centraux sur les ministères avaient engendré de la frustration et une baisse de moral chez les cadres moyens, dont les doléances concernaient surtout la réglementation excessive de l’administration, l’inflexibilité des règles concernant la passation des marchés, la quantité exagérée de renseignements à fournir aux organismes centraux, l’obligation de recourir à des organismes de services communs peu serviables et trop coûteux, et la lenteur des marches à suivre en matière de classification, de dotation et d’autres mesures touchant le personnel. Le gouvernement de l’époque a donc pris une série de mesures de renouveau visant à « laisser les gestionnaires gérer » et à déléguer aux ministres et aux ministères une partie du rôle des organismes centraux.

Le mouvement a culminé en décembre 1989, lorsque le Premier ministre a annoncé la mise en place de Fonction publique 2000. Ce processus de réforme pangouvernemental, mené par le greffier du Conseil privé, avait comme objectif principal de renouveler la fonction publique afin d’« équiper les fonctionnaires pour le XXIe siècle » et d’améliorer le service au public. Les deux grands thèmes retenus étaient : la réduction des contrôles centraux en vue d’accroître la liberté de gestion et la recherche de « moyens novateurs d’encourager l’efficacité et d’améliorer la prestation des programmes ». Ces deux thèmes s’appliquaient à la fois à la prestation des services aux citoyens et aux réformes internes (p. ex., en simplifiant le régime d’emploi et de gestion du personnel). [Voir Clark, p. 217, document cité dans la Liste bibliographique]

C’est ainsi qu’a été réalisé un vaste programme de réforme des organismes centraux et des ministères hiérarchiques, comportant les éléments suivants :

  • Un passage à des budgets de fonctionnement individuels (ce qui donnait aux gestionnaires le pouvoir de naviguer entre divers postes budgétaires : traitements, honoraires, dépenses de fonctionnement et petits investissements en capital).

  • Un décloisonnement des structures de gestion des ministères.

  • Un remplacement des organisations ministérielles traditionnelles, lorsque cela était possible, par des Organismes de services spéciaux (OSS) ayant pour caractéristiques un mandat plus restreint et (souvent) un mode d’opération commercialisé.

  • Une coordination améliorée de la gestion des ressources humaines, l’accent étant mis sur des valeurs comme l’apprentissage continu, l’attribution de pouvoirs accrus aux employés et la participation des employés.

  • Une réduction des obstacles à la mobilité des employés, par une fusion du groupe de la direction (EX) avec le groupe de la gestion supérieure (SM) et par le lancement d’un processus de reclassification des autres employés dans des catégories plus larges et plus souples.

  • La prise de moyens systématiques visant à supprimer les obstacles et à créer des possibilités pour les membres des groupes désignés (femmes, minorités visibles, autochtones et personnes handicapées).

  • La suppression de l’obligation pour les ministères de recourir aux services communs (sauf pour des raisons graves).

En plus de permettre une réforme administrative, Fonction publique 2000 devait renouveler la culture de la fonction publique. Le gouvernement espérait persuader les fonctionnaires de mettre l’accent sur la qualité des services qu’ils assuraient aux citoyens, plutôt que sur les règles et les marches à suivre. Il voulait également promouvoir l’esprit d’entrepreneuriat dans l’administration publique; les hauts responsables ont été incités à favoriser l’innovation et l’expérimentation et à « encourager la remise en question constructive des politiques et des pratiques » au sein de leurs ministères. [Voir Roberts, document cité dans la Liste bibliographique]

Malgré la mise en place d’un certain nombre de réformes administratives utiles, on a commencé dès 1992-1993 à se rendre compte que Fonction publique 2000 n’avait pas réussi à atteindre ses objectifs principaux, notamment ceux liés à l’amélioration des services et à la modification de la culture sous-jacente. Au sein de la fonction publique elle-même, cet échec relatif était généralement attribué au fait que l’entreprise s’était faite dans un contexte financier de plus en plus difficile et qu’elle devait composer avec des mesures pangouvernementales qui, estimait-on, entravaient l’amélioration de la qualité du service et de la gestion du personnel. En effet, à partir de 1989, il y a eu un gel des traitements, des réductions de personnel, ainsi que des fusions et des suppressions d’organismes. Ce mouvement a abouti, en 1993, à une vaste refonte de l’administration publique. La rapidité excessive du changement a provoqué beaucoup d’incertitude et d’inquiétude au sein des ministères. Par ailleurs, plusieurs observateurs (parmi lesquels le vérificateur général), signalèrent une série d’incidents regrettables, qui semblaient confirmer les réserves de certains quant à la façon dont les gestionnaires utiliseraient leurs pouvoirs discrétionnaires accrus. Les attaques du Parlement et de ses comités, de même que celles des médias, se sont faites de plus en plus virulentes. On reprochait en outre à Fonction publique 2000 d’émaner essentiellement des hautes sphères, de ne pas susciter une participation efficace et une prise en charge parmi les cadres moyens, les autres fonctionnaires et les syndicats et de ne pas remplir ses propres conditions en matière de gestion des ressources humaines et de délégation des pouvoirs. Enfin, certains observateurs soutenaient que, contrairement à l’initiative Next Steps au Royaume-Uni, ou au remodelage de la fonction publique en Nouvelle-Zélande, Fonction publique 2000 ne semblait pas faire l’unanimité en tant que priorité gouvernementale et n’était défendue activement ni par le Premier ministre ni par les membres du Cabinet. [Voir, par exemple, Seidle, p. 82, document cité dans la Liste bibliographique]

Après les élections de 1993, l’étoile de Fonction publique 2000 a pâli rapidement lorsque le gouvernement libéral, nouvellement élu, a fait de la réduction du déficit une priorité urgente et qu’il a amorcé son examen des programmes. En février 1995, le gouvernement a annoncé que ce processus supposerait une réduction nette des dépenses d’environ 9,8 milliards de dollars avant 1997-1998, ce qui signifiait, pour certains ministères, des compressions de dépenses de 20 p. 100 ou plus, tandis que l’effectif global de la fonction publique devrait baisser de 45 000. La deuxième étape de l’examen des programmes, à l’automne de 1995, prévoyait l’épargne de deux milliards de dollars supplémentaires avant 1998-1999 et des réductions d’effectif pouvant atteindre 10 000. Entre 1993 et 1997, les problèmes de ressources humaines ont été mis en veilleuse, car les cadres supérieurs devaient chercher avant tout à réduire leurs programmes, à atteindre leurs objectifs de diminution des dépenses et à « faire plus avec moins » au jour le jour.

LA RELÈVE  RAISON D’ÊTRE

Selon le Quatrième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada, de 1997, La Relève vise à résoudre deux problèmes liés entre eux. Le premier se manifeste par un moral, une satisfaction professionnelle et une motivation à la baisse chez beaucoup de fonctionnaires, comme le reflète précisément le nombre croissant de départs parmi les meilleurs spécialistes et gestionnaires. Le deuxième réside dans la difficulté pour la fonction publique d’attirer, ou de former et retenir par la suite, des personnes possédant les compétences nécessaires pour accomplir le genre de travail que devra effectuer le gouvernement fédéral au fur et à mesure qu’évoluera son rôle dans la société et dans la fédération.

Dans le rapport, on énumère plusieurs facteurs clés associés à ces grands problèmes:

  • Les effets cumulés de la décroissance de la fonction publique, amorcée au début des années 80 : le processus d’examen des programmes, lancé en 1995, aboutira à des réductions d’effectif d’environ 55 000 postes à plein temps (sur un total de 225 000 en 1995), alors que les réductions majeures déjà effectuées ont entraîné des problèmes non résolus de stress, d’incertitude et (dans certains secteurs) des charges de travail insoutenables.

  • Les entrevues de départ révèlent que de plus en plus de fonctionnaires, y compris certains des plus talentueux cadres supérieurs en puissance, décident de démissionner avant l’âge de la retraite, parce que, estiment-ils, leurs talents sont sous-utilisés, la réforme interne nécessaire ne se fera probablement pas et le contexte dans lequel ils travaillent les empêche de bien servir l’intérêt public.

  • Le secteur privé cherche de plus en plus à recruter des cadres supérieurs et des professionnels de la fonction publique, car l’économie est florissante et les « travailleurs du savoir », y compris ceux qui font partie de l’administration publique, de plus en plus recherchés.

  • D’après les statistiques démographiques, le recrutement extérieur a énormément diminué depuis quelques années. Cette baisse, ajoutée aux déséquilibres accompagnant le baby-boom, entraîne une pénurie de personnel qualifié là où il faudrait des compétences nouvelles et non traditionnelles, et elle entraîne un déclin de la créativité.

  • Les départs en retraite auront des effets majeurs sur certains groupes dans l’avenir immédiat, notamment la perte d’une somme d’expérience et de connaissances qui revêtent une importance capitale : jusqu’à 30 p. 100 des cadres supérieurs et des membres de certains groupes scientifiques et professionnels actuellement en place (à la fin de 1996) pourraient prendre leur retraite avant 2000, et 70 p. 100 avant 2005.

  • De plus en plus, les médias dépeignent les fonctionnaires comme des gens paresseux, esclaves du règlement, sans imagination et surrémunérés, les qualités positives étant réservées au seul secteur privé. Ce dénigrement a un effet négatif sur l’opinion que les fonctionnaires se font de leur travail et leur donne l’impression qu’ils ne sont pas appréciés des dirigeants politiques et du grand public. De surcroît, il pousse les jeunes diplômés des universités à faire carrière ailleurs.

  • Le gel prolongé des traitements a aggravé les écarts anormaux entre la rémunération de certains fonctionnaires et celle de leurs équivalents dans le secteur privé. Même si, comme on l’affirme dans le rapport, les fonctionnaires ne s’attendent pas à être rémunérés au même niveau que dans le secteur privé, les traitements doivent être suffisants pour leur permettre d’assumer leurs responsabilités de famille, par exemple d’envoyer leurs enfants à l’université.

  • L’attention insuffisante que l’on a accordée à l’interne aux problèmes naissants touchant la démotivation et le perfectionnement des compétences a rendu inefficaces les mesures peu coûteuses comme les mutations ou les détachements interministériels. De plus, les promotions stratégiques et le recrutement externe sont venus exacerber ces problèmes.

C’est pour répondre à un certain nombre de ces préoccupations et pour contrer leurs effets réels et éventuels que la greffière a annoncé une série de mesures de renouvellement regroupées sous le titre « La Relève ».

LA RELÈVE — PLAN D’ACTION DÉTAILLÉ

Dans le Quatrième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada de 1997, on a annoncé une série de premières mesures, à savoir :

  • Un programme de perfectionnement accéléré pour un certain nombre de cadres supérieurs en place et la création d’un bassin de candidats présélectionnés prêts à devenir sous-ministres adjoints.

  • Des modifications au processus de nomination des sous-ministres adjoints de manière à faciliter les affectations de perfectionnement et l’acquisition d’expérience.

  • La création d’un comité consultatif externe chargé de donner des avis sur la rémunération des cadres supérieurs de la fonction publique et des autres personnes nommées par le gouverneur en conseil.

  • Des initiatives visant à renforcer certains groupes professionnels (élaboration des politiques, communications, professions scientifiques, ressources humaines, informatique et gestion de l’information).

  • Des efforts pour renforcer le recrutement externe, y compris une amélioration de l’efficacité des programmes en place destinés à attirer des professionnels et de futurs gestionnaires.

  • L’examen par les ministères de leur situation en matière de ressources humaines, afin d’établir des plans d’action à l’intention du greffier et d’autres initiatives s’appliquant tant aux ministères que, au besoin, à l’ensemble de la fonction publique.

Quelque temps avant la publication du Rapport, un groupe de travail de hauts fonctionnaires a été créé pour coordonner les initiatives annoncées dans le document, et un comité de sous-ministres, le Comité d’examen des plans, a été formé pour étudier les communications transmises par les ministères et organismes au cours d’avril et mai 1997. Les résultats de ce processus de consultation, qui englobait tous les ministères et organismes centraux du gouvernement fédéral, les six collectivités fonctionnelles et les conseils régionaux de hauts fonctionnaires fédéraux, ont par la suite été examinés. Il en est ressorti un plan d’action que les sous-ministres ont endossé en juillet 1997. En octobre 1997, un sommaire des conclusions des consultations, ainsi que le plan d’action, ont été publiés sous le titre La Relève : Un parti pris pour l’action.

Dans l’introduction de ce document, dans la section intitulée « Le consensus qui se dégage », nous avons signalé que la portée des préoccupations évoquées dans le rapport de la greffière du Conseil privé au début de l’année avait été considérablement élargie. Il allait falloir :

  • Obtenir de bien meilleures données pour pouvoir faire une planification stratégique des ressources humaines.

  • Établir une stratégie globale de recrutement et de maintien des effectifs.

  • Accorder une attention accrue à la santé de l’organisation.

  • Mieux reconnaître l’apport des employés et redonner à ceux-ci leur fierté.

  • Considérer la rémunération comme une question majeure.

  • Faire en sorte que les femmes et les autres groupes visés par l’équité en matière d’emploi soient mieux représentés dans la catégorie de la direction (EX).

  • Favoriser une plus grande mobilité interministérielle et interfonctionnelle et créer une culture de l’apprentissage.

  • Répondre aux besoins particuliers du personnel de soutien.

  • Favoriser un meilleur équilibre entre le travail et la vie personnelle.

  • Établir un leadership renforcé et axé sur le changement, ainsi qu’une meilleure reddition des comptes (tant à leur propre sujet qu’au sujet de leurs subordonnés); et régler les problèmes à dimension humaine au sein de l’organisation.

Pour traduire cette portée élargie des besoins et des problèmes, on a lancé huit projets à portée générale que géreront les organismes centraux — Bureau du Conseil privé, Commission de la fonction publique et Secrétariat du Conseil du Trésor. Ce cadre demeure à ce jour la structure sur laquelle se greffent les initiatives d’ensemble de La Relève :

  • Stratégie de recrutement, d’équité en matière d’emploi et de maintien du personnel (regarnir et conserver un effectif compétent et représentatif).

  • Rémunération (réviser la rémunération des cadres supérieurs, négocier les conventions collectives et résoudre les problèmes liés à l’équité en matière d’emploi et aux pensions).

  • Norme générale de classification (remplacer les multiples classifications d’emploi par une série de catégories plus simples).

  • Réforme de la dotation (remettre le pouvoir de dotation aux ministères et le rendre plus souple).

  • Fierté et reconnaissance (renforcer les programmes internes de reconnaissance et la sensibilisation extérieure).

  • Relations de travail (négocier et conclure les conventions collectives et améliorer les relations en général).

  • Programmes de perfectionnement des cadres (élargir le bassin de cadres supérieurs et renforcer les programmes de relève du personnel de direction).

  • Valeurs et éthique (maintenir le dialogue déjà en cours sur les valeurs et faire la promotion des valeurs fondamentales).

Ces projets ont été présentés à la fois comme des priorités immédiates, à l’égard desquelles des progrès significatifs pourraient être réalisés en quelques mois, et des engagements à long terme. Outre cela, La Relève comprend :

  • Une série d’initiatives supplémentaires à l’échelle de la fonction publique qui font suite aux consultations de 1997.

  • Une vaste gamme de mesures prises à l’intérieur des ministères.

LA RELÈVE — RAPPORTS D’ÉTAPE SUR LES PRINCIPALES INITIATIVES

Dans les sections qui suivent, nous donnons une brève description de chaque projet tel qu’il avait conçu au départ et un état d’avancement établi d’après le Premier rapport sur la mise en oeuvre de La Relève, publié en mars 1998 (voir la Liste bibliographique).

   A. Recrutement, équité en matière d’emploi et maintien du personnel

Axé sur les questions démographiques et les futures pénuries de compétences soulignées dans le rapport de 1997 de la greffière du Conseil privé, ce projet vise l’établissement d’une vaste stratégie de recrutement et de maintien des effectifs qui, d’une part, répondra aux besoins prévisibles en matière de compétences et de connaissances et, d’autre part, rendra la fonction publique représentative de la population en général en s’attaquant aux problèmes d’équité en matière d’emploi.

Pour atteindre l’objectif, qui est de renouveler et de conserver des effectifs compétents et représentatifs, une stratégie en deux étapes a été élaborée :

a) La phase I comprend une enquête sur les besoins ministériels et pangouvernementaux, une analyse du marché du travail, le recensement des secteurs qui nécessitent un recrutement ciblé ou des efforts de maintien du personnel et l’établissement d’une estimation des coûts. Calendrier : automne 1997 pour la présentation d’un exposé au Comité des hauts fonctionnaires, après quoi les Commissaires de la fonction publique donneront l’autorisation de procéder au recrutement externe (aucune date).

b) La phase II comportera la conception, l’établissement du coût et la mise en oeuvre d’une stratégie de recrutement et de maintien, adaptée aux besoins des ministères et aux objectifs pangouvernementaux, « notamment en ce qui touche l’équité en matière d’emploi ». Calendrier : exposé à l’intention des ministres au cours du premier semestre de 1998.

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre :

  • on a déjà commencé à recruter dans certains secteurs critiques (p. ex., des informaticiens);

  • des analyses démographiques concernant trois groupes « à risques » (les cadres supérieurs, les groupes qui s’occupent d’inspection et de réglementation et la collectivité des sciences et de la technologie) sont en cours, afin d’appuyer l’élaboration de plans de recrutement);

  • l’analyse démographique de quatre grands ministères est en marche; elle viendra appuyer les stratégies de recrutement, de maintien des effectifs et d’équité en matière d’emploi et servira de modèle dans les autres ministères.

   B. Rémunération

Soulignant l’importance qu’a revêtue la rémunération dans les consultations avec les fonctionnaires et la nécessité d’établir des niveaux de traitement suffisamment élevés pour permettre au gouvernement d’attirer, de conserver et de motiver ses employés, le rapport indique que le Secrétariat du Conseil du Trésor entend :

a) négocier des conventions collectives (calendrier : avant la fin de 1998),

b) élaborer un régime de rémunération des cadres de direction (calendrier : rapport provisoire présenté à l’automne de 1997 au président du Conseil du Trésor par un comité consultatif, après quoi des propositions seront soumises au Conseil du Trésor),

c) résoudre les autres questions encore en suspens (calendrier : aucune date)

  • régler les plaintes de l’Alliance de la fonction publique du Canada en matière d’équité salariale,

  • élaborer des options de réforme du Régime de pensions de la fonction publique,

  • adapter la politique de rémunération en fonction de la Norme générale de classification.

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre :

  • En ce qui concerne les employés syndiqués : six conventions collectives ont été conclues, les augmentations annuelles se situant d’une manière générale autour de 2,5 p. 100; douze sont en cours de négociation et huit en sont à l’étape de l’intervention de tierces parties (conciliation/médiation/arbitrage). Parmi ces dernières, il faut citer les négociations avec l’Alliance de la fonction publique du Canada, le plus gros syndicat du secteur public. Celle-ci a rejeté le 20 septembre 1998 une offre qui regroupait un règlement immédiat du dossier de l’équité en matière d’emploi et une augmentation de traitement se situant au-dessous de 2 p. 100 par an.

  • Pour les cadres de direction, le 20 février 1998, le gouvernement a accepté les recommandations d’un comité consultatif mixte (secteur public/secteur privé) qui avaient été soumises huit jours auparavant et qui suggéraient des augmentations de traitement allant de 4 p. 100 (niveau EX1) à 19 p. 100 (sous-ministres des échelons supérieurs).

  • Le gouvernement maintient ses engagements d’assurer l’équité en matière d’emploi et de résoudre les problèmes encore en suspens.

   C. Norme générale de classification (NGC)

Le remplacement des multiples classifications d’emploi par une série de catégories simplifiées est en cours depuis un certain temps. Les auteurs du rapport sur La Relève mettent cette initiative sur le même plan que les huit projets principaux. Selon eux, on reconnaît généralement que l’actuel système de classification est complexe, coûteux et rempli d’obstacles pour les employés qui veulent acquérir une expérience nouvelle, notamment les femmes.

Dans le cadre de ce projet, le Secrétariat du Conseil du Trésor s’est engagé à mettre en place un mécanisme unique et non sexiste d’évaluation des emplois, qui favorisera l’avancement et rattachera plus étroitement les besoins en ressources humaines aux besoins organisationnels. On fera aussi une étude sur la rentabilité et les coûts de cette réforme et élaborera un plan d’application (dont la réalisation sera pilotée à l’échelle des ministères). Calendrier : automne 1997 : exposés à l’intention des fonctionnaires du Conseil du Trésor et des ministres; mise en oeuvre au cours de 1998.

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre, la NGC a été entérinée par les ministres du Conseil du Trésor le 6 novembre 1997; la rédaction des descriptions de travail et l’évaluation se poursuivent. Les deux premiers numéros d’une série de guides à l’usage des ministères ont été terminés par le Secrétariat du Conseil du Trésor, et « les travaux avancent comme il se doit pour permettre une conversion en 1999 ».

   D. Réforme de la dotation

La délégation aux ministères d’un pouvoir accru en matière de dotation et une meilleure utilisation des marges de manoeuvre existantes, tels sont les principaux moyens de corriger les défauts actuels du processus de dotation, considéré comme lent, tatillon et inflexible.

En ce qui concerne le projet visant à rationaliser le processus de dotation et à déléguer les pouvoirs, de manière à mieux répondre aux besoins opérationnels de l’administration publique, la Commission de la fonction publique cherchera, de concert avec les ministères, à profiter au maximum de ce que le cadre législatif actuel offre en matière de souplesse, d’adaptation et de mobilité, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de la fonction publique, afin de mieux refléter les valeurs de la fonction publique. Calendrier : mise en oeuvre à partir de l’automne 1997.

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre, dès juillet 1997, la Commission de la fonction publique a levé l’interdiction sur les mutations d’employés d’un groupe professionnel à l’autre, ce qui ouvre la porte à une mobilité accrue et à de meilleures occasions d’apprentissage.

D’une manière plus générale, les ministères sont dorénavant responsables de leur dotation interne jusqu’au niveau EX. Une première phase de la réforme, axée sur la consultation des parties prenantes et la suppression des restrictions sur les pouvoirs de dotation délégués aux ministères, devait être entièrement réalisée dès octobre 1998. Une deuxième étape, qui comprendra des forums d’information sur les pratiques les plus utiles, devait être réalisée au cours de 1998, de même que la troisième étape, qui prévoit l’élaboration d’un règlement allégé et son entrée en vigueur dès avril 1999.

   E. Fierté et reconnaissance

L’image négative que la fonction publique projette dans le public et chez les employés eux-mêmes, ainsi que les effets que cette perception pourrait avoir sur le recrutement et le maintien de l’effectif, sont des sujets d’inquiétude qui méritent une grande attention.

Pour atteindre l’objectif qui consiste à « renouveler la fierté à l’égard de la fonction publique en tant qu’institution de calibre mondial », un sous-ministre désigné et un nombre important de responsables politiques et de hauts fonctionnaires se sont engagés à maximiser le potentiel des événements annuels consacrés à la fonction publique, à réorganiser les programmes de primes pangouvernementaux et ministériels, à faire connaître aux Canadiens et aux Canadiennes l’importance de l’apport de la fonction publique, à obtenir le soutien du secteur privé et à surveiller le niveau de fierté au sein de la fonction publique en comparant ce qui se fait dans d’autres administrations. Calendrier : un exposé au Comité des hauts fonctionnaires sur les résultats de la mise en oeuvre initiale du plan était prévu pour l’automne 1997.

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre, en juillet 1997, un comité de sous-ministres a recommandé un cadre de travail axé sur trois éléments : rehausser la fierté des fonctionnaires envers la fonction publique; sensibiliser la population et les principales parties prenantes à l’importance des réalisations de la fonction publique; et rendre les programmes de prix et de récompenses plus efficaces. De plus, les sous-ministres ont fait remarquer que plusieurs ministres et hauts fonctionnaires avaient commencé à défendre la fonction publique de manière plus active et plus visible.

Parmi les initiatives prises par les ministères, le rapport cite des expositions pour présenter les programmes et les services, un renouvellement plus large des programmes de fierté et de reconnaissance et la révision (en cours) par le Conseil du Trésor de la politique pangouvernementale de prix et de récompenses.

   F. Relations de travail

La liste des projets traduit l’importance qui est accordée à la participation des employés dans toute la gamme des initiatives de La Relève et l’éventuelle contribution que les résultats positifs pourraient apporter aux négociations collectives en cours.

Le projet des relations de travail a pour objectifs d’accroître la participation des employés et de négocier des conventions collectives avec les syndicats de fonctionnaires. Le Secrétariat du Conseil du Trésor sera le principal organisme avec lequel les ministères collaboreront pour créer un cadre général de relations de travail efficaces et pour mener à bien la négociation des contrats. Calendrier : conclusion des négociations au cours de 1998.

État d’avancement en mars 1998 : D’après le Rapport sur la mise en oeuvre,

  • à cette date, six conventions collectives avaient été conclues,

  • douze étaient en négociation, et

  • huit en étaient à l’étape de l’intervention d’une tierce partie (médiation, conciliation, etc.).

Les négociations n’ont pas toutes été menées à terme sans acrimonie. Par exemple, le plus important syndicat du secteur public (l’Alliance de la fonction publique du Canada) s’est retiré des pourparlers le 20 septembre 1998, sur l’avis du conciliateur qui avait jugé insurmontables les différences d’opinion entre les deux parties. Le négociateur du syndicat a déclaré : « C’est peu dire que nous sommes furieux ». Par la suite, un vote de grève a débouché sur un appui à 68 p. 100 en faveur de grèves tournantes. Une entente temporaire a néanmoins été conclue le 13 novembre 1998 — c’était la première fois en dix ans que le gouvernement et l’Alliance en arrivaient à un accord sans qu’il y ait eu interruption importante du travail.

   G. Programmes de perfectionnement d’ensemble

Répondant aux arguments présentés dans le rapport de 1997 de la greffière du Conseil privé au sujet des effets prévisibles de l’évolution démographique et des départs en retraite sur le bassin de cadres supérieurs, le programme de perfectionnement d’ensemble reprend en substance la plupart des initiatives énumérées dans ce document. Les voici, avec leurs dates cibles :

  • Mettre en place un programme de perfectionnement accéléré pour les cadres qualifiés ayant beaucoup de potentiel, et évaluer le processus de sélection (date cible : automne 1997).

  • Créer un bassin de hauts fonctionnaires les compétences voulues pour accéder au niveau de sous-ministre adjoint (SMA), qui seront prêts à être nommés au fur et à mesure des besoins et à qui on pourra faire acquérir plus facilement une expérience diversifiée, et évaluer les processus de sélection (date cible : automne 1997).

  • Régler les problèmes d’admissibilité au niveau de la haute direction pour les spécialistes, notamment en définissant les exigences d’admissibilité pour les postes équivalents aux postes de direction (date cible : automne 1997).

  • Établir des mécanismes de transition pour assurer l’accès à la catégorie de la gestion.

  • Moderniser les programmes de recrutement externe pour la catégorie de la gestion :

- le Programme de formation des cadres, qui recrute des gens pour la filière de la gestion (date cible : automne 1997)

- le Programme d’affectations de carrière, qui offre aux employés non gestionnaires des affectations en vue d’acquérir des compétences et de développer leur potentiel en gestion (date cible : printemps 1998).

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre :

  • Plus de 15 p. 100 des membres du groupe EX ont présenté leur candidature au programme de perfectionnement accéléré et au programme de préqualification, et plus de la moitié des candidats retenus pour la préqualification avaient été placés après six mois, tandis que la plupart des candidats au perfectionnement accéléré avaient commencé leurs affectations complémentaires.

  • Un deuxième cycle du programme de préqualification des sous-ministres adjoints a été lancé en janvier 1998, et un deuxième cycle du programme de perfectionnement accéléré est en cours au moment ou ces lignes sont écrites (septembre 1998).

  • Un régime de gestion collective pour les SMA a été instauré en juillet 1997.

  • Le Programme de formation des cadres et le Programme d’affectations de carrière ont été modifiés.

  • Une structure d’évaluation, des mécanismes permettant l’ascension aux groupes EX et l’examen des besoins des groupes particuliers ne sont pas terminés.

   H. Valeurs et éthique

Selon le Rapport, la portée et l’ampleur des changements survenus dans la fonction publique au cours des années récentes ont fait ressortir des problèmes de reddition des comptes, des défis moraux et des difficultés en matière de leadership et de gestion des ressources humaines.

Afin d’examiner les relations entre les valeurs existantes et les valeurs naissantes, de recommander des façons d’harmoniser celles-ci avec les opérations et d’offrir aux fonctionnaires l’occasion de clarifier les valeurs fondamentales et d’y renouveler leur adhésion, un sous-ministre désigné coordonnera un dialogue au sein de la fonction publique ainsi que l’élaboration de recommandations (date cible : travail déjà en cours avec exposé au Comité des hauts fonctionnaires prévu pour fin 1997/début 1998).

État d’avancement en mars 1998 : Selon le Rapport sur la mise en oeuvre :

  • Les discussions au sujet des valeurs doivent être considérées comme faisant partie d’un processus permanent, qui se rattache de près aux questions de fierté et de reconnaissance, entre autres.

  • Des dialogues sur les valeurs ont été organisés dans plus de 20 ministères et dans divers autres endroits.

  • Les valeurs et l’éthique ont été intégrées dans les programmes de base du Centre canadien de gestion (CCG) et de la Commission de la fonction publique, tandis que certaines initiatives du Conseil du Trésor, comme la diversification des modes de prestation des services, profitent de l’attention qui est portée à l’équilibre entre les valeurs traditionnelles et les valeurs de gestion, comme l’efficience et les résultats.

   I. Autres mesures pangouvernementales

Pour traduire l’élargissement du champ d’application de La Relève, auquel semblent avoir donné lieu les consultations tenues dans l’ensemble de la fonction publique en 1997, on énumère dans le Rapport, huit domaines d’action supplémentaires. Les mesures à prendre ont été pour la plupart pilotées par le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique. Il s’agissait d’initiatives à dimensions multiples dont les calendriers d’exécution allaient de l’immédiat à 1999. Les voici :

  • Santé au travail : parmi les mesures à prendre, citons des enquêtes dans les ministères, l’élaboration d’indicateurs de santé organisationnelle visant à permettre de surveiller les progrès accomplis, la création de possibilités d’apprentissage en ce qui concerne les valeurs et la conscience sociale et la simplification des processus d’information.

  • Équité en matière d’emploi : on souhaitait, entre autres, instaurer un cadre et un plan stratégiques, mener des enquêtes et prendre des mesures pour toucher les groupes désignés; des échanges interministériels de meilleures pratiques devaient également être effectués.

  • Mobilité : on entendait notamment examiner les ententes existantes et potentielles concernant la mobilité et les échanges et établir des partenariats avec d’autres administrations publiques et des ONG.

  • Classification et dotation : on prévoyait, entre autres, de poursuivre les ajustements qui permettent de faire évoluer la classification et les concours; d’adapter les pratiques en fonction de la Norme générale de classification; et de procéder, dans quatre ministères, à des nominations pilotes de sous-ministres adjoints au niveau.

  • Services stratégiques en matière de ressources humaines : on voulait notamment dispenser des formations et prendre divers moyens pour rendre les gestionnaires des ressources humaines plus accessibles et davantage axés sur la stratégie et les résultats.

  • Gestion des ressources humaines fondée sur les compétences : on désirait, entre autres, organiser des formations et surveiller les mesures pilotes dans ce domaine.

  • Personnel de soutien administratif : on entendait notamment prendre des mesures pour réaliser un partage pangouvernemental des ressources et des renseignements sur la mise en place des nouvelles technologies et on envisageait des échanges de services et de personnel.

  • Apprentissage, formation et perfectionnement : on souhaitait, entre autres mesures visant à implanter une culture de l’apprentissage : réaliser des projets pilotes interministériels; effectuer des échanges d’installations, de meilleures pratiques et de renseignements sur les besoins en apprentissage de gestion; établir des réseaux de haut niveau; et refondre les programmes de base du Centre canadien de gestion.

État d’avancement en mars 1998 : Le Rapport sur la mise en oeuvre renferme des commentaires généraux sur les initiatives évoquées ci-dessus, qui diffèrent des initiatives pangouvernementales déjà abordées.

Santé au travail : Les progrès cités sont : des enquêtes effectuées (ou prévues) auprès des employés; une enquête pangouvernementale par le Conseil du Trésor sur l’avis des employés au sujet de leur milieu de travail; l’examen par les sous-ministres de l’opportunité de tenir d’autres enquêtes pangouvernementales.

Mobilité : Outre les mesures déjà mentionnées, comme les déploiements intercatégories, les progrès accomplis comprennent des mesures visant à faciliter la mobilité interministérielle au sein des collectivités fonctionnelles, la signature d’ententes avec cinq administrations publiques afin de faciliter les échanges avec elles; une promotion plus active d’un programme qui aidera les cadres supérieurs fédéraux à se rendre comme boursiers invités dans des universités canadiennes; et une attention à la possibilité d’élargir un programme d’échanges entre le gouvernement fédéral et d’autres gouvernements, le secteur privé et le secteur parapublic.

Gestion des ressources humaines en fonction des compétences : Aucun progrès précis n’est cité, mais, selon le Rapport, la Commission de la fonction publique entend examiner une nouvelle définition de la promotion fondée sur les compétences plutôt que sur le salaire, en même temps que de nouvelles normes d’évaluation et de sélection des employés.

Apprentissage et formation : Parmi les progrès accomplis, on cite la possibilité pour les ministères d’accéder à des centres de formation des ressources dans sept régions sur dix, le lancement d’un réseau de ressources d’apprentissage sur Internet par la Commission de la fonction publique et l’établissement d’une gamme de séminaires et de groupes de discussion pour certains groupes de fonctionnaires.

Personnel de soutien administratif : Des consultations ont été tenues dans toutes les régions et dans tous les ministères, et un rapport contenant 75 recommandations a été rédigé. Selon le Rapport sur la mise en oeuvre, le rapport en question, Valoriser nos gens, a permis de définir une vaste gamme de mesures à prendre; toutefois aucun exemple précis n’est fourni.

   J.  Mesures prises dans les ministères

À côté des mesures portant sur l’ensemble de la fonction publique, on a annoncé une série de projets s’appliquant à des ministères particuliers.

À ce niveau, à quelques exceptions près, les initiatives semblent s’inscrire dans le travail normal de gestion des ressources humaines, sans qu’il soit facile de les distinguer de celles que les gestionnaires prenaient déjà au cours des années antérieures à La Relève. Il est possible de dire essentiellement toutefois, que la gestion des ressources humaines, prise globalement, recevra une attention accrue.

Parmi les mesures analogues à celles qui sont énumérées dans les Parties III (Budget principal des dépenses) des ministères ces dernières années, citons : des analyses, des enquêtes et des consultations sur les questions de santé; des enquêtes, des efforts de gestion stratégique et des initiatives de marketing pour faire avancer l’équité en matière d’emploi; un recours accru aux descriptions de travail génériques; des stratégies, des programmes et des méthodes de formation; des stratégies spéciales pour répondre aux besoins en recrutement; et une insistance plus grande sur la mesure du rendement dans la gestion des ressources humaines.

Certaines initiatives se rattachent plus franchement aux priorités de La Relève, par exemple : une attention plus poussée à la composition démographique de l’effectif et à sa gestion stratégique; un accent nouveau sur les détachements et autres programmes internes de perfectionnement qui avaient été mis de côté ces dernières années; et des communications par les ministères pour faire valoir La Relève.

État d’avancement en mars 1998 : Un deuxième volume du Rapport sur la mise en oeuvre contient les rapports de chacun des ministères, ainsi que ceux des principales collectivités fonctionnelles.

Ce document présente des renseignements sommaires sur la vaste gamme des activités entreprises par les ministères et les groupes, par exemple :

  • apprentissage et formation (dans la plupart des cas, des dépenses accrues au titre de la formation, des projets se rattachant de plus près aux fonctions et un accent plus marqué sur la gestion de carrière);

  • mobilité (réalisée par voie de transferts intra et interministériels, de concert avec la formation et le perfectionnement des compétences);

  • mesures de recrutement et de promotion (qui comportent généralement l’augmentation des concours internes et du recrutement externe, ainsi qu’une participation plus grande aux programmes concernant les cadres supérieurs);

  • mesures touchant la gestion des ressources humaines y compris l’élaboration de profils de compétences pour permettre une embauche et des promotions fondées sur les compétences et des initiatives touchant l’équité en matière d’emploi et la diversification de l’effectif;

  • mesures visant les communications internes, dont on reconnaît parfois qu’elles sont nécessaires pour neutraliser le scepticisme qui règne au sujet de La Relève; et engagement à mieux gérer les ressources humaines;

  • initiatives concernant la culture organisationnelle qui consistent surtout à mieux reconnaître le mérite des employés et à leur accorder des pouvoirs accrus, tout en prêtant davantage d’attention aux valeurs de la fonction publique et aux problèmes que ces valeurs supposent.

En général, les rapports des ministères et des groupes fonctionnels traduisent le fait que La Relève est perçue comme une orientation et un engagement à agir plutôt que comme un programme clairement défini. Dans leurs rapports, les ministères offrent des aperçus de leurs activités en gestion des ressources humaines, dont beaucoup sont courantes et n’ont pas grand chose à voir avec La Relève, et qui voire, dans certains cas, comportent des mesures déjà amorcées avant que La Relève n’ait même été annoncée. En général, toutefois, on note dans ces documents que La Relève a poussé les ministères à s’intéresser de plus près à la gestion de leurs ressources humaines.

LA RELÈVE – ANALYSE

La fonction publique est essentiellement une organisation qui réalise des plans. L’exécution consciencieuse des engagements et programmes formulés dans le cadre de La Relève peut donc être tenue pour acquise, à condition que les ressources nécessaires soient disponibles.

La principale question à se poser n’est pas de savoir si les projets seront réalisés, mais s’ils auront des effets concrets. Dans la négative, le programme pourrait bien, en dernière analyse, susciter des attentes et ouvrir la voie à des désillusions subséquentes et à une éventuelle aggravation du manque de moral que La Relève devait justement corriger.

Dans l’analyse qui suit, nous définissons et examinons un certain nombre de facteurs qui permettront de déterminer si les mesures prises dans le cadre de La Relève auront des effets réels. Ce sont entre autres :

  • les enjeux conceptuels, notamment ceux qui concernent la façon dont sont compris les problèmes à résoudre;

  • les enjeux stratégiques, qui concernent la gestion et la coordination de toute une série de facteurs, à la fois internes et externes, de manière à favoriser au maximum la réussite de l’entreprise.

   A. Enjeux conceptuels

L’effet sur la fonction publique des facteurs évoqués dans le rapport de 1997 de la greffière du Conseil privé – compression d’effectifs et critiques plus virulentes de la part des médias et des responsables politiques – est incontestable. Toutefois, il est important de reconnaître que beaucoup des grands problèmes sur lesquels la Relève est axée, comme le manque de moral, la faiblesse de la capacité stratégique et l’absence de créativité, ont précédé la grande décroissance des années 90, avaient été prévus au sein de la fonction publique avant qu’ils ne se produisent et avaient même parfois déjà engendré des mesures de renouveau [voir Fonction publique 2000]. Même si est possible que les événements survenus au cours des années 90 aient exacerbé ces problèmes, ils ne peuvent pas en être la cause.

Le fait que La Relève soit orientée sur l’action a permis d’éviter que les mesures concrètes ne soient entravées par d’absconses considérations à propos des causes sous-jacentes de la situation et de faire porter les efforts portent sur une vaste gamme d’enjeux et de problèmes en matière de ressources humaines. Le principal avantage de cette approche est que les mesures ont pu être prises réellement et que l’on a évité bien des discussions interminables. Elle pourrait toutefois comporter des inconvénients.

      1. Problèmes et symptômes

Premièrement, La Relève ne fait pas de distinction claire entre les causes et les symptômes des problèmes. Il existe par conséquent un risque que les moyens et les énergies servent à supprimer les derniers plutôt que les premières.

Par exemple, dans son rapport de 1997, la greffière du Conseil privé mentionne, parmi les motifs de satisfaction offerts par la fonction publique, les suivants : l’occasion pour les fonctionnaires de contribuer au bien public et d’y fournir leur apport, ainsi que les possibilités de se perfectionner personnellement et de faire carrière. Toutefois, pour ce qui concerne les mesures annoncées, la greffière met l’accent, semble-t-il, sur l’avancement dans la carrière, la rémunération et d’autres avantages personnels, en prêtant une attention particulière au groupe de la direction et en laissant entendre que le mécontentement qui règne à ce niveau serait la cause première du malaise qui prévaut dans la fonction publique.

Le diagnostic que les initiatives de 1997 permettent de déduire est peut-être le bon. Toutefois, il existe également deux autres possibilités. Ou bien le malaise des fonctionnaires provient avant tout des obstacles organisationnels ou autres, qui les empêchent de savourer la satisfaction de servir le public. Ou bien le véritable problème réside dans les valeurs et les attentes des fonctionnaires (ou du moins de certains d’entre eux) qui, si elles se trouvent satisfaites à court terme, ne feront que renforcer les motifs qui sous-tendent l’actuelle démotivation et les autres problèmes que l’on connaît.

Cette dernière possibilité peut s’appuyer sur au moins une grande étude menée auprès des cadres supérieurs des organismes centraux à la fin des années 70 (voir Campbell et Szablowski, document cité dans la liste bibliographique). Selon cette enquête, la plupart des hauts fonctionnaires sont motivés avant tout par des objectifs carriéristes (défi et avancement, par exemple), plutôt que par l’idée de servir le public ou par des motifs humanitaires plus généraux. Reflet de l’expansion rapide que la fonction publique (et, donc, des possibilités d’avancement) connaissait à cette époque, le tableau que brossent les auteurs de l’étude des satisfactions offertes par une carrière dans le secteur public est extrêmement positif. Toutefois, les ambitions de carrière, qui contribuaient à la satisfaction du personnel au cours des années 70, seraient devenues de plus en plus déphasées par rapport à la réalité dans le contexte d’austérité qui a régné au cours des années 80 et 90. Si les attentes fondées sur les réalités des années 60 et 70 continuent d’exister dans la culture des cadres supérieurs du secteur public, ou dans celle de l’ensemble des fonctionnaires, elles ne pourront engendrer que des frustrations, étant donné ce que l’on peut prévoir. Les mesures annoncées dans le rapport de 1997 ne rétabliront pas les conditions qui sous-tendaient le contexte d’expansion dans lequel baignait l’administration publique au cours des années 60, et l’on ne peut pas s’attendre à les voir renaître compte tenu des tendances actuelles.

Le problème principal réside-t-il dans les attentes des fonctionnaires, dans la culture et les structures actuelles de l’administration publique, dans les effets des compressions de personnel et des réductions budgétaires récentes, ou dans plusieurs de ces facteurs à la fois? Quoi qu’il en soit, la solution ne sera satisfaisante que si les causes sont bien comprises et expliquées. Si l’on faisait enquête, on trouverait peut-être confirmation de ce qui est sous-entendu dans l’étude de Campbell et Szablowski (laquelle concernait une autre génération) à savoir que le vrai problème, ce sont peut-être les valeurs des fonctionnaires. On pourrait au contraire être amené à constater que leurs idéaux se fondent sur le désir de servir le public et que leurs difficultés proviennent de la culture et des structures dans lesquelles ils doivent travailler. On pourrait aussi être conforté dans les idées qui ont présidé au lancement de La Relève. Pour mener à bien cette enquête, il faudrait se poser les questions suivantes :

  • Si les priorités des fonctionnaires se sont modifiées, est-ce le simple reflet d’un changement survenu dans l’ensemble de la société ou bien l’indice d’une évolution spécifique à l’administration publique? Dans un cas comme dans l’autre, peut-on y changer quelque chose, ou vaut-il mieux chercher à adapter les organismes publics en conséquence?

  • Est-il possible que l’expansion rapide qu’a connue la fonction publique au cours des années 60 et 70 ait créé de nouveaux problèmes d’échelle et de dépersonnalisation et un certain effritement du sentiment d’appartenance et de la communauté d’objectifs qui prévalaient autrefois? Si c’est le cas, faut-il maintenant apporter des changements structurels?

  • Se pourrait-il que les fonctionnaires en soient arrivés à se demander sérieusement si une grande partie de ce qu’ils font est vraiment destiné à servir le public ou à soutenir les ambitions personnelles des hauts fonctionnaires et des ministres, et pourraient-ils, par défaut, s’être rabattus sur leurs ambitions personnelles? Si oui, que peut-on y faire?

  • Les fonctionnaires considèrent-ils les valeurs traditionnelles de la fonction publique comme pouvant sous-tendre le bon rendement et la satisfaction au travail, ou pourraient-ils au contraire y voir un obstacle, dans des organisations où le succès repose essentiellement sur la capacité de gérer sa carrière? Si cette dernière éventualité est la bonne, comment les études internes peuvent-elles permettre de déceler ce problème et comment pourrait-on le résoudre?

  • Pour pousser encore plus loin l’interrogation : est-il possible que l’introduction, en proportion croissante, de fonctions professionnelles et quasi-professionnelles « du savoir » généralement comparables, dans des organisations qui demeurent fortement hiérarchisées, où les différences de situation et de rémunération sont marquées, soit à l’origine d’un malaise (notamment du cynisme au sujet des valeurs) que les compressions récentes n’ont fait qu’aggraver? Si oui, comment pourrait-on réformer la fonction publique pour éviter cela?

Dans son rapport, le groupe de travail composé de sous-ministres, qui s’est penché sur les valeurs et l’éthique en 1996 et dont les constatations ont beaucoup influé sur l’approche adoptée dans La Relève à cet égard, fait bien ressortir les défaillances explicatives que nous venons d’évoquer. En effet, le groupe soutient que les problèmes de valeurs constituent un élément important du malaise qui affecte actuellement la fonction publique. De plus, il fait quelques déclarations extrêmement franches sur le sentiment d’aliénation qui règne parmi les cadres moyens, et sur certaines perceptions fort répandues, à savoir que les membres de la direction parlent beaucoup mais n’agissent guère pour valoriser les employés et cherchent plutôt à servir leur propre cause et à défendre leur territoire (voir le rapport, p. 52, document cité dans la liste bibliographique). Toutefois, dans son rapport, le groupe n’explique pas les causes de cette situation, sinon en invoquant les pressions entraînées par les compressions d’effectif et la lourdeur de la charge de travail. Par conséquent, ses recommandations manquent un peu de substance puisqu’elles insistent surtout sur la nécessité d’améliorer les communications et la qualité de la direction et demandent vaguement que l’on attache une attention plus grande aux valeurs qui prévalent dans la culture de la haute direction et dans les processus de sélection.

La Relève reflète directement cette approche, en faisant des valeurs de la fonction publique un objectif parmi d’autres et en présentant l’amélioration des communications parmi les hauts fonctionnaires comme le moyen privilégié de renforcer les valeurs. Si toutefois cet aspect du problème devait poser des défis plus essentiels, il faudrait peut-être apporter des changements culturels, fonctionnels et structurels plus profonds pour que les employés aient le sentiment que les responsables de leurs organismes ne se contentent pas de parler, mais qu’ils agissent.

      2. Essence et limites de La Relève

Comme tout un éventail de questions portant sur les ressources humaines (touchant parfois à la fois les causes et les symptômes) est étudié en même temps, les priorités risquent de demeurer très floues si l’on n’approfondit pas le débat sur les causes fondamentales. La Relève ne semble pas prévoir clairement de moyen de distinguer les mesures hautement prioritaires des mesures d’une importance modeste.

Cet état de fait reflète le caractère expérimental et ouvert de La Relève et traduit les efforts déployés pour encourager la participation et les initiatives provenant de la base, c’est à dire les ministères et les collectivités fonctionnelles. La liste complète de ces initiatives fournie dans le Premier rapport sur la mise en oeuvre de mars 1998 peut donner une idée du succès de cette approche, qui évite délibérément tout programme limité et préétabli par un organe central (« La Relève n’est pas une destination, mais une attitude et une vision. C’est un parti pris en matière de gestion des ressources humaines... »)

Ce qui est plus problématique, c’est que, faute de base conceptuelle pour l’établissement des priorités, ces dernières risquent d’être déterminées autrement, notamment en fonction des pressions qu’exerceront des groupes relativement influents pour que l’on prête une attention particulière à leurs besoins. Le fait que les premières étapes de ce programme ont consisté en une série de mesures visant la haute direction (sous-ministre adjoint) et ses groupes de relève illustre peut-être cette possibilité, tout comme le fait que les questions de rémunération des groupes de cadres supérieurs semblent avoir été réglées plus rapidement que celles touchant les employés syndiqués. Pour démontrer de façon convaincante que ces initiatives répondaient à des besoins réellement pressants au sein de la fonction publique, il faudrait qu’elles s’inscrivent dans une vision des problèmes fondamentaux.

Un autre problème qui pourrait se poser est l’absence de base conceptuelle permettant de délimiter La Relève de manière à distinguer les activités relevant de la gestion des ressources humaines des autres. Cette possibilité est bien illustrée dans un certain nombre de rapports ministériels contenus dans le Rapport sur la mise en oeuvre de mars 1998, qui mentionnent notamment des programmes de formation et de lutte contre le harcèlement apparemment courants. Dans plusieurs cas, les rapports font référence à des projets qui n’ont que de lointains rapports avec la gestion des ressources humaines et à plus forte raison, avec La Relève elle-même (comme le fait qu’un projet-pilote en matière de formation a été révisé en raison d’une décision du comité d’appel ayant confirmé des allégations, p. 40 des Rapports détaillés).

Des limites floues, tout comme l’absence de priorités déterminées par un organe central, présentent l’avantage de créer une atmosphère plus réceptive à la participation à partir de la base et l’innovation au niveau du ministère. Toutefois, du fait que les limites sont mal définies, il est plus difficile de distinguer les initiatives découlant effectivement de La Relève de celles qui ont été remaniées aux fins de la production de rapports. L’atteinte des objectifs en matière de reddition des comptes annoncés dans les premières étapes de ce programme pourrait être entravée, car il sera malaisé d’établir si des activités réellement nouvelles (ou considérablement remaniées) ont fait suite aux engagements pris dans le cadre de La Relève, ou s’il ne s’agit que d’initiatives traditionnelles de gestion des ressources humaines qui ont simplement changé de nom.

      3. Effectif et structures

Dans son rapport de 1997, la greffière du Conseil privé mentionne qu’une des causes de problèmes auxquelles La Relève est censée trouver une solution est l’incapacité des gestionnaires de la fonction publique de prêter une attention suffisante aux effets combinés de la réduction des effectifs et des tendances démographiques dans la fonction publique. Elle fait également remarquer que la fonction publique n’a pas su au fil des années planifier les ressources humaines ni l’avancement professionnel de ses membres.

Les préoccupations relatives à l’à-propos de la planification stratégique passée en matière de ressources humaines sont justifiées par le fait que des pans importants du problème avec lequel la fonction publique est actuellement aux prises avaient été prédits il y a de cela quelque temps déjà. De fait, le bas moral et les autres problèmes créés par l’existence d’une poche importante de fonctionnaires faisant partie du groupe démographique des baby-boomers, embauchés entre 1960 et 1970, ont fait l’objet d’une étude qui a eu un grand retentissement en 1981 et qui prédisait que les décideurs de politiques dans la fonction publique deviendraient mécontents avec l’âge car ils verraient leur avancement bloqué (Nicole Morgan; voir Liste bibliographique).

En raison des craintes suggérées par la greffière, certains se demanderont peut-être si les responsables de la gestion des ressources humaines de la fonction publique, qui ont supervisé la mise en place des arrangements qui doivent désormais être remaniés, peuvent aujourd’hui relever le double défi que pose La Relève : se réinventer et mettre en place les mesures de recrutement et autres programmes visant à attirer à la fonction publique de nouvelles compétences et capacités, tout en reconnaissant les compétences et capacités déjà présentes et en en tirant un meilleur parti.

L’hypothèse de départ, à savoir que la fonction publique peut être l’instigatrice de la réforme et que celle-ci peut être menée à bien par les actuels gestionnaires dans le cadre des structures organisationnelles existantes, est en gros caractéristique de La Relève. Il reste à établir si l’on peut réaliser les objectifs centraux ou répondre aux attentes des fonctionnaires au moyen de mesures inspirées apparemment du principe que le leadership et les structures actuelles n’ont pas contribué au malaise.

   B. Questions stratégiques

Par ailleurs, La Relève pose la question de savoir s’il est possible de satisfaire aux exigences plus larges qui assureront le succès des activités et des projets individuels. Ces questions stratégiques sont exposées ci-après.

      1. Volonté politique

Dans le rapport de la greffière de 1997 et le rapport intitulé Un parti pris pour l’action, il est reconnu que des facteurs externes contribuent aux problèmes de ressources humaines auxquels La Relève répond. Il y est fait expressément référence aux images négatives qui ressortent des débats publics sur le rôle du gouvernement et à la promotion, par certains théoriciens de la gestion, du secteur privé en tant que modèle d’efficience, d’efficacité et de dynamisme.

Certains pourraient percevoir dans ces commentaires quelque susceptibilité de la part des fonctionnaires. Mais il est plus probable qu’ils traduisent avec un certain tact le fait que la mauvaise réputation que les médias donnent à la fonction publique, surtout si le public s’en fait la même idée, aura presque à coup sûr des répercussions au niveau politique. Le discours politique qui avait cours au Canada pendant les années 90 et avant, ainsi que peut-être certaines des initiatives gouvernementales, en est la preuve.

De ce point de vue, La Relève peut être considérée comme un exercice de relations publiques nécessaire. Elle est efficace en ce sens, puisqu’elle permet de tuer dans l’oeuf un début de cercle vicieux : la mauvaise réputation de la fonction publique pourrait susciter des décisions politiques qui exacerberaient les problèmes de démotivation des fonctionnaires et nuiraient encore plus au recrutement, créant ainsi des comportements organisationnels qui renforceraient la mauvaise réputation de la fonction publique.

Plusieurs initiatives prises dans le cadre de La Relève illustrent l’effet que peut avoir une promotion réussie sur l’image de la fonction publique, notamment le fait que le Premier ministre du Canada, les ministres et tous les parlementaires et hauts fonctionnaires soient partenaires de ce projet consistant à encourager la fierté et la reconnaissance.

Il reste à voir si cette dimension de La Relève aura l’incidence désirée et si le fait que des politiciens et des hauts fonctionnaires se soient faits les champions de cette cause sur la scène publique suffira à établir le modèle durable qui permettra d’influencer l’opinion publique. C’est là une composante du programme global d’une importance stratégique qui, si elle porte fruit, placera La Relève bien au-dessus du programme Fonction publique 2000. Par contre, si elle est inopérante, le projet plus vaste de renouveau de la fonction publique pourrait être sérieusement entaché par le maintien d’un environnement nuisible et de ses effets directs et indirects sur la fonction publique.

      2. Traitement des erreurs

La Relève établit un modèle pour certains types de changements culturels qu’elle cherche à promouvoir. Elle rejette explicitement la culture traditionnelle de la fonction publique, où le conformisme et la peur des erreurs ont, selon beaucoup, trop souvent freiné l’initiative et le mouvement. Dans son rapport de 1997, la greffière du Conseil privé déclare énergiquement que la fonction publique a besoin d’un parti pris en faveur de l’action et qu’elle doit se lancer dans un projet expérimental, l’esprit ouvert et chercher à apprendre au fil du temps.

Cette nouvelle culture sera mise à l’épreuve lorsque les hauts fonctionnaires et les chefs politiques devront réagir aux erreurs. Le principal danger réside dans le fait que les gestionnaires de la fonction publique pourraient ne pas être à la hauteur des attentes. La prudence dont font traditionnellement preuve les organismes publics s’explique peut-être par l’intolérance du public face aux erreurs et les réactions punitives des médias et des politiciens dans de tels cas. Si cela est ainsi, le secteur public ne pourra créer une culture différente à lui tout seul.

Cette crainte est justifiée par le sort de Fonction publique 2000. Comme nous l’avons déjà mentionné, le fait que les médias ait critiqué la façon dont certains gestionnaires avaient utilisé les pouvoirs qui venaient de leur être délégués a beaucoup pesé dans l’érosion de l’appui politique dont jouissait cette entreprise, et cela s’est reflété par la suite dans le comportement de quelques hauts fonctionnaires.

      3. Équité interne

La Relève étant censée en partie régler les problèmes profonds de démotivation des fonctionnaires, il serait ironique que sa mise en oeuvre vienne intensifier ces problèmes. Et, pourtant, le fait que ce sont essentiellement les cadres supérieurs (qui venaient également de bénéficier du rétablissement de la rémunération au rendement) qui ont bénéficié sur-le-champ des premières mesures prises n’a sans doute pas relevé le moral des autres catégories d’employés. Un haut fonctionnaire qui s’est présenté devant le Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales, le 28 octobre 1997 (p. 21 des Procès-verbaux) a d’ailleurs admis que le moment du rétablissement de la rémunération au rendement a pu nuire aux objectifs plus vastes de La Relève.

Il se peut que la mise en oeuvre d’autres décisions en matière de rémunération fasse baisser le moral des employés, ceux-ci y voyant un traitement inégal. Le gouvernement a accepté les recommandations d’augmenter d’un maximum de 19 p. cent le salaire des cadres supérieurs à peine quelques jours après avoir reçu les recommandations du groupe de travail sur le sujet; pourtant, au cours des actuelles négociations collectives, les augmentations consenties aux employés syndiqués n’ont été en moyenne que de 2,5 p. 100. Au moment où nous écrivons le présent document, les négociations avec l’Alliance de la fonction publique du Canada, au cours desquelles les représentants syndicaux ont souvent fait référence à l’ampleur des augmentations salariales de cadres supérieurs pour justifier leur refus des propositions patronales, se terminent. (Voir, par exemple, l’article intitulé « PSAC Talks Collapse » dans le Citizen du 21 septembre 1998, p. A1 et A2.)

      4. Logique administrative

Comme la portée de La relève a de toute évidence été élargie, une multitude de mesures seront prises simultanément ou se chevaucheront au cours des quelques prochaines années. Cela pourrait, dans certains cas, donner lieu à des problèmes.

Par exemple, les premières mesures prises ont eu pour effet d’accélérer simultanément la création d’un bassin de sous-ministres adjoints, d’élargir ce bassin grâce à une sélection préliminaire des cadres supérieurs et d’augmenter la probabilité de retenir les sous-ministres adjoints en leur donnant l’occasion d’enrichir leur expérience grâce à une augmentation de leur rémunération et à un meilleur soutien. Il a certes été ainsi possible de retenir un plus grand nombre de sous-ministres adjoints, mais il reste que le bassin élargi de candidats à ce poste pourrait être excessif, du moins pendant un temps, ce qui devrait se solder par une baisse de la motivation, entre autres choses.

Selon les données fournies dans le Rapport sur la mise en oeuvre de mars 1998, cela n’est pas encore le cas. Du premier groupe de sous-ministres adjoints faisant partie de la première présélection, la moitié a obtenu un poste dans les six mois. Ce qu’il adviendra de la seconde moitié de ce groupe et du groupe ayant fait l’objet de la deuxième présélection effectuée en janvier 1998 reste à voir.

D’un point de vue plus général, si les personnes qui n’ont pas été sélectionnées pour faire partie du bassin en question estiment qu’elles ont « raté le coche » après avoir patienté des années durant et que leur avancement professionnel est bloqué par un groupe professionnel nouvellement créé, les problèmes de baisse de moral et les départs prématurés pourraient en fait s’accroître parmi elles.

      5. Reddition de comptes et mesure du rendement

Dans le rapport de 1997 Parti pris pour l’action, il est reconnu qu’il faut définir des axes de responsabilité très clairs pour que la mise en oeuvre de La Relève soit réussie. On y mentionne donc que les gestionnaires de tous les niveaux au sein des ministères seront tenus responsables de l’atteinte des résultats et de la gestion de leurs employés; les sous-ministres adjoints, quant à eux, devront répondre de l’application des plans de La Relève dans leur ministère et les chefs des organismes centraux, de la réalisation des engagements pris dans le cadre de La Relève.

Même si l’affirmation de ce principe de responsabilité est importante, on ne sait trop comment il sera appliqué. Les hauts fonctionnaires seront-ils responsables simplement de la mise en place de divers projets et mesures prévus dans les plans du ministère ou également de l’atteinte des objectifs plus vastes que visent ces projets ou mesures?

La référence explicite à la nécessité d’instaurer des indicateurs de rendement, au niveau du ministère et à la fonction publique dans son ensemble, constitue peut-être un élément de réponse aux interrogations relatives à la portée de la reddition de comptes. Le rapport Parti pris pour l’action indique que les ministères sont censés établir des indicateurs de rendement à utiliser à partir de novembre 1997 et que les organismes centraux feront de même pour l’ensemble de la fonction publique. Toutefois, étant donné la combinaison des indicateurs de rendement avec le suivi et le compte rendu des progrès réalisés, il se peut que le rendement porte davantage sur la mise en place de plans que sur l’obtention des résultats escomptés.

La lecture du Rapport sur la mise en oeuvre de mars 1998, ne dissipe pas les doutes quant à l’efficacité des mesures de rendement et de l’évaluation. En règle générale, ces rapports font mention du nombre de participants aux programmes et aux initiatives sans fournir de données de base sur les groupes que ces programmes ciblent. Le lecteur ne peut donc déduire le taux ou le niveau de participation, ni à plus forte raison l’efficacité de l’entreprise.

Le caractère des rapports s’explique par le fait que La Relève a moins de deux années d’existence et que, compte tenu de son envergure, elle n’en est qu’à ses débuts. Dans les rapports, on répertorie les activités et les programmes entrepris sans tenter de les relier aux objectifs fondamentaux que vise La Relève.

Il n’y a pas eu de débat concret sur la façon de déterminer l’ampleur du malaise dont souffre la fonction publique ni sur les progrès réalisés pour l’atténuer. Il n’y a pas non plus d’indices montrant que les activités entreprises dans le cadre de La Relève ont permis d’avancer sur la voie de la création d’une institution moderne et vibrante capable d’utiliser pleinement les talents de son effectif et possédant les compétences et les motivations nécessaires pour relever les nouveaux défis.

En revanche, comme des rapports annuels sur l’état d’avancement de cette entreprise doivent être soumis officiellement, les participants sont contraints de se focaliser sur la nécessité de prouver leurs progrès. Il est probable que, à mesure que La Relève évoluera et que son incidence se fera plus palpable, les rapports en question refléteront les progrès réalisés.

   C. Conclusion

Au moment où nous écrivons ces pages, La Relève n’a pas encore officiellement deux ans d’existence, bien qu’un certain nombre de ces composantes aient été mises en place il y a plusieurs années. Au cours de cette période, tout un éventail de mesures distinctes a été mis en place, qui témoigne de l’efficacité dont sait faire preuve la fonction publique dans l’application de plans d’action.

Comme il s’est écoulé relativement peu de temps depuis le lancement officiel de l’initiative en février 1997, il est encore trop tôt pour dire si les problèmes exposés dans le présent document ont un effet concret. Il reste donc à voir si La Relève haussera les attentes, sans y répondre par la suite, ou bien réussira à améliorer la culture de la fonction publique, la motivation et les capacités des employés.

MESURES PARLEMENTAIRES

Au cours de la trente-cinquième législature (1993-1997), le Comité permanent de la Chambre des communes sur les opérations gouvernementales a entendu le point de vue de fonctionnaires de plusieurs ministères sur les initiatives de renouveau en cours et prévues. Le 24 avril, il a déposé son troisième rapport, dans lequel :

  • il louait les initiatives entreprises dans le cadre de La Relève et annoncées jusque-là;

  • il pressait le gouvernement de faire de La Relève une de ses principales priorités;

  • il concluait qu’un renouveau important nécessiterait une stratégie portant sur cinq à dix ans; et

  • il demandait au gouvernement d’établir une structure de reddition de comptes efficace.

Comme le Comité reconnaissait que son examen avait lieu à un stade peu avancé d’un projet de longue haleine, son rapport ne contenait qu’une seule recommandation formelle :

  • Que le comité chargé de traiter des questions relatives aux activités gouvernementales dans la législature actuelle envisage sérieusement de suivre l’avancement du projet de renouveau de la fonction publique.

Ce premier effort mis à part, le Parlement s’est peu intéressé à La Relève, bien qu’un certain nombre de parlementaires aient continué de suivre la question dans le cadre de comités et à la Chambre.

LISTE BIBLIOGRAPHIQUE

Principales sources

  • Greffière du Conseil privé et secrétaire du Cabinet. Quatrième rapport au Premier ministre sur la fonction publique du Canada. Canada, Bureau du Conseil privé, 3 février 1997 [http://www.pco-bcp.gc.ca/4rept96/Cover_f.htm].

  • Groupe de travail La Relève. La Relève : Un parti pris pour l’action. Canada, Bureau du Conseil privé, 1997.

  • Groupe de travail La Relève. La Relève (plans des ministères, plans des collectivités fonctionnelles, rapports des régions et initiatives d’ensemble). CD-Rom mis en circulation par le gouvernement du Canada, 1er juillet 1997.

  • Groupe de travail La Relève. Premier rapport sur la mise en oeuvre — La Relève : Un parti pris pour l’action. Vue d’ensemble et rapports détaillés. Gouvernement du Canada, mars 1998.

  • Site Internet La Relève (contient des versions électroniques des principales publications, de nombreux documents supplémentaires et des liens avec les sites des ministères) [http://lareleve.communication.gc.ca/].

Sources supplémentaires

   A. Gouvernement

  • Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction. Premier rapport. établi pour le Président du Conseil du Trésor, janvier 1998. Ottawa, Conseil du Trésor du Canada, [http://www.tbs-sct.gc.ca/Pubs_pol/partners/acslr_f.html].

  • Canada, Bureau du Conseil privé. Repenser le rôle de l’État : Rapport d’étape. Ministère des Approvisionnements et Services du Canada, 1996.

  • Greffière du Conseil privé et secrétaire du Cabinet. Cinquième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada. Bureau du Conseil privé, 31 mars 1998 [http://www.pco-bcp.gc.ca/5rept97/cover_f.htm].

  • Rapports des groupes de travail des sous-ministres. 1996. (Comprend le document de travail sur Les valeurs et l’éthique dans la fonction publique, cité sous la rubrique Analyse, ci-dessus.) : [http://www.ccmd-ccg.gc.ca/documents/gtsm/introgtsm.html].

   B. Autres

La Relève n’a reçu que très peu d’attention de la part des spécialistes de l’administration publique et de la gouvernance, compte tenu de l’importance qu’elle revêt à l’intérieur de la fonction publique. On trouve toutefois un certain nombre de comparaisons avec des pays étrangers. Voir :

  • Peters, B. Guy and Donald J. Savoie. Réformer le secteur public : où en sommes-nous?. Centre canadien de gestion, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 1998.

L’attention des médias a été, elle aussi, assez limitée. L’Ottawa Citizen a toutefois rapporté les principaux événements et publié quelques commentaires. Voir, par exemple :

  • Katherine May. « PS Plan Gets Top Approval ». Ottawa Citizen, 19 octobre 1997, p. A1.

  • -----. « Public Servants Deserve Praise, Recruiters Say ». Ottawa Citizen, 20 octobre 1997, p. A3.

Études générales

Vérificateur général du Canada. Rapport à la Chambre des communes — avril 1998. Chapitre 1 (Les réductions des dépenses et des effectifs au sein de la fonction publique). Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux Canada, 1998.

Campbell, Colin et Szablowski, George J. The Superbureaucrats: Structure and Behavior in Central Agencies. Toronto, Macmillan of Canada, 1979.

Clark, Ian D. « Restraint, Renewal, and the Treasury Board Secretariat ». Administration publique du Canada, vol. 37, no 2, été 1994, p. 209 à 248.

Morgan, Nicole, S. Où aller? : Les conséquences prévisibles des déséquilibres démographiques chez les groupes de décision de la fonction publique fédérale. Montréal, Institut de recherches politiques, 1981.

O’Neal, Brian. Réorganiser le gouvernement : nouvelles conceptions de la réforme de la fonction publique. Bibliothèque du Parlement, BP-375, janvier 1994.

Commission de la fonction publique du Canada. Réduction des effectifs — Comparaison du Royaume-Uni, de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie, février 1997 [http://www.psc-cfp.gc.ca/prcb/compar3f.htm].

Roberts, Alasdair. « The Control Lobby and the PS 2000 Reforms ». Administration publique du Canada, vol. 39, no 4, hiver 1996, p. 489 à 523.

Seidle, F. Leslie. Rethinking the Delivery of Public Services to Citizens. Montréal, Institut de recherches politiques, 1995.

Wileman, Tom. Fonction publique 2000. Bibliothèque du Parlement, BP-263, août 1991.