PRB 99-12F
LES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
Rédaction :
TABLE DES MATIÈRES
DESCRIPTION DES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS ÉVALUATION
ET ÉTIQUETAGE DES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT LA
CONTROVERSE SUR LA SÉCURITÉ DES ALIMENTS B. Incidences environnementales
LES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS Les avancées théoriques et technologiques dans les sciences de la vie ont peu à peu transformé les industries de la santé et de lalimentation, qui, en fin de compte, sont axées sur les organismes vivants. Cependant, alors que les gens ne manifestent que peu dopposition à lutilisation de nouveaux vaccins ou de nouveaux médicaments destinés aux humains, ils réagissent tout autrement lorsque les nouvelles découvertes concernent lagriculture et lalimentation(1). Les craintes soulevées par les aliments génétiquement modifiés mettent la biotechnologie au cur des projets de réglementation. Dans ce document, nous donnons un aperçu de ces aliments et indiquons de quelle façon ils sont réglementés au Canada. Nous présentons également quelques éléments du débat qui porte sur ces aliments en Europe et en Amérique du Nord. DESCRIPTION DES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS Lexpression « aliment génétiquement modifié » (ou aliment GM) est souvent utilisée pour définir les aliments obtenus à laide des biotechnologies. Toutefois, comme les biotechnologies regroupent un nombre important de procédés et de méthodes, lappellation « génétiquement modifié » ne sapplique en fait quaux produits du génie génétique(2). Le génie génétique désigne la manipulation du matériel génétique (acide désoxyribonucléique ou ADN) et sert, par exemple, à transférer un gène dun organisme (animal, espèce végétale ou micro-organisme) dans le matériel génétique dun autre organisme. On retrouve dans la littérature scientifique plusieurs expressions servant à définir les produits issus de cette technique : organisme transgénique, organisme génétiquement modifié (OGM), organisme génétiquement amélioré ou organisme vivant modifié (OVM). Dans le domaine de la santé, la manipulation du matériel génétique a permis de créer des bactéries transgéniques qui possèdent un gène de lespèce humaine et produisent linsuline nécessaire aux malades atteints du diabète. En ce qui concerne lalimentation, les produits du génie génétique se trouvent essentiellement dans le monde végétal. Au Canada, 42 végétaux génétiquement modifiés, soit des variétés de canola, de tomate, de pomme de terre, de maïs, de soja, de lin, de coton et de courge, ont été approuvés pour la consommation humaine(3). On utilise ces plantes dans une foule de produits alimentaires; p. ex., le soya est employé dans les produits transformés comme le chocolat, les aliments pour nouveaux nés et les mélanges à gâteaux. Il y a aussi des animaux transgéniques qui servent à la recherche ou à la production de produits pharmaceutiques, mais pour le moment aucun nentre dans la chaîne alimentaire. On parle donc daliment génétiquement modifié lorsque lOGM est consommé tel quel (tomate, pomme de terre) ou transformé (sauce tomate, huile de canola), ou encore utilisé comme additif dans des aliments plus élaborés (amidon de maïs, lécithine de soja, etc.). Un aliment génétiquement modifié ne contient pas nécessairement de lADN biologiquement actif mais il est susceptible de contenir de nouvelles protéines issues de lexpression du transgène ou de nouveaux constituants ou métabolites issus de lactivité de ces nouvelles protéines. ÉVALUATION
ET ÉTIQUETAGE DES ALIMENTS GÉNÉTIQUEMENT Au Canada, les aliments génétiquement modifiés ne sont pas traités séparément des aliments conventionnels et chaque denrée est évaluée selon ses caractéristiques propres et non en fonction de la méthode par laquelle elle a été produite. Leur réglementation est une responsabilité partagée entre Santé Canada et lAgence canadienne dinspection des aliments (ACIA). En vertu de la Loi sur les aliments et drogues et de son règlement, Santé Canada exige une notification préalable à la vente ou à la publicité en vue de la vente de tout « aliment nouveau »(4). Cela sapplique aux produits alimentaires génétiquement modifiés, mais aussi à tous les produits crées au moyen dautres méthodes que le génie génétique. La notification préalable permet à Santé Canada dentreprendre une évaluation de linnocuité pour lhomme de chaque aliment nouveau. Les Lignes directrices relatives à lévaluation de linnocuité des aliments nouveaux (volume II, Plantes et micro-organismes génétiquement modifiés) visent les végétaux et les micro-organismes nouveaux(5). Actuellement, il nexiste pas de lignes directrices pour les animaux transgéniques (y compris les poissons et autres organismes aquatiques) dont lentrée dans la chaîne alimentaire pourrait être envisagée. Au mois de juin 1999, Santé Canada travaillait à la mise à jour des lignes directrices concernant les animaux transgéniques. La méthode dévaluation de linnocuité des aliments préconisée dans les Lignes directrices susmentionnées se fonde sur le principe de « léquivalence en substance ». Ce concept a été défini en 1993 par un groupe dexperts de lOrganisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui se sont appuyés sur des travaux réalisés dans les années 80. Ce concept est reconnu par des organismes internationaux comme lOrganisation des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture (OAA, mieux connue sous le nom de FAO) et lOrganisation mondiale de la santé (OMS). Ainsi, pour évaluer la sécurité dun nouvel aliment, Santé Canada compare sa valeur nutritive et sa composition à la valeur nutritive et à la composition dun aliment traditionnel(6). Lintroduction dun gène dans un organisme peut entraîner la production de nouvelle(s) protéine(s). Cest pourquoi Santé Canada examine également les données existantes afin de déceler la présence éventuelle de composantes toxiques ou non nutritives et du degré dallergénicité(7) des protéines introduites dans laliment(8). Dès quun aliment est déterminé équivalent à une contrepartie traditionnelle, Santé Canada estime, selon le principe déquivalence en substance, quil est inutile de soupçonner que celui-ci comporte un risque différent de celui de sa contrepartie, y compris pour les effets à long terme. Un nouvel aliment qui na pas de contrepartie traditionnelle est évalué en fonction de la composition et des propriétés qui lui sont propres. Bien quil nexiste pas encore de lignes directrices sur lévaluation de linnocuité des produits issus danimaux génétiquement modifiés, on a, par suite de consultations tenues en 1998 sur la réglementation des animaux délevage issus de la biotechnologie, recommandé que la méthode déquivalence en substance soit également utilisée dans le cas des animaux transgéniques(9). Lévaluation des impacts environnementaux des nouveaux aliments nest pas couverte par un règlement spécifique. Toutefois, en vertu de la Loi sur les semences (alinéa 4.(1)b)), lACIA réalise des évaluations environnementales pour les végétaux à caractères nouveaux (VCN)(10) avant leur dissémination dans lenvironnement. La directive de réglementation sur les critères dévaluation du risque environnemental associé aux VCN définit les différents risques pour lenvironnement dont lACIA doit tenir compte avant dautoriser la dissémination de ces végétaux. Lévaluation de linnocuité des VCN préoccupants (cest-à-dire hors du commun ou substantiellement équivalents à des produits déjà sur le marché, utilisés et généralement considérés sûrs) comporte un examen détaillé de lidentité du VCN, de son expression phénotypique relative et des interactions quelle est susceptible davoir avec dautres formes de vie. Actuellement, les animaux transgéniques sont maintenus dans des installations de confinement en raison de leur grande valeur et de leur utilisation très spécifique (production de produits pharmaceutiques, recherche, etc.); il se peut, toutefois, que dans un avenir proche, on développe des animaux présentant des caractéristiques améliorées pour lélevage, ce qui impliquerait que de tels animaux pourraient se retrouver dans les élevages « traditionnels » au pays. LACIA élabore actuellement des lignes directrices relatives à la libération dans lenvironnement des animaux transgéniques et Pêches et Océans Canada veut se doter dune réglementation qui prévoirait des évaluations environnementales pour les organismes aquatiques transgéniques. Pour lheure, tout produit issu de la biotechnologie qui nest pas réglementé en vertu des lois et règlements sectoriels est soumis aux dispositions de la Loi canadienne sur la protection de lenvironnement (partie 6, alinéa 106.(6)a)). En ce qui concerne létiquetage des produits nouveaux, Santé Canada est responsable de létiquetage obligatoire ayant trait à des questions de santé ou de sécurité alimentaire telles que les allergènes et la composition nutritionnelle. Pour sa part, lACIA est responsable de létiquetage volontaire et de létiquetage destiné à protéger le consommateur contre toute fraude. Parce que le Canada exige que les aliments vendus au pays soient sans danger pour la consommation(11), létiquetage des aliments nouveaux doit indiquer si un ingrédient présente des risques potentiels pour la santé de certaines personnes ou de certains segments de la population(12). Létiquetage doit également indiquer tout changement dans la composition ou la valeur nutritive de laliment par rapport à sa contrepartie traditionnelle(13). Il incombe au promoteur du produit de décider sil veut déclarer quun aliment est issu du génie génétique ou sil ne lest pas. Par conséquent, sil ny a pas de risque pour la santé (un allergène par exemple) ni de changement de valeur nutritionnelle, létiquetage des aliments génétiquement modifiés est strictement volontaire. De plus, il nexiste pour le moment aucune norme ni ligne directrice relativement à létiquetage de ces produits. En septembre 1999, le Conseil canadien de la distribution alimentaire (CCDA) et lOffice des normes générales du Canada (ONGC)(14) ont lancé une initiative visant à élaborer une norme canadienne pour létiquetage volontaire des aliments issus de la biotechnologie; une telle norme orienterait davantage les efforts des entreprises et des fabricants de produits alimentaires. Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) appuie cette initiative par le truchement du programme Agroalimentaire 2000. LA
CONTROVERSE SUR LA SÉCURITÉ DES ALIMENTS Les attitudes à légard des aliments génétiquement modifiés sont très diverses. Alors que les Nord-Américains ont adopté (du moins jusquà tout récemment) une position relativement favorable à de tels aliments, en Europe, la situation est bien différente. LUnion européenne na pas autorisé de cultures dOGM depuis avril 1998 et lAutriche et le Luxembourg les ont même interdites. Des campagnes contre les OGM ont été relayées dans la presse en Grande-Bretagne. Au Canada et aux États Unis, la majorité des OGM actuellement commercialisés ont été développés pour présenter de meilleures caractéristiques sur le plan agronomique. Les végétaux ont ainsi été modifiés génétiquement pour résister à certains herbicides à large spectre, pour produire leur propre pesticide contre certains de leurs ravageurs (insecte ou virus), ou encore pour mûrir moins rapidement. Il est prévu que la prochaine génération dOGM présentera des caractéristiques plus intéressantes pour le consommateur, comme lamélioration des qualités nutritives ou la présence de propriétés médicinales permettant de prévenir certaines maladies (cest le cas des nutraceutiques(15)). En Europe, les aliments génétiquement modifiés sont mal acceptés en raison des crises alimentaires qui se sont succédées (la vache folle, et plus récemment, le poulet contaminé à la dioxine); labsence de certitude scientifique et lincohérence qui caractérise la gestion de ces crises entretiennent lopinion dans le doute quant à la qualité des aliments commercialisés. Il en résulte que les groupes de consommateurs et de protection de lenvironnement continuent de sinquiéter des effets à long terme des OGM sur la santé des personnes et sur lenvironnement. Les adversaires des aliments GM prétendent que, parce que ceux-ci nont pas fait lobjet de tests adéquats, leurs effets à long terme sur la santé des personnes sont inconnus, notamment parce que lon comprend encore mal les interactions entre les gènes. Bien que la récente campagne « anti-OGM » en Grande-Bretagne se soit fondée sur une seule et fort controversée étude(16), il semble y avoir encore des incertitudes au sein de la communauté scientifique. Les réactions allergiques qui peuvent se produire ne sont pas encore complètement comprises, et il savère parfois difficile de porter des jugements à propos de toxines encore inconnues(17). Or, certains scientifiques estiment quune substance toxique non identifiée a plus de chances dapparaître dans la culture dune nouvelle variété dune plante traditionnelle, où sont couramment introduits de nombreux gènes nouveaux et souvent inconnus, que dans une plante GM contenant un seul gène caractérisé et ses produits protéinés(18). Il a également été avancé que les effets potentiels de lintroduction dun seul gène dans un OGM sont plus faciles à prévoir que les effets dune nouvelle variété de plante issue des méthodes conventionnelles de sélection. Même dans le domaine des cultures conventionnelles, parmi les nombreuses variétés produites, seulement deux ont manifesté le pouvoir de dégager dans lenvironnement un composé toxique qui navait pas été décelé au cours des tests réguliers. Il a été constaté que lun de ces composés (psoralène), qui sétait accumulé dans une variété non GM de céleri résistante aux insectes sous leffet de la lumière, cause des brûlures de la peau. Des accumulations toxiques de solanine, causées par les températures froides, ont provoqué le retrait de la patate Magnun Bonum (une espèce non GM) de la culture en Suède(19). La notion de « léquivalence substantielle » employée par les autorités réglementaires, y compris au Canada, est également critiquée. Selon un article paru dans Nature(20), ce concept na jamais été correctement défini et les scientifiques ne sont pas encore capables de prévoir avec assurance les effets biochimiques ou toxicologiques dun aliment GM, en partant de sa composition chimique. Dautres croient que léquivalence substantielle est un outil utile qui identifie les différences entre une culture GM et une culture non GM et soumet ainsi ces cultures à un examen plus approfondi. De nombreux partisans des OGM mettent de lavant le fait quil ny a actuellement pas de preuve que les aliments génétiquement modifiés sont plus dangereux que les aliments conventionnels. Tirant les leçons de la crise de la vache folle en Europe, les opposants répondent que ne pas réussir à prouver quun aliment est dangereux néquivaut pas à prouver que cet aliment est sûr et sans danger. Le mieux que la science puisse faire est de réduire lincertitude, de part et dautre. B. Incidences environnementales Les incidences environnementales des OGM varient selon le type de modification utilisée. Dans le règne végétal, il existe un risque que lOGM devienne une mauvaise herbe ou commence à envahir des habitats naturels ou encore que le gène introduit passe dans dautres espèces et que naissent des descendants hybribes plus nuisibles ou plus envahissants. On pourrait constater des effets sur des organismes non visés ou sur la diversité biologique. Un exemple largement médiatisé dune incidence environnementale néfaste concerne leffet du maïs Bt sur le papillon monarque. Le maïs Bt est une variété modifiée génétiquement dans le but de produire un insecticide (une substance présente naturellement dans une bactérie appelée Bacillus thuringiensis ou Bt) mortel pour la pyrale du maïs, un ravageur présent dans les champs de maïs dAmérique du Nord. En mai 1999, les résultats dune étude réalisée à lUniversité Cornell ont révélé que le maïs Bt pouvait être mortel pour des espèces non visées. Dans le cadre dexpériences décrites dans la revue Nature (vol. 399, p. 14), des entomologistes ont trouvé que 44 p. 100 des larves de monarque sont mortes après avoir été nourries de feuilles dasclépiade saupoudrées de pollen de maïs Bt. La principale critique que lon a faite à létude cest que les expériences menées nont pas reproduit les conditions de la nature. Dautres études sur les incidences environnementales du maïs Bt sur les populations despèces non visées sont en cours à lUniversité de Guelph. De plus, selon des recherches menées à lArable Crops Research Institute du Royaume-Uni, on en est arrivé à la conclusion que la répression des ravageurs des cultures par le maïs Bt pourrait être moins dommageable pour la faune que les pesticides traditionnels pulvérisés. Dans le cadre de cette étude à grande échelle, dont le rapport a été présenté dans la revue Nature daoût 1999, les scientifiques ont constaté que le maïs Bt navait aucun effet sur les insectes bénéfiques. Cette étude semble appuyer les dires des groupes dagriculteurs pour qui lemploi de cultures Bt permet de réduire les applications de pesticides et qui estiment que ces cultures sont moins susceptibles dattaquer les espèces animales bénéfiques que les produits chimiques, lesquels peuvent également tuer des insectes non visés. Toutefois, toutes les cultures GM ne permettent pas de réduire lemploi de pesticides. Ainsi, la culture de plantes modifiées génétiquement pour être résistantes à des herbicides à large spectre (par ex., le canola Roundup-Ready MC) simplifie la répression des mauvaises herbes sans toutefois garantir une diminution de lemploi dherbicides(21). Chaque modification génétique apporte son lot de risques et davantages; des théories sur les incidences environnementales de certains OGM (par les défenseurs ou par les détracteurs) ne sappliquent pas nécessairement à tous les OGM. Le risque de créer des « super mauvaises herbes », un spectre brandi par les détracteurs des OGM, serait très exagéré, selon certains scientifiques(22). On semble sentendre davantage, toutefois, sur les risques de déséquilibre écologique découlant dune culture de plus en plus axée sur les espèces GM. Des groupes écologistes comme Green Alliance, une organisation britannique qui ne soppose pas aux modifications génétiques, proposent quon procède à une vaste « vérification environnementale » des plantes GM plutôt que de tenter dévaluer les risques, comme le prévoient les règlements de certains pays, dont le Canada(23). En Europe, les préoccupations des consommateurs vont au delà de linnocuité des aliments proprement dite; la manière dont les aliments sont produits, la protection des animaux, les différences culturelles et éthiques sont autant déléments qui font partie du débat public sur lalimentation(24). Ainsi les manipulations génétiques ne sont pas toujours appréciées surtout lorsquelles impliquent des animaux et que les avantages pour le consommateur ne sont pas clairs. Devant les réticences des consommateurs, lUnion européenne a mis en place un règlement concernant létiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés. Dautres pays comme lAustralie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et la Corée du Sud ont adopté des lois ou des règlements similaires. En mai 1999, sept chaînes européennes de supermarché et trois multinationales alimentaires ont annoncé leur intention de distribuer des produits « garantis sans OGM ». Cela ne se fera cependant pas sans coûts supplémentaires puisquil faudra réorganiser les circuits de transport, de transformation et de distribution. Linstitut anglais Wye estime quil faudrait augmenter de 5 à 15 p. 100 le prix des marchandises pour compenser ces investissements. Le débat sur les OGM en Europe nest pas sans conséquence pour le Canada et les États-Unis. Certaines minoteries nord américaines, dont CASCO Inc., un des principaux transformateurs de maïs au Canada, ont annoncé au printemps 1999 quelles refuseraient dacheter les variétés de maïs génétiquement modifié pour ne pas perdre leurs clients européens. En septembre 1999, lentreprise agro-alimentaire Archer Daniels Midland Co. a demandé à ses fournisseurs de maïs et de fèves de soja de séparer les produits génétiquement modifiés des produits de culture classique. Les fournisseurs américains prétendent quil est impossible de séparer les variétés génétiquement modifiées des autres produits, car la plupart des silos à grains ne permettent pas de séparer de grandes quantités de maïs et de fèves de soja. Reprenant les arguments entendus en Europe, les groupes environnementaux canadiens et américains commencent à informer la population des dangers potentiels des aliments génétiquement modifiés. Des voix sélèvent également pour demander un étiquetage obligatoire de tous ces aliments au nom du « droit de savoir » des consommateurs. LACIA estime que létiquetage obligatoire poserait une difficulté technique de taille, vu la complexité de la chaîne de production, et juge que virtuellement tout pourrait être étiqueté comme étant issus dOGM étant donné que les végétaux concernés entrent dans la composition de très nombreux aliments. En revanche, létiquetage pourrait avoir ses bons côtés. Prenons lexemple de la tomate à mûrissement retardé de la compagnie Calgene(25), qui a été commercialisée et volontairement étiquetée comme génétiquement modifiée pour avoir une durée de conservation plus longue et qui a été bien acceptée par les consommateurs. Bien que peu de gens estiment que les biotechnologies sont une mauvaise chose, notamment dans le domaine médical, les aliments génétiquement modifiés suscitent un certain nombre dinquiétudes. Beaucoup de scientifiques pensent que les risques sont largement hypothétiques et que les mesures de protection actuelles sont adéquates(26). Cependant, même parmi les plus fervents partisans des aliments génétiquement modifiés, on entend de plus en plus dappels en faveur dune augmentation de la recherche sur les risques liés à la santé et de lélaboration dun système de surveillance qui permettrait une détection rapide de tout problème à long terme(27). En sappuyant sur la réglementation existante et en utilisant des concepts scientifiques reconnus à léchelle internationale, le Canada a réussi a faire bénéficier les agriculteurs canadiens des avantages des végétaux à caractères nouveaux. Cependant, avec le débat européen qui sétend peu à peu en Amérique du Nord et larrivée de nouveaux aliments génétiquement modifiés dorigine animale, un certain nombre de défis vont se poser aux législateurs et aux décideurs : trouver des moyens de fournir aux consommateurs la meilleure information scientifique possible et aussi résoudre des questions déthique qui concernent, par exemple, létiquetage et les animaux transgéniques susceptibles dentrer dans la chaîne alimentaire. Définition de « aliment nouveau » telle que proposée par Santé Canada dans : « Les règlements sur les aliments et drogues Modification (Annexe numéro 948) », Gazette du Canada, Partie I 26 septembre 1998 :
(1) Johnston D.J., « Soutenons la biotechnologie moderne », Lobservateur de lOCDE, no 216, mars 1999. (2) Le génie génétique est aussi appelé méthode de recombinaison de lADN. Il existe aussi dautres méthodes qui permettent dinduire des modifications génétiques : vecteurs viraux, fusion de protoplastes, mutagénèse, etc. (3) Site internet de Santé Canada, mis à jour le 10 juin 1999. (4) Règlement sur les aliments et drogues, partie B, 28.002. (5) Une fois un nouveau végétal évalué et jugé salubre, on considère que ses produits dérivés le sont aussi. Par exemple, si Santé Canada juge quune variété de canola ou de maïs génétiquement modifié est salubre, il nest pas nécessaire de faire une évaluation pour lhuile du canola génétiquement modifié ou les produits qui utiliseront lhuile. (6) Par exemple, une variété de maïs génétiquement modifié pour produire son propre insecticide contre un de ses ravageurs et une variété de maïs non modifié déjà utilisée en alimentation humaine. (7) Le degré dallergénicité, ou pouvoir allergisant, définit la susceptibilité dune substance à provoquer une réaction allergique. (8) Les nouvelles protéines sont comparées à la base de données des toxines protéiques et des allègènes connus. On évalue la toxicité en partie en examinant les tests de toxicité aiguë fournis par les fabricants. On évalue lallergénicité potentielle en comparant les caractéristiques dallergènes connus (stabilité à la transformation, poids moléculaire, etc.). (9) Consultation sur la réglementation des animaux délevage et du poisson issus de la biotechnologie, rapport de séance, avril 1999; parrainée et appuyée par lAgence canadienne dinspection des aliments, Santé Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada, Pêches et Océans Canada. (10) Quils soient destinés ou non à lalimentation humaine et produits par génie génétique ou par toute autre méthode. (11) Loi sur les aliments et drogues, partie 1, article 4. (12) Comité permanent de lagriculture et de lagroalimentaire de la Chambre des communes, Profitons de lavantage : la biotechnologie agricole au nouveau millénaire, troisième rapport, mai 1998, p. 12. (13) Ibid., p. 12. (14) LONGC travaille dans les systèmes nationaux du Canada en vue délaborer des normes qui feront consensus et qui seront approuvées par un comité dexperts représentant les utilisateurs, les producteurs et les membres du grand public. LONGC a terminé tout récemment lélaboration dune norme sur lagriculture organique, grâce au travail dun groupe diversifié dintervenants et de Canadiens intéressés. Le CCDA représente environ 80 p.100 des grands détaillants en alimentation du Canada; le Conseil se voue à la sensibilisation et à léducation du public, en ce qui concerne la biotechnologie. (15) Les nutraceutiques, aussi appelés aliments fonctionnels, sont des aliments caractérisés par la présence dadditifs censés améliorer le fonctionnement de lorganisme humain par leurs propriétés spécifiques. (16) « GM Foods Debate Needs a Recipe for Restoring Trust », Nature, vol. 398, no 6729, 22 avril 1999. (17) Butler et al., « Long-Term Effect of GM Crops Serves Up Food for Thought », Nature, vol. 398, no 6729, 22 avril 1999. (18) Anthony Trewaras et C.J. Leaver, « Conventional Crops Are the Test of GM Prejudice », Nature, 14 octobre 1999. (19) Ibid. (20) Erik Millstone et al., « Beyond Substantial Equivalence », Nature, 7 octobre 1999. (21) Charles Benbrook, « Evidence of the Magnitude and Consequences of the Roundup Ready Soybean Yield Drag from University-Based Varietal Trials in 1998 », Ag Biotech InfoNet, document technique, juillet 1999. (22) Largument avancé est que les cultures transgéniques nont pas toujours un parent sauvage avec lequel elles peuvent se mêler ou auquel elles peuvent transmettre leur matériel génétique. (23) Julie Hill, « A Public Perspective », Lobservateur de lOCDE, no 216, mars 1999. (24) Jones Wayne, « Innocuité des aliments : protection ou protectionnisme », Lobservateur de lOCDE, no 216, mars 1999. (25) McMillan Darce, « Labelling Can Have a Positive Effect », Ontario Farmer, 8 juin 1999. (26) Butler (1999). (27) Ibid. |