PRB 99-15F
HÉPATITE C
Rédaction :
TABLE DES MATIÈRES DESCRIPTION CLINIQUE DE LHÉPATITE C A. Quelques précisions sur le virus C. Symptômes et diagnostics de lhépatite C RECHERCHES ACTUELLES SUR LA MALADIE IMPORTANCE DE LHÉPATITE C AU CANADA A. Combien de personnes sont atteintes? B. Indemnisation des victimes du sang contaminé 1. Débat au sujet des tests indirects 3. Indemnisation par les provinces 4. Responsabilité de la Croix-Rouge canadienne
HÉPATITE C Étant donné que les médias ont, ces dernières années, beaucoup fait état du scandale du sang contaminé au cours duquel lhépatite C a été transmise par transfusion sanguine et transfusion de produits sanguins, la plupart des Canadiens ont entendu parler de cette maladie. Bien que celle-ci soit connue depuis longtemps, lagent viral qui en est responsable, lui, nest connu que depuis peu et on est encore loin de comprendre parfaitement comment il agit sur la progression de la maladie. Dans ce document, nous faisons le point sur lhépatite C et examinons la recherche qui se poursuit actuellement pour mettre au point un traitement efficace, ainsi quun vaccin et un remède. Des maladies très diverses portent le nom dhépatite. Chacune a une cause, un mode dinfection, des symptômes, une progression, un traitement et un niveau de gravité qui lui sont propres. Cependant, toutes les hépatites se caractérisent par linflammation des tissus du foie (tissus hépatiques) et, assez souvent, par des lésions permanentes à ceux-ci. Des agents non viraux alcool, poisons chimiques, médicaments, drogues peuvent provoquer lapparition de lhépatite. Des agents infectieux, de nature virale, causent également la maladie : les virus identifiés, de plus en plus nombreux, sont désignés dans lordre alphabétique, de A à G. Lhépatite C et ses cousins, lhépatite A et lhépatite B, sont les types dhépatite les plus communs. Il existe des vaccins pour lhépatite A et lhépatite B. Une des façons de caractériser les virus de lhépatite consiste à déterminer si le virus se transmet par voie orale, par la nourriture, ou par le sang. Les hépatites transmises par la nourriture ne causent pas de maladie chronique (de longue durée) et produisent rarement des complications graves. Ainsi, lhépatite A est avant tout causée par labsorption daliments et deau contaminés par des matières fiecales infectées; elle est plus courante dans les pays sous-développés quailleurs. Lhépatite E est une autre hépatite virale transmise par les aliments; cliniquement, elle ressemble beaucoup à lhépatite A, mais elle peut durer un peu plus longtemps que celle-ci. On a récemment ajouté lhépatite F à la liste des hépatites transmises par les aliments. Dans les hépatites virales du système sanguin, dites à diffusion hématogène, la maladie se transmet surtout par contact avec du sang infecté ou, plus rarement, avec dautres fluides organiques infectés. Lune de ces hépatites est lhépatite B, beaucoup plus infectieuse que le VIH, qui se transmet facilement par contact sexuel et par allaitement, par des contacts intrafamiliaux normaux, ainsi que de sang à sang. Seulement de 5 à 10 p. 100 des personnes infectées par le virus de lhépatite B (VHB) deviennent malades de façon chronique; la plupart des autres réussissent à combattre le virus et sont jugées avoir souffert dune infection aiguë. Les virus D et G sont dautres virus hématogènes. Le premier semble être un agent co-infectieux qui nest présent quen compagnie du VHB, qui en accentue les symptômes. Lhépatite G dont on connaît à lheure actuelle très peu de chose, a été récemment ajoutée à la liste. Lhépatite C, qui constitue le principal sujet détude du présent document, se transmet avant tout par le sang, par exemple, lors du partage de seringues pour linjection de drogues intraveineuses. Avant 1990, la maladie se transmettait essentiellement par transfusion sanguine et utilisation de produits sanguins. Le virus de lhépatite C nest pas aussi infectieux que le VHB et ne se transmet pas aussi facilement que lui par contacts intimes ou par mélange de fluides biologiques. Plus de 80 p. 100 des infections par lhépatite C (VHC) deviennent chroniques et on estime que la plupart dentre elles mènent à des maladies hépatiques. DESCRIPTION CLINIQUE DE LHÉPATITE C A. Quelques précisions sur le virus Le virus qui cause lhépatite C (VHC) a été identifié en mai 1987 par la société Chiron(3). Jusque là, les malades dont les tests nindiquaient la présence ni de lhépatite A ni de lhépatite B mais qui présentaient des symptômes de la maladie étaient qualifiés de porteurs de lhépatite non A, non B. En 1990, on a mis au point un test réagissant spécifiquement à lanticorps produit contre lhépatite C, mais ce nest que depuis 1993 quil existe un test détectant le virus lui-même. Il sagit là dun progrès important, parce quune personne infectée met normalement de quatre à six semaines avant de développer des anticorps en quantité détectable. Presque tous les organismes stockent linformation génétique dans leur ADN (acide désoxyribonucléique). Certains virus font exception : dans deux des six classes de virus connus, linformation génétique est stockée dans lARN (acide ribonucléique). Cette molécule, beaucoup moins stable que lADN, subit des mutations à une fréquence beaucoup plus élevée que celle-ci. LARN sert dintermédiaire dans la réplication (duplication) du matériel génétique, de sorte quil ne constitue pas un corps étranger pour les organismes porteurs dADN. Voilà pourquoi les virus réussissent à produire des infections chroniques qui échappent au système immunitaire. Le virus de lhépatite C doit se fixer aux cellules hépatiques et les infecter afin de compléter son cycle vital et de se perpétuer. Il injecte son ARN dans une cellule vivante qui, croyant reconnaître son propre ARN messager (ARNm) se met en frais de le reproduire. Ce faisant, la cellule infectée interrompt la plupart de ses fonctions normales afin de conserver son énergie. Des centaines ou des milliers de copies de lARN viral sont produites dans la cellule hépatique, au taux de mutation de celui-ci, qui, comme nous lavons dit, est élevé. La cellule hôte continue de collaborer à la fabrication des éléments requis pour que lARN viral reconstitue des virus. Ensuite, ceux-ci quittent la cellule, qui finit par mourir, et vont ensuite infecter des centaines ou des milliers dautres cellules hépatiques saines. Le système immunitaire du malade en vient vite à reconnaître la présence du virus et tente déliminer lenvahisseur. Cependant, la forte mutagénicité du virus fait en sorte quune variante évoluée réussit toujours à échapper à la réponse immunitaire et à se reproduire sans interruption, jusquà ce que le système immunitaire entreprenne une nouvelle tentative déradication. Ces virus évoluent donc plus rapidement que nimporte quel autre organisme; ce jeu de cache-cache génétique explique pourquoi les scientifiques ont été jusquà présent incapables de trouver un vaccin efficace contre lhépatite C. On croit que le VHC ne se transmet que par le sang. Contrairement aux autres virus hématogènes cependant, il semble pouvoir être accueilli par toute source de sang ou de produit sanguin et être transmis même indirectement, par exemple, par un rasoir ou une brosse à dents. Par conséquent, le VHC est beaucoup plus transmissible que les autres virus hématogènes, y compris le VIH. Dans les années 70 et 80, bien des gens ont été infectés par le VHC lors de transfusions sanguines. Les hémophiles étaient particulièrement susceptibles de contracter la maladie, parce que des produits sanguins dont ils avaient besoin venaient du sang de milliers de donneurs. Depuis que le virus est identifié et quon dispose de tests de dépistage, le nombre de cas de transmissions est tombé à un niveau négligeable dans le réseau canadien dapprovisionnement en sang. Cest la toxicomanie qui présente le plus grand danger de contracter lhépatite C, puisquil compte pour 40 p. 100 de tous les cas. En fait, la majorité des utilisateurs de drogues intraveineuses sont séropositifs pour le VHC car le virus se transmet non seulement par les seringues mais également par dautres instruments utilisés par les toxicomanes. Il y a dautres facteurs de risque non négligeables : les piqûres accidentelles par des aiguilles, le tatouage, le body peircing, lacupuncture, le perçage des oreilles, la contamination de léquipement médical et la multiplicité des partenaires sexuels. La transmission par les contacts quotidiens courants et la transmission mère-enfant à la naissance constituent aussi des risques, mais ils demeurent mal connus. C. Symptômes et diagnostics de lhépatite C (4)(5) Dans la majorité des cas, le malade ne manifeste pas de symptômes tout juste après linfection (lorsque celle-ci est dans sa phase aiguë). Les rares symptômes qui se présentent passent généralement pour des symptômes de la grippe ou un malaise général et ne font pas lobjet dun suivi approprié. Dans 3 à 5 p. 100 des cas, une réaction aiguë survient de deux à trois semaines après linfection, donnant lieu à de graves douleurs abdominales, à des nausées, à des vomissements et à une fatigue extrême. La jaunisse, la perte dappétit, la perte de poids et la léthargie suivent généralement, mais la gravité de ces symptômes diminue généralement avec le temps. Les symptômes les plus courants de linfection chronique apparaissent parfois après plusieurs années : fièvre légère, douleurs musculaires et articulaires, nausées, vomissements, perte dappétit, douleurs abdominales diffuses et parfois, diarrhées. Il nest pas rare que les victimes de lhépatite C se plaignent de démangeaisons de la peau. Cependant, comme on comprend mal ce symptôme, on fait mal le lien avec linfection par le VHC. Les symptômes suivants sont plus rares : urines foncées, selles pâles et perte de poids. Comme dans le cas des autres réactions aiguës moins intenses, bien des personnes confondent ces symptômes avec ceux de la grippe et risquent de ne pas reconnaître la maladie même quand leur cas est suffisamment grave pour nécessiter une intervention médicale. Chez une faible proportion de victimes de lhépatite C, la maladie en vient, généralement après des dizaines dannées, à produire une dysfonction hépatique. Outre les symptômes déjà mentionnés, ces malades souffrent denflures aux bras et aux jambes, de contusions, de confusion intermittente, de désorientation ou dincapacité à effectuer des tâches mentales complexes. Bien des malades reçoivent leur diagnostic lorsquils cherchent à se faire soigner pour une fatigue chronique. Dautres ne découvrent leur maladie que lorsque de graves problèmes au foie les incitent à voir un médecin. Certaines personnes sont diagnostiquées quand des tests sanguins courants indiquent une teneur anormale denzymes hépatiques(6) ou lorsquelles subissent des tests avant de donner du sang. Une concentration élevée denzymes hépatiques incite les médecins à faire passer des tests pour lanticorps du VHC et dautres maladies liées aux dysfonctions hépatiques. Une personne nouvellement infectée sera séronégative car le système immunitaire met de trois à quatre mois à produire des anticorps. Un malade qui présente des anticorps au VHC est dit « anti-VHC positif ». Cette personne développe généralement une infection chronique, et un très faible pourcentage de malades réussissent à éliminer complètement le virus de leur système. Depuis peu, un test détecte le virus lui-même. Ce test, qui analyse lARN viral, a été adopté par lAgence canadienne du sang comme test standard pour les produits sanguins. Il faut procéder à une biopsie du foie avant dentreprendre la pharmacothérapie, ou si on a une raison de soupçonner de graves lésions au foie, ce qui ne peut être confirmé que par analyse du tissu hépatique. La progression de lhépatite C est relativement lente, mais ses conséquences peuvent être assez graves et même mortelles. À ce jour, étant donné le peu de temps écoulé depuis lidentification du virus, le pourcentage de personnes infectées qui ont développé une maladie du foie et sont décédées nest pas connu. Linflammation chronique du foie associée à lhépatite C produit une cirrhose, lorgane tentant de se protéger contre linflammation. Environ 20 p. 100 des victimes dinfection chronique auront développé une cirrhose 20 ans après linfection. Chaque année, de 1 à 5 p. 100 de celles-ci auront un cancer du foie (carcinome hépatocellulaire)(7). Lhépatite C aggrave également les autres affections hépatiques. Une fois que la maladie a progressé jusquau stade de la cirrhose ou du cancer, seule une transplantation du foie peut assurer la survie du malade. Les maladies hépatiques causées par le VHC sont à lorigine de la plupart des transplantations du foie au Canada(8). De nombreuses autres complications sont également mises au compte de la maladie, bien que les relations ne soient pas parfaitement comprises à lheure actuelle. On estime que jusquà 20 p. 100 des personnes souffrant dhépatite C présenteraient des affections à la thyroïde, aux intestins, aux yeux, aux articulations, au sang, à la rate, aux reins ou à la peau(9). On soupçonne que bon nombre de ces complications résultent de la thérapie à linterféron utilisée. Une fois la maladie diagnostiquée, le sujet doit choisir le traitement : médicaments, médecine douce ou changement des habitudes de vie. Lorsque le malade ne souffre pas de symptômes physiques et que les enzymes hépatiques sont cliniquement stables, les médecins favorisent rarement un traitement intensif. Depuis quon a identifié lhépatite C, la seule pharmacothérapie approuvée est celle qui fait appel à linterféron, connu sous le nom commercial dIntron-A®. Les interférons sont une famille de glycoprotéines dérivées des cellules humaines chargées normalement de combattre les infections virales en prévenant la multiplication des virus dans les cellules. La thérapie à linterféron est principalement destinée aux personnes infectées au VHC dont la concentration toujours élevée des enzymes hépatiques indique une hépatite chronique. Le traitement à linterféron nest pas un remède. Seulement le quart des malades infectés peuvent profiter de cette thérapie et parmi ceux qui sont traités, seulement de 10 à 25 p. 100 connaîtront une réduction prolongée des enzymes hépatiques et de la concentration du virus. Les variantes de la pharmacothérapie ont toujours inclus linterféron en doses variables, parfois concurremment à un deuxième médicament. Récemment, la thérapie consistait en injections trihebdomadaires pendant 12 mois ou plus. On met fin au traitement lorsque la concentration des enzymes du foie ne saméliore pas dans un délai raisonnable (deux ou trois mois). Parmi les personnes qui manifestent une amélioration durant la thérapie, bon nombre feront une rechute à la fin du traitement. On peut augmenter la dose de linterféron en augmentant la quantité du médicament administré ou la fréquence de ladministration; cette approche semble avoir plus de succès dans lirradication du virus durant la thérapie et donner lieu à un taux de succès plus élevé après traitement. Cependant, ici encore, le taux de rechute demeure élevé et laugmentation de la dose ne semble pas améliorer beaucoup le taux de réaction soutenue. Linterféron entraîne de nombreux effets secondaires débilitants, et plusieurs médecins le remettent en question, étant donné le taux très faible de rémission à long terme. Récemment, le Programme des produits thérapeutiques de Santé Canada a approuvé le recours au Rebetron®. Il sagit dune thérapie dans laquelle linterféron est combiné à la ribavirine, médicament qui, comme linterféron, agit en modulant la réaction immunitaire. Cette combinaison thérapeutique accroît le pourcentage de malades qui manifestent une diminution soutenue de la concentration virale dans le sang. Chez les malades infectés à une certaine lignée de VHC, cependant, seulement de 25 à 30 p. 100 manifestent une réaction soutenue à la suite du traitement(10). Les effets secondaires considérables de la ribavirine peuvent limiter le recours à cette thérapie chez de nombreux malades(11). On soutient que de nombreux remèdes dherboristerie sont utiles au traitement des maladies du foie en général et que certaines sont efficaces contre lhépatite C de façon spécifique. Des études confirment que le remède le plus généralement reconnu, la silymarine, provenant du chardon Marie, aide les cellules hépatiques à se régénérer et stabilise leurs parois. Cette substance accroît également la capacité du foie à filtrer le sang et prévient les lésions causées par des toxines comme les solvants, lalcool, les drogues, la plupart des pesticides et des herbicides, ainsi que les composés bactériens comme ceux découlant des intoxications alimentaires. La silymarine pourrait contribuer à traiter la cirrhose, lhépatite et dautres maladies du foie(12). De nombreuses personnes qui souffrent dhépatite C estiment quelles peuvent réduire la fatigue qui les afflige en prenant de bonnes habitudes de sommeil, en prévoyant de petites siestes, en mangeant sainement et en faisant de lexercice physique à un niveau modeste mais constant. Pour ce quest de lalimentation, on encourage les malades à absorber suffisamment de protéines pour réparer les cellules de leur foie, à consommer beaucoup de glucides complexes et à limiter les lipides tout en consommant suffisamment dacides gras essentiels. Lapport calorique ne devrait pas être restreint à moins que le malade ne doive déjà perdre du poids. On recommande aux séropositifs pour le VHC déviter lembonpoint, lequel est lié à certaines anomalies hépatiques comme les dépôts de gras, qui peuvent causer linflammation du foie(13). Étant donné que tout stress additionnel sur le foie aggrave les effets du virus, on recommande que les malades évitent les substances inutiles qui taxent le métabolisme du foie. À cet égard, il faut limiter au minimum de nombreux médicaments. Des produits courants comme laspirine et libuprofène peuvent devenir toxiques sils sont consommés régulièrement par une personne dont la fonction hépatique est compromise(14). De toute évidence il faut éviter lalcool, reconnu pour accroître les risques de cirrhose. RECHERCHES ACTUELLES SUR LA MALADIE La recherche sur lhépatite C porte sur deux domaines : le traitement de la maladie et la prévention de linfection. Voici une brève description des recherches actuelles dans ces deux domaines. Le traitement de la maladie couvre plusieurs éléments : méthodes pour atténuer ou éliminer les symptômes, pour ralentir ou inverser les lésions (avec ou sans symptômes) ou pour éliminer le virus. La recherche actuelle porte surtout sur les deux derniers aspects. Une part importante de la recherche vise les pharmacothérapies existantes. La thérapie à linterféron sest révélée utile pour un nombre très limité dinfections par le VHC mais cette portion semble augmenter lorsque linterféron est combiné à la ribavirine. Cependant, les graves effets secondaires de ces médicaments rendent ces traitements peu attrayants. Les chercheurs sont intéressés à déterminer quelles victimes de lhépatite C sont le plus susceptibles den profiter, afin de réduire au minimum lapplication des thérapies inefficaces. Dautres travaux de recherche consistent à analyser les causes de labsence de réponse à linterféron et à les surmonter(15). La recherche dun remède pour la maladie a surtout visé des vaccins et des médicaments produits par génie génétique qui pourraient « vaincre » le virus avant quil soit capable de muter suffisamment pour échapper au traitement. Récemment, on sest penché sur la thérapie génique antisens(16)(17). La recherche sur la prévention de linfection vise la mise au point dun vaccin. Cette recherche a été contrariée considérablement par la mutagénicité du virus. On espère produire un vaccin par génie génétique dans un proche avenir. Tout progrès dans la recherche dun vaccin contre le VIH accélérerait la production dun vaccin contre le VHC(18). IMPORTANCE DE LHÉPATITE C AU CANADA A. Combien de personnes sont atteintes? Selon un rapport, près de 300 000 personnes au Canada (plus de 1 p. 100 de la population) seraient infectées par le VHC(19), et près de 20 000 nouvelles infections sont signalées chaque année(20). Certaines sources estiment que la prévalence de linfection est supérieure à ces nombres; aux États-Unis, les Centers for Disease Control and Prevention (centres de contrôle et de prévention de la maladie), dAtlanta, établissent cette prévalence à environ 1,8 p. 100(21). Bien des personnes infectées nont pas été diagnostiquées parce que bon nombre dentre elles sont asymptomatiques ou faiblement symptomatiques. Cest pourquoi on qualifie lhépatite C d« épidémie silencieuse ». Des 300 000 cas présumés, on prévoit quenviron 60 000 (20 p. 100) développeront une cirrhose, ce qui, au taux de 1 à 5 p. 100 par année, pourrait donner lieu à 600 à 3 000 carcinomes hépatocellulaires par année. B. Indemnisation des victimes du sang contaminé 1. Débat au sujet des tests indirects (22) Au début des années 70, on a commencé à faire subir un test de dépistage de lhépatite B aux donneurs de sang; cétait la seule hépatite virale chronique connue à lépoque. On pensait que ce dépistage éliminerait toutes les hépatites post-transfusionnelles; cependant, les infections ont continué. Bien des scientifiques pensaient que les hépatites post-transfusionnelles diminueraient avec des tests de dépistage dune concentration élevée dune enzyme hépatique dans le sang, lalanine amino transférase (ALT) et de lanticorps de lantigène nucléocapsidique du virus de lhépatite B (anti-HBc). Ce test est dit indirect, parce quil ne recherche pas lagent infectieux lui-même. Dautres scientifiques et responsables étaient davis que ce test indirect était dune valeur douteuse, et quil serait quasi impossible, pour des raisons morales, den confirmer lutilité par des recherches. Néanmoins, les États-Unis ont exigé le test indirect dans tout don de sang à partir de 1986, même si bien des centres du pays avaient pris linitiative de le faire subir dès 1982. Le Canada a suivi le dossier américain et, à plusieurs reprises, envisagé dimposer le test indirect pour tous les dons de sang. Des opinions divergentes au sein des organismes comme la Société canadienne de la Croix-Rouge et le Bureau des produits biologiques ont, en sus des considérations budgétaires, retardé la décision de mettre en uvre ce test. Après une étude considérée inacceptable aux États-Unis, une étude des tests indirects a été entreprise au Canada en 1989, et on a demandé à la Croix-Rouge de suspendre ces tests pendant la durée des travaux. Finalement, le test spécifique au virus de lhépatite C est apparu au début de 1990, puis les premières trousses de détection anti-VHC de Chiron ont rendu caduc le débat sur les tests indirects au Canada. Par conséquent, entre la mise en uvre des tests indirects aux États-Unis en 1986 et lapparition de la trousse anti-VHC en 1990, les dons de sang au Canada nont pas été testés du tout pour lhépatite non A non B. Cest en invoquant cette lacune que les personnes qui ont contracté la maladie à partir de produits sanguins au Canada entre ces dates ont exigé une indemnisation du gouvernement fédéral et des provinces. Le 27 mars 1998, le gouvernement fédéral a annoncé une enveloppe dindemnisation de 1,1 milliard de dollars pour les personnes qui ont contracté lhépatite C à partir du sang contaminé au Canada entre 1986 et 1990. On a estimé leur nombre à 10 000(23), même si le total pourrait être inférieur(24). Ce régime dindemnisation avait été établi de concert avec les provinces et les territoires et il était constitué de 300 millions de fonds provinciaux et territoriaux et de 800 millions de fonds fédéraux. La somme a été légèrement réduite le 16 décembre 1998, lorsquon a décidé daffecter environ 58 millions de dollars aux victimes dune infection secondaire par le VIH. Le 18 décembre 1998, les détails de lenveloppe ont été révélés après beaucoup de tractations entre les avocats du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires, et ceux représentant les victimes dans les recours collectifs. En mai 1999, on a convenu dun règlement final évalué à 1,118 milliard de dollars, plus les intérêts; cette somme inclut lindemnisation des victimes dune infection secondaire par le VIH. Le régime proposé prévoit un paiement initial de 10 000 $ à chaque personne porteuse du VHC et infectée par le sang entre le 1er janvier 1986 et le 1er juillet 1990. Ces victimes sont également admissibles à une indemnisation supplémentaire, selon la gravité de la maladie. Les victimes peuvent également être admissibles à une indemnisation pour perte de revenus, perte de services à la maison, coût des soins, coût de la pharmacothérapie, coût du traitement et des médicaments non assurés, ainsi que pour des dépenses personnelles. Si la maladie progresse, elles peuvent réclamer plus dargent jusquà un plafond de 240 000 $. En outre, la succession est indemnisée par une prestation pour un décès directement attribuable à lhépatite C contractée à partir du sang contaminé entre les dates visées(25). Cette prestation nest pas imposable et ne modifie pas laide sociale. En contrepartie, les personnes qui acceptent loffre doivent signer une renonciation au droit de poursuivre la Croix-Rouge, le fédéral, les provinces et les territoires. Cette offre, déposée devant les tribunaux de lOntario, de la Colombie-Britannique et du Québec, en est à létape de lappel, qui devrait être entendu dici lautomne de 1999(26). À lacceptation de lentente, les conditions lient les parties et couvrent toutes les poursuites déjà intentées, en recours collectif ou privé, y compris dans les autres provinces. En général, toutes les demandes doivent être soumises avant le 30 juin 2010. 3. Indemnisation par les provinces Lorsque loffre fédérale dindemnisation a été annoncée en mars 1998, elle la été en collaboration avec les provinces et territoires, celles-ci ayant appuyé lindemnisation des seules personnes infectées entre 1986 et 1990. Pendant plusieurs mois cependant, certaines provinces ont commencé à envisager détendre lindemnisation à toutes les personnes ayant contracté le VHC par le sang contaminé, peu importe la date. La plupart des provinces concernées estimaient que cette bonification de lindemnisation devait venir des fonds fédéraux. En novembre 1998, le gouvernement ontarien a annoncé quil allait indemniser ces victimes; avant la fin décembre, il a commencé à distribuer des montants forfaitaires de 10 000 $(27). À lheure actuelle, lOntario est la seule province à indemniser les personnes infectées avant 1986 et après 1990; cependant, le Québec et la Colombie-Britannique ont dit envisager elles aussi daccorder des indemnisations à ces personnes. 4. Responsabilité de la Croix-Rouge canadienne Juste avant dabandonner la responsabilité de lapprovisionnement sanguin à lautomne de 1998, la Croix-Rouge canadienne a demandé la protection de la Loi sur les faillites afin de pouvoir restructurer ses finances, compte tenu des poursuites totalisant huit milliards de dollars déposées surtout par des personnes ayant contracté lhépatite C à partir du sang en dehors de la période 1986-1990. Lorganisme avait exprimé son désir de remplir ses obligations morales envers ces victimes mais souligné les contraintes financières auxquelles il faisait face. Il avait espéré créer un fonds dindemnisation acceptable pour les victimes de lhépatite C; cependant, en mars 1999, son offre de 60 millions de dollars aux victimes, excluant loffre fédérale, a été rejetée(28). La lenteur avec laquelle lhépatite C progresse chez le malade jusquà causer éventuellement la mort la fait qualifier d« épidémie silencieuse ». Cependant, maintenant que la maladie a été identifiée, et quon sait que beaucoup de personnes en souffrent depuis des années, les problèmes de santé qui en découlent reçoivent plus dattention. Chaque année, on signale de nouveaux cas. Cela ne témoigne pas dune recrudescence des infections, mais plutôt dun meilleur diagnostic de linfection chronique après apparition des symptômes. Lhépatite C contribue beaucoup aux maladies du foie, à la cirrhose et au cancer du foie. (1) « Hepatitis C An Epidemic for Anyone », site Internet : www.epidemic.org (2) S.D. Shafran et J.M. Colly, « ABCDEFG », The Canadian Journal of Infections Diseases, vol. 7, no 3, mai/juin 1996, p. 181-182. (3) Site Internet de Chiron : www.chiron.com/patients/education/hepatitisFrame.html (4) Paul R. Gully et Martin L. Tepper, « Hepatitis C », Journal de lAssociation médicale canadienne, vol. 156, no 10, 1997, p. 1427. (5)
Organisation mondiale de la santé, fiche dinformation sur lhépatite C
au site Internet : (6) Les enzymes hépatiques sont particulières au foie et se retrouvent normalement dans le sang. Toute agression sur le foie peut donner lieu à des concentrations élevées de ces enzymes, toujours présentes en petite quantité à cause de la nécrose normale des cellules hépatiques et de la diffusion de ces enzymes dans le sang. (7)
Organisation mondiale de la santé, fiche dinformation sur lhépatite C
au site Internet : (8) Registre canadien des insuffisances et des transplantations dorganes (RCITO), Rapport annuel 1996, vol. 2, Ottawa, Institut canadien de linformation sur la santé, 1996, p. 3-11. (9) « Hepatitis C An Epidemic for Anyone », site Internet : www.epidemic.org (10) Site Internet HepNet : www.hepnet.com/hepc/news042999.html (11) Mitchell Schiffman, « Hepatitis C: Dilemmas in Treatment », présentation à la réunion annuelle de la Digestive Disease Week, 17 mai 1999. (12) M.I. Thabrew, « Phytogenic Agents in the Therapy of Liver Disease », Phytotherapy Research, vol. 10, no 6, septembre 1996, p. 461-467. (13)
« Relationship between Diet and VHC », site Internet de l'American Liver
Foundation: (14) T.R. Riley 3rd et J.P. Smith, « Ibuprofen-Induced Hepatotoxicity in Patients with Chronic Hepatitis C: A Case Series », American Journal of Gastroenterology, vol. 93, no 9, septembre 1998, p. 1563-1565. (15)
W. Wayt Gibbs, « In Focus: Rx for B and C », site Internet du Scientific
American : (16) Dans la thérapie génique antisens la reproduction virale est inhibée par ladministration de copies de synthèse de lADN aux cellules affectées, modifiées de façon à inhiber un ou plusieurs des mécanismes viraux, ce qui empêche le virus de survivre. (17)
Kenneth B. Chiacchia, « Looking to the Future », site Internet HepNet : (18) David B. Weiner et Ronald C. Kennedy, « Genetic Vaccines », Scientific American, vol. 281, no 1, juillet 1999, p. 50-57. (19) Direction générale de la protection de la santé, Rapport du groupe dexperts sur lhépatite C, Ottawa, Santé Canada, juillet 1998. (20) Communication personnelle avec le Laboratoire des infections virales humaines du Bureau de microbiologie de Santé Canada, juin 1999. (21)
Fiche sur lhépatite C, site Internet des Centers for Disease Control and
Prevention : (22) Le contenu de cette section est adapté du Rapport final de la Commission denquête sur le système dapprovisionnement en sang au Canada du juge Horace Krever, vol. 2, chap. 23 et 24, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 1997, 1, 138 p. (23) Hepatitis C Class Action Class Counsel Statement, Canada News-Wire, 15 juin 1999. (24) Rapport de la Réunion du groupe expert sur lépidémiologie de lhépatite C, Santé Canada, 24 juillet 1998. (25)
« Entente de règlement proposée pour les personnes ayant contracté
lhépatite C entre 1986 et 1990, résumé », site Internet de Santé
Canada : (26)
« Entente de règlement proposée pour les personnes ayant contracté
lhépatite C entre 1986 et 1990, chronologie des principales étapes »,
site Internet de Santé Canada : (27) Communiqué de presse du gouvernement de lOntario daté du 15 juin 1999, site Internet : www.newswire.ca/government/ontario/english/releases/June1999/15/c5064.html (28) Mark Kennedy, « Blood Victims Refect $60M Offer: Hep-C Victims Say Red Cross Proposal Not Enough », The Ottawa Citizen, 30 mars 1999, p. A7 |