PRB 99-4F

 

ASSURANCE-EMPLOI : TENDANCES RELATIVES
AUX PRESTATAIRES ORDINAIRES

 

Rédaction :
Kevin B. Kerr
Division de l'économie
17 mars 1999


 

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS

   A. Normes d’admissibilité

   B. Durée des prestations

   C. Pénalités en cas de démission sans motif valable

CONCLUSION

 


ASSURANCE-EMPLOI : TENDANCES RELATIVES
AUX PRESTATAIRES ORDINAIRES

INTRODUCTION

Pour avoir droit aux prestations d’assurance-emploi ordinaires, il faut, entre autres choses, avoir occupé un emploi assurable pendant un nombre minimum d’heures (de semaines dans l’ancien régime d’assurance-chômage)(1). Depuis 1990, le nombre de chômeurs en mesure de toucher les prestations d’assurance-emploi a reculé, en termes relatifs, comme l’indique bien la diminution constante du nombre de prestataires ordinaires d’assurance-emploi par rapport au nombre de chômeurs (appellé ci-après le ratio prestataires/chômeurs ou ratio P/C)). Dans les pages qui suivent, nous expliquons cette tendance et certains des facteurs qui l’expliquent.

Le nombre de prestataires ordinaires est toujours fonction d’un grand nombre de variables, dont la principale est le niveau de chômage. Entre 1976 et 1989, il existait une relation linéaire assez forte entre le nombre de prestataires ordinaires et le chômage global. Après cette période, cette relation est devenue beaucoup plus ténue(2). Le graphique 1 illustre cette relation à l’aide du ratio prestataires/chômeurs et montre que cette tendance était commune dans toutes les régions du pays.

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Comme on peut le voir aussi dans le graphique, c’est le Canada atlantique qui a accusé le ratio P/C le plus élevé entre 1976 et 1998, suivi du Québec, de la Colombie-Britannique, des Prairies et de l’Ontario. Les tendances affichées par les ratios régionaux ont été similaires dans l’ensemble pendant toute la période, même si, fait notable, les Prairies et l’Ontario ont interverti leur position après la récession de 1981-1982. Le ratio des prestataires/chômeurs dans le Canada atlantique a affiché le recul le plus net en termes absolus entre 1976 et 1998, et l’Ontario, le repli le plus important en termes relatifs. On peut dire essentiellement la même chose pour la période qui s’est écoulée depuis 1990, même si le ratio dans les Prairies a accusé un déclin nettement plus marqué au cours de ces années que pendant l’ensemble de la période.

Pour l’ensemble du pays, le ratio P/C a chuté d’environ 50 p. 100 entre 1976 et 1998, puisqu’il est passé de 0,83 à 0,42. Cette évolution contraste très nettement avec la tendance observée chez les prestataires non ordinaires (touchant des prestations d’emploi, des prestations spéciales et des prestations de pêcheurs) en proportion du nombre total de chômeurs, puisque ce ratio est passé de 0,1 à 0,14 pendant la même période. Après s’être replié pendant huit années de suite, le ratio national prestataires/chômeurs a connu une légère hausse en 1998. Comme l’indique le graphique 1, ce ratio a également enregistré une progression dans le Canada atlantique, au Québec et dans les Prairies.

Pour beaucoup, cette tendance est inquiétante, car l’assurance-emploi est un substitut de revenu pour une proportion décroissante de chômeurs, ce qui pourrait avoir un effet négatif sur les effets de stabilisation du régime et l’ajustement du marché de la main-d’œuvre(3). En 1997, Développement des ressources humaines Canada a effectué une étude visant à dégager les facteurs expliquant cette tendance et à éclaircir les raisons pour lesquelles le nombre de chômeurs réclamant des prestations d’assurance-emploi ordinaires était proportionnellement moindre(4). Ce rapport, intitulé Analyse de la couverture assurée par le régime d’assurance-emploi (le Rapport), a été publié en octobre 1998.

RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS

Statistique Canada mène un sondage appelé Enquête sur la couverture de la population par l’Assurance-emploi pour déterminer qui reçoit des prestations d’assurance-emploi et qui n’en reçoit pas. Cette enquête a été menée pour la première fois en janvier 1997 et s’effectue depuis tous les trois mois dans le cadre de l’Enquête sur la population active. En décomposant le ratio prestataires/chômeurs, le Rapport s’appuie sur des analyses antérieures qui comparaient les « prestataires potentiels », définis comme étant quiconque aurait eu droit à des prestations d’assurance-chômage ou d’assurance-emploi entre 1972 et 1997(5), et les prestataires réels. Par exemple, un individu qui aurait démissionné de son plein gré en 1997 après avoir occupé un emploi assurable pendant huit semaines au cours de l’année antérieure pourrait être un bénéficiaire potentiel, car il aurait pu avoir droit aux prestations d’assurance-chômage en 1972. Selon l’étude, il y a trois aspects à l’évolution du ratio des prestataires/chômeurs :

  • changements du ratio des prestataires ordinaires sans gains aux prestataires potentiels (changement de régime et d’orientation);

  • changements du ratio des prestataires potentiels aux chômeurs (modifications de la composition de la main-d’œuvre); et

  • changements du ratio des prestataires avec gains aux chômeurs.

Selon cette analyse, les changements induits par le régime et les changements d’orientation expliquent 48 p. 100 de la baisse qu’a enregistrée le ratio P/C entre 1989 et 1997, et l’évolution de la composition de la main d’oeuvre en explique 43 p. 100; le reste est attribuable à des variations du ratio des prestataires avec gains aux chômeurs(6). Quant aux effets du marché du travail, le plus important a été l’accroissement de la proportion des gens sans-emploi au cours des 12 mois précédents dans l’ensemble des chômeurs, qui, de 20,8 p. 100 en 1989, est passée à 38,4 p. 100 en 1997. De ce groupe, un peu plus de 25 p. 100 était constitué, en 1997, de chômeurs sans expérience professionnelle (nouveaux venus sur le marché du travail), et les 75 p. 100 restants étaient des chômeurs ayant déjà travaillé, mais pas dans les 12 mois précédents.

D’après le Rapport, sur les 925 000 chômeurs non couverts par l’assurance-emploi en 1997, 65 p. 100 étaient des chômeurs n’ayant occupé aucun emploi depuis 12 mois (483 000 individus), des travailleurs autonomes et des personnes travaillant pour le chef de famille sans rémunération (65 000 personnes) ainsi que des chômeurs ayant quitté leur emploi pour poursuivre des études (56 000 personnes). Dans ces trois groupes (à l’exception des pêcheurs autonomes), personne n’a jamais été couvert par le régime d’assurance-chômage canadien(7). La progression de cette composante des chômeurs canadiens montre bien que le ratio P/C est un piètre indicateur de la couverture assurée par le régime d’assurance-emploi(8). Par contre, 78 p. 100 des chômeurs couverts par l’assurance-emploi (516 000 personnes) avaient droit aux prestations d’assurance-emploi(9).

Selon le Rapport, les réformes d’assurance-chômage et d’assurance-emploi mises en œuvre depuis le début de la décennie n’ont modifié sensiblement le ratio P/C qu’après 1993, car l’élargissement de l’admissibilité aux prestations et l’allongement de la durée de ces dernières, induits par la récession, ont neutralisé les changements d’orientation apportés au régime au début des années 90. Bon nombre des réformes de l’assurance-chômage ou de l’assurance-emploi mises en place depuis 1990 étaient censées diminuer le coût du régime et encourager l’établissement de liens plus forts avec le travail. Ces changements d’orientation devaient donc avoir pour effet d’abaisser le ratio P/C, du moins à court terme, et réduire le chômage à plus long terme. Trois réformes — modifications aux critères d’admissibilité et à la structure des prestations, exclusion totale en cas de démission sans motif valable ou perte d’un emploi par suite d’inconduite — ont, semble-t-il, fortement contribué à la baisse du nombre de prestataires ordinaires, pendant toute la période.

   A. Normes d’admissibilité

Lorsque le projet de loi C-21 a été adopté en 1990, la norme d’admissibilité aux prestations ordinaires (sauf celles destinées aux pêcheurs indépendants), qui était de 10 à 14 semaines d’emploi assurables, selon la région, a été portée à 10 à 20 semaines. Dans les régions où le taux de chômage était inférieur à 15 p. 100, la norme d’admissibilité a été relevée pour tous. Elle a été portée de une à cinq semaines d’emploi assurable dans les régions où le taux de chômage variait entre plus de 10 p. 100 et moins de 15 p. 100 et de six semaines dans toutes les régions où le taux de chômage était inférieur à 10 p. 100.

En 1994, en vertu du projet de loi C-17, la norme d’admissibilité minimale dans les régions du pays où le taux de chômage était le plus élevé est passée de 10 à 12 semaines d’emploi assurable. En outre, le Règlement sur l’assurance-chômage a été modifié de manière à imposer les mêmes normes d’admissibilité (pas la période d’admissibilité) aux pêcheurs indépendants qu’aux prestataires ordinaires.

La toute dernière modification à la norme d’admissibilité, adoptée en vertu de la Loi sur l’assurance-chômage, est le remplacement des semaines d’emploi assurable par des heures comme base de détermination de l’admissibilité aux prestations (une semaine de travail de 35 heures a été utilisée pour effectuer la conversion). Par suite de cette modification, la norme effective d’admissibilité a été relevée pour ceux qui travaillent moins de 35 heures par semaine et abaissée pour ceux qui travaillent plus de 35 heures par semaine. Même si l’assurance-emploi couvre désormais la première heure travaillée, elle a considérablement augmenté les normes d’admissibilité pour certains travailleurs à temps partiel, surtout ceux qui étaient admissibles selon les anciennes règles minimales d’assurabilité du régime. Quiconque devient ou redevient membre de la population active doit désormais occuper un emploi assurable pendant 910 heures, soit jusqu’à 210 heures de plus que ce qui était exigé auparavant (moins selon les anciennes règles minimales d’assurabilité).

Les nouvelles normes en matière d’admissibilité ont été mises en place en deux étapes. Au cours de la dernière moitié de 1996, quiconque devenait ou redevenait membre de la population active devait avoir occupé un emploi assurable pendant six semaines supplémentaires pour avoir droit aux prestations et, dès janvier 1997, tous les prestataires étaient assujettis à la détermination de l’admissibilité aux prestations de chômage en fonction des heures travaillées. Selon le rapport intitulé Analyse de la couverture assurée par le régime d’assurance-emploi de 1997, le nombre de nouveaux prestataires (à l’exception de ceux répondant à la définition donnée au paragraphe 58(1) de la Loi) a reculé de 12 p. 100 (149 000 personnes) entre les derniers semestres de 1995 et de 1996 et de 18,16 p. 100 (169 000 personnes) entre les premiers semestres de 1996 et de 1997. Il est intéressant de noter que les prestataires ayant occupé un emploi assurable pendant 20 à 25 semaines comptaient pour près de la moitié du recul du nombre de nouveaux prestataires au cours de la première de ces périodes et pour le tiers, dans la seconde(10). Il s’agit là de la catégorie de prestataires la plus touchée par le relèvement du critère d’admissibilité pour les personnes qui deviennent ou redeviennent membres de la population active. En revanche, il semble que certaines de ces personnes aient été en mesure de répondre aux nouveaux critères d’admissibilité; en effet, le nombre de nouveaux prestataires parmi ceux ayant occupé un emploi assurable pendant 26 à 30 semaines s’est accru de 7,5 p. 100 entre les seconds semestres de 1995 et de 1996 et de 3,5 p. 100 entre les premiers semestres de 1996 et 1997. C’est la seule catégorie de prestataires qui a enregistré une augmentation des nouveaux venus au cours de ces périodes(11).

Même s’ils n’attribuent à aucune réforme en particulier les changements du ratio, les auteurs du Rapport laissent entendre que le non-respect des critères d’admissibilité a été la deuxième cause de non-admissibilité en 1997, touchant 142 000 cotisants chômeurs inadmissibles(12). De ceux-ci, environ 54 p. 100 (76 105 personnes) ne répondaient pas aux normes minimales d’admissibilité du régime (420 heures d’emploi assurable), et 46 p. 100 (soit 65 895 personnes) satisfaisaient aux normes minimales, mais ne répondaient pas aux normes d’admissibilité régionales. Les habitants du Canada atlantique et les jeunes faisaient plus souvent partie du groupe de ceux ne pouvant répondre aux normes minimales d’admissibilité que de celui ne satisfaisant pas aux normes régionales. Comparativement au premier groupe, le second contenait en proportion davantage d’hommes que de femmes(13).

   B. Durée des prestations

Le projet de loi C-21 a regroupé les trois stades prévus dans la structure des prestations (prestations initiales, prestations de prolongation fondées sur la durée d’emploi et prestations de prolongation fondées sur le taux de chômage régional) en un seul. Cela a eu pour effet de réduire la durée maximum de l’admissibilité aux prestations dans tous les cas, à l’exception de celui des prestataires occupant un emploi pendant de longues périodes et habitant dans des régions à fort taux de chômage.

En 1994 (en vertu du projet de loi C-17), la période maximale d’admissibilité aux prestations a été de nouveau écourtée, et ce sont les régions à taux de chômage élevé qui l’ont ressenti le plus fortement. Par exemple, les prestataires ayant occupé un emploi assurable pendant 25 semaines et résidant dans les régions où le taux de chômage était supérieur à 11 et inférieur à 15 p. 100 ont vu leur période d’admissibilité réduite de 16 semaines. Pour l’ensemble du pays, la moyenne des semaines d’admissibilité à l’assurance-emploi est passée de 41 semaines au premier semestre de 1994 à 34 semaines au premier semestre de 1995(14). Les taux d’épuisement des prestations, illustrés au graphique 2, ont accusé une hausse en 1995, ce qui peut expliquer, en partie, la baisse de 11 p. 100 du ratio P/C cette année-là.

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La Loi sur l’assurance-emploi a instauré une structure de prestations fondée sur le nombre d’heures d’emploi assurable. Par suite de cette réforme, l’admissibilité effective aux prestations a régressé pour ceux qui travaillent moins de 35 heures par semaine et augmenté pour ceux qui travaillent plus de 35 heures. Par ailleurs, la période d’admissibilité maximale est passée de 50 à 45 semaines. Au départ, ce changement s’est surtout répercuté sur les prestataires travaillant de courtes semaines et sur ceux travaillant au moins 1 400 heures ou plus d’emploi assurable et habitant dans des régions du pays à taux de chômage relativement élevé. Par exemple, selon l’ancien système, un prestataire habitant une région où le taux de chômage dépassait les 10 p. 100 sans excéder 11 p. 100 et qui travaillait 20 heures par semaine pendant 30 semaines aurait eu droit à un maximum de 29 semaines de prestations. Aujourd’hui, le même prestataire a droit à un maximum de 22 semaines de prestations. Les prestataires ayant participé pendant longtemps au marché du travail ont vu la durée maximale des périodes de prestations réduite d’au plus cinq semaines selon le taux de chômage de la région.

Selon le Rapport, 35 000 chômeurs qui avaient établi leur droit aux prestations d’assurance-emploi ou les recevaient ont épuisé ces prestations en 1997. En d’autres termes, 3,8 p. 100 environ des chômeurs non couverts par l’assurance-emploi (925 000 sans-emploi) ont épuisé leurs prestations cette année-là. Par rapport aux autres groupes d’âge, ce sont les travailleurs âgés d’au moins 45 ans qui ont été le plus susceptibles d’épuiser leurs prestations. Cela n’a rien d’étonnant, étant donné que c’est ce groupe qui a affiché le plus fort taux de chômage de longue durée (c.-à-d. pendant au moins 53 semaines) cette année-là (19,4 p. 100). Le lien entre la fréquence régionale de l’épuisement et le chômage de longue durée (tel qu’il est défini) est beaucoup plus ténu toutefois; le Canada Atlantique a enregistré la plus forte proportion de prestataires ayant épuisé leurs prestations en 1997, mais s’est classé avant-dernier pour ce qui est du chômage de longue durée.

   C. Pénalités en cas de démission sans motif valable

Jusqu’en 1993, les prestataires devaient respecter une période d’exclusion de courte durée, de sept à douze semaines(15). En 1993, en vertu du projet de loi C-113, quiconque démissionnait volontairement sans motif valable ou perdait son emploi pour cause d’inconduite était totalement exclu. Comme l’illustre le graphique 3, cette réforme a probablement eu une incidence sur le ratio P/C, car la fréquence des exclusions dues à ces deux causes a enregistré son plus bas niveau depuis 1980 et est demeurée relativement stable par la suite(16). Avant 1993, les exclusions pour cause d’inconduite ou de démission volontaire avaient un effet temporaire sur le nombre de prestataires ordinaires au cours de l’année(17); toutes choses étant égales par ailleurs, les changements apportés en 1993 semblent toutefois avoir réduit de façon permanente le nombre de prestataires ordinaires par rapport au nombre de sans-emploi, et ce, au cours de n’importe quel mois. Selon le Rapport, 100 000 chômeurs n’étaient pas couverts par les prestations d’assurance-emploi en 1997, parce qu’ils avaient démissionné volontairement ou perdu leur emploi pour cause d’inconduite. Ces deux motifs constituent la troisième cause de non-couverture par l’assurance-emploi. En 1997, ce groupe comprenait des concentrations relativement fortes de jeunes (de moins de 35 ans) et de résidants des Prairies, où le chômage est faible.

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CONCLUSION

S’il est encore trop tôt pour connaître l’incidence ultime de la réforme de l’assurance-emploi sur le ratio P/C, on peut toutefois déjà affirmer que les effets cumulatifs des modifications du régime d’assurance-chômage du Canada depuis le début de la décennie ont sans conteste permis d’abaisser ce ratio. Selon le Rapport, les réformes du régime expliquent au moins la moitié du repli du ratio P/C depuis 1990. Les modifications de la composition des chômeurs, surtout pour ce qui est de la proportion des chômeurs qui n’ont pas travaillé au cours des douze derniers mois, ont également considérablement contribué à cette tendance.

L’utilité du ratio P/C comme mesure de la couverture assurée par l’assurance-emploi s’est estompée ces dernières années en raison de l’évolution de la composition du groupe des chômeurs. En 1997, près des deux tiers des chômeurs non couverts n’avaient jamais été admissibles à des prestations dans le cadre du régime d’assurance-chômage canadien. Si l’incidence de l’évolution du marché du travail sur le ratio P/C demeure incertaine, il est probable que les effets nocifs des réformes du régime d’assurance-emploi s’estomperont à long terme, à condition que ces réformes, comme elles sont censées le faire, consolident les liens vis-à-vis du travail et réduisent le niveau global du chômage(18).


(1) Les critères minimums d’admissibilité aux prestations ordinaires sont inversement liés aux taux de chômage régionaux. Par exemple, dans une région où le taux de chômage dépasse les 6 p. 100 mais est inférieur à 7 p. 100, il faut avoir occupé un emploi assurable pendant un minimum de 665 heures pour avoir droit aux prestations, contre 420 heures dans les régions où le taux de chômage est supérieur à 13 p. 100. Ces critères sont encore plus élevés pour les demandeurs qui ont enfreint la Loi au moins une fois. Les personnes qui intègrent ou réintègrent la population active (c’est à dire qui, au cours des 52 semaines qui ont précédé immédiatement la période) doivent avoir occupé pendant au moins 910 heures un emploi assurable pour avoir droit aux prestations, quel que soit le taux de chômage de leur région. Selon le paragraphe 7(4) de la Loi sur l’assurance-emploi, la personne qui devient ou redevient membre de la population active est celle qui, au cours de la période de cinquante deux semaines qui précède le début de sa période de référence, a cumulé, selon le cas : a) moins de quatre cent quatre-vingt-dix heures d’emploi assurable; b) moins de quatre cent quatre-vingt dix heures au cours desquelles des prestations lui ont été payées ou lui étaient payables, chaque semaine de prestations se composant de trente-cinq heures; c) moins de quatre cent quatre-vingt-dix heures reliées à un emploi sur le marché du travail, tel qu’il est prévu par règlement; d) moins de quatre cent quatre-vingt-dix de l’une ou l’autre de ces heures.

(2) Le lien entre les prestataires ordinaires et le chômage, mesuré par le coefficient de détermination, tombe de 0,93 (pour la période allant de 1976 à 1989) à 0,23 (pour la période allant de 1990 à 1998). En d’autres termes, la fluctuation du nombre de prestataires s’explique, dans une proportion de 93 p. 100, par le nombre de chômeurs pendant la période allant de 1976 à 1989, et dans une proportion de seulement 23 p. 100 par le nombre de chômeurs entre 1990 et 1998.

(3) Même si les prestations sont censées intensifier les recherches d’emploi, produire des salaires plus élevés à la réintégration sur le marché du travail et permettre un appariement plus durable entre les travailleurs et les entreprises, elles peuvent également influer sur la décision de faire partie de la main d’œuvre et donc sur le taux de chômage.

(4) Selon le Rapport de contrôle et d’évaluation — Régime d’assurance-emploi en 1997, l’étude sur le ratio des prestataires/chômeurs était également censée porter sur l’effet financier sur ceux ne touchant aucune prestation d’assurance-emploi. Ce rapport ne traite toutefois pas de la question.

(5) On estime qu’en 1997, 14 p. 100 des chômeurs et des gens hors de la population active étaient des bénéficiaires potentiels (Analyse de la couverture assurée par le régime d’assurance-emploi, Développement des ressources humaines Canada, W-98-35F, automne 1998, p. 29).

(6) Développement des Ressources humaines Canada, Analyse de la couverture assurée par le Régime d’assurance-emploi, W-98-35F, octobre 1998, p. 31.

(7) Ibid., p. 46-47.

(8) Il faut noter qu’en 1997, 139 000 prestataires ordinaires ne faisaient pas partie de la population active (c’est-à-dire n’étaient pas comptés comme chômeurs) pendant la semaine de référence et que 94 000 prestataires ordinaires avaient un emploi au cours de cette semaine (c’est-à-dire n’étaient pas comptés comme chômeurs).

(9) Les sans-emploi couverts par l’assurance-emploi comprennent les personnes qui ont occupé un emploi assurable rémunéré au cours des 12 derniers mois et n’ont pas quitté leur emploi pour suivre des études ou n’ont pas démissionné sans motif valable ou encore perdu leur emploi pour cause d’inconduite.

(10) Selon l’Analyse de la couverture assurée par le régime d’assurance-emploi de 1997, le nombre de nouveaux chômeurs a reculé d’environ 6 p. 100 (40 300 personnes) entre juillet 1995 et juin 1996 et entre juillet 1996 et juin 1997. Pendant la même période, le nombre de nouveaux prestataires a diminué de 318 000 personnes, soit de 15 p. 100. Même si elle est sans aucun doute liée au repli des pertes d’emploi, cette baisse ne semble constituer qu’un élément de réponse.

(11) Ce résultat préliminaire contredit celui de l’analyse d’incidence présentée au Comité permanent du développement des ressources humaines de la Chambre des communes le 23 janvier 1996. Selon cette dernière, 90 000 travailleurs environ auraient droit aux prestations par suite de l’élimination des critères minimums d’assurabilité et de la nouvelle base de détermination de l’admissibilité en fonction du nombre d’heures travaillées. Toutefois, cette nouvelle base de détermination et le relèvement des normes d’admissibilité pour les personnes devenant ou redevenant membres de la population active devraient avoir pour effet de réduire dans les mêmes proportions l’admissibilité aux prestations. Ces changements liés à l’admissibilité sont censés avoir des répercussions sur la répartition des prestataires, mais l’incidence globale sur l’ensemble des prestataires devrait être négligeable.

(12) Développement des ressources humaines, Canada (octobre 1998), p. 48-49.

(13) Ibid., p. 50.

(14) Développement des ressources humaines Canada, Rapport de contrôle et d’évaluation — Régime d’assurance-emploi en 1997, décembre 1997, tableau 7, p. 82.

(15) Avant l’adoption du projet de loi C-21, en 1990, la période d’exclusion en cas de démission volontaire ou de perte d’emploi par suite d’inconduite se situait entre une et six semaines.

(16) Le taux d’exclusion pour la période qui a fait suite à la récession de 1990-1991 n’a pas sensiblement augmenté à mesure que l’économie s’est redressée, ce qui contraste nettement avec le comportement procyclique qu’il a affiché après la récession de 1981-1982.

(17) Par exemple, entre 1990 et 1992, les prestataires exclus pour cause de démission volontaire ou de perte d’emploi en raison de leur inconduite ont perdu entre sept et douze semaines de prestations, après quoi ils ont recommencé à percevoir leurs prestations et le ratio P/C a grimpé. Il en a été tout autrement après avril 1993, car les prestataires exclus pour ces motifs n’avaient pas droit aux prestations pendant qu’ils étaient sans emploi.

(18) Par exemple, les données compilées pour faire suite au relèvement temporaire des normes d’admissibilité en 1990 semblent indiquer que certains prestataires ont pu obtenir des semaines supplémentaires d’emploi assurable pour avoir droit aux prestations ordinaires. Entre janvier et novembre 1990, la norme variable d’admissibilité de 10 à 14 semaines d’emploi assurable est devenue une norme fixe, de 14 semaines. En conséquence, le sommet du taux de départ qui se trouvait à 10 semaines en 1989 est passé à 14 semaines en 1990. Par suite du relèvement de la norme d’admissibilité en 1990, la durée moyenne d’emploi a enregistré une augmentation estimée à 1,5 semaine et le taux de chômage a perdu 0,4 points de pourcentage dans les régions où les prestations payables sont les plus élevées (voir D. Green et C. Riddell, La norme d’admissibilité à l’assurance-chômage, Rapport d’évaluation no 1 de Développement des ressources humaines Canada, janvier 1994).