87-2F

 

LES DÉPENSES FÉDÉRALES :
NOUVELLES TENDANCES

 

Rédaction :
Jean Soucy, Division de l'économie
Marion G. Wrobel, Analyste principal

Révisé le 27 mars 2000


 

TABLE DES MATIÈRES

 

DÉFINITION DU SUJET

CONTEXTE ET ANALYSE

   A. Tendances des dépenses

   B. Le coût des services sociaux

      1. Sécurité de la vieillesse et programmes connexes
      2. La prestation des aînés
      3. Assurance-emploi
      4. Allocations familiales/Prestations fiscales pour enfants

   C. Frais de la dette

   D. Les budgets fédéraux de 1990, 1991 et 1992, et l'exposé économique
        et financier de décembre 1992

   E. Le budget fédéral de 1993

   F. Le budget fédéral de 1994

   G. Le budget fédéral de 1995

   H. Le budget fédéral de 1996

   I. Le budget fédéral de 1997

   J. Le budget fédéral de 1998

   K. Le budget fédéral de 1999

   L. Le budget fédéral de 2000

MESURES PARLEMENTAIRES

CHRONOLOGIE

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

 


LES DÉPENSES FÉDÉRALES : NOUVELLES TENDANCES*

 

DÉFINITION DU SUJET

Depuis 1970-1971, les dépenses totales du gouvernement fédéral sont passées de 16 à environ 158,000 milliards de dollars. Pour placer ces chiffres en perspective, signalons qu’elles représentaient 18 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) au début de 1970-1971 comparativement à 15,8 p. 100 en 2000-2001. Ces données masquent cependant le fait que les dépenses fédérales ont grimpé jusqu’à environ 25 p. 100 du PIB au milieu des années 80, puis qu’elles ont baissé depuis (graphique 1).

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La tendance à long terme à l’accroissement des dépenses s’est amorcée il y a plusieurs décennies. Dans le présent bulletin, nous ne couvrons que la période récente de croissance des dépenses et ne nous intéressons pas tant aux dépenses totales elles-mêmes qu’à l’évolution de certains de leurs éléments constitutifs, soit ceux qui les font augmenter; nous cherchons à expliquer pourquoi ces éléments ont cet effet.

CONTEXTE ET ANALYSE

   A. Tendances des dépenses

Les trois graphiques des pages suivantes résument les tendances des dépenses fédérales. Le graphique 1 illustre les dépenses totales en proportion du PIB et fournit un point de comparaison en indiquant le montant des recettes. Il nous permet de constater qu’il y a eu une progression très accentuée des dépenses fédérales tout au long des années 70 et durant la première moitié des années 80, puis une chute radicale de ces dernières par la suite.

Le graphique montre clairement les effets des récessions sur les dépenses. Il reste que les quinze premières années affichent une nette tendance à la hausse, qui est renversée dans les dix-sept dernières années de la période observée. Aujourd’hui, la proportion des dépenses par rapport au PIB est inférieure à ce qu’elle était au début des années 70.

Les dépenses totales ont fluctué avec le temps, et leur composition a régulièrement changé. Depuis le milieu des années 70, lorsque le rapport de la dette au PIB était le plus bas, la part des frais de service de la dette dans les dépenses totales a triplé, passant de 10 à environ 30 p. 100. Selon les projections budgétaires, les frais de service de la dette devraient se stabiliser autour de 26 p. 100 des dépenses, comme l’indique le graphique 2.

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Le graphique 3 présente cinq éléments constitutifs principaux des dépenses de programmes en proportion des dépenses de programmes totales. Les tendances qui se dégagent donnent une idée de l’évolution des priorités du gouvernement. On constate une diminution lente mais régulière de la part relative du financement public des sociétés d’État. On observe une tendance similaire dans les dépenses relatives à la défense, dont la part relative a baissé de plus de 25 p. 100 depuis 1990. Les autres ministères et organismes comptent pour une part croissante des dépenses, part qui devrait atteindre 21,4 p. 100 en 2001-2002.

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Selon ce graphique, les transferts aux autres gouvernements représentent maintenant la troisième catégorie de dépenses en importance. Ils ont constitué une part relativement stable des dépenses de programmes jusqu’à la création du TCSPS, mais cette part a diminué depuis. En 2001-2002, ils représenteront un peu moins de 20 p. 100 des dépenses de programmes.

Les transferts aux particuliers sont l’élément le plus important des dépenses fédérales; ils comptaient pour un peu moins de 30 p. 100 des dépenses de programmes dans la dernière moitié des années 80. La proportion est montée jusqu’à 34 p. 100 à cause de la récession et de la forte augmentation des paiements d’assurance-chômage/emploi. La réforme de l’assurance-emploi a fait baisser le coût des prestations si bien que les transferts aux particuliers devraient représenter 31,1 p. 100 des dépenses de programmes en 2001-2002.

La faible augmentation de la part relative des transferts aux particuliers jusqu’en 2002 est due principalement à l’évolution démographique qui engendre une progression régulière des prestations aux personnes âgées. Cependant, le facteur le plus important qui explique ce phénomène est le fait que ces transferts ont pour la plupart échappé aux réductions budgétaires qui ont touché les autres programmes. À l’exception de la réforme de l’assurance-emploi, dont les effets se sont fait sentir surtout avant 1996, il n’y a pas eu de réduction des transferts aux particuliers dans la dernière partie de la décennie. Il s’ensuit que le poids relatif de cette catégorie de dépenses augmente légèrement par défaut.

TABLEAU 1
DONNÉES SUR LES DÉPENSES FÉDÉRALES
(en millions de dollars)

Exercice financier
(clos le 31 mars)

Dépenses
totales

Dépenses de
programmes

Frais de la
dette brute

Défense
nationale

Transferts
aux
particuliers

Transferts aux gouvernements

1970-71

15 998

14 111

1 887

1 818

3 281

2 954

1971-72

18 405

16 295

2 110

1 862

3 942

3 610

1972-73

21 107

18 807

2 300

1 937

5 153

4 134

1973-74

24 641

22 076

2 565

2 224

6 042

4 585

1974-75

31 476

28 238

3 238

2 526

7 620

5 884

1975-76

37 862

33 892

3 970

2 966

9 233

6 874

1976-77

41 304

36 596

4 708

3 373

9 873

8 399

1977-78

45 505

39 974

5 531

3 776

11 104

8 512

1978-79

50 004

42 980

7 024

4 096

12 030

9 551

1979-80

53 996

45 502

8 494

4 377

11 967

10 601

1980-81

63 423

52 765

10 658

5 063

13 793

11 578

1981-82

75 981

60 867

15 114

5 672

16 051

13 088

1982-83

89 711

72 808

16 903

6 599

21 697

14 177

1983-84

97 045

78 968

18 077

7 679

22 514

17 125

1984-85

109 493

87 100

22 393

8 636

23 888

18 548

1985-86

111 528

86 106

25 422

8 890

25 062

18 879

1986-87

116 673

90 005

26 668

9 695

26 423

19 569

1987-88

125 406

96 453

28 953

10 337

27 400

20 518

1988-89

132 840

99 688

33 152

10 700

28 780

22 145

1989-90

142 637

103 848

38 789

11 249

30 501

23 417

1990-91

151 353

108 765

42 588

11 518

34 532

22 928

1991-92

156 389

115 215

41 174

10 901

39 340

24 865

1992-93

161 401

122 576

38 825

10 939

40 365

26 544

1993-94

157 996

120 014

37 982

11 282

37 536

26 947

1994-95

160 785

118 739

42 046

10 693

35 326

26 313

1995-96

158 918

112 013

46 905

9 935

34 510

26 076

1996-97

149 793

104 820

44 973

8 661

33 986

22 162

1997-98

149 684

108 753

40 931

8 879

34 067

20 504

1998-99

152 787

111 393

41 394

8 781

34 665

25 523

1999-00

157 000

115 500

41 500

9 900

35 000

23 600

2000-01

158 000

116 000

42 000

9 400

36 000

22 600

2001-02

163 000

121 500

41 500

9 500

37 800

24 100

Source : Ministère des Finances, Tableaux de référence financiers, septembre 1999; et ministre des Finances, Plan budgétaire, février 2000.

   B. Le coût des services sociaux

Au cours de l’exercice 1986-1987, le gouvernement fédéral a consacré 41,711 milliards de dollars aux services sociaux, selon la définition que Statistique Canada donne de ce terme. Les dépenses ont ainsi augmenté de 3,7 p. 100 par rapport à l’exercice précédent et, en trois ans, jusqu’à 1986-1987, les coûts des services sociaux se sont accrus de près de ce 20 p. 100. Ces dépenses constituent la majeure partie des dépenses de programmes et, à ce titre, elles se prêtent bien à un examen. De plus, comme un certain nombre d’entre elles ont été indexées automatiquement pendant la majeure partie des années 70 et au début des années 80 (et le sont encore), elles constituent un sujet d’examen valable pour vérifier l’affirmation selon laquelle l’indexation a contribué à la croissance rapide des dépenses publiques.

Les deux programmes les plus importants sont la sécurité de la vieillesse et l’assurance-emploi, qui représentent actuellement des dépenses brutes de l’ordre de 24,2 milliards de dollars dans le premier cas et de 11,5 milliards dans le deuxième. Avant la réforme du système d’allocations versées pour les enfants, les sommes consacrées aux allocations familiales, quoique moins élevées, étaient tout de même importantes.

En 1988, le gouvernement fédéral a consacré 45,335 milliards de dollars aux programmes de sécurité sociale, comparativement à 4,497 milliards en 1970. L’augmentation des dépenses a été de 14,6 p. 100 supérieure à la moyenne à Terre-Neuve, mais inférieure de 14 p. 100 environ à la moyenne en Saskatchewan. En Ontario, la progression des dépenses a été inférieure de 10 p. 100 à la moyenne nationale. Ces divergences s’expliquent par des différences au niveau du taux de croissance de la population, de la progression des revenus et de l’évolution démographique. Comme on le constate au tableau 1, les transferts publics totaux ont considérablement augmenté en 1999. Cela tient au versement d’un supplément ponctuel de 3,5 milliards de dollars au TCSPC destiné à aider les provinces à financer leurs programmes de santé. En 2000, le gouvernement fédéral a annoncé un autre supplément ponctuel, de 2,5 milliards de dollars.

      1. Sécurité de la vieillesse et programmes connexes

Toute personne de plus de 65 ans qui répond à certaines conditions de résidence peut toucher les prestations imposables de la Sécurité de la vieillesse, qui sont indexées trimestriellement d’après l’indice des prix à la consommation. Depuis 1971, elles ont généralement été indexées en fonction du taux d’inflation. Deux programmes font complément à la Sécurité de la vieillesse : le Supplément de revenu garanti et l’Allocation au conjoint. Ces programmes démentent la croyance selon laquelle la sélectivité réduit nécessairement les coûts; en effet, quoique le système soit devenu plus sélectif, il est aussi devenu plus généreux et, par conséquent, plus coûteux.

Après 1952, le programme de pensions de vieillesse était vraiment universel, mais depuis la création du Supplément de revenu garanti, il est de plus en plus sélectif. La comparaison des taux maximaux de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti le confirme. En 1971, les prestations maximales du Supplément représentaient 69 p. 100 des prestations de la Sécurité de la vieillesse, contre 119 p. 100 à l’heure actuelle. Autrement dit, les prestations de la Sécurité de la vieillesse sont demeurées relativement constantes depuis 15 ans; en dollars réels, elles n’ont augmenté que de 13 p. 100, alors que le taux maximal du Supplément de revenu garanti a plus que doublé.

Entre 1970 et 1988, les prestations nettes de la Sécurité de la vieillesse se sont multipliées par près de 5,7 et celles du Supplément de revenu garanti par 12,5. L’augmentation des dépenses totales est liée à deux variables : le montant des paiements annuels par prestataire et le nombre de prestataires. Le facteur qui influe le plus sur le montant des paiements globaux de la Sécurité de la vieillesse est évidemment la croissance du nombre de bénéficiaires. Si on avait maintenu la valeur réelle des prestations aux niveaux de 1970, leur coût en 1988 aurait été de 9,373 milliards de dollars au lieu de 10,774 milliards, soit 12,5 p. 100 de moins seulement. Ce n’est pas le cas des paiements du Supplément de revenu garanti, dont la hausse est principalement due à l’augmentation de la valeur réelle des prestations moyennes. Si cette valeur avait été maintenue aux niveaux de 1970, le total des prestations aurait atteint 2,368 milliards en 1988 plutôt que 3,725 milliards, c’est-à-dire 36 p. 100 de moins.

Pourquoi les paiements réels du Supplément de revenu garanti ont-ils tellement augmenté et quelles en sont les composantes? Cette augmentation indique-t-elle un appauvrissement des personnes âgées ou une plus grande générosité du gouvernement fédéral? Il y a plusieurs façons d’envisager ces questions. L’augmentation du nombre de prestataires du Supplément de revenu garanti est à peine supérieure à celle du nombre de bénéficiaires de la Sécurité de la vieillesse. Cependant, il est intéressant de noter que le nombre de personnes touchant le maximum des prestations a diminué de façon constante, tandis que celles qui reçoivent des prestations partielles sont maintenant trois fois plus nombreuses qu’en 1970.

Initialement, le Supplément de revenu garanti, créé à la même époque que le Régime de pensions du Canada (RPC), devait être temporaire : il visait à venir en aide à ceux qui ne participaient pas au RPC ou qui ne pouvaient pas le faire. Toutefois, le nombre des prestataires devait diminuer à mesure qu’augmenterait le nombre des adhérents au RPC. Bien que la diminution du nombre de bénéficiaires de prestations maximales ait effectivement suivi cette tendance, le nombre de personnes recevant des prestations partielles s’est accru. Cette situation peut notamment s’expliquer par le mécanisme de réduction des prestations. Les revenus autres que les prestations de Sécurité de la vieillesse sont assujettis à un taux de réduction de 50 p. 100; autrement dit, les prestations partielles sont supprimées dès que le revenu égale deux fois le niveau des prestations maximales du Supplément de revenu garanti. Ce seuil augmente au même rythme que le Supplément de revenu garanti. Le gouvernement a décidé dans le passé que le maximum du Supplément devait augmenter en termes réels et, pour y parvenir, il a eu recours à des majorations ponctuelles. (Les prestations sont en outre entièrement indexées selon l’indice des prix à la consommation.) Il s’ensuit que le seuil de suppression des prestations a aussi augmenté en valeur réelle, et, de ce fait, qu’une proportion accrue de personnes âgées sont maintenant admissibles aux prestations partielles du Supplément de revenu garanti.

Pour mettre l’étude de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti en perspective, il suffit d’établir leur importance respective par rapport au PIB. En 1970, les prestations de la Sécurité de vieillesse représentaient 1,8 p. 100 du PIB. Ce rapport est tombé à 1,6 p. 100 jusqu’en 1982, année où il est remonté à 1,8 p. 100 pour y rester depuis. Étant donné que les prestations de la Sécurité de la vieillesse n’ont que légèrement augmenté en valeur réelle au cours de cette période, la croissance réelle du PIB a permis de contrebalancer l’augmentation du nombre de personnes admissibles. Le cas du Supplément de revenu garanti est très différent. En 1970, les prestations représentaient 0,3 p. 100 du PIB. Ce pourcentage est passé à 0,5 p. 100 en 1971 et il est demeuré à ce niveau pendant dix ans. En 1981, il est monté à 0,6 p. 100 et, en 1985, à 0,7 p. 100. La valeur réelle des prestations maximales du Supplément de revenu garanti a augmenté sensiblement et, à cause du mécanisme de réduction des prestations, le nombre de personnes admissibles s’est également accru. Ce programme qui, au départ, devait être temporaire, a plus que doublé sa valeur par rapport à l’ensemble de l’économie.

      2. La prestation des aînés

À l’époque où le gouvernement s’efforçait de diminuer ses dépenses en vue de réduire le déficit, il avait annoncé, dans le budget de 1996, l’instauration d’une nouvelle prestation aux aînés qui serait offerte en 2001. Ce devait être une prestation ciblée non imposable destinée aux familles âgées et pleinement indexée à l’inflation. L’admissibilité et le montant de la prestation dépendront du revenu familial. Une fois que la nouvelle prestation aux aînés sera instituée, la pension de sécurité de la vieillesse, le supplément de revenu garanti, le crédit en raison d’âge et le crédit pour revenu de pension disparaîtront.

Le projet de prestation aux aînés a été extrêmement critiqué, surtout du fait que certaines dispositions auraient découragé les personnes de certaines tranches de revenu d’épargner en vue de la retraite. Il a donc été abandonné. Le gouvernement affirme maintenant qu’il est moins nécessaire d’envisager des réformes radicales parce que les finances du pays se portent mieux.

      3. Assurance-emploi

Actuellement, les prestations totales d’assurance-emploi avoisinent les 12 milliards de dollars annuellement. Elles totalisaient moins de 550 millions de dollars durant l’exercice 1970 et elles ont culminé à 19,065 milliards de dollars en 1992-1993. La comparaison de ces valeurs monétaires à vingt ans d’intervalle souffre des mêmes problèmes que toute comparaison du genre : les changements survenus dans l’indice des prix et dans l’échelle de l’économie faussent l’importance des écarts. Quoiqu’il en soit, l’augmentation des prestations d’assurance-emploi est réelle. Alors qu’elles étaient égales à 0,56 p. 100 du PIB à la fin des années 60, les prestations d’assurance-emploi ont dépassé les 2 p. 100 du PIB depuis 1982. Elles représentent actuellement environ 1,4 p. 100 du PIB. L’inflation ou l’accroissement du nombre absolu de chômeurs ne sauraient expliquer cette croissance.

La variable qu’on examine spontanément lorsqu’on explique le rapport entre les prestations d’assurance-emploi et le PIB est le taux de chômage. Mais on ne peut lui attribuer entièrement la responsabilité de l’augmentation. En effet, depuis 1982, le taux de chômage s’élève à 2,7 fois le taux moyen de la fin des années 60, alors que le rapport entre les prestations d’assurance-emploi et le PIB est quatre fois supérieur D’autres facteurs sont donc intervenus pour rendre le régime d’assurance-emploi aussi coûteux qu’il l’est aujourd’hui.

Deux modifications institutionnelles aident à expliquer cette croissance. D’abord, en 1971, le régime a été considérablement libéralisé : le niveau des prestations a été majoré et celles-ci sont devenues imposables; les critères d’admissibilité ont été assouplis; la durée des prestations et la protection globale ont été accrues. Nous estimons qu’en raison de cette modification, le rapport entre les prestations d’assurance-emploi et le PIB a augmenté de 0,56 point de pourcentage pour chaque variation d’un point du taux de chômage. Outre cet effet direct, cette modification institutionnelle a fait augmenter le coût du programme d’assurance-emploi, dans la mesure où elle a suscité une hausse du taux de chômage qui a été évaluée entre 0,4 et 1,9 point de pourcentage.

En 1978, le gouvernement a imposé des restrictions au régime d’assurance-chômage, par suite du mécontentement provoqué par certains aspects de la réforme de 1971. Il est évident que ces mesures ont porté des fruits : même si le taux de chômage moyen a continué de croître après 1978, le rapport entre les prestations et le PIB a diminué. Toutefois, nous estimons que les modifications de 1978 n’ont corrigé qu’environ la moitié des effets de celles de 1971. Par conséquent, le régime actuel reste plus généreux que celui d’avant 1971.

Les coûts récents du régime sont surtout attribuables aux taux de chômage élevés qui ont commencé avec la récession, mais qui ont chuté par la suite. Le rapport entre les prestations et le PIB varie d’environ 0,5 point de pourcentage pour chaque variation de trois points du taux de chômage. Le rythme de diminution du nombre de sans-emploi s’est ralenti considérablement au début des années 90. La baisse rapide des prestations d’assurance-emploi est attribuable à des réformes qui ont resserré les conditions d’admissibilité et les règles relatives aux prestations.

Quoi qu’il en soit, il est clair que le programme d’assurance-emploi réagit fortement aux modifications institutionnelles. Celles-ci ont des conséquences majeures et rapides sur sa taille. Par exemple, la mise en œuvre des recommandations de la Commission Forget pourrait avoir le même effet sur les coûts du programme qu’une chute de trois points de pourcentage du taux de chômage.

En juin 1989, le gouvernement fédéral a présenté le projet de loi C-21 dans le but de limiter les effets dissuasifs de l’assurance-chômage et de diminuer les dépenses fédérales dans ce domaine. Ce projet de loi a imposé des normes plus sévères d’admissibilité aux prestations d’AC, diminué la durée moyenne de ces prestations et supprimé les contributions financières du gouvernement fédéral à ce programme. Selon les prévisions, ces mesures permettront au gouvernement d’économiser 1,9 milliard de dollars par année. Annoncé pour la première fois dans le discours du Trône, l’allongement du congé parental de six mois à un an figurait dans le budget de 2000.

      4. Allocations familiales/Prestations fiscales pour enfants

Un autre facteur dont il faut tenir compte dans la présente étude est l’évolution historique des dépenses liées aux allocations familiales et ce, pour un certain nombre de raisons. D’abord, les allocations familiales constituaient un volet important des dépenses fédérales en matière de développement social. En 1991, les paiements nets à ce titre étaient de 2,8 milliards de dollars et ils étaient versés à plus de 3,7 millions de familles. Mais l’intérêt de ce programme réside aussi dans le fait qu’il démontre à quel point les tendances des dépenses peuvent être totalement trompeuses. Il est toutefois difficile d’étudier ces tendances, en raison des modifications apportées à l’orientation du programme depuis 1970. À ses débuts, il s’agissait d’un programme modeste de prestations non imposables, offert à toutes les familles sans égard à leur revenu. Les prestations sont devenues imposables en 1974 et ont été considérablement augmentées. En 1979, leur niveau a été réduit et un crédit d’impôt pour enfants a été instauré.

Le nombre d’enfants à l’égard desquels des allocations familiales ont été versées a atteint son niveau maximum en 1975, avec 7,3 millions d’enfants.

En 1970, les allocations familiales représentaient 0,6 p. 100 du PIB. Ce pourcentage est passé à 1,2 p. 100 en 1974, à la suite de l’importante majoration des prestations brutes par enfant. Le rapport entre les allocations versées et le PIB est tombé à 0,9 p. 100 pendant les quatre années suivantes, puis à 0,6 p. 100 par la suite. Cette baisse était principalement attribuable à la diminution du nombre d’enfants admissibles et à la réduction effectuée en 1979 au moment de l’établissement du crédit d’impôt pour enfants.

Le crédit d’impôt pour enfants était techniquement considéré comme une dépense fiscale et ne figurait donc pas dans les statistiques des dépenses ou des revenus. Toutefois, une telle exclusion est purement arbitraire, et le crédit d’impôts pour enfants aurait pu tout aussi facilement être considéré comme une dépense comportant un élément de réduction en fonction du revenu, tout comme le Supplément de revenu garanti. D’ailleurs, si nous le traitons de cette façon et le combinons avec les allocations familiales, l’évolution des dépenses fédérales dans les programmes visant les enfants présente le profit suivant : de 0,6 p. 100 du PIB en 1970, ces dépenses passent à 1,2 p. 100 au milieu des années 70, au moment où le nombre d’enfants atteint son maximum; le rapport décline ensuite légèrement mais remonte encore à 1,3 p. 100 avec l’instauration de crédit d’impôt pour enfants; enfin, il fléchit jusqu’à son niveau des années 90, soit 0,9 p. 100 du PIB à la suite d’un nouveau déclin du nombre de bénéficiaires.

Dans le budget fédéral d’avril 1989, le gouvernement avait trouvé un moyen de réduire les prestations versées au titre des pensions de sécurité de la vieillesse et des allocations familiales en les frappant de l’impôt sur le revenu des particuliers. Les prestations furent réduites de 0,15 $ pour chaque dollar de revenu des particuliers au-delà de 50 000 $. Le programme d’allocations familiales n’existe plus; il a été remplacé par la prestation fiscale pour enfants, le 1er janvier 1993. Sans cette réforme, les transferts aux particuliers qui atteignent maintenant des niveaux records, auraient été encore plus élevés. Les dispositions contenues dans le budget de 1996 devaient doubler le supplément du revenu gagné en deux étapes, pour le porter à 1 000 $. Ces dispositions ont maintenant changé. Le gouvernement consacrera 600 millions de dollars de plus au programme et le montant du supplément dépendra désormais du nombre d’enfants dans la famille. Dans le budget de 1999, le gouvernement a annoncé des augmentations des montants consacrés à la prestation fiscale pour enfants : 320 millions de dollars de plus à partir de juillet 1999, puis une autre tranche de 750 millions de dollars en 2000 et une autre encore, de 850 millions de dollars, en 2001. Le budget de 2000 prévoyait de nouvelles augmentations : de 475 millions de dollars à partir de juillet 2000, de 1,020 milliard en 2001 et de 1,350  milliard en 2002.

   C. Frais de la dette

Jusqu’à maintenant, nous nous sommes penchés sur divers programmes de dépenses du gouvernement fédéral. Toutefois, une composante de plus en plus importante des dépenses de l’État est celle des intérêts sur l’encours de la dette publique. En 1970, ces intérêts représentaient la somme de 1,8 milliard de dollars, contre plus de 40 milliards de dollars pour l’exercice en cours. Exprimés en pourcentage du PIB, ils ont plus que doublé, pour atteindre presque 6 p. 100.

On attribue très souvent la hausse de cet élément de dépense à la politique monétaire plutôt qu’à la politique financière, en faisant état du rôle qu’ont joué les taux d’intérêts réels élevés depuis 1982-1983. On dit que les frais de la dette pourraient être réduits considérablement si l’on adoptait une politique de réduction des taux d’intérêt courants. Par exemple, lors de la publication du Budget des dépenses principal de 1988, on avait soutenu qu’un recul de 1 p. 100 seulement des taux d’intérêt pourrait réduire les frais de la dette de 1,4 milliard de dollars.

Il est vrai que les taux d’intérêt réels sont beaucoup plus élevés aujourd’hui que dans les années 70. Mais au cours de cette période, nous avons connu une inflation galopante qui a entraîné une chute des taux d’intérêt réels ex post à des niveaux très bas, voire même négatifs. Il n’est pas du tout évident qu’il soit souhaitable de revivre une pareille expérience. Il n’est pas certain non plus que la Banque du Canada pourrait, par une politique d’expansion monétaire, faire baisser les taux d’intérêt, ni que les frais élevés de la dette soient imputables aux seuls taux d’intérêt élevés. Il y a aussi une autre variable importante dont il faut tenir compte : la taille de la dette auxquels s’appliquent ces frais d’intérêt.

Dans la première moitié des années 70, les frais de la dette représentaient en moyenne 2,2 p. 100 du PIB. En même temps, le rapport entre la dette publique et le PIB diminuait, et les taux d’intérêt réels étaient faibles, voire souvent négatifs. Après 1976, les frais de la dette ont grimpé régulièrement pour atteindre plus de 4 p. 100 du PIB, même si les taux d’intérêts réels continuaient d’être relativement faibles, ce qui s’explique par l’augmentation de l’encours de la dette. C’est au cours de cette période que le rapport entre la dette publique et le PIB a commencé à croître, à mesure que le gouvernement fédéral commençait à accumuler des déficits considérables.

Depuis 1984, les frais de la dette dépassent 5 p. 100 du PIB. S’il est vrai que l’endettement s’est accru rapidement au cours de cette période, les taux d’intérêt réels ont été extrêmement élevés en comparaison de ce qu’on a connu récemment. C’est ce qui a conduit certains analystes à affirmer que le montant élevé des frais de la dette était fonction de la politique monétaire.

Pour vérifier cette affirmation, nous avons évalué quel effet aurait eu, à compter de l’exercice financier de 1981-1982, un taux d’intérêt réel de 3 p. 100 sur les frais de la dette. S’il est vrai qu’un taux réel de 3 p. 100 est un taux relativement élevé en comparaison de ceux des années 70, époque où ils étaient exceptionnellement bas, il reste compatible avec le taux moyen enregistré au Canada sur une longue période.

Depuis l’exercice 1981-1982, le rapport moyen entre les frais de la dette et le PIB est de 4,8 p. 100; si le taux d’intérêt réel avait été de 3 p. 100, ce rapport se serait établi en moyenne à 3,64 p. 100. Le rapport entre la dette elle-même et le PIB aurait aussi légèrement diminué, passant de 59,47 à 57,4 p. 100 à la fin de 1986-1987; en moyenne, ce rapport serait resté toutefois relativement élevé en comparaison de ceux des années 70. On a surestimé l’effet qu’aurait eu une réduction des taux d’intérêt sur la dette et les frais qui s’y rattachent. Cette mesure aurait limité à 3 p. 100, en termes réels, le rapport des frais bruts de la dette à l’endettement brut, publié par le ministère des Finances. Or, toute politique de réduction des taux d’intérêt adoptée maintenant ne toucherait que les nouveaux emprunts. Il faudrait donc des années avant qu’un recul soutenu des taux d’intérêt se fasse sentir sur l’endettement global.

   D. Les budgets fédéraux de 1990, 1991 et 1992, et l'exposé économique
        et financier de décembre 1992

Le 20 février 1990, l’hon. Michael H. Wilson a déposé son sixième budget. Le point saillant de celui-ci consistait en un plan de contrôle des dépenses axé sur une réduction totale des dépenses de 6,111 milliards de dollars sur deux ans et de 16,689 milliards de dollars au cours des cinq années suivantes. Ce plan comportait quatre volets. Premièrement, un certain nombre de programmes, plus particulièrement les paiements du Régime d’assistance publique du Canada à l’Ontario, à la Colombie-Britannique et à l’Alberta, étaient maintenus à une croissance de 5 p. 100 au cours des deux années suivantes. Deuxièmement, les transferts par habitant versés dans le cadre du Financement des programmes établis demeuraient constants pendant deux ans. Troisièmement, certains programmes étaient réduits, y compris les montants consacrés aux logements sociaux et les subventions versées au ministère de la Santé nationale et du Bien-être social ainsi qu’au Secrétariat d’État. Enfin, certains programmes étaient supprimés, par exemple le Programme de stimulation de l’exploration minière au Canada, le projet OSLO d’exploitation des sables bitumineux et le projet du brise-glace Polar 8.

Grâce à ces mesures, le gouvernement s’attendait à réduire les dépenses consacrées aux programmes en les faisant passer de 16 p. 100 du PNB à 14,2 p. 100 en 1994-1995.

Le budget de 1991 avait pour objectif premier de prolonger de trois ans le plan de contrôle des dépenses instauré l’année précédente. Il proposait également, dans le cadre de ce plan, de limiter les hausses de traitement des fonctionnaires fédéraux et de plafonner par une loi les dépenses des programmes.

Cette mesure législative de contrôle des dépenses s‘inspirait de la loi américaine Gramm-Rudman de réduction du déficit, et de la loi de temporisation appliquée par les États pour maîtriser la croissance des dépenses des programmes. Elle limitait l’ensemble des dépenses des programmes à 615,3 milliards de dollars au cours de la période allant de 1991-1992 à 1995-1996. L’augmentation des dépenses serait plafonnée en moyenne à 3 p. 100 par année. Cette mesure avait pour but de freiner l’ensemble des dépenses. Si les dépenses dépassaient le plafond fixé au cours d’une année, l’excédent ne serait pas ajouté à la base de dépenses, mais devrait être compensé au cours des autres années.

Le budget de 1992 a élargi encore le Plan de contrôle des dépenses en réduisant de un milliard de dollars les dépenses pour 1992.

La piètre performance de l’économie canadienne avait accru la pression sur le déficit fédéral, à cause, principalement, de la diminution des revenus de l’État, mais également de l’augmentation de certaines dépenses de programmes. Le gouvernement a donc pris d’autres mesures afin de contrôler et de réduire ses coûts de fonctionnement de 3 600 millions de dollars au cours d’une période de deux ans. Ces nouvelles mesures comportaient une réduction de 10 p. 100 de la plupart des subventions et contributions au cours de chacune des deux années suivantes, un autre gel de deux ans des salaires des fonctionnaires et des parlementaires et une réduction de 3 p. 100 des budgets de fonctionnement. De plus, pour les nouveaux prestataires, le taux des prestations d’assurance-chômage est passé de 60 à 57 p. 100 des gains assurables. Quant à ceux qui abandonneraient leur emploi sans raison valable, ou qui seraient congédiés, ils n’auraient plus droit à l’assurance-chômage.

   E. Le budget fédéral de 1993

Le gouvernement a introduit dans ce budget quelques nouvelles mesures de réduction des dépenses qui se greffaient à celles qu’il avait annoncées dans des budgets antérieurs et dans l’exposé économique et financier. Les nouvelles mesures étaient toutefois d’une ampleur restreinte par rapport aux précédentes.

Ainsi, le gouvernement a annoncé une réduction de 20 p. 100, après 1996-1997, des subventions et des contributions qu’il avait déjà comprimées de 10 p. 100 pour deux ans. Par ailleurs, il a prolongé les réductions dont avaient été frappés les programmes de développement régional et annoncé son intention de ne pas renouveler certains accords fédéraux-provinciaux de développement. Lorsque les mesures antérieures d’austérité permettaient tout de même des augmentations futures, ces accroissements étaient désormais limités à 1,5 p. 100 par année, soit le taux d’inflation prévu. Étaient visées ici les dépenses engagées dans la défense, l’aide internationale et le financement des conseils de recherche universitaire.

Les crédits affectés à la SCHL pour le logement social ont été bloqués à deux milliards de dollars par année, alors que ceux de la SRC et de Via Rail allaient baisser de 100 millions de dollars par année après 1995-1996. D’autres compressions équivalant à 300 millions de dollars touchaient les budgets de fonctionnement de 1993-1994 et de 1994-1995, après quoi elles seraient encore plus fortes. Dans l’ensemble, cependant, l’effet de ces compressions supplémentaires ne culminerait que quelques années plus tard.

En dépit de toutes ces réductions, les dépenses courantes du gouvernement ont augmenté, passant de 17,150 milliards de dollars, en 1991-1992, à 20,3 milliards de dollars en 1993-1994, soit une progression de 18,4 p. 100 en deux ans.

D’après le budget, les dépenses de programmes devaient croître, elles aussi, de 1,7 p. 100 par année entre 1993-1994 et 1997-1998, dépassant tout juste le taux d’inflation. À court terme, cependant, la croissance des dépenses de programmes serait plus forte, masquée par la refonte des prestations fiscales pour enfants. Ainsi, les dépenses de programmes seraient pour l’exercice 1993-1994, de 2,8 p. 100 supérieures à celles de 1993-1993. On s’attendait à une croissance presque aussi forte l’année suivante (2,6 p. 100).

Le budget satisfaisait aux exigences de la Loi sur le contrôle des dépenses. En fait, les dépenses cumulatives jusqu’en 1995-1996 devaient être inférieures de 8,5 milliards de dollars aux plafonds prévus, et le gouvernement projetait de traduire cette baisse en de nouveaux plafonds, plus bas. Ces plafonds de dépenses ont été rajustés pour tenir compte de la restructuration des programmes fédéraux, dans le cadre de laquelle certaines obligations ne relèveraient plus des dépenses de programmes.

   F. Le budget fédéral de 1994

Ce budget prévoyait que les dépenses de programmes demeureraient stables jusqu’en 1995-1996. Toute hausse des dépenses totales résulterait de l’augmentation des frais de service de la dette.

Cette apparente stabilité des dépenses de programmes était attribuable à la réforme du système de prestations pour enfants. Sans cette réforme, les dépenses se seraient accrues; à la place, les recettes fiscales devaient diminuer.

   G. Le budget fédéral de 1995

De 1990 à 1993, les dépenses ont augmenté plus vite que les recettes, mais la situation a commencé à changer en 1995. À partir de 1994-1995, les dépenses de programmes devaient baisser chaque année, si bien que, en 1997, elles seraient inférieures de 12 milliards de dollars à celles qui avaient été enregistrées en 1993-1994, année ou elles avaient totalisé 120 milliards de dollars. Le rapport des dépenses de programmes (coûts de réaménagement compris) au PIB serait ramené de 16,9 à 13,1 p. 100, mais on prévoyait en revanche une hausse substantielle des frais associés à la dette publique, frais que le gouvernement estimait à plus de 50 milliards de dollars (6,2 p. 100 du PIB) pour 1996-1997, contre 38 milliards (5,3 p. 100 du PIB) en 1993-1994.

Si le gouvernement est arrivé à réduire les dépenses, c’est en partie grâce à une révision de fond en comble et à une réduction considérable des dépenses de programmes et des dépenses de fonctionnement du gouvernement qui devaient se solder par l’amputation de 45 000 postes dans la fonction publique fédérale. Environ 6 000 de ces postes devaient être transférés au secteur privé, mais les autres disparaîtraient purement et simplement.

Les subventions aux entreprises devaient diminuer de 60 p. 100 sur trois ans, et certaines subventions à l’agriculture seraient réduites et d’autres carrément supprimées. À la suite de l’examen des programmes, les ministères visés dépenseraient globalement presque 10 milliards de dollars de moins en 1997-1998 qu’en 1994-1995, ce qui représenterait une baisse de 19 p. 100.

Par ailleurs, le gouvernement entendait combiner le financement du Régime d’assistance publique du Canada et le Financement des programmes établis en une seule subvention globale à partir de 1996-1997. Ce Transfert social canadien serait fondé sur une nouvelle formule qui entraînerait une diminution de 4,7 milliards de dollars des transferts pour 1996-1997 et 1997-1998. Les provinces auraient plus de latitude quant à la façon dont elles dépensent ces fonds, mais les transferts fédéraux ne seraient plus liés aux décisions des provinces en matière de dépenses.

Selon les projections de dépenses du gouvernement fédéral, il y aurait aussi une réforme du régime d’assurance-chômage qui devait permettre d’économiser au moins 700 millions de dollars en 1996-1997. Des modifications mineures ont été apportées à la pension de sécurité de la vieillesse, mais on prévoyait apporter des changements plus importants au régime une fois que le ministre du Développement des ressources humaines aurait procédé à un examen de celui-ci.

Le budget fédéral de 1995 annonçait des réductions de dépenses cumulatives de 25,3 milliards de dollars sur une période de trois ans s’achevant en 1997-1998, dont 17 milliards résultaient de l’examen des programmes. Cependant, 16 p. 100 seulement des réductions devaient être faites la première année.

   H. Le budget fédéral de 1996

Contrairement au budget de 1995, celui de 1996 ne contenait pas de compressions des dépenses importantes. Il veillait néanmoins à ce que les dépenses de programmes continuent de diminuer pour passer à 105,5 milliards de dollars en 1998-1999, comparativement à 118,7 milliards de dollars en 1994-1995.

Le budget a prolongé l’examen des programmes, ce qui a permis de réaliser des économies additionnelles de 1,9 milliard de dollars en 1998-1999. On a notamment annoncé dans le budget une nouvelle réduction de 3,5 p. 100 des budgets des ministères en 1998-1999, l’élimination progressive de la subvention aux producteurs laitiers, une baisse de 18 p. 100 de la subvention des postes, une diminution des dépenses consacrées à Via Rail et à l’ÉACL et de nouvelles compressions des dépenses en matière de défense. Certaines des sommes ainsi économisées ont été réaffectées à des secteurs ayant une plus grande priorité.

   I. Le budget fédéral de 1997

Ce budget contenait un certain nombre de nouvelles dépenses dans des secteurs prioritaires, mais leurs répercussions globales étaient faibles et les dépenses de programmes continuaient sur la pente descendante établie dans les budgets précédents.

Les nouvelles mesures de stimulation de l’emploi comprenaient un supplément de 425 millions de dollars destiné au programme Travaux d’infrastructure Canada pour 1997-1998 (annoncé avant le budget) et une contribution de 800 millions de dollars à la nouvelle Fondation canadienne pour l’innovation qui, sur une période de cinq ans, devait financer la modernisation des infrastructures des collèges et universités, des hôpitaux de recherche et des instituts de recherche sans but lucratif. L’apport de la Fondation était limité à la moitié des coûts d’investissement et devait généralement tourner généralement autour de 40 p. 100 du total. La contribution du gouvernement figurait dans les dépenses de 1996-1997, mais les fonds ne devaient être déboursés que plus tard. Le vérificateur général a exprimé des réserves au sujet de la manière dont le gouvernement avait comptabilisé cette dépense, un peu comme il l’avait fait au sujet de la comptabilisation, dans le budget de l’année dernière, du paiement destiné aux trois provinces de l’Atlantique pour l’harmonisation de leurs taxes de vente respectives avec la TPS.

Étaient également prévus un complément de fonds pour les réseaux de centres d’excellence et le Programme d’aide à la recherche industrielle (PARI), la prolongation du Programme d’aide à la remise en état des logements (PAREL), ainsi que des fonds additionnels pour la promotion du tourisme. Ces nouvelles dépenses de programmes n’étaient pas très importantes et ne modifiaient pas la tendance à la baisse des dépenses de programmes totales, qui devaient se chiffrer à 103,5 milliards de dollars en 1998-1999, soit un peu moins de 12 p. 100 du PIB. Le budget annonçait aussi deux injections de capital de 50 millions de dollars chacune destinées respectivement à la Banque fédérale de développement et à la Société du crédit agricole. Ces dernières injections de capital devaient être financées par le gouvernement fédéral, mais elles ne constituaient pas des mesures de dépenses étant donné qu’une contrepartie figurerait à l’actif du bilan du gouvernement.

Le gouvernement a profité par ailleurs de taux d’intérêt peu élevés. En 1998-1999, les frais de la dette publique devaient s’élever à 46,5 milliards de dollars, ce qui représenterait 5,3 p. 100 du PIB, contre 6 p. 100 du PIB en 1995-1996.

   J. Le budget fédéral de 1998

La tendance à la baisse des dépenses fédérales s’est poursuivie. En proportion du PIB, les dépenses fédérales totales de 1999-2000 devaient être inférieures de 30 p. 100 à ce qu’elles étaient en 1992-1993 et représenter exactement le tiers de ce qu’elles avaient été en 1984-1985, lorsqu’elles ont culminé à 24,6 p. 100 du PIB. Cependant, comme on peut le voir au graphique 1, le rythme de la baisse ralentissait.

Selon les prévisions, les dépenses de programmes devaient représenter 11,5 p. 100 du PIB en 1999-2000, contre 17,8 p. 100 en 1992-1993 et 19,6 p. 100 en 1984-1985. Ces dépenses ont enregistré des baisses encore plus spectaculaires que les dépenses totales, soit de 35 p. 100 depuis 1992-1993 et de 41 p. 100 depuis 1984-1985. D’ailleurs, la valeur nominale des dépenses totales et des dépenses de programmes devait être à peu près la même en 1999-2000 qu’elle l’avait été en 1990-1991, soit neuf ans auparavant. Cela aussi représentait une réalisation sans précédent.

Le budget de 1998 prévoyait néanmoins un certain nombre de nouvelles dépenses qui, ajoutées aux mesures annoncées avant le budget, représentaient un montant cumulatif de 10,9 milliards de dollars de nouvelles dépenses en 1999-2000. Avec l’augmentation des dépenses au chapitre de la prestation fiscale pour enfants présentée comme un allégement fiscal dans le budget, on arrivait à un total cumulé de 12 milliards de dollars de dépenses nouvelles.

La plus importante mesure de dépenses était la création du Programme des bourses du millénaire. Le gouvernement a débité 2,5 milliards de dollars à ce titre en 1997-1998 bien que les fonds ne devaient parvenir à la Fondation que l’année suivante. Le coût cumulatif du relèvement du montant minimal du transfert pécuniaire aux termes du TCSPS (porté à 12,5 milliards de dollars) qui avait été annoncé avant le budget devait totaliser 4,1 milliards de dollars en 1999-2000. D’autres dépenses visaient les étudiants de niveau postsecondaire et complétaient les nouvelles mesures fiscales.

Le gouvernement annonçait aussi dans le budget des augmentations des crédits destinés aux conseils subventionnaires, aux programmes visant les autochtones et à la lutte contre le sida.

   K. Le budget fédéral de 1999

L’excédent budgétaire de l’année précédente avait suscité des demandes de dépenses substantielles dans le domaine social, principalement dans le secteur de la santé. Le gouvernement fédéral a annoncé plusieurs initiatives à cet égard. D’ici les cinq années suivantes, 11,5 milliards de dollars seraient transférés aux provinces exclusivement pour leurs régimes de soins médicaux. Sur ce montant, huit milliards serviraient à relever le plancher de la fraction pécuniaire du TCSPS et 3,5 milliards seraient ajoutés de façon ponctuelle au Transfert.

Même en comptant ces dépenses, les dépenses fédérales de 2000-2001 devaient être au niveau le plus bas en cinquante ans et représenter 12,0 p. 100 du PIB, soit 0,6 point de pourcentage de moins que ce qui était prévu pour 1999-2000.

Le budget contenait aussi des mesures concernant la connaissance et l’innovation. La Fondation canadienne pour l’innovation, dont l’objectif principal consiste à promouvoir la recherche dans le secteur des technologies de pointe, recevrait des fonds additionnels. Pour la première fois de son histoire, l’Agence spatiale canadienne allait recevoir des fonds non liés à des projets; on y investirait 430 millions de dollars dans les trois années suivantes.

La Prestation fiscale pour enfants avait déjà été augmentée dans le budget de 1998. Cependant, le budget de 1999 en a étendu l’admissibilité aux familles à revenu moyen ou modeste en leur consacrant 300 millions de dollars. Les cotisations d’assurance-emploi devaient être réduites de 465 millions de dollars au total en 1999-2000. Bref, le budget de 1999 mettait l’accent sur le système de soins médicaux tout en offrant aux contribuables de petits allégements fiscaux.

   L. Le budget fédéral de 2000

L’excédent budgétaire enregistré en 1998-1999 était le second d’affilée. Après avoir annoncé des excédents importants pour les cinq prochaines années dans la Mise à jour économique et financière de 1999, le gouvernement a adopté un plan d’allégements fiscaux dans le budget de 2000. Il a par ailleurs aussi annoncé de nouvelles dépenses : 900 millions de dollars de plus pour la Fondation canadienne pour l’innovation, 900 millions de dollars distribués sur cinq ans en vue de créer 2 000 nouvelles chaires de recherche universitaire dans l’ensemble du Canada, 160 millions de dollars au projet Génome Canada pour faire avancer la génétique et la biotechnologie, 700 millions de dollars sur quatre ans pour l’amélioration des techniques et des pratiques en matière de protection de l’environnement et des fonds additionnels pour le financement de projets d’infrastructure à négocier avec les administrations provinciales et municipales.

Le gouvernement fédéral a accru le TCSPS par la voie d’un paiement ponctuel additionnel de 2,5 milliards de dollars en 1999-2000.

Après de nombreuses années de compressions budgétaires, le financement de la défense a recommencé à augmenter en 1998-1999. D’autres sommes substantielles ont été annoncées dans le budget de 2000 : 634 millions de dollars de plus en 1999-2000, 546 millions de dollars de plus en 2000-2001 et plus de 500 millions de dollars par an par la suite. Les autres ministères et organismes ont bénéficié d’augmentations de leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement totalisant 505 millions de dollars en 1999-2000 et 1,2 milliard de dollars l’année suivante. Le rapport des dépenses de programmes au PIB devrait néanmoins continuer de diminuer pour passer à 11,6 p. 100.

L’élément le plus important du budget de 2000 est le rétablissement de l’indexation intégrale des tranches d’imposition et des crédits d’impôt, mesure qui concerne aussi la Prestation fiscale pour enfants.

MESURES PARLEMENTAIRES

On peut dire que, concrètement, l’évolution des dépenses gouvernementales est liée, d’une façon ou d’une autre, à des mesures votées par le Parlement. Environ une fois l’an, le ministre des Finances présente au Parlement un exposé budgétaire donnant un aperçu des projets de dépenses et du plan financier du gouvernement. En outre, presque tous les projets de loi votés par le Parlement ont une incidence sur les dépenses de l’État.

CHRONOLOGIE

juin 1971 -

Adoption du projet de loi C-229 prévoyant des mesures très poussées d’élargissement et d’assouplissement du régime d’assurance-chômage.

janvier 1974 -

Les allocations familiales sont portées à 20 $ par mois par enfant et commencent à bénéficier de l’indexation, mais elles seront désormais considérées comme un revenu imposable.

1977 -

Présentation et adoption du projet de loi C-27 dont l’objet est de tempérer la générosité du régime d’assurance-chômage. Les conditions d’admissibilité sont plus rigoureuses et, pour beaucoup de prestataires, le nombre maximal de semaines de prestations est réduit.

1978 -

Introduction du crédit d’impôt pour enfants, qui ne peut dépasser 200 $ par enfant admissible.

1979 -

À compter de janvier, les allocations familiales sont réduites d’environ 22 p. 100.

1983 et 1984 -

Les facteurs d’indexation des dépenses gouvernementales sont limités à 6 p. 100 pour la première année et à 5 p. 100 pour la suivante.

mai 1985 -

Le budget fédéral propose que le facteur d’indexation soit limité à la partie de la hausse de l’indice des prix à la consommation qui dépasse 3 p. 100.

novembre 1986 -

La Commission d’enquête sur l’assurance-chômage (Commission Forget) recommande dans son rapport de remanier en profondeur le régime d’assurance-chômage afin qu’il reprenne sa fonction d’assurance.

octobre 1994 -

Le ministre des Finances, l’honorable Paul Martin, publie La mise à jour économique et financière.

décembre 1994 -

Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes dépose son rapport intitulé Pour affronter la crise du déficit.

novembre 1999 -

Le ministre des Finances, l’honorable Paul Martin, annonce dans la Mise à jour économique et financière qu’il prévoit encore des excédents budgétaires pour les prochaines années et une croissance modérée des dépenses.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

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Dingledine, G. Exposé chronologique : l’évolution de l’assurance-chômage de 1940 à 1980. Ottawa, Emploi et Immigration Canada, 1981.

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Horry, I.D. et M.A. Walker. Government Spending Facts. Vancouver, Institut Fraser, 1990.

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Saunders, P. et F. Klau. « Le rôle du secteur public : causes et conséquences de l’élargissement du secteur public ». Revue économique de l’OCDE, no 4, printemps 1985.

The National Finances. Toronto, L’Association canadienne d’études fiscales, divers numéros.


La première version de ce bulletin d'actualité a été publiée en janvier 1987.  Le document a été périodiquement mis à jour depuis.