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LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL
AU CANADA

 

Rédaction :
Guy Beaumier
Division de l'économie
Révisé le 27 octobre 1998


 

TABLE DES MATIÈRES

DÉFINITION DU SUJET

CONTEXTE ET ANALYSE

   A.  La prise de conscience du problème

   B.  Les premières armes - de 1958 à 1968

   C.  La création du MEÉR

   D.  La création du MEIR

   E.  La restructuration de 1987

   F.  Résumé

CHRONOLOGIE

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE


LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL AU CANADA*

 

DÉFINITION DU SUJET

Pratiquement depuis les origines de la Confédération, le gouvernement fédéral met en oeuvre des programmes qui touchent certaines régions plus que d'autres. Ces programmes n'ont toutefois été inscrits dans une politique fédérale de développement régional qu'au cours des années 60, lorsque les hommes politiques se sont éveillés au fait que toutes les régions ne prospéraient pas au même rythme et ont décidé d'éliminer les inégalités.

Deux commissions royales d'enquête (Rowell-Sirois et Gordon) et une grave récession, à la fin des années 50, ont eu pour effet de mettre en lumière des écarts durables entre les diverses régions. Jusque-là, les pouvoirs publics avaient cru que les programmes fédéraux visant à stimuler la croissance économique nationale profiteraient également à toutes les régions. Cela était vrai en période de prospérité, mais les inégalités n'ont pas disparu et on n'a réussi à améliorer la situation qu'au prix de sérieuses perturbations sociales.

Les efforts déployés par le gouvernement fédéral en vue de formuler des politiques et de mettre en oeuvre des programmes visant à amoindrir les inégalités régionales ont mené à la création, en 1969, du ministère de l'Expansion économique régionale (MEÉR); plus tard, fusionné au ministère de l'Industrie et du Commerce, il est devenu le ministère de l'Expansion industrielle régionale (MEIR), qui était chargé du développement régional et industriel au Canada. En 1987, le MEIR a été démantelé et les responsabilités fédérales en matière de développement régional ont été confiées à des organismes régionaux de développement.

Le présent bulletin donne un aperçu de la politique de développement régional mise en oeuvre par le gouvernement fédéral depuis la Seconde Guerre mondiale; pendant cette période, les gouvernements fédéral et provinciaux ont consacré beaucoup de ressources à la réduction des inégalités régionales au Canada.

CONTEXTE ET ANALYSE

   A. La prise de conscience du problème

Les inégalités régionales existent au Canada depuis la Confédération mais, au début, on ne jugeait pas qu'elles constituaient un problème distinct de celui qui consistait à assurer une croissance économique soutenue dans l'ensemble du pays. Toutefois, pendant la Crise des années 30, les écarts entre les taux de chômage des provinces devinrent trop grands pour qu'on continue de se fermer les yeux. Devant les effets dévastateurs de la Crise sur les finances des provinces, on décida d'instituer la Commission Rowell-Sirois, qui fut chargée d'analyser la situation; dans son rapport déposé en 1940, elle recommandait une refonte complète des ententes financières fédérales-provinciales. Elle concluait que, compte tenu des capacités inégales des gouvernements provinciaux en matière de prestation de services, les Canadiens ne pouvaient s'attendre à être traités également dans toutes les provinces, même s'ils étaient tous imposés également d'un océan à l'autre. La Commission recommandait donc le transfert de fonds des régions privilégiées aux régions défavorisées, dans le but d'égaliser les capacités financières des provinces. Ces recommandations ne furent mises en oeuvre qu'après la fin des hostilités; les gouvernements fédéral et provinciaux se rencontrèrent alors en une série de conférences visant à résoudre les problèmes liés au partage de l'assiette fiscale au Canada. Il en est résulté une formule que nous connaissons bien aujourd'hui, celle des paiements de péréquation versés aux provinces les moins riches.

En 1957, la Commission royale d'enquête sur les perspectives économiques du Canada (Commission Gordon) reconnut officiellement l'existence d'inégalités régionales. Peu à peu, on se rendait compte que les régions n'avaient pas toutes non seulement les mêmes moyens financiers, mais aussi les mêmes possibilités de croissance. La Commission Gordon définissait les inégalités régionales comme suit : une différence ou un écart entre les recettes d'une province, son taux de chômage ou un autre facteur clé et l'équivalent dans une autre province ou la moyenne nationale; c'est ce qu'on en est venu à appeler les « disparités régionales ». À cette époque, on s'est aussi aperçu que, quelle que soit la santé de l'économie nationale, ces écarts ne disparaissaient pas. Certes, ils s'élargissaient ou diminuaient au rythme de la croissance économique nationale, mais les différences relatives entre provinces riches et provinces pauvres semblaient immuables. Pour les éliminer, il ne fallait pas viser, pour les provinces défavorisées, un rythme de croissance égal à celui des provinces privilégiées, mais une croissance bien supérieure. Cette constatation modifia profondément la façon de concevoir les politiques régionales.

Cette définition du problème péchait toutefois à trois égards. Premièrement, on estime aujourd'hui qu'il n’aurait pas fallu utiliser les provinces comme base de discussion, étant donné que les régions économiques ne coïncident pas nécessairement avec elles. Au cours des ans, on a tenté de cerner les régions où la mise en oeuvre des politiques de développement régional serait la plus efficace; pourtant, la formule qui ferait l'unanimité reste encore à trouver, même si certaines sous-régions (p. ex., l'île du Cap-Breton) ont été faciles à reconnaître. Dans la majorité des cas, la province demeure l'unité géographique élémentaire, parce que la plupart des données disponibles sont calculées au niveau provincial et que les gouvernements provinciaux jouent un rôle important dans le processus global du développement économique.

Deuxièmement, la notion même de disparité régionale posait un problème. Phénomène facile à reconnaître, la disparité régionale a bien des fois été confondue avec le problème même du développement régional. C'est ainsi que, ayant déterminé que certaines provinces avaient des taux de chômage plus élevés que d'autres, on a formulé des politiques qui visaient à créer des emplois, c'est-à-dire qui masquaient les symptômes sans éliminer leur cause. En fait, un écart au niveau du taux de chômage, de la productivité ou des revenus peut s'expliquer par une foule de facteurs agissant seuls ou en combinaison sur l'économie régionale, dont chacun nécessite souvent des mesures particulières.

 

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Pour être en mesure de corriger une situation, il importe d'en comprendre les causes; dans le cas des inégalités régionales, elles sont nombreuses, mais on peut néanmoins les classer dans cinq catégories. La première est celle des différences apparentes, par exemple les écarts du revenu par habitant, qui ne traduisent pas d'inégalités réelles entre les régions; ici, l'intervention est inutile. En deuxième lieu, on trouve les atouts naturels des régions, comme l'existence d'une caractéristique géographique susceptible d'apporter la prospérité; ici encore, l'intervention n'est pas nécessaire. Troisièmement, certaines mesures fédérales ou provinciales peuvent être à l'origine d'inégalités régionales; la solution consiste alors à éliminer ces mesures. Dans la quatrième catégorie, on peut classer les « imperfections » des marchés, notamment la présence de monopoles ou de syndicats; le choix de l'intervention varie alors en fonction des buts poursuivis et de la nature de l'imperfection. Enfin, dans la cinquième catégorie, on retrouve des différences structurelles comme la présence ou l'absence de certains facteurs et les goûts des consommateurs. Dans ce cas, la meilleure solution consiste normalement à laisser agir les forces du marché; il faut toutefois que la main-d'oeuvre soit mobile. En revanche, des considérations politiques peuvent inspirer des mesures prévoyant l'octroi de subventions à la production. Évidemment, dans la réalité, les inégalités régionales au Canada peuvent être causées par une combinaison de ces facteurs, ce qui complique le choix d'une démarche. Qui plus est, comme il est fort probable que la cause de l'inégalité régionale diffère d'une région à l'autre, toute politique visant à apporter une solution universelle grâce à un programme national n'aura pas des résultats optimaux.

Enfin, la troisième faille de l'étude de la Commission Gordon tient à sa vision de la mise en valeur des ressources et du développement industriel. Comme le secteur de la fabrication était très développé dans les provinces du Centre, il devint pratique courante, jusqu'à tout récemment d'ailleurs, d'associer développement à création d'emplois dans ce secteur. C'était oublier que, bien souvent, le meilleur moyen de mettre une région en valeur consiste à exploiter ses richesses naturelles.

Malgré ces faiblesses et grâce aux résultats apparemment satisfaisants des politiques de stabilisation mises en oeuvre après 1945, on en vint à tenir pour acquis que les gouvernements ne devaient plus se contenter de dédommager les victimes de mauvaises conditions économiques; ils avaient la capacité et donc le devoir d'éliminer les causes mêmes de ces conditions. Par conséquent, lorsque fut reconnue l'existence des inégalités régionales, on jugea tout naturel, comme le fit la Commission Gordon, de demander au gouvernement fédéral de les corriger.

 

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Mais la prospérité que connut le Canada au cours de la décennie ayant suivi la fin de la guerre n'incita pas les pouvoirs publics à considérer le problème comme urgent. En fait, parce que la croissance économique était rapide et que toutes les régions en profitaient, ce n'est que beaucoup plus tard que la question resurgit parmi les priorités gouvernementales. En temps de prospérité, une province pouvait se contenter d'un taux de croissance légèrement inférieur à la moyenne, mais, en période de récession, elle était rarement prête à accepter un taux de chômage supérieur.

   B. Les premières armes - de 1958 à 1968

Devant la récession des années 50, le gouvernement fédéral fut forcé d'intervenir pour réduire les disparités régionales. On mit notamment sur pied des programmes de travaux d'hiver en 1958-1959 et 1959-1960. Il s'agissait d'expédients à court terme, mais ils représentaient néanmoins une nouvelle manière de résoudre les problèmes locaux de chômage au moyen d'initiatives à frais partagés et ils prouvèrent la faisabilité de programmes à vocation locale.

Les décideurs de l'époque étaient aux prises avec des problèmes cycliques de courte durée, mais ils cherchèrent surtout à corriger les défauts structurels à long terme des économies régionales. Par exemple, on tenta de mettre en valeur les ressources humaines au moyen du Programme d'aide à la formation technique et professionnelle, dont la formule à frais partagés permettait aux provinces d'offrir une formation à leur main-d'oeuvre. On adopta ensuite la Loi sur la formation professionnelle, qui comportait des dispositions sur la main-d'oeuvre et la mobilité visant à lutter contre le chômage structurel.

Parmi les initiatives marquantes de cette période, mentionnons le lancement du Programme d'aménagement rural et de développement agricole (ARDA), visant à améliorer le niveau de vie des agriculteurs installés sur des terres peu productives; la création du Fonds de développement économique rural (FODER), qui devait permettre la réalisation d'initiatives fédérales-provinciales dans des régions désignées; la formation de l'Office d'expansion économique de la région de l’Atlantique, qui administrait un fonds servant à financer des projets dans cette région du pays; et la création de l'Agence de développement régional, qui encourageait le développement économique dans les régions où le chômage était élevé, au moyen de stimulants financiers aux entreprises du secteur de la fabrication.

Au cours des années 60, de par leur conception et leur exécution, les programmes fédéraux visaient à corriger des problèmes particuliers. Cependant, faute d'une stratégie de développement globale et de coordination entre les divers ministères intéressés, ces premières tentatives n'eurent qu'une succès mitigé. Chaque programme portait sur des problèmes particuliers de développement économique et était conçu et réalisé par un seul ministère. En outre, les ministères d'exécution collaboraient avec leurs équivalents provinciaux, de sorte que l'on pouvait trouver dans une même province plusieurs plans fédéraux de développement qui n'avaient aucun lien entre eux. Il était donc impossible pour les gouvernements fédéral et provinciaux de collaborer à la poursuite d'objectifs communs et d'élaborer ensemble des stratégies de développement économique. Vers la fin des années 60, il devint évident qu'il fallait charger un organisme central de coordonner les efforts de développement régional déployés par le gouvernement fédéral et de conclure des ententes de coopération avec les provinces.

   C. La création du MEÉR

Pour que ses efforts de développement régional soient plus cohérents, le gouvernement fédéral créa en 1969 le ministère de l'Expansion économique régionale (MEÉR) et lui confia la mission de promouvoir l'expansion économique et de corriger les inégalités sociales dans les régions défavorisées du Canada. Certains programmes en place furent intégrés aux opérations du MEÉR tandis que d'autres furent remplacés par de nouvelles initiatives. Le Ministère devait concentrer ses efforts sur 23 zones (pôles de croissance) d'où le développement rayonnerait dans les régions. Il devait y offrir des services d'aide à l'amélioration de l'infrastructure, à l'application de mesures de redressement social et à l'investissement privé dans des zones désignées. Le nouveau ministère devait consacrer la majorité de ses énergies à l'Est du Canada, 80 p. 100 du budget étant affectés à des zones situées à l'est de Trois-Rivières; ces dépenses devaient être canalisées principalement vers les pôles de croissance choisis parce que, croyait-on, il en résulterait des possibilités accrues de croissance économique dans les centres urbains de l'Est.

La théorie des pôles de croissance veut que le développement économique prenne naissance autour de certains points ou pôles et que la croissance ne soit pas égale et n'ait pas la même intensité partout, à cause des possibilités particulières de chaque région. C'est pourquoi les efforts de développement régional devaient être dirigés vers ces points centraux, dans des régions à croissance lente, afin de mettre en marche une croissance qui s'entretiendrait toute seule. Ensuite pensait-on, les avantages se feraient sentir autour de ces points.

Le MEÉR permit certes de coordonner et de rationaliser l'action fédérale, mais il ne sut pas s'attaquer efficacement aux problèmes des inégalités régionales. Voici ce qu'en conclut un important examen de la politique réalisé en 1972 :

  • Les inégalités régionales étaient trop complexes pour qu'un ministère s'y attaque seul; il fallait adopter une démarche globale permettant aux responsables de toutes les politiques gouvernementales d'être mieux informés des objectifs de développement régional et d'y être plus sensibles.
  • Les programmes nationaux ne suffisaient pas et il fallait leur adjoindre des mesures sélectives et souples afin de tirer profit des occasions de développement déterminées et de contourner les obstacles reconnus.
  • Il ne fallait pas tant s'attaquer aux inégalités régionales qu'encourager chaque région du pays à atteindre le développement économique et social dont elle était capable. Ce changement de cap était important, car il montrait que l'on s'intéressait désormais plus aux possibilités de développement qu'aux problèmes régionaux.

À la suite de cet examen, le gouvernement fédéral changea complètement sa démarche en matière de développement régional. Le MEÉR demeura le principal intervenant fédéral, mais on abandonna le principe des pôles de croissance au profit d'une démarche multidimensionnelle plus souple faisant appel à une collaboration accrue entre le gouvernement fédéral et les provinces et entre les ministères fédéraux.

De cette collaboration naquit une série d'ententes fédérales-provinciales d'abord appelées Accords généraux de développement puis, à compter de 1984, Ententes de développement économique et régional (EDÉR). Dans ce nouveau cadre, les provinces participent davantage à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes de développement régional. Chaque EDÉR repose sur un ensemble de critères délimitant le cadre à l'intérieur duquel les deux ordres de gouvernement collaborent à la promotion de la croissance régionale ou industrielle. Les conditions particulières de chaque EDÉR sont le reflet des priorités et des préoccupations de la province signataire. Les projets communs sont mis en oeuvre grâce à des ententes auxiliaires qui prévoient normalement les éléments suivants: i) les mesures à prendre; ii) l'aide financière requise; iii) un mécanisme de consultation et de coordination; et iv) la mise en commun des informations pertinentes par les deux niveaux de gouvernement. On peut assouplir l'élaboration et l'adoption des ententes auxiliaires en y faisant participer directement les ministères d'exécution.

   D. La création du MEIR

En 1982, le MEÉR a été remplacé par le ministère de l'Expansion industrielle régionale (MEIR), résultant de la fusion du MEÉR et du ministère de l'Industrie et du Commerce, démantelé la même année. Désormais, il était possible d'obtenir des stimulants fédéraux au développement industriel et régional par le truchement d'un même nouveau programme, le Programme de développement industriel et régional (PDIR), qui offrait une aide financière aux entreprises de fabrication, de transformation et de services. Toutes les régions du pays y étaient admissibles mais l'ampleur de l'aide accordée variait en fonction de la région et de l'activité en cause.

En 1987, au terme d'un examen du PDIR et des programmes réalisés dans le cadre des EDÉR, le Comité permanent de l'expansion industrielle régionale de la Chambre des communes a conclu que les régions partageaient la même opinion sur plusieurs aspects des activités du MEIR. Premièrement, elles estimaient que les programmes ne répondaient pas à leurs besoins parce que leur conception et l'évaluation des demandes de fonds étaient fondées sur des critères qui ne pouvaient être appliqués universellement. Faute de participation des régions au processus, on estimait que des sommes d'argent étaient accordées à des projets inutiles tandis que des initiatives valables sur le plan local restaient sans suite.

Deuxièmement, on accusait les programmes du MEIR de courir deux lièvres à la fois en voulant réaliser en même temps la promotion industrielle et le développement régional. De l'avis des régions moins développées, le processus décisionnel du MEIR était dominé par des préoccupations sectorielles, de sorte que le développement industriel recevait plus d'argent et d'efforts que le développement régional. Pour les habitants de ces régions, il fallait que le gouvernement fédéral débloque des fonds pour des projets de faible envergure axés sur l'exploitation des richesses naturelles et que le choix des initiatives soit confié à des bureaux locaux.

   E. La restructuration de 1987

Malgré la variété des initiatives mises en place au cours des décennies précédentes, on a jugé, au milieu des années 80, que le MEIR ne parvenait pas à atténuer suffisamment les disparités régionales, ce qui conduisit à la restructuration des politiques de développement régional de 1987. La nouvelle politique se caractérisait par une décentralisation vers les régions des fonctions administratives et politiques jusque-là regroupées à Ottawa. Les programmes et les mesures devaient dorénavant répondre aux besoins des régions auxquelles ils devaient venir en aide et ils n’avaient plus à s’appliquer d’un bout à l’autre du pays. Cette nouvelle approche devait se traduire par une interaction plus directe entre les organismes fédéraux locaux et la collectivité dans la conception et la mise en oeuvre des programmes.

La restructuration des efforts fédéraux de développement régional a commencé à l’été de 1987 lorsqu’il a été annoncé que le MEIR serait démantelé et que ses programmes d’aide à l’industrie seraient intégrés à ceux du ministère d’État aux Sciences et à la Technologie pour former le ministère de l’Industrie, des Sciences et de la Technologie (MIST). Cette nouvelle entité devait demeurer responsable du développement régional dans le sud de l’Ontario et au Québec, tandis qu’ailleurs au Canada, les responsabilités de MEIR en la matière étaient confiées à trois organismes régionaux. Le PDIR est venu à expiration en juin 1998 et n’a pas été reconduit.

L’Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA) est chargée de coordonner toutes les activités du gouvernement fédéral en matière de développement économique dans la région de l’Atlantique et d’assurer une participation régionale à l’élaboration et à la mise en oeuvre des politiques et des programmes nationaux. L’Agence jouit d’une grande latitude quant au choix des mesures à prendre dans la région et est dotée d’un budget quinquennal de 1,05 milliard de dollars.

L’Initiative fédérale du développement économique dans le Nord de l’Ontario (FedNor), qui relève du MIST, a été chargée d’encourager le développement économique dans le Nord de l’Ontario et de fournir au gouvernement fédéral des avis et des renseignements quant aux politiques, aux programmes et aux services qui intéressent cette région; son budget quinquennal s’élevait au départ à 55 millions de dollars.

On a confié au ministère de la Diversification de l’économie de l’Ouest (DEO) la tâche de coordonner, d’appuyer et d’encourager la création d’entreprises dans les quatre provinces de l’Ouest; il incombe également au ministère de coordonner les activités des autres ministères et organismes fédéraux présents dans cette région. Le DEO a été doté au départ d’un Fonds de diversification de l’économie de l’Ouest de 1,2 milliard de dollars, qui devait être dépensé sur une période de cinq ans.

En 1991, les efforts fédéraux de développement régional dans la province de Québec ont été décentralisés et confiés à un nouvel organisme, le Bureau fédéral de développement régional-Québec (BFDR-Q). Doté d’un budget quinquennal de 1,3 milliard, l’organisme avait pour objectif : d’établir les objectifs fédéraux de développement régional pour le Québec; de négocier et d’administrer des ententes de développement économique avec le gouvernement provincial; et d’administrer des programmes d’appui à des initiatives pertinentes dans chaque région du Québec.

D’une certaine manière, la création de l’APECA, du BFDR-Q et du DEO s’inscrit dans un mouvement de décentralisation des efforts canadiens de développement régional, comme il avait été recommandé lors de l’examen du MEÉR de 1982. Comme les programmes d’une EDER, la nouvelle structure contenait un élément local important quant au choix et à la mise en oeuvre des programmes de développement régional, ce qui a conduit à la création de programmes différents d’une région à l’autre.

   F. Résumé

Les programmes de développement régional ont certes connu quelques succès mitigés au cours des ans, mais, dans la majorité des cas, ils n'ont pas permis d'atténuer les inégalités régionales au Canada. L'insatisfaction exprimée à leur égard a donné lieu à de fréquentes réorganisations des efforts fédéraux en la matière, dont bon nombre trahissaient la volonté des divers gouvernements de laisser leur marque sur la politique de développement régional. Trop souvent, les programmes n'ont cherché qu'à créer des emplois sans modifier au préalable les fondements des économies locales, ce qui aurait pu ouvrir la voie à une croissance durable. Normalement, quand des emplois sont créés, c'est que l'économie est en croissance; mais il faut se garder de confondre croissance et développement, car la création d’emploi n'implique aucune variation des perspectives d'avenir d'une région, alors que le développement dénote une modification profonde de la capacité d'une région d'engendrer la richesse. Des mesures vraiment efficaces de développement régional devraient se traduire par une multiplication des possibilités de croissance durable.

 

CHRONOLOGIE

1957 - La Commission royale d'enquête sur les perspectives économiques du Canada (Commission Gordon) cerne un nouveau sujet d'intérêt économique, le développement régional.

1960-1966 - Le gouvernement fédéral met en vigueur plusieurs mesures fiscales et programmes d'aide adaptés à différentes régions.

1969 - Création du ministère de l'Expansion économique régionale (MEÉR) qui met en place une politique de développement économique fondée sur la théorie des pôles de croissance.

1974 - Décentralisation des efforts fédéraux de développement régional; signature des Accords généraux de développement (AGD) avec les provinces.

1982-1983 - Création du ministère de l'Expansion industrielle régionale (MEIR), par le fusionnement du MEÉR et du ministère de l'Industrie et du Commerce. Les AGD deviennent des EDÉR. On annonce le lancement du Programme de développement industriel et régional (PDIR), créé pour promouvoir à la fois le développement régional et l’expansion industrielle.

1987 - Le gouvernement fédéral annonce la création d'organismes régionaux de développement pour l'Est et l'Ouest du Canada. Le ministère d'État aux Sciences et à la Technologie est intégré à l'élément de soutien industriel du MEIR pour former le ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie.

1988 - Le PDIR vient à expiration et n'est pas reconduit.

1991 - Le Bureau fédéral de développement régional-Québec (BFDR-Q) est créé pour administrer les initiatives fédérales de développement dans cette province.

1995 - La Loi sur le ministère de l’Industrie fait relever les trois organismes de développement économique, l’APECA, le DEO et le BFDR-Q du ministère de l’Industrie.

 

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Anderson, F.J.  Regional Economic Analysis: A Canadian Perspective. Toronto, Harcourt Brace Jovanovich Canada, 1988.

Benedetti, G.J. et R.H. Lamarche. Shockwaves: The Maritime Urban System in the New Economy. Moncton, Institut canadien de recherche sur le développement régional, 1994.

Bradfield, Michael.  Regional Economic Analysis and Policies in Canada. Toronto, McGraw-Hill Ryerson, 1988.

Careless, Anthony G.S.  Initiative and Response: The Adaptation of Canadian Federalism to Regional Economic Development. Montréal, McGill-Queen's University Press, 1977.

Conseil économique du Canada.  Vivre ensemble: une étude des disparités régionales. Ottawa, ministre des Approvisionnements et Services, 1977.

Hansen, Niles. « Regional Development Policies: Past Problems and Future Possibilities ». Canadian Journal of Regional Science, volume XIX, no 1, printemps 1996.

Howland, R.D. Certains aspects régionaux du développement économique du Canada. Ottawa, Commission royale d'enquête sur les perspectives économiques du Canada, 1957.

Lithwick, N. Harvey. «Regional Development Policies: Context and Consequences.» Still Living Together: Recent Trends and Future Directions in Canadian Regional Development. William J. Coffey et Mario Polèse (éd.). Montréal, Institut de recherches politiques, 1986, p. 121-155.

Melvin, James R. «Regional Inequalities in Canada: Underlying Causes and Policy Implications».  Analyse de politiques, vol. 13, n° 3, 1987, p. 304-317.

Organisation de coopération et de développement économiques. Politiques et problèmes régionaux au Canada. Paris, OCDE, 1994.

Savoie, Donald J.  Regional Economic Development: Canada's Search for Solutions. Toronto, University of Toronto Press, 1986.

 


La première version de ce bulletin d'actualité a été publiée en novembre 1988.  Le document a été sans cesse mis à jour depuis.