88-7F

 

LE DÉFICIT FÉDÉRAL :  NOUVELLES TENDANCES

 

Jean Soucy, Division de l'économie
Marion G. Wrobel, Analyste principal

Révisé le 11 avril 2000


 

TABLE DES MATIÈRES

DÉFINITION DU SUJET

CONTEXTE ET ANALYSE

   A. Mesure de la croissance du déficit : recettes et dépenses
      1. Les déficits de fonctionnement
      2. Les frais de la dette
      3. Les dépenses de programmes
      4. Le budget fédéral de 1991 et l’impact de la récession
      5. Le budget fédéral et l’exposé économique et financier de 1992
      6. Le budget fédéral de 1993
      7. Le budget fédéral de 1994
      8. Le budget fédéral de 1995
      9. Le budget fédéral de 1996
    10. Le budget fédéral de 1997
    11. Le budget fédéral de 1998
    12. Le budget fédéral de 1999
    13. Le budget fédéral de 2000

   B. Croissance du fardeau de la dette

   C. L’évolution de la politique budgétaire fédérale et la stabilité de la dette

   D. Détenteurs de la dette

MESURES PARLEMENTAIRES

CHRONOLOGIE

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

 


LE DÉFICIT FÉDÉRAL :  NOUVELLES TENDANCES*

 

DÉFINITION DU SUJET

Au cours de l’exercice 1984-1985, le déficit du gouvernement fédéral selon les Comptes publics a atteint le chiffre record de 38 324 millions de dollars, soit 8,6 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) de l’année civile correspondante. Trois ans plus tôt, le déficit fédéral s’établissait à 14 872 millions de dollars, soit 4,2 p. 100 du PIB. Au cours du dernier exercice, le gouvernement fédéral a présenté un budget équilibré pour la deuxième année de suite et a enregistré un excédent de près de 3 milliards de dollars, mesuré sur la base des Comptes publics. Dans la deuxième moitié des années 70, les déficits ont été considérablement plus élevés que dans la première moitié, et ils ont gonflé encore davantage dans les années 80 et au début des années 90. De plus, après avoir diminué jusqu’au milieu des années 70, la dette accumulée, exprimée en pourcentage du PIB, a connu une croissance rapide dans les années 80. Au 31 mars 1975, la dette publique nette représentait 16,8 p. 100 du PIB. Aujourd’hui, elle en représente un peu plus de 61 p. 100, selon les chiffres du budget de 2000, après avoir atteint un sommet de plus de 70 p. 100.

Le gouvernement conservateur avait beaucoup misé sur sa politique de maîtrise du déficit et de la dette. Le gouvernement libéral actuel s’était engagé à ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d’ici 1996-1997, puis à 1 p. 100 en 1998-1999. Or l’objectif fixé pour 1996-1997 a été dépassé de plus de 15 milliards de dollars et, ce qui est encore plus important, le gouvernement fédéral a atteint, et même dépassé, ses objectifs. Avec les derniers excédents, le gouvernement prédit maintenant un autre budget équilibré et peut-être même un petit excédent pour 1999-2000 et les deux exercices suivants. Dans le présent bulletin, nous examinons l’évolution de ces deux variables au fil du temps, les principaux facteurs qui influent sur leur taille et les principes financiers suivant lesquels le gouvernement fédéral espère les maîtriser.

CONTEXTE ET ANALYSE

Les deux modes les plus courants de présentation des dépenses et des recettes du gouvernement sont la présentation des Comptes publics, qui vise à fournir aux parlementaires des données financières pertinentes, et celle des Comptes nationaux, qui permet de mesurer l’impact du secteur public sur le flux des recettes et des dépenses dans l’économie. Le déficit a tendance à être moins élevé lorsqu’il est mesuré selon les Comptes nationaux plutôt que selon les Comptes publics. Toutefois, l’une et l’autre mesure finissent par faire ressortir des tendances presque identiques. Dans la présente étude, nous ne tenons compte que des données des Comptes publics, puisqu’elles sont mieux connues des parlementaires. Toutes les statistiques sont conformes à celles des tableaux de référence contenus dans les Documents budgétaires. Lorsqu’une année est citée, nous renvoyons à l’exercice clos le 31 mars de l’année en question.

Le tableau 1 présente, sous forme de données nominales, les statistiques les plus communément citées en ce qui a trait au déficit et à la dette. Étant donné que de telles données risquent d’être trompeuses, nous exprimerons ci-après les déficits, la dette, etc. sous forme de proportion du produit intérieur brut (PIB).

TABLEAU 1
QUELQUES STATISTIQUES FINANCIÈRES - GOUVERNEMENT FÉDÉRAL
(en millions de dollars)

Exercice
financier
(clos le
31 mars)

Excédent

Excédent de
fonctionnement

Frais de la
dette brute

Dette
publique nette

1970-1971

-1 016

871

1 887

20 293

1971-1972

-1 786

324

2 110

22 079

1972-1973

-1 901

399

2 300

23 980

1973-1974

-2 211

354

2 565

26 191

1974-1975

-2 225

1 013

3 238

28 416

1975-1976

-6 205

-2 235

3 970

34 620

1976-1977

-6 896

-2 188

4 708

41 517

1977-1978

-10 879

-5 348

5 531

52 396

1978-1979

-13 029

-6 005

7 024

65 425

1979-1980

-11 967

-3 473

8 494

77 392

1980-1981

-14 556

-3 898

10 658

91 948

1981-1982

-15 674

-560

15 114

107 622

1982-1983

-29 049

-12 146

16 903

136 671

1983-1984

-32 877

-14 800

18 077

169 549

1984-1985

-38 437

-16 044

22 393

207 986

1985-1986

-34 595

-9 173

25 422

242 581

1986-1987

-30 742

-4 074

26 668

273 323

1987-1988

-27 794

1 159

28 953

301 117

1988-1989

-28 773

4 379

33 152

329 890

1989-1990

-28 930

9 859

38 789

358 820

1990-1991

-32 000

10 588

42 588

390 820

1991-1992

-34 357

6,817

41 174

425 177

1992-1993

-41 021

-2 196

38 825

466 198

1993-1994

-42 012

-4 030

37 982

508 210

1994-1995

-37 462

4 584

42 046

545 672

1995-1996

-28 617

18 288

46 905

574 289

1996-1997

-8 897

36 076

44 973

583 186

1997-1998

3 478

44 409

40 931

579 708

1998-1999

2 884

44 278

41 394

576 824

1999-2000

0

44 500

41 500

576 800

2000-2001

0

46 000

42 000

576 800

2001-2002

0

46 500

41 500

576 800

De 1971 à 1975, le déficit selon les Comptes publics était inférieur à 2 p. 100 du PIB. Il s’est élevé graduellement jusqu’à représenter plus de 5 p. 100 du PIB en 1979. Après avoir régressé pendant plusieurs années, il a enregistré une nouvelle hausse marquée, atteignant 8,6 p. 100 du PIB en 1985. Le gouvernement précédent avait fait de la réduction du déficit l’une des priorités de sa politique budgétaire, et le déficit a été ramené à 4,4 p. 100 du PIB en 1990. La tendance a ensuite changé. Le déficit a grimpé jusqu’à 5,8 p. 100 du PIB en 1994, après quoi il a chuté brusquement pour se muer en excédents durant les deux derniers exercices.

   A. Mesure de la croissance du déficit : recettes et dépenses

Le déficit mesure la différence entre les recettes et les dépenses d’une année donnée. En ce sens, il n’est qu’une statistique de synthèse. Son évolution est donc la conséquence directe des fluctuations des recettes et des dépenses.

Le début des années 70 a été marqué par l’accroissement du secteur public; les dépenses fédérales ont augmenté de près de 3 p. 100 du PIB et pourtant, comme les recettes fiscales ont elles aussi augmenté fortement pendant cette courte période, l’augmentation du déficit a été négligeable. Cependant, après 1975, les rentrées d’impôt ont diminué radicalement, entraînant une baisse des recettes totales, qui, d’un sommet de 19,2 p. 100 du PIB, sont passées à un creux de 15,2 p. 100 en 1980. En 1976, les dépenses ont progressé de plus de 1 p. 100 du PIB, pour régresser ensuite jusqu’en 1980 d’environ 2 p. 100 du PIB. Ces fluctuations des dépenses et des recettes ont préparé le terrain à des déficits relativement importants. À la fin des années 70, les dépenses fédérales représentaient une plus forte proportion du PIB qu’au début de la décennie, même si la croissance du secteur public s’était ralentie. Plutôt que de financer la croissance en augmentant les impôts, le gouvernement a laissé augmenter ses déficits.

De 1980 à 1982, les dépenses et les recettes ont légèrement augmenté et le déficit est demeuré relativement stable. Toutefois, après 1982, les effets de la récession se sont fait sentir. Ainsi, de 1982 à 1985, les recettes ont diminué dans une proportion d’environ 1 p. 100 du PIB. Par contre, les dépenses ont augmenté considérablement, soit de plus de 3 p. 100 du PIB, pour plafonner à 24,5 p. 100 du PIB en 1985. Le gouvernement précédent a coupé dans les dépenses et augmenté les impôts pour réduire le déficit à court terme. De 1985 à 1987, les recettes fiscales, qui ont augmenté d’environ 1 p. 100 du PIB, ont été la première source d’augmentation des recettes. Au cours de cette période, les dépenses ont diminué de près de 2 p. 100 du PIB. D’après des prévisions à plus long terme, la compression des dépenses devait assurer le plus gros de la réduction du déficit. Les recettes fiscales représentent maintenant 16 p. 100 du PIB, ayant diminué récemment par suite de la récession.

Le graphique 1 illustre ces tendances. Le déficit de chaque année est égal à la différence entre les dépenses totales et les recettes totales. Les projections au-delà de l’exercice 1999-2000 contiennent une réserve pour éventualités, si bien que l’on prévoit des budgets équilibrés même si l’on s’attend que les recettes dépassent les dépenses.

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      1. Les déficits de fonctionnement

Le budget fédéral de 1990 a introduit la notion de déficit de fonctionnement (voir le graphique 2). Le déficit de fonctionnement représente la différence entre les dépenses de programmes et les recettes totales. On peut aussi le calculer en soustrayant les frais de la dette du déficit total.

 

Jusqu’en 1978, les variations du déficit étaient directement liées aux variations du déficit de fonctionnement qui dans les quelques années qui ont suivi, s’est résorbé beaucoup plus rapidement que le déficit total. Les frais de la dette nette ont commencé à influer de plus en plus sur la croissance du déficit.

De 1982 à 1983, le déficit s’est brusquement accentué, en grande partie à cause de la récession. Comme on peut le voir au graphique 2, cette augmentation tenait pour beaucoup à une hausse du déficit de fonctionnement. Après 1983, le déficit de fonctionnement a nettement perdu de son influence sur le déficit budgétaire du gouvernement fédéral, alors que l’importance relative des frais de la dette nette s’est accrue.

Le déficit de fonctionnement est plus sensible que le déficit total aux changements d’orientation budgétaire du gouvernement et aux variations de la situation économique. Après que le gouvernement précédent a été élu, le solde de fonctionnement a été en régression constante et a enregistré un excédent en 1988. La récession a suscité un nouveau déficit de fonctionnement. Depuis 1998, le solde de fonctionnement est excédentaire et représente environ 5 p. 100 du PIB.

      2. Les frais de la dette

Les frais de la dette pour une année donnée correspondent à l’encours moyen de la dette, multiplié par le taux d’intérêt moyen exigé. Pour certains éléments de la dette dont l’échéance est à long terme, les taux d’intérêt peuvent être beaucoup plus élevés que les taux courants. Toutefois, le taux d’intérêt applicable aux éléments de la dette nouvellement contractés reflète les conditions récentes sur le marché. Plus l’encours de la dette augmente rapidement, plus grande est la proportion de la dette assujettie aux taux d’intérêt courants.

L’encours de la dette nette à un moment donné correspond tout simplement à la somme des déficits passés selon les Comptes publics. Ce montant, plus les emprunts contractés pour se procurer des ressources financières, correspond à la dette brute totale. Les frais de la dette nette dépendent donc à la fois des taux d’intérêt courants, habituellement mentionnés dans les discussions sur le déficit, et des déficits passés, dont l’importance est généralement minimisée. Si la dette fédérale se compose d’emprunts à long terme et à taux d’intérêt fixe, une hausse marquée des taux d’intérêt a peu d’effets immédiats sur les frais de la dette lorsque le déficit est faible, puisque seule la faible partie de la dette qui est nouvelle doit être financée aux taux courants. Cependant, un déficit élevé nécessite le financement d’un encours de dette important aux taux courants.

Par conséquent, l’accroissement rapide du fardeau de la dette en raison de l’ampleur des déficits annuels rend l’orientation budgétaire du gouvernement plus sensible aux taux d’intérêt temporairement élevés, puisqu’une proportion plus forte de la dette est assujettie aux taux d’intérêt courants.

      3. Les dépenses de programmes

Les dépenses totales, diminuées des frais de la dette, représentent le total des dépenses engagées dans les programmes du gouvernement. On sait que ces dépenses sont au cœur de la politique d’un gouvernement moderne. Aux beaux jours de l’accroissement du secteur public, de 1971 à 1976, c’est l’augmentation des dépenses de programmes qui a conduit à l’accroissement des dépenses globales. En 1971, les dépenses de programmes représentaient 15,6 p. 100 du PIB et 87,9 p. 100 des dépenses fédérales totales; en 1976, à leur apogée, elles correspondaient à 19,5 p. 100 du PIB et à 89 p. 100 des dépenses totales.

Depuis ce temps, les dépenses engagées dans les programmes ont diminué par rapport à l’ensemble des sorties de fonds. Même pendant la récession, elles n’ont pas atteint le niveau relatif qu’elles avaient enregistré en 1976. Les dépenses de programmes représentaient environ 75 p. 100 des dépenses totales en 1989. Depuis 1998, elles en représentent moins de 73 p. 100, et elles devraient osciller entre 71,5 p. 100 et 72,5 p. 100 en 2001-2002. Cette année-là, les dépenses de programmes ne devraient représenter que 11,6 p. 100 du PIB.

Les dépenses de programmes peuvent être ventilées de différentes façons. Dans les budgets fédéraux précédents, le ministère des Finances les a divisées en dépenses statutaires et non statutaires. En 1985, les dépenses statutaires ont représenté 55,4 p. 100 du total des dépenses de programmes et, il était prévu qu’en 1989 cette proportion serait passée à 57,9 p. 100.

On ne dispose pas d’une ventilation semblable pour 1984 et les années précédentes; la modification des définitions comptables pourrait fausser l’interprétation de données à long terme. Néanmoins, les principales dépenses statutaires sont faciles à cerner : prestations d’assurance-chômage, prestations de la sécurité de la vieillesse, allocations familiales, Régime d’assistance publique du Canada, paiements en espèces du financement des programmes établis et transferts fiscaux. Selon une étude de la Banque du Canada, la hausse des dépenses avant 1984 s’explique surtout par l’augmentation des sommes engagées dans les programmes statutaires. Comme il ressort nettement des statistiques budgétaires, cette tendance s’est poursuivie depuis 1984.

      4. Le budget fédéral de 1991 et l’impact de la récession

La récession s’étant manifestée, le gouvernement fédéral a dû revoir certaines de ses prévisions budgétaires. Le déficit prévu pour 1990-1991, qui d’après les prévisions de 1990 devait s’élever à 28,5 milliards de dollars, a été porté à 30,5 milliards. Pour 1991-1992, le tableau était encore plus sombre. Dans le budget de 1990, le gouvernement avait prévu un déficit à la baisse de 26,8 milliards de dollars. En 1991, malgré de nouvelles initiatives destinées à le contenir, à savoir une réduction des dépenses et des hausses d’impôt représentant ensemble 4,5 milliards, on s’attendait que le déficit demeure de 30,5 milliards. Autrement dit, la récession et la guerre du Golfe ont entraîné une augmentation de 30 p. 100 du déficit de statu quo pour 1991-1992.

      5. Le budget fédéral et l’exposé économique et financier de 1992

Dans le budget de 1992, les prévisions du déficit pour l’exercice 1991-1992 ont été révisées à la hausse de 900 millions de dollars et pour l’exercice 1992-1993, de 3,5 milliards de dollars. En dépit du fait que la baisse des taux d’intérêt avait diminué les frais de la dette publique, la piètre performance récemment affichée par l’économie a fortement poussé à la hausse le déficit; cette tendance a toutefois été atténuée quelque peu par des initiatives gouvernementales. Par conséquent, le ministère des Finances avait prévu que le ratio de la dette au PIB continuerait de croître une autre année, pour culminer autour de 63 p. 100 du PIB. Il semblait maintenant qu’il continuerait d’augmenter pour dépasser 65 p. 100 du PIB. Au 31 mars 1994, la dette nette du gouvernement fédéral devait atteindre 20 milliards de dollars de plus que ce qui avait été prévu au moment du budget de 1992.

      6. Le budget fédéral de 1993

Le gouvernement fédéral n’a toujours pas réussi à atteindre les objectifs qu’il s’était fixés en matière de réduction du déficit. D’après les prévisions du budget, le déficit devait s’élever à 35,5 milliards de dollars en 1992-1993, soit 1,1 milliard de plus que le chiffre auquel ou s’attendait en décembre 1992. On prévoyait que les déficits cumulatifs seraient, entre 1992-1993 et 1996-1997, supérieurs de 53,6 milliards de dollars à ce qui avait été prévu dans le budget de 1992.

Le tableau du déficit que brossait le budget de 1993 se rapprochait assez de celui des budgets antérieurs, puisque l’on prévoyait des chutes rapides et marquées dans deux ou trois ans. Par le passé, ces prévisions ne s’étaient jamais réalisées. Au cours des années 80, les plans du gouvernement avaient été bouleversés par une hausse inattendue des taux d’intérêt. En 1993, on a tenu pour responsable la faiblesse inattendue des recettes.

Certains soupçonnaient que la lutte contre l’inflation avait aggravé le déficit, du moins temporairement. Comme la plupart des dépenses de programmes sont fixées sans égard à l’inflation ou au PIB nominal, un recul imprévu de l’inflation n’aurait pas fait baisser l’ensemble des dépenses de programmes. Par contre, les recettes baissent en proportion directe avec le recul de l’inflation, en raison de l’effet de celle-ci sur le PIB nominal. De plus, comme le régime fiscal n’était pas entièrement indexé selon le taux d’inflation, la baisse de ce dernier en deçà de 3 p. 100 a eu pour effet de contracter davantage les recettes, le gouvernement n’étant pas en mesure de profiter pleinement de l’effet de l’inflation.

La stratégie de réduction du déficit adoptée par le gouvernement reposait sur : 1) une forte croissance économique à partir de 1993 qui devait faire augmenter les recettes, 2) le contrôle des dépenses de programmes et 3) une baisse des taux d’intérêt pour assurer la constance du service de la dette, en dépit d’une dette nette grandissante. Ce budget prévoyait une baisse soutenue du loyer de l’argent en raison d’un faible taux d’inflation et/ou s’attendait à une croissance des recettes générée par une progression réelle de la production de plus de 4 p. 100 par année jusqu’en 1998, une croissance annuelle de l’emploi de 3 p. 100 et un recul du taux de chômage à 7,5 p. 100 au plus tard en 1998. Il était admis que ces prévisions ne tiendraient plus si le gouvernement n’arrivait pas à atteindre ces objectifs.

      7. Le budget fédéral de 1994

Le budget fédéral de 1993 prévoyait que les déficits pour 1992-1993 et pour 1993-1994 se chiffreraient respectivement à 35,5 et à 32,6 milliards de dollars. Dans le budget de 1994, ces chiffres étaient respectivement de 40,5 et de 45,7 milliards de dollars; l’augmentation de la dette nette sur deux ans s’élevait à 18 milliards de dollars. Cependant, malgré l’augmentation de l’ordre de cinq milliards de dollars du déficit en 1992-1993, les besoins financiers n’ont augmenté que de 100 millions de dollars par rapport au montant indiqué dans le budget; les besoins financiers pour 1993-1994 étaient cependant en hausse de plus de sept milliards de dollars.

Le budget indiquait que, en l’absence de changements de politique, les déficits seraient sensiblement plus élevés, au cours des prochaines années, que ne l’avait prévu le gouvernement précédent. On s’attendait que certains facteurs économiques et techniques fassent augmenter la dette cumulative de 39 milliards de dollars entre 1993-1994 et 1995-1996. Certains ont affirmé que l’incapacité du gouvernement conservateur de faire adopter les lois proposées dans les budgets antérieurs allait entraîner une hausse supplémentaire de la dette cumulative de 5,3 milliards de dollars au cours de la même période.

On s’attendait désormais que la dette nette atteigne 75 p. 100 du PIB. Au 31 mars 1996, le budget de 1992 avait prévu qu’elle représenterait 55 p. 100 du PIB à cette date.

      8. Le budget fédéral de 1995

À en juger par les chiffres du budget de 1993, on prévoyait un déficit fédéral de 35,5 milliards de dollars pour l’exercice 1992-1993. Or, le déficit s’est en fait établi à 41 milliards de dollars cette année-là et il a atteint 42 milliards l’année suivante. Il a été ramené à 37,9 milliards de dollars en 1994-1995 et il aurait même pu tomber à 35,3 milliards n’eut été de deux importantes dépenses de restructuration : un paiement ex gratia de 1,6 milliard de dollars aux propriétaires de terres agricoles de l’ouest du Canada à titre d’indemnisation pour la suppression des subventions versées aux termes de la Loi sur le transport du grain de l’Ouest et une somme de un milliard de dollars représentant le coût d’un programme de primes au départ anticipé à l’intention des fonctionnaires. On prévoyait que le déficit continuerait à diminuer jusqu’à atteindre 24,3 milliards de dollars en 1996-1997; le gouvernement atteindrait ainsi son objectif provisoire déclaré, à savoir ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB.

Le budget de 1995 mettait l’accent sur la réduction du déficit. Les mesures prévues dans le budget étaient censées aboutir en trois ans à un déficit cumulé inférieur de 29 milliards de dollars à ce qu’il aurait été si elles n’avaient pas été prises. Les compressions de dépenses contenues dans ce budget équivalaient à environ sept fois les augmentations de recettes. La première année, le rapport était plus près de quatre contre un.

La baisse à court terme du déficit a été soutenue par la décision du gouvernement de laisser le compte d’assurance-chômage accumuler un excédent de plus de cinq milliards de dollars avant de laisser les cotisations d’assurance-chômage diminuer après 1996; le gouvernement voulait ainsi éviter d’avoir à accroître les cotisations en période de ralentissement économique, lorsque le compte afficherait normalement un déficit.

Les projections du déficit pour 1995-1996 et 1996-1997 contenaient des réserves pour éventualités de 2,5 et 3 milliards de dollars respectivement; ces réserves visaient à servir de tampon au cas où la conjoncture, et en particulier les taux d’intérêt, ne serait pas aussi favorable qu’on l’avait anticipé. Autrement dit, compte tenu des hypothèses économiques sur lesquelles il reposait, le modèle utilisé par le gouvernement a produit des résultats meilleurs que ceux qui étaient annoncés dans le budget. En fait, lorsque l’on tient compte aussi du fait que les hypothèses économiques utilisées par le gouvernement étaient plus pessimistes que celles sur lesquelles se fondaient les entreprises privées de prospective, le déficit sous-jacent pour 1996-1997 était d’environ 19 milliards de dollars, et non pas de 24,3 milliards de dollars comme on l’annonçait dans le budget.

Le budget de 1995 ne contenait pas de prévisions du déficit pour 1997-1998, mais il comportait des estimations des répercussions des mesures budgétaires pour cette année-là. En fait, 46 p. 100 des mesures de réduction du déficit devaient entrer en vigueur en 1997-1998, si bien qu’on a prédit que le déficit de cette année-là pourrait passer sous la barre des 18 milliards et représenter seulement 2 p. 100 du PIB, ce qui ne s’était pas vu depuis vingt ans et qui devait enfin permettre de réduire le ratio de la dette au PIB.

Au 31 mars 1993, la dette publique nette se chiffrait à 466,2 milliards de dollars, comparativement à 358 milliards en 1990 et aux 428 milliards de dollars que le budget de 1990 prévoyait pour 1993. Au 31 mars 1997, la dette devait s’élever à 603 milliards de dollars. Les deux années suivantes, la dette nette devait se stabiliser autour de 73,5 p. 100 du PIB.

On prévoyait que le service de la dette publique dépasserait 50 milliards de dollars en 1996-1997 en raison de l’augmentation continuelle de la dette et de la progression des taux d’intérêt. À titre d’exemple, les projections plaçaient les taux d’intérêt à court terme à 8,5 p. 100 pour 1995, contre 4,8 p. 100 dans le budget de 1994.

Les projections présentées pour 1996-1997 témoignaient éloquemment des conséquences de l’endettement continuel et des coûts élevés du service de la dette. Le gouvernement prévoyait un déficit de 24,3 milliards de dollars pour cette année-là, alors qu’il anticipait un excédent de fonctionnement (l’excédent des recettes sur les dépenses de programmes) de 29 milliards de dollars, de loin le plus élevé jamais enregistré. Pour un jour arriver à équilibrer le budget, il faudrait plusieurs excédents de fonctionnement de plus de 50 milliards de dollars par an. Cela illustrait parfaitement ce qui se produit lorsque les dépenses ne trouvent pas leur contrepartie dans les recettes fiscales courantes. Le financement des dépenses par déficit ne permet pas du tout d’éviter le financement de ces dépenses par les recettes fiscales; il ne fait que le différer.

      9. Le budget fédéral de 1996

Le gouvernement a continué d’affirmer qu’il atteindrait l’objectif de 32,7 milliards de dollars qu’il s’était fixé à l’égard du déficit de 1995-1996, mais qu’il y avait de fortes chance que le chiffre définitif serait même inférieur à ce montant. Il maintenait aussi l’objectif de 24,3 milliards de dollars de déficit pour 1996-1997 et il s’est donné une cible de 17 milliards de dollars pour 1997-1998. Plusieurs analystes ont affirmé que le déficit tomberait en deçà de ces cibles-là aussi.

La piètre performance de l’économie en 1995 a produit des recettes inférieures aux prévisions qui figuraient dans le budget de 1995, ce qui a été compensé par des taux d’intérêt eux aussi moins élevés que prévu, grâce auxquels les frais de service de la dette n’ont pas progressé aussi rapidement qu’on l’avait initialement pensé. L’excédent de fonctionnement a continué d’augmenter, mais moins vite qu’on ne l’avait prévu l’année précédente, et il devait atteindre 35 milliards de dollars en 1997-1998, soit 4,2 p. 100 du PIB.

Le ministre des Finances a dit à plusieurs reprises dans le discours du budget que le gouvernement équilibrerait son budget, si bien que l’on pouvait considérer ces cibles comme provisoires. Compte tenu du rythme de réduction du déficit depuis 1993-1994, on espérait être en mesure de viser un budget équilibré pour 1999-2000. En fait, les conjoncturistes qui se sont présentés devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes durant les consultations prébudgétaires ont en général estimé que le budget devrait être équilibré au plus tard à cette date.

Le gouvernement a continué de faire preuve d’une grande circonspection dans la confection du budget fédéral : celui-ci reposait sur des hypothèses économiques prudentes et prévoyait une réserve pour éventualités pour parer aux événements imprévus. Les dépenses et les recettes témoignaient d’une rigueur un peu plus grande qu’il n’était nécessaire, de sorte que les objectifs visés seraient atteints. Les hypothèses relatives aux taux d’intérêt étaient supérieures de 50 points de base au taux moyen prévu par le secteur privé pour 1996 et de 80 points pour 1997. (On attribuait le plus grand facteur de prudence pour 1997 aux arguments probants soulevés par le Comité permanent des finances au sujet de l’accroissement du risque politique en 1997.) En conséquence, les hypothèses de croissance contenues dans le budget étaient inférieures aux projections du secteur privé, lesquelles étaient déjà basses. Selon les hypothèses économiques du secteur privé, on aboutit à un déficit plus proche de 1,5 p. 100 du PIB, tandis que la cible était de 2 p. 100. En outre, à en juger par les mesures contenues dans le budget de 1996, le déficit de 1998-1999 pourrait être proche de 1 p. 100 du PIB, à moins de détérioration imprévue de l’économie et d’une augmentation des taux d’intérêt.

À première vue, le ministre des Finances aurait pu fixer un objectif de un pour cent du PIB pour le déficit pour 1998-1999, ce qui aurait exigé que trois milliards de dollars à peu près de réduction additionnelle des dépenses. Le Ministre avait cependant un gros problème à régler. Le gouvernement se servait de l’ample excédent des cotisations d’assurance-emploi sur les dépenses annuelles du programme pour réduire le déficit. Cet excédent tenait au fait que, au début des années 90, le compte d’assurance-chômage, comme on l’appelait à l’époque, affichait un déficit cumulé considérable, qui était encore de 3,9 milliards de dollars au 31 mars 1995. Dans le budget de 1995, le gouvernement avait proposé de maintenir les cotisations bien au-delà du montant nécessaire pour couvrir les coûts annuels afin d’éponger le déficit cumulé puis d’amasser un excédent d’un peu plus de cinq milliards de dollars d’ici la fin de 1996, lequel serait maintenu par la suite. On a interprété cette mesure comme signifiant que les cotisations seraient ultérieurement réduites à un niveau correspondant aux coûts annuels.

Le secteur privé a exercé de vives pressions pour que le gouvernement laisse les cotisations baisser, de manière que les employeurs et les salariés puissent profiter de la diminution des coûts du programme. Les taux ont été réduits, quoique très modestement, et le montant des cotisations pour 1997 devait être fixé à l’automne de 1996. Cependant, selon les tableaux de prévision des recettes et des dépenses contenus dans le budget, le fonds continuerait d’afficher un excédent annuel important en 1997-1998. L’excédent cumulé pourrait alors s’élever au double de ce qui avait été prévu dans le budget de 1995.

On savait que si les cotisations d’assurance-emploi étaient sensiblement réduites pour 1997 les prévisions de recettes contenues dans le budget seraient compromises. Si l’objectif de 2 p. 100 établi pour 1997-1998 devait être inviolable, il faudrait compenser ailleurs la diminution des recettes provenant des cotisations, la perte ne pouvant pas être financée à même la réserve pour éventualités. Il faudrait alors augmenter d’autres prélèvements ou réduire davantage encore les dépenses. Il pourrait donc rester des décisions difficiles à prendre pour 1997-1998. On ne pouvait éviter cette situation qu’en maintenant le niveau courant des cotisations d’assurance-emploi et en permettant au compte d’accumuler un excédent cumulé d’environ 10 milliards de dollars d’ici la fin de 1997-1998.

Par ailleurs, le gouvernement a décidé de modifier le calendrier des prélèvements de cotisations d’assurance-emploi pour l’aligner sur celui des paiements des cotisations au RPC. À l’époque, les cotisations hebdomadaires reposaient sur le moins élevé des montants suivants : le montant maximal des gains assurables ou les gains réels. À partir de janvier 1997, les cotisations hebdomadaires seraient fondées sur les gains hebdomadaires réels; une fois le montant annuel maximal des cotisation atteint, le prélèvement des cotisations cesserait. Ceux dont la rémunération était égale ou inférieure au montant maximal des gains assurables continueraient de verser leurs cotisations sur une période de 52 semaines. Ceux qui gagnaient plus mettraient moins de temps à acquitter leurs cotisations. Ainsi, une personne gagnant 80 000 $ par année paierait la totalité de ses cotisations dans les six premiers mois de l’année et ne paierait rien durant les six mois restants.

Cette modification administrative était sans effet sur le montant total des cotisations que devaient acquitter les employeurs et les salariés. Cependant, elle a influé sur le déficit affiché par le gouvernement. En avançant le paiement des cotisations à partir de 1997, ce dernier prévoyait faire en sorte que le déficit de 1996-1997 soit inférieur de 1,5 à 1,8 milliard de dollars à ce qui était prévu dans le budget. Ces modifications n’auraient aucune répercussion sur les exercices suivants. Il reste cependant que ce changement administratif ponctuel pourrait aussi réduire les coûts futurs du service de la dette d’environ 100 millions de dollars par année.

Par ailleurs, le budget ne tenait pas compte du produit de la vente d’actifs en 1996-1997, en particulier de la vente de wagons-trémies et du système de navigation aérienne. Les conséquences de ces ventes sur le budget allaient dépendre des montants obtenus ainsi que de la comptabilisation actuelle de ces actifs. Selon les articles parus à l’époque, la vente de ces actifs pourrait rapporter 1,5 milliard de dollars.

Ainsi, si le gouvernement fédéral a réussi à se fixer un objectif réalisable pour la réduction du déficit pour 1997-1998 (2 p. 100 du PIB), mais on savait qu’il lui faudra néanmoins encore faire des choix difficiles pour pouvoir équilibrer le budget d’ici la fin du siècle.

Le fait que le ministre des Finances ait pu annoncer un objectif de 2 p. 100 pour 1997-1998 et introduire par ailleurs des mesures de réduction du déficit de moins de 200 millions de dollars montrait que c’était au budget de l’année dernière qu’il fallait attribuer cet objectif. Les conséquences du budget de 1996 ne se feraient vraiment sentir qu’en 1998-1999, et seulement faiblement.

Un lecteur pressé aurait pu penser à la lecture du budget que la croissance économique ralentirait en 1996. Or, comme 1995 a été de l’avis général une mauvaise année, cette conclusion avait de quoi déconcerter, d’autant plus que la plupart des analystes prévoyaient une meilleure performance en 1996.

En fait, les prévisions de croissance contenues dans le budget de 1996 étaient fondées sur une comparaison entre le PIB moyen une année donnée et le PIB moyen l’année précédente. Ainsi, une partie de la bonne performance de 1994 était attribuée au taux de croissance de 2,2 p. 100 en 1995 et une partie de la mauvaise performance de 1995 a été imputée au taux de croissance prévu de 1,8 p. 100 pour 1996. L’étude de croissance économique durant l’année civile, a montré que le taux de croissance pour 1995 a été de 0,6 p. 100 et que le taux prévu pour 1996 était de 2,5 p. 100, soit quatre fois plus.

      10. Le budget fédéral de 1997

Contrairement à ceux des années précédentes, le budget de 1997 n’avait pas prédit que l’objectif de réduction du déficit que le gouvernement s’était fixé pour l’exercice courant, à savoir 1996-1997, serait atteint. On y a plutôt annoncé que le déficit serait ramené à 19 milliards de dollars (2,4 p. 100 du PIB), soit au moins 5,3 milliards de dollars de mieux que ce qui avait été prévu. D’ailleurs, certaines personnes ont même pensé que les chiffres définitifs seraient peut-être même encore meilleurs.

La revue financière du ministère des Finances montrait un excédent de 2,191 milliards de dollars pour décembre 1996 et, pour les neuf premiers mois de l’exercice, un déficit cumulé inférieur de 13,185 milliards de dollars à celui de l’exercice précédent, qui s’était finalement établi à 28,6 milliards de dollars. Les auteurs du document mettaient le lecteur en garde contre une interprétation trop optimiste de ces tendances, car des mesures prises antérieurement par le gouvernement avaient modifié le calendrier de certaines recettes et dépenses durant l’exercice. Par ailleurs, des événements ponctuels comme la vente du système de navigation aérienne avaient influé sur le montant des recettes enregistrées jusqu’à alors.

Autre nouveauté par rapport aux budgets précédents, la réserve pour éventualités de l’exercice prochain était maintenue à trois milliards de dollars et non ramenée à 2,5 milliards comme on l’avait fait précédemment.

Le budget de 1997 contenait une série de mesures qui allaient vraisemblablement alourdir la dette de 3,4 milliards de dollars au total sur quatre ans. Le déficit de 19 milliards de dollars prévu cette année-là se serait chiffré à 18,2 milliards de dollars n’eût été de la dotation de 800 millions de dollars destinée à la Fondation canadienne pour l’innovation. D’autres mesures, dont certaines avaient été annoncées avant même le budget sous les rubriques Investir dans l’emploi et la croissance et Renforcer le tissu social, devaient faire augmenter les dépenses des trois années suivantes. Ces nouvelles mesures devaient être financées en partie par des réaffectations de fonds d’autres secteurs et des augmentations de taxes (par ex. par une hausse de la taxe d’accise sur les produits du tabac et le maintien de la taxe temporaire sur les banques), mais surtout au moyen d’emprunts. Cependant, en dépit de ces nouvelles mesures, les dépenses de programmes ont continué de diminuer comme prévu, et les objectifs visés en matière de déficit n’ont pas été compromis.

Le budget expliquait pourquoi le déficit était tombé en-deçà de l’objectif annoncé dans le budget de l’année précédente. À l’exception de l’impôt sur les sociétés, les recettes avaient été dans l’ensemble inférieures de deux milliards de dollars aux chiffres prévus dans ce budget-là. Les dépenses de programmes ont été inférieures de 800 millions de dollars aux prévisions et les frais de la dette publique ont été inférieurs de 2,3 milliards de dollars à ce qui avait été prévu parce que les taux d’intérêt avaient diminué rapidement durant l’année. Au total, ces facteurs économiques ont réduit le déficit de 1,1 milliard de dollars.

Certains éléments ponctuels, comme la vente du système de navigation aérienne et l’accélération de la perception des cotisations d’assurance-emploi, ont contribué à faire baisser le déficit d’une autre tranche de 2,5 milliards de dollars. Cependant, comme ni l’un ni l’autre de ces facteurs ne constituait une nouvelle mesure, on pourrait soutenir qu’ils auraient dû être pris en compte dans le budget de l’année précédente, en particulier dans le cas de l’accélération de la perception des cotisations d’assurance-emploi, dont les répercussions n’auraient pas été difficiles à estimer. La vente du système de navigation aérienne posait davantage de problèmes en raison des incertitudes quant à la date exacte de la conclusion du contrat.

Enfin, le gouvernement n’a pas eu besoin d’aller puiser dans la réserve pour éventualités, ce qui a épargné 2,5 milliards de dollars. Combinés à la dotation de 800 millions de dollars de la Fondation canadienne pour l’innovation qui venait d’être annoncée, ces facteurs devaient aboutir à un déficit inférieur d’au moins 5,3 milliards de dollars à l’objectif. Il restait cependant encore trois mois à courir dans l’exercice au moment du budget et on n’avait pas encore fait le rapprochement des comptes de fin d’année, pour lequel on n’avait pas encore les données financières nécessaires, si bien que le déficit pouvait bien tomber en-deçà de 19 milliards de dollars.

Ce budget attestait aussi de l’amélioration de la posture financière de la plupart des provinces. Comme dans le cas du gouvernement fédéral, la baisse des déficits des provinces était attribuable en grande partie à des réductions des dépenses de programmes et à la baisse des taux d’intérêt. On signalait dans le budget que la baisse des taux d’intérêt entre janvier 1995 et décembre 1996 avait fait économiser 1,8 milliard de dollars aux gouvernements provinciaux, soit 1,2 p. 100 des dépenses. Le ratio de la dette au PIB du Canada n’était dépassé que par celui de l’Italie parmi les pays du G-7, mais le déficit global de l’ensemble du secteur public devait être le moins élevé du G-7 à partir de cette année-là. En 1998, le Canada devait être le seul pays du G-7 à afficher un compte public équilibré sur la base des comptes nationaux. Par comparaison, le déficit des États-Unis était de plus de 1,5 p. 100 du PIB, ceux de l’Allemagne et du Japon, de plus de 2 p. 100, et ceux de la France, du Royaume-Uni et de l’Italie, de 3 p. 100 ou plus.

Ce budget reposait, comme les précédents budgets du gouvernement, sur des prévisions économiques prudentes, par l’ajout de 80 points de base à la moyenne sur trois mois des bons du Trésor prévue par le secteur privé et de 50 points de base à la moyenne sur dix ans des taux des obligations du gouvernement établie par le secteur privé. Le gouvernement prévoyait une croissance de 3,2 p. 100 en 1997, puis de 2,65 p. 100 en 1998.

L’exercice 1996-1997 devait marquer la fin de l’augmentation continuelle du ratio de la dette au PIB. Ce ratio devait commencer à baisser et on s’attendait qu’il serait ramené à 73,1 p. 100 du PIB, comparativement au sommet de 74,4 p. 100.

      11. Le budget fédéral de 1998

Dans ce budget, le ministre des Finances projetait un budget équilibré pour l’exercice 1997-1998, ainsi que pour les deux exercices suivants du cycle de planification budgétaire. En fait, il a fait mieux encore. On a enregistré un excédent de 3,5 milliards de dollars en 1998, une réalisation sans précédent dans l’histoire budgétaire moderne du gouvernement fédéral. Selon les chiffres du budget, la dette nette est tombée à 67,8 p. 100 du PIB en 1998.

Ces résultats supérieurs aux prévisions tenaient à des recettes fiscales qui ont dépassé de 10 milliards de dollars ce qui était prévu dans le budget de l’année précédente, en grande partie grâce aux recettes tirées de l’impôt sur les sociétés et de la TPS. Les dépenses de programmes étaient en baisse de trois milliards de dollars par rapport aux projections de l’année précédente, principalement en raison d’une baisse des prestations d’assurance-emploi. Les frais de service de la dette publique ont été inférieurs aux prévisions et on n’a pas eu besoin de puiser dans la réserve pour éventualités de trois milliards de dollars.

Suivant les recommandations du vérificateur général, le gouvernement a révisé la manière dont il comptabilise les coûts d’intérêt associés aux régimes de pension publics. Cette mesure a réduit les frais d’intérêt d’environ 0,6 milliard de dollars en 1998. Grâce à l’excédent budgétaire, le gouvernement fédéral a pu réduire la dette publique, laquelle est passée de 583,2 milliards de dollars en 1996-1997 à 579,7 milliards de dollars en 1997-1998, la première réduction depuis 1969.

Le gouvernement a utilisé des hypothèses économiques prudentes pour éviter les contrecoups de la crise financière asiatique qui a touché les trois cinquièmes des pays du globe. Cette mesure, associée à une réserve pour éventualités de trois milliards de dollars cette année-là, a donné au gouvernement un coussin de six milliards de dollars chaque année. S’il faut en juger par l’expérience des récentes années, l’utilisation de pratiques budgétaires prudentes devrait aboutir à une dette nette qui serait plus proche de 571 milliards de dollars en 1999-2000 que du sommet de 583,2 milliards de dollars de 1997. Ainsi, le rapport de la dette nette au PIB serait plus proche de 61 p. 100 que des 63 p. 100 indiqués dans le budget. Le gouvernement a porté la prudence à de nouveaux sommets pour 1999.

Dans le passé, le gouvernement ajoutait 80 points de base aux prévisions moyennes du secteur privé concernant les taux d’intérêt à court terme et 50 points de base dans le cas des taux longs. Dans le budget de 1998, il a ajouté 100 points de base aux projections des taux courts et des taux longs.

      12. Le budget fédéral de 1999

Le budget de 1998 était équilibré, et avait même affiché un excédent, et celui de 1999 a suivi la même voie. Le gouvernement fédéral s’attendait que le budget soit au moins équilibré jusqu’en 2000-2001. La dette nette devait demeurer au même niveau (579,1 milliards de dollars), soit 65,3 p. 100 du PIB, et l’on espérait ramener la proportion à 62 p. 100 du PIB pour le budget de 2001.

Si le gouvernement enregistrait effectivement un budget équilibré, la réserve pour éventualités de trois milliards de dollars servirait à réduire la dette publique. Depuis 1995-1996, le rapport de la dette au PIB n’a cessé de diminuer. Cette situation était très inhabituelle, et le Canada était pratiquement le seul pays du G-7 dans ce cas, à l’exception notable des États-Unis. Le gouvernement fédéral savait qu’il devrait continuer de faire preuve d’une grande prudence budgétaire s’il voulait demeurer dans cette voie.

      13. Le budget fédéral de 2000

L’exercice terminé en 1999 s’est soldé par un deuxième excédent budgétaire consécutif (2,9 milliards de dollars), légèrement inférieur à celui de l’exercice précédent.

Le gouvernement fédéral continue de prévoir des budgets équilibrés jusqu’en 2001-2002. Ses prévisions budgétaires ne dépassent pas cette période, bien que la Mise à jour économique et financière de 1999 contienne des projections sur cinq ans afin d’alimenter le débat public.

Comme il est dit dans la Mise à jour économique et financière de novembre 1999, le gouvernement aura recours à une « marge de prudence » en sus de la réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars. Cela a été confirmé dans le budget de 2000. Le gouvernement fédéral prévoit des budgets équilibrés de 1999-2000 à 2001-2002. La dette publique nette, qui s’élevait à 576,8 milliards de dollars en 1999 et représentait 64,4 p. 100 du PIB, devrait demeurer à ce niveau nominal durant la période de projection. Ainsi, le rapport de la dette publique nette au PIB s’élèvera à 55,2 p. 100, rapport qui devrait tomber en deçà de 50 p. 100 en 2004-2005.

Si l’on se rendait compte que l’on n’avait pas besoin de la réserve pour éventualités et si l’on s’en servait plutôt pour rembourser la dette, le montant nominal de la dette tomberait à 567,8 milliards de dollars, ce qui représenterait 54,3 p. 100 du PIB. Même à ce niveau, le ratio de la dette au PIB continuerait d’être supérieur à la moyenne des pays du G-7.

On s’attend que les recettes budgétaires augmenteront de 2,8 p. 100 en 1999-2000, mais de seulement 1,3 p. 100 en 2000-2001, du fait des allégements fiscaux annoncés dans le budget. Elles progresseront cependant davantage en 2001-2002.

Les dépenses de programmes devraient augmenter de 3,7 p. 100 en 1999-2000, largement en raison du supplément pécuniaire de 2,5 milliards de dollars au TCSPS et des 1,3 milliard de dollars qui serviront à financer des mesures visant à stimuler l’innovation. Si le gouvernement fédéral n’annonce pas de nouvelles mesures, les dépenses de programmes afficheront une hausse de seulement 0,4 p. 100 en 2000-2001, mais devraient grimper sensiblement (4,7 p. 100) en 2001-2002.

Les frais de la dette publique devraient fluctuer autour de 42 milliards de dollars jusqu’en 2001-2002. La dette est moins sensible aux variations des taux d’intérêt parce qu’une proportion accrue de celle-ci est constituée d’instruments à taux fixe.

   B. Croissance du fardeau de la dette

La période de 20 ans qui a pris fin en 1975 a vu régresser lentement la dette fédérale nette, qui a atteint un creux d’environ 17 p. 100 du PIB en 1975, contre 36 p. 100 en 1956. (Au cours de la Seconde Guerre mondiale, elle avait dépassé 100 p. 100 du PIB, mais ce pourcentage a rapidement été réduit après la guerre.) L’augmentation de la dette nette depuis 1982 représente près de 40 p. 100 du PIB actuel.

Le niveau de la dette nette est égal au total cumulatif des déficits passés selon les Comptes publics. Il constitue ainsi une mesure pratique des mouvements financiers des années passées. De ce fait, la dette nette donne une autre idée des déficits annuels de l’État et peut aider à envisager la politique financière sous un angle différent.

Le graphique 3 fait ressortir la croissance rapide de la dette nette du gouvernement fédéral dans les années 80. Au 31 mars 1982, la dette nette s’établissait à 28,25 p. 100 du PIB. Au 31 mars 1987, elle avait atteint 51,8 p. 100 du PIB, par suite des déficits annuels considérables enregistrés dans l’intervalle. Elle a atteint un sommet d’environ 72 p. 100 du PIB en 1995-1996, avant de diminuer légèrement.

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La formule suivante résume la relation qui existe entre la croissance de la dette et les déficits :

(1) Variation du ratio dette nette/PIB = (déficit de fonctionnement)/PIB
+ (dette nette/PIB) x (taux d’intérêt - taux de croissance du PIB)

L’augmentation du ratio de la dette au PIB est fonction directe du rapport entre les déficits de fonctionnement et le PIB. Elle est également fonction du rapport entre la dette existante et le PIB, multiplié par la différence entre le taux d’intérêt applicable à la dette et le taux de croissance du PIB. Quand le taux d’intérêt applicable à l’encours de la dette est égal au taux de croissance du PIB, le ratio de la dette au PIB peut être stabilisé si toutes les dépenses de programmes sont financées par les impôts, c’est-à-dire si le déficit de fonctionnement est nul. Quand ce taux d’intérêt est supérieur au taux de croissance du PIB, le gouvernement doit réaliser un excédent de fonctionnement pour stabiliser le ratio de la dette au PIB. Pour que ce rapport diminue, l’excédent de fonctionnement doit alors être encore plus élevé.

Il faut bien comprendre la relation qui existe entre le ratio de la dette au PIB, le déficit de fonctionnement, les taux d’intérêt et le taux de croissance du PIB si l’on veut que les principes financiers qui guident le gouvernement actuel se traduisent par une réduction effective des déficits.

Ces conclusions au sujet du déficit de base ne permettent pas de déterminer à combien devrait s’élever le déficit global pour que le ratio de la dette au PIB se stabilise. Cette valeur dépend du coefficient d’endettement visé par le gouvernement fédéral. L’équation suivante devrait se vérifier pour que le coefficient d’endettement demeure stable :

(2) Déficit/PIB = (dette/PIB) x taux de croissance du PIB

Si le ratio de la dette au PIB est de 75 p. 100 et que le PIB croisse au rythme de 5 p. 100 par an, un déficit égal à 3,75 p. 100 du PIB permettra de stabiliser le coefficient d’endettement. Si le ratio de la dette au PIB n’est que de 25 p. 100, le déficit ne pourra pas représenter plus de 1,5 p. 100 du PIB. Dans une publication sur le déficit parue en 1985, le ministre des Finances proposait comme nouvel objectif financier de ramener le ratio de la dette au PIB de la dette au PIB à 25 p. 100 ou moins du PIB, comme avant les années 80.

Le graphique 3 fait également ressortir le degré d’exactitude des prévisions du rapport de la dette au PIB. Au début de la dernière décennie, les prévisions étaient toujours inférieures aux chiffres réels, mais on observe l’inverse dans les récents budgets.

Lorsque cet objectif à long terme sera atteint, le ratio de la dette au PIB pourra être maintenu constant si le déficit ne dépasse pas environ 1,25 p. 100 du PIB, dans l’hypothèse d’un taux de croissance de 5 p. 100. Toutefois, un déficit de cet ordre permettrait de maintenir le coefficient d’endettement au niveau souhaité, mais non de le ramener d’abord à ce niveau. Par exemple, si le taux d’intérêt est égal au taux de croissance du PIB, un excédent de fonctionnement équivalant à 4 p. 100 du PIB se traduira par une diminution annuelle de trois points de pourcentage du coefficient d’endettement. De nombreux analystes proposaient que l’on vise un objectif à court terme plus modeste, à savoir ramener le rapport de la dette au PIB à environ 60 p. 100, ce qui pourrait raisonnablement se faire en cinq ans. Selon les chiffres des Comptes publics, le rapport de la dette au PIB sera ramené à 60 p. 100 en 2000-2001.

   C. L’évolution de la politique budgétaire fédérale et la stabilité de la dette

La dette nette fédérale est en train de diminuer en proportion du PIB. Cette baisse sensible devrait se poursuivre pendant un certain nombre d’années et compenser une bonne partie des vingt ans d’augmentation du ratio de la dette au PIB. Il pourrait être utile d’examiner les facteurs qui ont influé sur les tendances de ce ratio.

Le graphique 4 résume la politique budgétaire fédérale et la conjoncture économique depuis 1963. Trois variables y sont illustrées : 1) l’excédent du taux d’intérêt, c’est-à-dire la différence entre le taux d’intérêt moyen sur la dette fédérale et le taux de croissance de l’économie; 2) le ratio de stabilité, à savoir l’excédent du taux d’intérêt multiplié par le rapport de la dette nette au PIB; et 3) l’excédent de fonctionnement du gouvernement fédéral exprimé en pourcentage du PIB. Le solde de fonctionnement est la différence entre les recettes totales et les dépenses de programmes. Le ratio de stabilité représente le solde de fonctionnement, exprimé en pourcentage du PIB, qui est nécessaire pour que le rapport de la dette au PIB demeure constant. Si le solde de fonctionnement est supérieur à ce chiffre, le ratio de la dette nette au PIB diminuera.

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L’évolution de ces variables permet de dégager quatre périodes, déterminées par la conjoncture économique et la politique budgétaire.

Période A : Jusqu’au milieu des années 70, le taux de croissance de l’économie dépassait sensiblement le taux d’intérêt sur la dette publique. Cela veut dire que le gouvernement aurait pu enregistrer des déficits de fonctionnement mais quand même stabiliser, à terme, le rapport de la dette au PIB. Cependant, le gouvernement a fait le contraire. Il a enregistré des excédents de fonctionnement, si bien que le rapport de la dette au PIB a baissé. On pourrait dire que c’était là une période de politique budgétaire prudente et de conjoncture économique favorable. Le gouvernement a emprunté tous les ans, mais pour financer une partie seulement des frais de service de la dette. Cependant, les dernières années de cette période, le politique budgétaire du gouvernement fédéral a commencé à se relâcher sensiblement.

Période B : Du milieu des années 70 au début des années 80, la conjoncture est demeurée bonne. La croissance économique a continué de dépasser les taux d’intérêt, d’où un ratio de stabilité encore négatif. La situation financière du gouvernement fédéral a cependant commencé à se détériorer. Les budgets fédéraux se sont mis à afficher des déficits de fonctionnement qui étaient dans l’ensemble suffisamment élevés pour faire lentement grimper le ratio de la dette au PIB. Le gouvernement fédéral a alors été obligé de financer la totalité des frais de service de la dette et une partie des dépenses de programme par emprunts. La tendance du ratio de la dette nette au PIB, qui n’avait pas changé depuis l’après-guerre, s’est finalement inversée.

Période C : Du début des années 80 jusqu’en 1988 environ, la politique budgétaire est devenue encore plus lâche que durant la période précédente, mais cela a changé vers le milieu de la décennie. Il reste que les déficits de fonctionnement étaient supérieurs à ceux de la période précédente, en partie à cause de la récession. La détérioration de la conjoncture est venue exacerber les effets d’une politique budgétaire lâche. Le ratio de stabilité est devenu positif, car les taux d’intérêt ont dépassé les taux de croissance de l’économie. Le gouvernement a été forcé de dégager des excédents de fonctionnement pour tenter de stabiliser la dette. Ses efforts de stabilisation ont cependant échoué, et le ratio de la dette au PIB a rapidement augmenté.

Période D : Au début de la nouvelle décennie, les taux d’intérêt étaient encore nettement supérieurs au taux de croissance de l’économie. Cette situation, combinée au ratio élevé de la dette nette au PIB résultant des déficits des années 80, a obligé le gouvernement à dégager des excédents de fonctionnement très élevés pour stabiliser la dette. Même si la politique budgétaire du début des années 90 était manifestement plus rigoureuse que dans le passé, cela n’a pas suffi à stabiliser le ratio d’endettement. C’était trop peu, trop tard.

D’une certaine manière, la dernière moitié des années 90 forme une période distincte. Le ratio de stabilité a sensiblement diminué grâce à la baisse des taux d’intérêt et à l’amélioration du taux de croissance de l’économie. Il demeure néanmoins supérieur aux chiffres de la période C parce que l’excédent du taux d’intérêt s’applique à une dette nette considérable. L’excédent de fonctionnement a beaucoup augmenté et est finalement supérieur au ratio de stabilité. Avec une croissance vigoureuse et une baisse de la dette nette en termes absolus, le rapport de la dette au PIB diminue sensiblement, passant de 71,2 p. 100 en 1995-1996 à 55 p. 100 (prévision) en 2001-2002. Les budgets équilibrés génèrent des excédents d’exploitation qui correspondent à environ 5 p. 100 du PIB, ce qui est bien supérieur à ce qui est nécessaire pour stabiliser le rapport de la dette au PIB.

   D. Détenteurs de la dette

Le graphique 5 fait ressortir la nature changeante des groupes qui détiennent la dette négociable du gouvernement du Canada. Il révèle deux tendances assez spectaculaires. D’abord, la part de la dette que détient la Banque du Canada a considérablement diminué au cours des années 80. En effet, bien que la somme absolue de la dette qu’elle détient soit passée de 16 milliards de dollars en 1980 à plus de 27 milliards de dollars, ce dernier chiffre représente moins de 6 p. 100 du total, contre 19,5 p. 100 en 1980. L’autre important changement réside dans l’augmentation de la proportion de la dette qui est détenue par des étrangers depuis 1984, bien que cette part baisse régulièrement depuis 1993. Les étrangers détiennent actuellement près de 22 p. 100 de la dette (environ 100 milliards de dollars), en hausse par rapport à 11 p. 100 en 1980.

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Depuis 1990, on constate une nouvelle tendance selon laquelle les banques à charte détiennent des portions de plus en plus importantes de la dette fédérale. De 1990 à la fin de 1995, les sommes détenues par ces banques ont plus que triplé pour atteindre près de 80 milliards de dollars. À la fin de 1999, les banques à charte détenaient pour plus de 60 milliards de dollars de titres de créance du gouvernement fédéral.

MESURES PARLEMENTAIRES

Chaque fois que le gouvernement fédéral prend de nouvelles mesures entraînant des dépenses ou qu’il modifie le régime fiscal, il influe sur la taille du déficit. Presque toutes les mesures qu’il prend ont donc un effet sur le déficit. Environ une fois l’an, le ministre des Finances présente un budget qui expose les intentions du gouvernement en matière de dépenses et de fiscalité.

CHRONOLOGIE

juin 1971 - Adoption du projet de loi C-229, qui a pour effet d’élargir et d’assouplir considérablement le régime d’assurance- chômage.

janvier 1974 - Augmentation des allocations familiales, qui passent à 20 $ par mois par enfant admissible et qui commencent à être incluses dans le revenu imposable; elles commencent aussi à être indexées suivant l’augmentation du coût de la vie.

1977 - Adoption du projet de loi C-27, qui resserre les conditions d’admissibilité à l’assurance-chômage et qui réduit le nombre maximal de semaines pendant lesquelles bon nombre de bénéficiaires peuvent recevoir des prestations.

1978 - Lancement du crédit d’impôt pour enfants, dont le maximum est fixé à 200 $ par enfant admissible.

1979 - Réduction d’environ 22 p. 100 des allocations familiales à compter de janvier.

1983 et 1984 - Les facteurs d’indexation des dépenses gouvernementales sont limités à 6 et 5 p. 100 respectivement.

mai 1985 - Le budget fédéral limite le facteur d’indexation à la partie de l’augmentation de l’indice des prix à la consommation qui est supérieure à trois points. Cette indexation partielle s’applique à une vaste gamme de mesures fiscales et à certains programmes sociaux.

juin 1987 - Dépôt du Livre blanc du gouvernement fédéral sur la réforme fiscale. Cette réforme vise à modifier la répartition des obligations fiscales entre les contribuables et les catégories de revenu. Elle ne doit avoir aucun effet sur les recettes et, partant, aucun effet direct sur le déficit.

décembre 1987 - Le gouvernement fédéral annonce sa Stratégie nationale sur la garde des enfants, qui prévoit une exemption plus élevée pour les frais de garde des enfants, une augmentation du crédit d’impôt pour enfants à l’intention des familles qui ne produisent pas de reçus pour leurs frais de garde, ainsi que de nouvelles dispositions concernant le partage des frais avec les provinces. Ces mesures devraient coûter au gouvernement fédéral 5,4 milliards de dollars au cours des sept prochaines années.

février 1991 - Dans son budget, le gouvernement fédéral annonce l’adoption de dispositions législatives qui ont pour but de plafonner les dépenses de programmes, ainsi que l’établissement d’un Fonds de service et de réduction de la dette, auquel seront versées toutes les recettes de la TPS.

novembre 1993 - Selon les calculs du ministère des Finances, le déficit de 1992-1993 sera de 40,5 milliards de dollars, soit cinq milliards de dollars de plus que le montant prévu dans le budget de 1993.

- Le ministre des Finances estime que le déficit pour 1993-1994 se situera entre 44 et 46 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 13,4 milliards de dollars par rapport au montant prévu dans le budget de 1993.

février 1994 - Le premier budget libéral prévoit que le déficit budgétaire pour 1993-1994 atteindra 45,7 milliards de dollars. Le gouvernement maintient quand même qu’il sera en mesure de réduire le déficit à 3 p. 100 du PIB en trois ans.

octobre 1998 - Plusieurs mois après le dépôt du budget de 1998, le ministre des Finances, Paul Martin, annonce le premier budget équilibré depuis les années 70 et un excédent budgétaire de 3,5 milliards de dollars.

Novembre 1999 - Après un second budget équilibré, le ministre des Finances Paul Martin annonce un plan quinquennal à des fins d’établissement des prévisions. L’excédent cumulé devrait atteindre 95 milliards de dollars pour l’ensemble de cette période.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Bloskie, C. « An Overview of Different Measures of Government Deficits and Debt ».  Canadian Economic Observer, novembre 1989, p. 3.1 à 3.20.

Canada, ministère des Finances.  Le plan financier. Ottawa, différentes éditions.

Canada, ministère des Finances.  Le déficit fédéral mis en perspective. Ottawa, avril 1983.

Canada, ministère des Finances.  Réduire le déficit et maîtriser la dette nationale. Ottawa, novembre 1985.

Canada, ministère des Finances.  Réforme fiscale 1987. Ottawa, juin 1987.

Canada, ministère des Finances. Debt Operations Report. Ottawa, septembre 1994.

Canada, ministère des Finances. Un nouveau cadre de la politique économique. Ottawa, 1994.

Canada, ministère des Finances. Rapport financier annuel du gouvernement du Canada. Ottawa, 1994.

Canada, ministère des Finances. La mise à jour économique et financière. Ottawa, 1994.

Canada, ministère des Finances, La mise à jour économique et financière, Ottawa, 1999.

« L’évolution des recettes, des dépenses et du déficit du gouvernement fédéral à partir de 1970 ». Revue de la Banque du Canada, octobre 1985.

Mimoto, H. et P. Cross. « La croissance de la dette fédérale ». L’observateur économique canadien, juin 1991.

Prince, M.J.   How Ottawa Spends, 1987-1988: Restraining the State. Toronto, Methuen, 1987.


*  La première version de ce bulletin d'actualité a été publiée en mars 1988.  Le document a été périodiquement mis à jour depuis.


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