Direction de la recherche parlementaire


PRB 99-24F

 

LE RAPPORT DE LA COMMISSION ROYALE
SUR LES PEUPLES AUTOCHTONES

 

Rédaction :
Mary C. Hurley, Division du droit et du gouvernement
Jill Wherrett, Division des affaires politiques et sociales
Octobre 1999


 

TABLE DES MATIÈRES

PRINCIPALES CONCLUSIONS DU RAPPORT

RÉPONSE AU RAPPORT

 


LE RAPPORT DE LA COMMISSION ROYALE
SUR LES PEUPLES AUTOCHTONES

La Commission royale sur les peuples autochtones a présenté son rapport final en novembre 1996. Ce document de 4 000 pages, comptant cinq volumes, couvrait un large éventail de questions et ses 440 recommandations invitaient à apporter des changements fondamentaux aux relations entre les Autochtones et les non-Autochtones et les gouvernements au Canada. Les communautés et les organisations autochtones ont réagi en insistant pour qu'on donne suite aux recommandations de la Commission.

Principales conclusions du rapport

Le rapport tourne autour de la vision d'une nouvelle relation fondée sur la reconnaissance des peuples autochtones comme nations autonomes occupant une place unique au Canada. La Commission y propose un programme de changement étalé sur 20 ans et recommande l'adoption de nouvelles lois et la création de nouvelles institutions, l'affectation de ressources additionnelles, une redistribution des terres et la reconstruction des nations, des gouvernements et des communautés autochtones. Reconnaissant que l'autonomie n'est pas réaliste sans un véritable développement communautaire, la Commission réclamait des mesures rapides dans quatre domaines : pansement des plaies, amélioration des perspectives économiques, développement des ressources humaines et édification d'institutions autochtones. Selon la stratégie de mise en application élaborée, la Commission proposait que les gouvernements portent leurs dépenses à 1,5 milliard de dollars d’ici à la cinquième année d’application de la stratégie, et à 2 milliards de dollars pendant les quinze années subséquentes. Selon le rapport, l'investissement additionnel consenti pendant 20 ans permettrait de réaliser des économies à long terme.

Voici quelques-unes des principales recommandations de la Commission :

  • l'adoption de nouvelles lois, dont une nouvelle Proclamation royale énonçant l'engagement du Canada à instaurer une nouvelle relation, ainsi que des lois complémentaires énonçant des processus relatifs aux traités, et la reconnaissance de nations et de gouvernements autochtones;

  • la reconnaissance d'un ordre de gouvernement autochtone, assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés, ayant compétence sur les questions concernant le bon gouvernement et le bien-être des peuples autochtones ainsi que sur leurs territoires;

  • le remplacement du ministère fédéral des Affaires indiennes par deux nouveaux ministères, l'un chargé de mettre en oeuvre la nouvelle relation avec les nations autochtones, et l'autre de fournir des services aux collectivités n’ayant pas encore opté pour l'autonomie gouvernementale;

  • la création d'un parlement autochtone;

  • l'élargissement des terres et des ressources distribuées aux Autochtones;

  • la reconnaissance du droit des Métis à l'autonomie gouvernementale, l'attribution d'assises territoriales, et la reconnaissance du droit des Métis de chasser et de pêcher sur les terres de la Couronne;

  • la prise de mesures visant à répondre aux besoins en matière de bien-être social, d'éducation, de santé et de logement, dont la formation de 10 000 professionnels de la santé sur une période de 10 ans, la création d'une université des peuples autochtones et la reconnaissance de la compétence des nations autochtones en matière de protection de l'enfance.

La Commission a signalé plusieurs réalités importantes aux législateurs et décideurs. Elle a ainsi indiqué que, de nos jours, un pourcentage important des Autochtones du Canada vivent dans des zones urbaines et que les questions liées à l’autonomie gouvernementale dans les zones urbaines et les différends au sujet du partage des responsabilités entre gouvernements pour la prestation des services revêtent donc de plus en plus d’importance. La Commission a aussi souligné un autre problème démographique : la population autochtone croît actuellement à un rythme deux fois plus rapide que la population canadienne et plus de la moitié des Autochtones ont moins de 25 ans. Il est donc impératif qu’on s’occupe des dossiers de l’éducation, de la création d’emplois, de la justice, de la santé et des loisirs pour les jeunes Autochtones.

Réponse au rapport

Le rapport de la Commission royale a été généralement bien accueilli par les groupes autochtones, mais non sans quelques notes discordantes. On s’attendait toutefois à ce que le gouvernement y réponde. Le rapport a reçu beaucoup d’attention de la part des médias au moment de sa publication, mais il a été relégué à l’arrière-plan dans les mois subséquents. En décembre 1996, le premier ministre a affirmé que le gouvernement avait besoin de temps pour étudier les recommandations et qu’il ne ferait pas connaître sa réponse avant la tenue des élections générales. Le ministre des Affaires indiennes de l’époque a pour sa part déclaré qu’il serait difficile de porter les dépenses au niveau proposé par la Commission. En avril 1997, l’Assemblée des Premières nations a tenu une journée nationale de protestation pour exprimer sa colère devant ce qu’elle considérait comme de l’inaction de la part du gouvernement et un refus de la part du premier ministre d’assister à une réunion des dirigeants des Premières nations pour discuter du rapport.

En janvier 1998, le gouvernement a répondu au rapport de la Commission royale. Le document Rassembler nos forces, Le plan d’action du Canada pour les questions autochtones a établi un cadre d’action pour les mesures gouvernementales ultérieures en se fondant sur quatre objectifs principaux se décomposant chacun en un certain nombre d’éléments.

  • Renouveler les partenariats : cet engagement comprenait une Déclaration préliminaire de réconciliation reconnaissant les injustices historiques subies par les peuples autochtones et l’établissement d’un « fonds de guérison » de 350 millions de dollars pour tenter d’atténuer les conséquences des abus subis dans les pensionnats. Parmi les autres éléments, notons la préservation et la promotion des langues autochtones; la sensibilisation du public aux traditions et problématiques autochtones; l’inclusion de partenaires autochtones dans la conception, le développement et la prestation des programmes; le désir du gouvernement d’explorer comment les systèmes actuels pourraient être améliorés; et enfin l’adoption d’une approche plus efficace pour répondre aux besoins des Autochtones vivant en milieu urbain.

  • Renforcer l’exercice des pouvoirs par les Autochtones : les initiatives regroupées sous cet objectif concernaient, entre autres, le développement de la capacité des peuples autochtones de négocier et de mettre en œuvre l’autonomie gouvernementale; l’établissement de nouvelles commissions d’étude des traités ainsi que de centres pour le gouvernement autochtone; la création d’un nouvel organisme de revendications indépendant en collaboration avec les Premières nations; un programme de recensement des Métis; le financement des organisations de femmes autochtones afin de favoriser leur participation aux processus d’autonomie gouvernementale; et la mise sur pied possible d’un instrument de reconnaissance des gouvernements autochtones.

  • Établir une nouvelle relation financière : les objectifs du gouvernement dans ce secteur comprenaient la recherche d’une plus grande stabilité, d’une plus grande responsabilisation et d’une plus grande autonomie; l’adoption de nouvelles normes financières comportant des systèmes de reddition de comptes et de vérification qui soient conformes aux principes comptables généralement acceptés; l’assistance aux gouvernements autochtones qui souhaitent accroître leur autonomie financière grâce au développement de leurs propres sources de revenus; et l’amélioration de la collecte des données et de l’échange de renseignements.

  • Renforcer les collectivités et les économies, et appuyer les gens : cet objectif prévoyait la consécration de ressources à l’amélioration du niveau de vie dans les collectivités autochtones en ce qui touche au logement et aux systèmes d’eau et d’égouts; la réforme de l’aide sociale afin de réduire la dépendance et de mettre l’accent sur la création d’emplois; une stratégie quinquennale de développement des ressources humaines chez les Autochtones; l’expansion du programme Bon départ pour les Autochtones; la réforme de l’éducation; un recentrage sur les besoins et programmes liés à la santé; l’amélioration de l’accès aux capitaux; et l’établissement de centres pour les jeunes vivant en milieu urbain.

Conformément à ce cadre d’action, le Ministre et le grand chef de l’Assemblée des Premières nations ont annoncé un plan d’action préliminaire qui décrivait des projets précis devant être réalisés immédiatement et établissait les secteurs d’intervention futurs. Ce plan d’action devait être parachevé par les Premières nations et les ministères fédéraux, notamment en ce qui a trait aux ressources dont devrait disposer le gouvernement fédéral pour la mise en œuvre et en ce qui concerne les changements possibles dans l’organisation gouvernementale.

Pour le moment, il est difficile de prédire si les programmes prévus dans le cadre du plan Rassembler nos forces produiront des résultats comparables aux objectifs fixés dans les principales recommandations du rapport de la Commission royale. En janvier 1999, la ministre des Affaires indiennes et l’Interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits ont rendu public Rassembler nos forces, Le plan d’action du Canada pour les questions autochtones : Rapport d’étape, un document dans lequel sont examinées les mesures prises dans les quatre secteurs d’activités susmentionnés. Dans le communiqué diffusé à cette occasion, on signalait que des progrès avaient été réalisés dans plusieurs domaines et indiquait du même coup qu’il était urgent de donner suite au plan Rassembler nos forces étant donné que les indicateurs sociaux, économiques et de santé des collectivités autochtones demeuraient toujours bien en-deçà de ceux des centres non autochtones. Les autres ministères participant à la mise en œuvre de Rassembler nos forces sont Patrimoine canadien, le ministère des Pêches et des Océans, les Services correctionnels du Canada, Santé Canada, Développement des ressources humaines Canada, Industrie Canada, le ministère de la Justice, Ressources naturelles Canada, le Solliciteur général et Statistique Canada.