Bibliothèque du Parlement

LS-308F

 

PROJET DE LOI C-17 :  LOI MODIFIANT LA LOI
SUR LES TÉLÉCOMMUNICATIONS ET LA LOI SUR
LA RÉORGANISATION ET L'ALIÉNATION
DE TÉLÉGLOBE CANADA

 

               Rédaction :   Susan Alter
                                       Division du droit et du gouvernement

                                       Antony Jackson
                                       Division de l'économie

                                       Le 14 novembre 1997
                                         


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-17

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 30 octobre 1997 Première lecture : 9 décembre 1997
Deuxième lecture : 25 novembre  1997 Deuxième lecture :: 24 février 1998
Rapport du comité : 5 décembre 1997 Rapport du comité : 25 mars 1998
Étape du rapport : 9 décembre 1997 Étape du rapport :  
Troisième lecture : 9 décembre 1997 Troisième lecture : 29 avril 1998


Sanction royale : 12 mai 1998
Lois du Canada 1998, chapitre 8







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

CONTEXTE

   A.  La Loi sur les télécommunications, 1993

   B.  L'Accord sur les télécommunications de base

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Fournisseurs de services de télécommunication (Articles 1, 3 et 7)

      Article 1 — « Fournisseur de services de télécommunication »

      Articles 3 et 7 — Licences de services de télécommunication

   B.  Propriété des câbles sous-marins et des stations terriennes (Article 2, 4 et 5)

      Article 2 — Exclusion de propriété et contrôle canadiens

      Articles 4 et 5 — Licences de câble sous-marin international

   C.  Numérotage et autres activités (Article 6)

   D.  Appareils de télécommunication (Articles 8, 9 et 10)

      Article 8 — Appareils de télécommunication

      Articles 9 et 10 — Infractions et confiscation

   E.  Téléglobe Canada (Articles 11 à 23)

COMMENTAIRE


 

 PROJET DE LOI C-17 : LOI MODIFIANT LA LOI SUR LES
TÉLÉCOMMUNICATIONS ET LA LOI SUR LA RÉORGANISATION
ET L’ALIÉNATION DE TÉLÉGLOBE CANADA

 

CONTEXTE

Le 30 octobre 1997, le ministre de l’Industrie, l’honorable John Manley, a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation et l’aliénation de Téléglobe Canada. Avec ce projet de loi, le Canada réaliserait les engagements qu’il a pris aux termes de l’Accord sur les télécommunications de base (ATB), adopté en vertu de l’Accord général sur le commerce des services (GATS). D’avril 1994 à février 1997, le Canada et 68 autres pays ont négocié cet Accord qui libéralisera le commerce international des services de télécommunications de base. Les engagements du Canada en vertu de l’ABT comprennent l’offre d’éliminer certains monopoles d’entreprises de télécommunication et de lever certaines restrictions visant le droit de propriété par des intérêts étrangers.

Outre la réalisation des engagements pris par le Canada en vertu de l’ABT, le projet de loi C-17 apporterait d’autres modifications à la Loi sur les télécommunications qui vont dans le sens des engagements pris et qui sont jugées nécessaires pour poursuivre l’ouverture à la concurrence en cette ère de commerce libéralisé des télécommunications de base. Le ministre a souligné cet aspect à la Chambre des communes en disant :

Le projet de loi C-17 vise à poursuivre la libéralisation des télécommunications canadiennes entamée il y a plus de 10 ans et qui s’est déjà traduite par de nombreux avantages pour les Canadiens et les entreprises de télécommunications canadiennes. Cette libéralisa-lion a commencé par l’attribution de licences pour des services de téléphonie cellulaire concurrentiels, et elle s’est poursuivie avec la privatisation de Téléglobe et de Télésat, l’ouverture à la concurrence des services de communications téléphoniques interurbaines, et l’adoption de la nouvelle Loi sur les télécommunications(1).

   A. La Loi sur les télécommunications, 1993

Le Parlement a adopté la Loi sur les télécommunications en 1993, et, ce faisant, il a regroupé le régime réglementaire des télécommunications qui, jusque-là, se trouvait dispersé ici et là dans divers textes législatifs. La Loi a modernisé les instruments de réglementation des télécommunications dont dispose le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), les allégeant et les assouplissant, et, dans certains cas, en les rendant entièrement facultatifs. Et, ce qui est encore plus important, la loi a énoncé les objectifs de la politique du Parlement touchant les télécommunications au Canada et y ajouté les suivants : rendre les services de télécommunication sûrs et abordables; accroître l’efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes; favoriser le libre jeu du marché pour la fourniture de services de télécommunication; et assurer l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire (Loi sur les télécommunications, article 7).

Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, le CRTC a travaillé à élaborer un nouveau cadre réglementaire à appliquer aux télécommunications au Canada — un cadre qui pourra être adapté au changement technologique rapide, qui favorisera une concurrence plus grande et qui reconnaîtra l’importance que revêtent les télécommunications pour la croissance économique du Canada. Par exemple, la décision Télécom CRTC 1994-19, rendue publique le 16 septembre 1994, a amené des tarifs interurbains moins élevés, des tarifs locaux qui correspondent mieux à leur coût réel et la concurrence dans la fourniture des services locaux.

Pendant qu’il procédait chez lui à une réforme réglementaire et à l’accroissement de la concurrence dans le domaine des télécommunications, le Canada est entré en négociation avec les pays membres du GATS pour établir un cadre multilatéral au commerce des services de télécommunication de base. Comme l’accord qui en est résulté, l’ATB, engageait le Canada à la libéralisation de ses services internationaux de télécommunication, le Parlement doit maintenant apporter certaines modifications à la Loi sur les télécommunications et à la Loi sur la réorganisation et l’aliénation de Téléglobe Canada. Le projet de loi C-17 propose également quelques autres modifications à ces lois qui sont plus une conséquence générale du processus de libéralisation qu’une conséquence des obligations du Canada en vertu du traité.

   B. L’Accord sur les télécommunications de base

L’Accord général sur le commerce des services, GATS, poursuit la libéralisation du commerce dans le domaine des services. Accroître la compétition dans ce secteur permet à l’industrie de profiter de marchés plus vastes et aux consommateurs de prix plus bas. Le GATS ouvre l’accès aux marchés en exigeant qu’il n’y ait plus de discrimination en faveur des fournisseurs nationaux, ce qu’on appelle le traitement national, et plus de discrimination entre les autres membres signataires de l’Accord, le principe de la nation la plus favorisée (NPF).

Les premiers domaines du GATS négociés ont été la mobilité de la main-d’oeuvre, le transport maritime, les services financiers, les services de télécommunication et les services professionnels. En outre, certains pays on pris des engagements relatifs aux services commerciaux; à la construction de communications et aux services techniques connexes; aux services de distribution; aux services éducatifs; aux services environnementaux; aux services financiers en santé et aux services sociaux; aux services de tourisme et de voyages d’agrément, culturels et sportifs; et aux services de transport.

Dans les traités sur le commerce de biens, des listes tarifaires sont négociées; dans les traités sur le commerce de services, les négociations portent sur des listes d’engagements spécifiques. Il s’agit d’engagements qui lient les parties, sur l’accès au marché et le traitement national. En vertu du GATS, ces engagements ne peuvent être modifiés dans les trois premières années de leur existence, et une indemnisation est exigée pour les modifications qui y sont apportées après cette période. Ces engagements peuvent aussi comporter des restrictions sur des sujets comme la propriété étrangère. Dans l’ensemble, les engagements spécifiques précisent d’avance en détail les conditions d’accès à un marché et les restrictions qu’un concurrent étranger est susceptible de rencontrer dans un certain marché national.

La définition des services de télécommunication de base donnée dans le GATS est générale et englobe les services vocaux de personne à personne, les services mobiles, les télégrammes, les télex, les services de transmission de données et les communications corporatives par ligne louée, mais pas la diffusion ou la distribution par câble d’émissions de télévision ou de radio. On avait décidé de donner une portée globale aux négociations sans exclure à priori aucune télécommunication de base.

Aux termes de l’ATB le Canada s’est engagé à ouvrir à la concurrence :

  • les services mobiles de communication par satellite d’ici le 1er janvier 1998 au Canada et entre le Canada et les États-Unis;

  • les services de télécommunication internationaux par câble au plus tard le 1er octobre 1998;

  • tous les services mobiles de communication par satellite au plus tard le 31 octobre 1998;

  • tous les services internationaux au plus tard le 31 décembre 1999, sauf pour les services fixes par satellite entre le Canada et les États-Unis.

  • les services par satellite au plus tard le 1er mars 2000.

À l’instar de beaucoup d’autres pays, le Canada a préservé ses politiques sur la propriété étrangère du mieux qu’il pouvait en assortissant son engagement de restrictions. Son principe directeur à cet égard a été de conserver les politiques actuelles pour les exploitations à partir d’installations au Canada tout en autorisant la propriété étrangère totale des liaisons avec le reste du monde par câbles sous-marins ou services par satellite et en permettant aux fournisseurs de services canadiens d’utiliser au Canada les services par satellite entièrement détenus par des étrangers. La limite des investissements étrangers dans les fournisseurs de services de télécommunication à partir d’installations est fixée à un total cumulé de 46,7 p. 100 des actions avec droit de vote, basé sur 20 p. 100 d’investissements directs et 33 p. 100 d’investissements indirects; de tels fournisseurs doivent en fait être sous contrôle canadien. Les revendeurs de services de base peuvent être détenus entièrement (100 p. 100) par des étrangers, sauf qu’il leur est interdit d’offrir ces services par téléphone public. Les compagnies de téléphone existantes détenues par des intérêts étrangers et fonctionnant à partir d’installations sont maintenues.

L’ouverture des services internationaux (outremer) par câble à la concurrence a comme conséquence de faire perdre à Téléglobe son monopole; cependant, les conditions visant la propriété étrangère s’appliqueront à ces services et limiteront les investissements étrangers cumulés à 46,7 p. 100, ce qui imposera donc une limite à la part que Téléglobe pourra détenir des entreprises étrangères de télécommunications et des sociétés qui y sont associées. Le monopole de Téléglobe est appliqué administrativement par imposition de restrictions au droit d’amener à terre des câbles sous-marins, pas législativement. Le monopole de Télésat sur les installations du secteur spatial du service fixe par satellite prendra fin d’ici le 1er mars 2000, lorsque le CRTC sera autorisé à délivrer des licences.

La liste des engagements précis comporte aussi un certain nombre de points qui intéressent particulièrement certaines compagnies de téléphone. Les restrictions assurant qu’elles demeurent à grand nombre d’actionnaires sont maintenues pour la Maritime Telegraph and Telephone Ltd. et pour la Manitoba Telecom Services Inc. La liste précise aussi que la concurrence pourra être limitée dans le cas de compagnies de téléphone antérieurement régies par les provinces, qui sont sous compétence fédérale depuis la décision rendue par la Cour suprême en 1994 dans la cause Procureur général du Québec et al. c. Téléphone Guèvremont Inc. Sans doute que le CRTC verrait toute restriction de ce genre comme s’inscrivant dans l’effort d’amener toutes ces compagnies de téléphone sous la coupe du régime réglementaire fédéral.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A. Fournisseurs de services de télécommunication (Articles 1, 3 et 7)

      Article 1 — « Fournisseur de services de télécommunication »

L’article 1 ajouterait une définition de « fournisseur de services de télécommunication » à la disposition 2(1) de la Loi sur les télécommunications. Aux termes de cette définition, une personne qui fournit « des services de télécommunication de base », y compris au moyen d’un appareil de transmission exclu serait un « fournisseur de services de télécommunication ». Les services de télécommunication de base, bien que la loi ne les énumère pas ni ne les définisse, sont généralement vus comme comprenant les services de télécommunication locaux et interurbains, assurés par un quelconque type de technologie de réseau (par ex. câble, radio, satellite, télévision par câble) et fournis soit à partir d’installations, soit par la revente de services provenant d’installations existantes(2). Les services de télécommunication de base assurent le transport en temps réel de l’information entre deux points sans aucune intervention. Les services à valeur ajoutée, comme le traitement de données en ligne, les dépôts et retraits de données en ligne dans une base de données, l’échange de données électroniques, le courrier électronique et vocal, exigent une intervention et ne sont donc pas considérés comme des services de télécommunication de base(3).

      Articles 3 et 7 — Licences de services de télécommunication

L’article 3 ajouterait un nouveau régime d’attribution de licences à la Loi en vertu des articles 16.1 à 16.4 et proposés; ce régime s’appliquerait à n’importe quelle catégorie de « fournisseurs de services de télécommunication » précisée par le Conseil. L'article 16.1 proposé exigerait que les catégories de fournisseurs de services de télécommunication précisées par le Conseil (aux termes du nouveau pouvoir d’établissement de règlements que lui conférera l’article 7) obtiennent une licence de services de télécommunication. Les modalités applicables aux licences et à leur attribution permettraient au CRTC d’exiger du demandeur le paiement de droits et les renseignements voulus (en vertu de l'article 16.2 proposé); autoriseraient le CRTC à assortir la licences des conditions indiquées, et à décider de sa période de validité qui ne pourrait excéder dix ans (en vertu de l'article 16.3 proposé); et lui permettraient (en vertu de l'article 16.4 proposé) de suspendre ou de révoquer la licence quand il aurait des motifs raisonnables de croire que le titulaire a contrevenu à la Loi sur les télécommunications, à ses règlements ou aux conditions de la licence.

Le nouveau régime d'attribution de licences donnerait au CRTC le pouvoir d’établir les conditions d’exploitation des entreprises offrant des services internationaux au moment où le monopole de Téléglobe sur le trafic outremer prendra fin(4). Comme le ministre de l’Industrie, John Manley, l'a expliqué : « [ n] ous donnerons au CRTC le pouvoir d’établir un régime d’attribution de licences qui fera en sorte que tous les fournisseurs de services internationaux seront assujettis aux mêmes règles »(5). En mai 1997, le ministre de l’Industrie a officiellement informé le Conseil de l’intention du gouvernement de déposer un projet de loi qui, entre autres choses, modifierait la Loi sur les télécommunications pour donner au CRTC le pouvoir légal d’exiger de tous les membres d’une quelconque catégorie de fournisseurs de services d’obtenir une licence. Donc, en octobre 1997, le CRTC a publié un avis sollicitant des propositions et des observations sur le régime réglementaire qui devrait s’appliquer à la fourniture de services internationaux de télécommunication lorsque le monopole de Téléglobe prendra fin(6).

   B. Propriété des câbles sous-marins et des stations terriennes (Articles 2, 4 et 5)

      Article 2 — Exclusion de propriété et contrôle canadiens

En ce moment, le Canada n’autorise aucune propriété étrangère des câbles sous-marins internationaux qui aboutissent sur son littoral. Également, le Canada limite l’utilisation de satellites détenus et contrôlés par des intérêts étrangers qui fournissent des services de télécommunication aux Canadiens. Le Canada s’est engagé, dans l’Accord sur les télécommunications de base, à permettre, à partir du 1er octobre 1998, à des intérêts étrangers de posséder et de contrôler dans leur totalité les câbles sous-marins internationaux qui aboutissent au Canada et à lever les restrictions visant l’utilisation de satellites mobiles et géostationnaires étrangers qui assurent des services de télécommunication aux Canadiens. L’article 2 donnerait suite à cet engagement en dégageant a) les câbles sous-marins internationaux et b) les stations terriennes qui fournissent des services de télécommunication par satellites des exigences relatives à la propriété et au contrôle canadiens auxquelles l’article 16 de la Loi sur les télécommunications assujettit les entreprises de télécommunication.

      Articles 4 et 5 — Licences de câble sous-marin international

À l'heure actuelle, le paragraphe 19(1) de la Loi sur les télécommunications autorise le ministre à attribuer une licence de câble sous-marin international à toute « personne morale » admissible en vertu des règlements. L'alinéa 22(2)c) de la loi autorise le gouverneur en conseil à déterminer les « personnes morales » admissibles à être titulaires de telles licences. Les articles 4 et 5 modifieraient ces dispositions de la Loi en remplaçant les mots « personne morale » par « personne », ouvrant ainsi la possibilité à d’autres types d’entreprises de détenir ce genre de licence. On trouve la définition suivante de « personne » au paragraphe 2(1) de l’actuelle Loi : « Sont compris parmi les personnes les particuliers, les sociétés de personnes, les personnes morales, les organisations non personnalisées, les gouvernements ou leurs organismes, ainsi que les fiduciaires, exécuteurs testamentaires, curateurs, tuteurs ou autres représentants légaux ».

   C. Numérotage et autres activités (Article 6)

L’article 6 ajouterait six nouvelles dispositions à la Loi, soit les articles 46.1 à 46.6. L'article 46.1 proposé donnerait au CRTC le pouvoir de gérer les « ressources en matière de numérotage » et « toutes autres activités » liées à la fourniture, par une entreprise canadienne, des services de télécommunication. Les ressources de numérotage sont les numéros de téléphone, les indicatifs régionaux, les codes de pays, les codes d’entreprise, les codes de facturation et les autres codes de numérotage dont on se sert dans l’exploitation des réseaux de télécommunication. Le gouverneur en conseil déterminerait ce qui constitue les « autres activités » liées à la fourniture de services de télécommunication et les préciserait dans des règlements pris en vertu de l'article 46.3. Les répertoires téléphoniques informatisés sont un exemple des activités liées à la fourniture des services de télécommunication que le Conseil pourrait administrer conformément à ce nouveau pouvoir.

L'article 46.2 proposé autoriserait le Conseil à déléguer à toute personne tout pouvoir que lui confère l’article 46.1. Par exemple, ce nouvel article permettrait au Conseil de déléguer son pouvoir de gérer les ressources en matière de numérotage à une société privée comme une firme de gestion et de comptabilité. L'article 46.4 proposé autoriserait le délégataire de ces activités administratives à imposer des tarifs pour ses services; cependant, le Conseil serait en mesure, au besoin, de régir ces tarifs. En outre, conformément à l'article 46.5 proposé, le Conseil pourrait régir les modalités que le délégataire d’une des fonctions administratives envisagées dans cette disposition devrait respecter pour la fourniture des services

L'article 46.6 proposé donnerait au Conseil le pouvoir d’organiser la gestion d’un fonds auquel contribueraient les fournisseurs de services et dont l’établissement a été jugé nécessaire lors de l’introduction des services interurbains compétitifs. Tant et aussi longtemps que les principales compagnies de téléphone ont eu le monopole des services interurbains et locaux, elles ont, de manière substantielle, financé leurs services locaux avec les recettes provenant des services interurbains. Cependant, quand les concurrents ont été autorisés à entrer dans le marché des interurbains, le CRTC a déterminé qu’ils seraient tenus de verser une portion de leurs recettes aux services locaux monopolistiques; donc, les services locaux continueront d’être subventionnés par les recettes provenant des interurbains durant la période de rééquilibrage des tarifs. (Le rééquilibrage des tarifs est le processus qui permettra de mieux refléter dans les tarifs imposés pour les services locaux et interurbains le coût réel de ces services.) L’ouverture imminente des services locaux à la concurrence ajoute une nouvelle dimension à la gestion de ce fonds. Puisque plus d’un fournisseur de services locaux pourra désormais s’implanter dans le marché local, les contributions au fonds des divers fournisseurs des services interurbains devront être réparties proportionnellement entre les fournisseurs des services locaux. Comme le Conseil l’a fait remarquer dans sa décision sur la concurrence locale de mai 1997 :

La contribution désigne la réaffectation des revenus provenant des services dont les tarifs sont supérieurs aux coûts des services, principalement les services locaux de résidence de base, dont les tarifs sont inférieurs aux coûts. Il existe à l’heure actuelle une source de contribution explicite : les services interurbains. [...] La présente instance soulève la question de la mesure dans laquelle il faut rajuster le régime de contribution actuel pour tenir compte de l’évolution d’un marché concurrentiel dans les services locaux(7).

Le régime que recommandait le Conseil dans sa décision de mai était un fonds central (géré par une tierce partie indépendante qui ne contribuerait pas au fonds ni n’en bénéficierait) dont les contributions seraient réparties proportionnellement aux entreprises des services locaux(8). L’article 46.6 proposé permettrait la création d’un tel régime.

Le nouveau paragraphe 46.6(1) donnerait au Conseil le pouvoir d’enjoindre un fournisseur de services de télécommunication de contribuer à un fonds « pour favoriser l’offre continue de services de télécommunication aux Canadiens ». L’objectif de ce fonds, tel qu’il est décrit dans ce paragraphe, respectel’objectif de la politique canadienne de télécommunication énoncée à l’alinéa 7b) de la Loi sur les télécommunications qui se lit comme suit : « permettre l’accès aux Canadiens dans toutes les régions — rurales ou urbaines — du Canada à des services de télécommunication sûrs, abordables et de qualité ». Les autres paragraphes de l’article 46.6 proposé permettraient de confier la gestion de ce fonds à une tierce partie indépendante conformément aux exigences administratives que le Conseil établirait.

   D. Appareils de télécommunication (Articles 8, 9 et 10)

      Article 8 — Appareils de télécommunication

L’article 8 ajouterait une nouvelle Partie IV.I à la Loi; essentiellement, cette partie étofferait l’actuel système de contrôle de la qualité des appareils de télécommunication au Canada. Le système amélioré s’appliquerait, conformément au nouvel article 69.1, spécifiquement aux appareils de télécommunication pouvant être reliés à un réseau de télécommunication d’une entreprise canadienne et utilisés dans les locaux d’un abonné d’un service de télécommunication. Parmi les appareils auxquels le système amélioré s’appliquerait, mentionnons les appareils de téléphone, les télécopieurs, les modems et les téléphones d’affaires à plusieurs lignes.

Tant le ministre que le gouverneur en conseil se verraient conférer de nouveaux pouvoirs pour faire en sorte que soient mis en place les éléments requis pour que ce système de contrôle de la qualité puisse fonctionner. Une nouvelle disposition, l’article 69.3, donnerait au ministre des pouvoirs en matière de délivrance de certificats, comme le pouvoir d’établir les spécifications techniques des appareils de télécommunication et de délivrer des certificats d’approbation technique à l’égard des appareils de télécommunication respectant les normes. D’autre part, le nouvel article 69.4 donnerait au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre les règlements nécessaires pour régir le système de certification, par exemple le pouvoir d’établir, par règlement, les spécifications techniques, de préciser les appareils assujettis au certificat d’approbation technique et d’établir la procédure de demande des certificats.

Le nouvel article 69.2 empêcherait quiconque de distribuer, louer, mettre en vente, vendre ou importer tout appareil de télécommunication qui n’aurait pas été certifié comme il se doit. Cette disposition est semblable, mais non identique, à celle de la Loi sur la radiocommunication (paragraphe 4(2)), qui interdit à quiconque de distribuer, louer, vendre, manufacturer et importer certains types d’appareils et d’équipements radio qui ne respectent pas les normes techniques imposées.

Des inspecteurs seraient nommés pour appliquer ce système de contrôle de la qualité et pourraient pénétrer dans un lieu d’affaires pour examiner les appareils et les documents (nouvel article 69.5). Ces pouvoirs d’inspection seraient semblables à ceux conférés aux inspecteurs en vertu de la Loi sur la radiocommunication (article 8) et pourraient en théorie être exercés par les mêmes personnes.

      Articles 9 et 10 — Infractions et confiscation

L’article 73 de la Loi sur les télécommunications stipule que quiconque contrevient à certains articles énumérés de la Loi commet une infraction et encourt l’amende associée à l’infraction en question. L’article 9 du projet de loi ajouterait à la liste actuelle des infractions les contraventions à certains nouveaux articles de la Loi, y compris l’article interdisant les activités ayant trait aux appareils non certifiés (article 69.2).

Si jamais l’amende maximale (10 000 $ pour les personnes physiques et 100 000 $ pour les personnes morales contrevenant à l’article 69.2) ne suffisait à décourager les contrevenants éventuels, le paragraphe 9(4) et l’article 10 du projet de loi donneraient au ministre des outils d’application additionnels. Le paragraphe 9(4) donnerait à la Cour fédérale le pouvoir d’accorder des injonctions, à la demande du ministre, pour empêcher quiconque de se livrer à des activités en contravention de l’article 69.2. L’article 10 autoriserait le ministre en cas de déclaration de culpabilité pour une contravention à l’article 69.2 à ordonner la confiscation au profit de Sa Majesté du chef du Canada de l’appareil de télécommunication en cause. Des dispositions semblables de confiscation se trouvent à l’article 13 de la Loi sur la radiocommunication.

   E. Téléglobe Canada (Articles 11 à 23)

Le Canada a accepté, en vertu de l’ATB, de mettre fin au monopole de Téléglobe Canada sur le trafic international. Le 1er octobre 1998, Téléglobe Canada ne sera plus autorisée à être le seul fournisseur des services de télécommunication du Canada vers l’étranger à partir d’installations. Par conséquent, le projet de loi C-17 propose d’abroger tous les articles de la Loi sur la réorganisation et l’aliénation de Téléglobe Canada qui ne s’appliqueraient plus.

L’article 12, qui abrogerait l’article 5 de la Loi sur la réorganisation et l’aliénation de Téléglobe Canada, répondrait directement à l’engagement du Canada en vertu de l’ATB d’assouplir les règles actuelles de participation étrangère à Téléglobe Canada en permettant aux investissements étrangers cumulés d’atteindre 46,7 p. 100.

COMMENTAIRE

Le projet de loi C-17 donnerait force de loi aux engagements pris par le Canada en vertu du GATS. Des modifications additionnelles combleraient les lacunes de la structure réglementaire. Le projet de loi permettrait au CRTC d’autoriser une firme commerciale à gérer l’attribution du numérotage téléphonique et d’autres activités de ce genre. Les mécanismes servant à vérifier que seul l’équipement téléphonique certifié est relié aux réseaux canadiens seraient mis à jour.

Briser le monopole sur les services internationaux offre la perspective de voir baisser les tarifs pour les appels à l’étranger et de confronter les services monopolistiques canadiens, Téléglobe et Télésat, aux défis commerciaux qu’ils connaissent depuis des années. Il est difficile de dire qui en seraient les premiers bénéficiaires, mais les collectivités qui ont de forts liens commerciaux et familiaux avec l’étranger, comme Vancouver en a avec Hong Kong, seraient sans doute les premières à constater que le choix réduit les coûts à mesure que de nouvelles liaisons par câble entreraient en service.

Les satellites ne respectent pas les frontières nationales. Les satellites géostationnaires canadiens qui servent le pays pourraient tout aussi bien desservir d’autres pays situés au sud (grâce peut-être à une certaine rotation de l’antenne), tandis que les nouvelles générations de satellites sur orbite basse franchissent les frontières à volonté. Une préoccupation clairement établie du gouvernement du Canada a été de s’assurer que le pays disposerait d’assez de créneaux orbitaux. On ne sait trop comment les dispositions du projet de loi C-17 se répercuteraient sur la demande de services canadiens par satellite et par conséquent sur les créneaux orbitaux. Les compagnies de téléphone canadiennes pourraient choisir un service par satellite américain si elles le souhaitaient. En revanche, les possibilités pour l’offre de services de télévision, de données et d’Internet par satellite au Canada augmentent et il sera beaucoup plus facile aux sociétés canadiennes de services par satellite de faire concurrence dans un marché nord-américain en expansion plutôt qu’en contraction.

Le dilemme du Canada au sujet des tarifs de téléphone ne serait nullement changé par le projet de loi C-17. Conformément à l’article 46.6 proposé, le CRTC pourrait enjoindre tout fournisseur de services de télécommunication à contribuer à un fonds qui subventionnerait le service de téléphone local. Maintenir le niveau actuel de l’interfinancement ou rééquilibrer davantage les tarifs resteront des choix politiques possibles, mais difficiles.

Le projet de loi C-17 maintiendrait les restrictions à la propriété étrangère pour les exploitants ayant des installations physiques de télécommunication au Canada, mais il a dû, par nécessité, gruger un peu la politique sur la propriété étrangère parce que les exploitants outremer de services par câble souhaitent desservir le Canada et que les satellites étrangers survolent le Canada. Si le gouvernement estime qu’une combinaison de réglementation et de concurrence fera en sorte que cette partie du système fonctionnera à l’avantage des Canadiens, ce serait forcer les choses pour lui de soutenir l’imposition d’autres restrictions à la propriété étrangère pour certaines mais pas toutes les parties du système canadien, surtout si l’on songe que la propriété étrangère de B. C. Tel et Québec Tel serait maintenue en vertu de cette Loi. Il n’est pas clair si cela constituera un irritant à l’échelle internationale. Les entreprises canadiennes auraient accès au marché des services de télécommunications à l’étranger, mais on ne saurait dire dans quelle mesure ce marché s’ouvrirait à elles.

C’est au Canada que les effets indirects du GATS pourraient être les plus forts. L’ouverture des marchés mondiaux de services de téléphone augmenterait la demande d’équipements à la hauteur des technologies de télécommunication et d’information. Le marché mondial de l’industrie de l’information connaît une croissance deux fois plus rapide que le commerce mondial et le Canada possède un avantage comparatif dans cette industrie.


 (1) Chambre des communes, Débats, 4 novembre 1997, p. 1519.

(2) Organisation mondiale du commerce : Accord sur les services de télécommunication (Quatrième Protocole à l’Accord général sur le commerce des services), 36 I.L.M. 354 à 358, 359 et 371 (1997).

(3) John F. Blakney et David Ujimoto, « The Impact of the World Trade Organization’s Agreement on Basic Telecommunications on Canada’s Telecommunications Regulatory Environment », Canadian Competition Record, printemps 1997, p. 36.

(4) Industrie Canada, « Accroître la concurrence dans le secteur canadien des télécommunications », Communiqué, 30 octobre 1997, p. 2.

(5) Chambre des communes, Débats, 4 novembre 1997, p. 1521.

(6) CRTC, « Concurrence dans la fourniture de services internationaux de télécommunications », Avis public Télécom CRTC 97-34, Ottawa, 2 octobre 1997.

(7) CRTC, « Concurrence locale », Décision Télécom CRTC 97-8, Ottawa, 1er mai 1997, p. 28.

(8) Décision Télécom CRTC 97-8, p. 34.