Bibliothèque du Parlement

LS-313F

 

PROJET DE LOI C-29 :  LOI SUR L'AGENCE
CANADIENNE DES PARCS

 

Rédaction :

Susan Alter
Division du droit et du gouvernement

Sonya Dakers
Division des sciences et de la technologie


Le 18 février 1998
Révisé le 2 juin 1998

                                      

     


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-29

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 5 février 1998 Première lecture : 3 juin 1998
Deuxième lecture : 19 mars 1998 Deuxième lecture : 15 juin 1998
Rapport du comité : 14 mai 1998 Rapport du comité : 20 octobre 1998
Étape du rapport : 1 juin 1998 Étape du rapport :  
Troisième lecture : 2 juin 1998 Troisième lecture : 19 novembre 1998


Sanction royale : 3 décembre 1998
Lois du Canada 1998,
chapitre 31






N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.   Organisation et responsabilités de l'Agence

   B.   Ressources humaines

   C.   Dispositions financières

   D.  Pouvoirs du minitre

   E.   Modifications corrélatives

COMMENTAIRE


 

PROJET DE LOI C-29 : LOI SUR L’AGENCE CANADIENNE DES PARCS

 

CONTEXTE

Le 5 février 1998, le projet de loi C-29, Loi portant création de l’Agence canadienne des parcs et apportant des modifications corrélatives à certaines lois a franchi l’étape de la première lecture à la Chambre des communes. En avril et mai 1998, le projet de loi a été étudié par le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes. En comité, les membres ont convenu de renommer l’Agence « l’Agence Parcs Canada » et de modifier en conséquence le titre de la Loi et toutes les mentions de l’Agence dans le projet de loi.

Depuis quatre ans, Parcs Canada cherche à compléter le réseau des parcs nationaux et à mettre en valeur les lieux historiques nationaux et les aires de conservation marines dans un contexte de contraintes financières, et avec un budget amputé de 100 millions. Les raisons invoquées pour justifier la création de l’Agence canadienne des parcs sont la simplification des structures, l’amélioration de l’efficacité administrative et la mise en place de procédures plus flexibles en matière de dotation et de finances.

Les 38 parcs nationaux et les 786 lieux historiques du Canada sont visités chaque année par plus de 24 millions de Canadiens; ils comptent parmi les éléments les plus importants de l’identité canadienne et constituent des symboles très chers de la géographie et de l’histoire du Canada. Le projet de loi C-29 vise à aider Parcs Canada à préserver, protéger et développer le réseau des parcs nationaux, des lieux historiques et d’autres lieux patrimoniaux protégés. Le gouvernement continuerait à financer les nouveaux parcs et à protéger ceux qui existent déjà, mais les usagers paieraient pour les avantages personnels ou commerciaux qu’ils en retirent. Les Canadiens seraient invités au moins tous les deux ans à conseiller le ministre au sujet de la gestion de ces trésors nationaux.

Contrairement à la rumeur, Parcs Canada ne serait pas privatisé mais deviendrait un employeur distinct ou un établissement public, l’Agence Parcs Canada, en vertu de l’annexe II de la Loi sur la gestion des finances publiques. L’Agence relèverait du ministre du Patrimoine canadien, qui continuerait d’être responsable de son orientation générale et de la mise en oeuvre de la politique. L’Agence serait dirigée par un directeur général nommé par le Cabinet.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A. Organisation et responsabilités de l’Agence

L’Agence Parcs Canada serait une société d’État, relevant du ministre du Patrimoine canadien. Sa mission générale serait de réaliser le mandat du ministre en matière de protection de l’intégrité des régions naturelles du pays ¾  terrestres et marines ¾   et de mettre en valeur les sites historiques du Canada. Ses attributions particulières incluraient la planification à long terme, la recommandation de créer de nouveaux parcs, ainsi que l’administration et l’application des lois placées sous sa responsabilité (art. 3 à 6).

L’Agence tiendrait l’essentiel de son mandat des diverses lois qu’elle serait chargée d’administrer, telles que la Loi sur les parcs nationaux et la Loi sur les lieux et les monuments historiques. Le préambule du projet de loi C-29 ne modifierait pas l’ensemble du mandat de l’Agence et n’y ajouterait rien en substance; il viserait plutôt à aider l’Agence à interpréter et à assumer ses responsabilités. Vu l’objet du préambule, le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes a apporté, pour plus de clarté, des corrections et des améliorations mineures au projet de loi.

Dans le cadre de sa mission, l’Agence aurait le pouvoir de passer des marchés et des ententes, d’acquérir des biens par voie de dons, de legs ou autrement, de vendre ou d’aliéner des biens personnels, et de rendre disponibles, notamment par cession ou octroi de licences, des biens intellectuels passés sous son contrôle (art. 8). Pour que les personnes intéressées aux questions qui relèveraient de l’Agence Parcs Canada puissent conseiller régulièrement le ministre sur le bon fonctionnement de l’Agence, le gouvernement a ajouté le paragraphe 8.1 à l’étape du rapport. Selon cette nouvelle disposition, le ministre devrait organiser au moins tous les deux ans une table ronde réunissant des personnes intéressées pour discuter du bon fonctionnement de l’Agence et répondre dans un délai de 180 jours aux recommandations faites par écrit dans le cadre d’une telle table ronde. Comme le paragraphe 8.1 est essentiellement une version revue et améliorée du paragraphe 12(4) du projet de loi original, qui aurait simplement permis à des personnes intéressées de transmettre leurs observations au directeur général et ne prévoyait aucun mécanisme formel de réponse de la part du gouvernement, ce dernier paragraphe a été supprimé.

L’Agence pourrait poursuivre et être poursuivie en justice (art. 18). Le siège de l’Agence serait fixé dans la région de la capitale nationale (art. 17). Travaux publics et Services gouvernementaux Canada continuerait de fournir certains services essentiels. L’Agence serait toutefois habilitée à se procurer des biens et des services avec l’agrément donné, hors de la Fonction publique (art. 9). On ne connaît pas les limites des marchés autorisés.

Comme l’Agence exercerait ses pouvoirs et s’acquitterait de ses responsabilités et de ses fonctions seulement à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, elle serait assujettie aux dispositions de la Loi sur les langues officielles. Cet avis a été exprimé par la ministre de la Justice, Anne McLellan, dans une lettre au Secrétaire d’État (Parcs), Andy Mitchell, qui a été déposée devant le Comité du patrimoine canadien le 12 mai 1998. La ministre a déclaré : « l’Agence serait clairement considérée être une institution fédérale et, conséquemment, la Loi sur les langues officielles (LLO) s’appliquerait entièrement à elle ». Néanmoins, pour plus de certitude, le Comité a ajouté le nouveau paragraphe 36.1, qui aurait stipulé que : « la Loi sur les langues officielles s’applique à l’Agence et à ses sous-traitants ». Malheureusement, en proposant que la LLO s’applique pleinement non seulement à l’Agence, mais aussi à ses sous-traitants, le Comité aurait pu, en fait, élargir la portée de la loi au-delà de ce que le Parlement avait prévu au départ. Ce problème possible a été abordé à l’étape du rapport à la Chambre, et le paragraphe 36.1 a été révisé. John Godfrey, secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, a expliqué à la Chambre que le paragraphe 36.1, révisé, reprendrait simplement les principes de la Loi sur les langues officielles : « Elle ne change rien à la situation. Cependant, elle montre que Parcs Canada est à l’écoute et qu’il se préoccupe de la question. » (Chambre des communes, Débats, 28 mai 1998, p. 7329)

Le directeur général aurait la responsabilité de gérer et de contrôler l’Agence, sous l’autorité du Ministre, ainsi que ses opérations au jour le jour. Il disposerait d’un pouvoir exclusif sur la dotation. Nommé pour un mandat renouvelable de cinq ans, il aurait le rang et les attributions d’un sous-ministre.

   B.   Ressources humaines

Même si cela n’est pas énoncé de façon explicite dans le projet de loi, le ministère du Patrimoine canadien a indiqué que l’Agence fonctionnerait comme un employeur distinct; le projet de loi contient des dispositions en conséquence. Les employés des parcs cesseraient de relever de la Loi sur l’emploi dans la Fonction publique pour passer à un régime de ressources humaines où le directeur général aurait le pouvoir d’embaucher et de mettre en disponibilité des employés, et d’établir les modalités d’emploi (art. 13). Dans les documents d’information à l’appui du projet de loi, il est dit que la dotation serait fondée sur « les valeurs fondamentales du service au public », à être précisées dans la charte de l’Agence, à laquelle le public aurait accès (art. 16). Tous les quatre ans, l’Agence serait aussi tenue de faire préparer un rapport indépendant sur sa gestion des ressources humaines et de le mettre à la disposition du public (art. 35).

Tous les concours, appels et griefs en cours, entrepris en vertu de la Loi sur l’emploi dans la Fonction publique, seraient transférés à la nouvelle Agence et visés par les règles qui s’appliquaient au départ (dispositions transitoires, art. 37 à 44). Il reviendrait au Cabinet de fixer la date de création de l’Agence, à laquelle le nouveau régime de gestion des ressources humaines s’appliquerait (art. 62). Pour que la transition s’effectue en douceur, la collaboration des syndicats serait essentielle.

Par ses nouvelles attributions, l’Agence des parcs serait considérée comme un organisme de services publics en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, et le Conseil du Trésor continuerait d’intervenir puisqu’il approuverait le au mandat du directeur général de négocier des conventions collectives et de répondre à des griefs (art. 15). Les employés auraient une situation qui se rapprocherait de celle des employés du secteur privé : ils n’auraient plus les droits des fonctionnaires fédéraux pour ce qui est de la négociation des tâches, des nominations, des évaluations et des griefs. Par ailleurs, l’Agence ne serait pas considérée comme une entreprise commerciale dont les employés bénéficieraient de la protection du Code du travail du Canada. Le directeur général pourrait demander à la Commission de la Fonction publique d’exercer certaines fonctions qu’elle offre aux ministères; la Commission pourrait alors recouvrer ses coûts (art. 14).

   C. Dispositions financières

Pour favoriser la souplesse financière, un seul crédit serait voté pour toute l’enveloppe affectée à l’exploitation de tous les parcs et lieux existants. La partie non utilisée de l’enveloppe pourrait être reportée à l’exercice suivant mais serait annulée à la fin de celui-ci (art. 19). On créerait un « Compte des nouveaux parcs et lieux historiques », parmi les comptes du Canada, pour développer les parcs ou lieux historiques existants, ou pour en acquérir de nouveaux. L’Agence serait en mesure de verser dans ce compte les revenus provenant des transactions financières, des cadeaux et des dons (art. 21). Une avance de 10 millions de dollars serait versée au Compte afin de lui donner plus de souplesse (art. 22).

Le financement de l’Agence proviendrait à 80 p. 100 environ du crédit parlementaire et à 20 p. 100 de ses revenus : cela n’est pas différent de la situation actuelle. Les crédits continueraient de servir à l’établissement et à la protection des parcs et lieux historiques, mais on s’attend que les utilisateurs des parcs paieraient pour les avantages personnels ou commerciaux qu’ils reçoivent.

Le directeur général devrait préparer chaque année un plan d’entreprise exposant les objectifs, les stratégies, le rendement attendu et les budgets prévus pour l’exercice qui vient et les quatre exercices suivants (art. 33). Chaque année, le ministre déposerait un résumé du plan devant le Parlement (art. 33). Selon un amendement à cet article proposé par le Comité du patrimoine canadien, le public pourrait, à sa demande, consulter le plan d’entreprise après le dépôt du résumé du plan.

Le vérificateur général serait tenu d’examiner chaque année les finances de l’Agence (art. 36). Des observateurs ont proposé, pour les agences financées en partie par les utilisateurs, que le vérificateur général examine la rentabilité de la prestation des services, afin de voir si les frais exigés correspondent au coût réel du service.

   D. Pouvoirs du ministre

Même si le directeur général aurait le pouvoir exclusif de gérer les ressources humaines de l’Agence (art. 13, par. 4(3)), cela ne serait pas le cas pour les autres aspects d’exploitation de l’Agence. Le ministre conserverait un droit de regard important (art. 4), ce qui pourrait rendre l’Agence plus responsable, mais limiterait certainement son indépendance.

Pour ce qui est de la responsabilité, l’Agence serait assimilable à un ministère. Le ministre continuerait de rendre des comptes au Parlement et aurait le pouvoir d’approuver la politique des parcs, les plans directeurs, le plan d’entreprise et le rapport annuel ainsi que de fixer les tarifs (art. 23 à 25, 28, et 31 à 34). Les prix fixés par le ministre ne devraient pas dépasser les coûts de la prestation des services (art. 23). Avant de fixer les prix, le ministre devrait consulter les parties intéressées et publier les changements éventuels dans la Gazette du Canada (art. 25).

   E. Modifications corrélatives

Le projet de loi modifierait une douzaine d’autres lois pour les rendre conformes à la Loi proposée. Ainsi, la Loi sur les fonds renouvelables permettrait l’exploitation des entreprises de l’Agence, tant que les dépenses n’excéderaient pas les revenus de plus de huit millions de dollars (art. 61).

COMMENTAIRE

Le projet de loi C-29, comme la plupart des nouvelles mesures législatives, est une loi habilitante. Même si l’information présentée à l’appui du projet de loi nous renseigne un peu, la plupart des détails n’apparaîtront qu’à l’étape de la mise en oeuvre. Les conflits de compétence ont miné les négociations devant mener à la création des nouveaux parcs. On espère que le regroupement des fonctions des parcs dans une seule agence facilitera les discussions futures avec les autres paliers de gouvernement.

La création proposée de l’Agence canadienne des parcs est le plus récent cas de transfert de fonctions fédérales d’un ministère à un organisme quasi indépendant. L’Agence canadienne d’inspection des aliments est un autre cas récent. Le législateur veut ainsi offrir des services plus efficaces dans un contexte de contraintes financières; malgré les intentions, la création et l’exploitation de la nouvelle Agence entraîneraient des dépenses. La création d’une nouvelle structure, à une époque où on compte mettre davantage les consommateurs à contribution pour les coûts de l’exploitation des parcs, pourrait mener à l’augmentation des prix exigés pour l’utilisation des parcs nationaux et la visite des lieux historiques. On manque de détails sur la transition, sur la façon dont l’Agence serait financée et exploitée, sur le coût administratif de son exploitation et sur la proportion de ce coût qui pourrait être défrayée par les usagers. Si l’Agence évalue mal les sommes que ces derniers sont prêts à payer pour ses services, sa capacité de fonctionner efficacement en serait grandement affectée. L’Agence compte recevoir 70 millions de dollars en frais d’utilisation durant l’exercice 1997-1998, et davantage les années suivantes.

Les dispositions exigeant des consultations publiques tous les deux ans et l’accès du public à des copies du plan d’entreprise semblent être des démarches très positives qui permettraient d’intégrer les utilisateurs dans le circuit de l’information. Comme les utilisateurs des parcs sont en fait des actionnaires plutôt que de simples intervenants, ce type de consultation prendrait un éclairage nouveau.

Parcs Canada a déjà tenté sans succès de céder à contrat certains de ses services. Selon le ministère lui-même, l’organisme conclu que la privatisation des services n’est pas une démarche populaire. On ne sait pas clairement, à partir du projet de loi, dans quelle mesure Parcs Canada dépendrait de l’impartition pour remplir son mandat. Le public en est venu à attendre des services de grande qualité dans les parcs nationaux; il reste à voir si l’État pourra les maintenir malgré sa tendance à vouloir fonctionner comme une entreprise privée.