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LS-321F

PROJET DE LOI C-43 :  LOI PORTANT CRÉATION
DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU
DU CANADA, ET MODIFIANT ET ABROGEANT
CERTAINES LOIS EN CONSÉQUENCE

 

Rédaction :
Luc Gagné, Margaret Young,
Division du droit et du gouvernment
Le 14 octobre 1998
Révisé le 26 novembre 1998


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-43

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 4 juin 1998 Première lecture : 8 décembre 1998
Deuxième lecture : 27 octobre 1998 Deuxième lecture : 10 février 1999
Rapport du comité : 25 novembre 1998 Rapport du comité : 18 mars 1999
Étape du rapport : 7 décembre 1998 Étape du rapport :  
Troisième lecture : 8 décembre 1998 Troisième lecture :  


Sanction royale :
Lois du Canada







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION

   A. La mission de l’Agence (article 5)

   B. Le rôle du ministre (articles 6-13; article 38)

   C. La structure organisationnelle de l’Agence (articles 14-29; 42-46)

   D. La compétence et le fonctionnement de l’Agence (articles 30-86)

      1. Le rôle du conseil de direction et du commissaire (articles 31-41)

      2. Plan d’entreprise (articles 47-49)

      3. Ressources humaines (articles 50-59)

      4. Utilisation des crédits et recettes (article 60)

      5. Contrats, ententes, actions en justice et propriété intellectuelle (articles 61-72)

      6. Immeubles de l’Agence (articles 73-86)

      7. Contrôle parlementaire (articles 87-89)

      8. Langues officielles (article 89.1)

   E. Autres dispositions

COMMENTAIRE

   A. Généralités

   B. Point de vue des syndicats

 


PROJET DE LOI C-43 :  LOI PORTANT CRÉATION
DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU
DU CANADA, ET MODIFIANT ET ABROGEANT
CERTAINES LOIS EN CONSÉQUENCE

CONTEXTE

Déposé à la Chambre des communes par le ministre du Revenu national le 4 juin 1998, le projet de loi C-43 y a été adopté en première lecture. Il créerait l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ci-après l’Agence) qui assumerait les fonctions administratives actuelles de Revenu Canada ayant trait à la fiscalité, au commerce et aux douanes. Les quelque 40 000 à 46 000 employés permanents et saisonniers du ministère passeraient à l’Agence(1). Le gouvernement a dévoilé son intention de créer l’Agence dans le discours du Trône de février 1996.

Le gouvernement a présenté plusieurs raisons pour justifier l’adoption du projet de loi. Il soutient que le mandat actuel de Revenu Canada pourrait être exécuté plus efficacement, surtout du point de vue ressources humaines, par une agence organisée et gérée selon des systèmes qui lui sont propres plutôt que selon ceux qui s’appliquent à l’ensemble de la fonction publique fédérale. D’après un document produit par Revenu Canada, l’Agence serait mieux placée qu’un ministère traditionnel pour répondre aux besoins de la clientèle, aux exigences des gouvernements provinciaux et territoriaux et à un milieu d’affaires qui évolue constamment(2).

En outre, l’Agence serait structurée de telle sorte qu’elle pourrait administrer une plus grande part du programme fiscal pour le compte des provinces. On croit que le fait d’avoir un seul organisme permettrait de réduire le chevauchement et le dédoublement entre le gouvernement fédéral et les autorités provinciales et territoriales et de réduire les coûts pour les entreprises(3), les contribuables et les gouvernements. Pour étayer cette affirmation, le gouvernement cite une étude indépendante, effectuée par le Forum des politiques publiques (ci-après le Forum), qui a estimé qu’une administration fiscale unique permettrait aux entreprises canadiennes d’économiser annuellement entre 116 et plus de 193 millions de dollars en frais d’observation de la loi et aux gouvernements provinciaux d’épargner entre 37,5 et 62,5 millions de dollars en frais d’administration(4). Le Forum a fait remarquer que les chiffres seraient plus élevés si le Québec était inclus dans les calculs, puisque les économies relativement aux frais d’observation de la loi varieraient alors entre 171 et 285 millions de dollars tandis que celles se rapportant aux frais d’administration iraient de 97 à 162 millions de dollars(5). Toutefois, le gouvernement du Québec a fait savoir qu’il ne voulait pas que l’Agence administre ses programmes.

DESCRIPTION

   A. La mission de l’Agence (article 5)

L’Agence aurait quatre fonctions principales :

  • fournir l’appui nécessaire à l’application et au contrôle d’application de la législation fiscale et douanière actuellement appliquée par Revenu Canada;

  • mettre en oeuvre toute entente conclue entre elle ou le gouvernement fédéral et le gouvernement d’une province ou un organisme public et portant sur l’exercice d’une activité, l’administration d’une taxe ou l’application d’un programme pour son compte;

  • mettre en oeuvre toute entente ou tout accord conclu entre elle et un ministère ou organisme fédéral et portant sur l’exercice d’une activité ou l’application d’un programme pour son compte;

  • mettre en oeuvre toute entente conclue entre le gouvernement fédéral et un gouvernement autochtone et portant sur l’administration d’une taxe ou d’un impôt pour son compte.

   B. Le rôle du ministre (articles 6-13; article 38)

Contrairement au projet initial(6), l’Agence serait placée sous la responsabilité du ministre du Revenu national, qui détiendrait un pouvoir potentiel important sur son fonctionnement. Le ministre pourrait donner à l’Agence, par l’intermédiaire du président du conseil, des instructions écrites sur les questions relevant des attributions du conseil qui, selon lui, touchent des questions d’ordre public ou seraient susceptibles de toucher notablement les finances publiques. Comme de telles instructions ne seraient pas des textes réglementaires au sens de la Loi sur les textes réglementaires(7), elles ne seraient probablement pas publiées. À quelques exceptions près, le ministre pourrait déléguer au commissaire ou à tout autre employé de l’Agence l’exercice de toutes ses attributions, et fixer les limites de cette délégation. De plus, il aurait le pouvoir de donner des instructions à toute personne à qui des attributions auraient été déléguées. Le ministre pourrait aussi faire enquête sur toute activité de l’Agence et aurait accès à tout renseignement qui relève d’elle.

L’article 38 du projet de loi obligerait le commissaire à renseigner régulièrement le ministre sur toutes les matières qui pourraient toucher les questions d’ordre public ou, de façon notable, celles des finances publiques et à lui donner tout autre renseignement que le ministre estime nécessaire. (Le commissaire ne serait pas tenu de renseigner le conseil de direction.) Le commissaire aiderait et conseillerait aussi le ministre dans l’exercice de ses autres attributions à titre de ministre.

   C. La structure organisationnelle de l’Agence (articles 14-29; 42-46)

L’Agence serait dirigée par un conseil de direction composé de quinze administrateurs : le président, le commissaire des douanes et du revenu (le commissaire) et 13 autres administrateurs, qui seraient tous seront nommés à titre amovible par le gouverneur en conseil (le Cabinet). Le président, le commissaire et deux administrateurs seront choisis par le fédéral. Dans une disposition unique conçue pour renforcer l’obligation redditionnelle envers les provinces, les onze autres administrateurs (un par province et un pour les territoires), bien que nommés par le gouverneur en conseil, seraient choisis parmi une liste de candidats proposés par le ministre responsable de l’administration fiscale dans chaque province et un des territoires (ou tout autre ministre désigné par la province ou le territoire). Si une province ne soumettait pas de liste de candidats répondant aux conditions de nomination dans les deux mois suivant la date de sanction de la Loi, ou dans les six mois suivant celle où le poste d’administrateur deviendrait vacant, le gouverneur en conseil pourrait nommer l’administrateur. (Ainsi, même si le Québec ne faisait pas partie de l’Agence, par exemple, le gouvernement fédéral pourrait nommer un administrateur pour aider le conseil dans les cas où les intérêts de la province seraient susceptibles d’être touchés par une décision.)

Pour être nommés, les administrateurs doivent, de l’avis du gouverneur en conseil, posséder l’expérience et la compétence nécessaires. De plus, ils doivent :

  • être citoyens canadiens ou résidents permanents;

  • ne pas être membres du Sénat ou de la Chambre des communes, ni d’une législature provinciale ou territoriale;

  • ne pas occuper un emploi à temps plein au sein d’une administration publique, fédérale, provinciale ou territoriale (le commissaire serait la seule exception).

Vu les deux dernières conditions, seuls des travailleurs du secteur privé pourraient être nommés au conseil de direction (exception faite du commissaire). Le gouvernement soutient que les administrateurs recrutés dans le secteur privé permettraient à l’Agence de régler selon des critères qui lui sont propres les questions liées à l’administration. Il croit aussi qu’un tel conseil examinerait avec un recul stratégique les activités de l’Agence et permettrait d’en administrer les ressources davantage comme le ferait une entreprise(8).

Les dispositions habituelles précisent que les administrateurs seraient tenus d’agir avec intégrité et de bonne foi au mieux des intérêts de l’Agence, compte tenu de sa mission, et avec le soin, la diligence et la compétence d’une personne prudente et avisée en pareilles circonstances. Ces obligations et les règles contre les conflits d’intérêts sont énoncées aux articles 42 à 46.

Le président du conseil serait nommé à titre amovible et à temps partiel pour un mandat maximal de cinq ans, renouvelable une fois pour au plus cinq ans. Il dirigerait les réunions du conseil et exercerait les autres attributions que lui conféreraient les règlements administratifs de l’Agence.

Le commissaire serait le chef de la direction de l’Agence. Il serait nommé à titre amovible pour un mandat maximal de cinq ans et pourrait recevoir un ou plusieurs nouveaux mandats d’au plus cinq ans chacun(9).

Les autres administrateurs seraient nommés à titre amovible et à temps partiel pour des mandats de trois ans au maximum qui pourraient être renouvelés deux fois. Le mandat des 11 administrateurs nommés sur proposition des provinces et territoires serait renouvelé si ceux-ci étaient de nouveau proposés. Les mandats des administrateurs autres que le président et le commissaire seraient échelonnés, dans la mesure du possible, pour que leur expiration au cours d’une même année touche au plus la moitié des administrateurs.

   D. La compétence et le fonctionnement de l’Agence (articles 30-86)

L’article 30 prévoit que l’Agence aurait compétence dans les domaines suivants :

  • ses grandes orientations administratives;

  • son organisation;

  • ses immeubles, au sens de l’article 73;

  • la gestion de son personnel, notamment la détermination de ses conditions d’emploi.

Par dérogation à la Loi sur la gestion des finances publiques(10), l’Agence ne serait pas assujettie aux règlements ou exigences du Conseil du Trésor ayant trait aux sujets énumérés ci-dessus, sauf dans la mesure où ils ont trait à la gestion financière.

      1. Le rôle du conseil de direction et du commissaire (articles 31-41)

Le conseil serait chargé de la supervision de la structure organisationnelle et de l’administration des questions relevant de l’Agence, y compris la préparation du plan d’entreprise (voir ci-après) et l’établissement de règlements administratifs. Il pourrait conseiller le ministre sur les questions liées à l’application et au contrôle d’application en général de la législation fiscale et douanière, mais il ne pourrait pas donner au commissaire ou à toute autre personne des instructions sur la façon d’exercer leurs fonctions. Il est donc évident que le projet de loi envisage une division stricte entre l’administration de l’Agence (qui relève du conseil de direction) et l’application de la législation fiscale et douanière (qui est du ressort du commissaire et des employés). Il sera intéressant de voir si un tel cloisonnement peut rester étanche.

Le conseil ne serait pas autorisé à prendre connaissance de renseignements qui révéleraient l’identité d’une personne physique ou morale et que l’Agence aurait obtenu en appliquant la Loi.

En sa qualité de premier dirigeant de l’Agence, le commissaire en assurerait la direction des affaires courantes, contrôlerait la gestion de son personnel et, sous réserve de certaines exceptions, pourrait déléguer toutes les attributions de son poste.

Conformément à l’objectif d’accroître la responsabilisation à l’endroit des provinces, le commissaire serait tenu de fournir à celles pour le compte desquelles l’Agence appliquerait un programme ou administrerait une taxe ou un impôt, les informations nécessaires à l’évaluation du programme, de la taxe ou de l’impôt. L’Agence serait aussi tenue de consulter les provinces au sujet de toute question qui les concerne. En outre, un rapport annuel serait envoyé aux provinces concernées et il y aurait annuellement une réunion avec les ministres provinciaux visés.

      2. Plan d’entreprise (articles 47-49)

L’Agence serait tenue de soumettre annuellement un plan d’entreprise au ministre en vue de sa recommandation au Conseil du Trésor, qui pourrait assortir son approbation de certaines modalités. Le paragraphe 47(2) précise ce que doit absolument renfermer le plan, notamment les stratégies de l’Agence concernant les ressources humaines et leur effet sur le total des salaires et des avantages. Une fois le plan approuvé par le Conseil du Trésor, l’Agence en soumettrait un résumé au ministre qui le déposerait au Parlement. Le résumé traiterait succinctement des matières visées au paragraphe 47(2) et énoncerait les principes sur lesquels reposerait le programme de dotation de l’Agence.

      3. Ressources humaines (articles 50-59)

Comme nous l’avons déjà indiqué, l’une des principales raisons données par le gouvernement pour justifier la création de l’Agence, c’est la nécessité de régler les problèmes de personnel qu’éprouve actuellement Revenu Canada. L’Agence serait un employeur distinct au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique(11) et elle aurait le pouvoir de concevoir, d’élaborer et de gérer son propre régime des ressources humaines sans avoir à se plier aux règles régissant actuellement la fonction publique administrée par le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique(12). Entre autres, l’Agence pourrait déterminer la classification, la formation et le perfectionnement, les conditions d’emploi, les horaires de travail, les congés, les récompenses, la reconnaissance du mérite, les mesures disciplinaires, les rétrogradations, les cessations d’emploi et les indemnités de déplacement.

L’Agence aurait compétence exclusive pour nommer le personnel qu’elle estime nécessaire à l’exercice de ses activités. Il faut souligner que ses employés seraient admissibles aux mutations, aux nominations et aux concours internes de la fonction publique au même titre que les fonctionnaires fédéraux qui ne sont pas au service d’un employeur distinct.

L’Agence élaborerait son propre programme de dotation en personnel pour régir les nominations et les recours offerts aux employés. Cela signifie notamment que la Commission des relations de travail dans la fonction publique n’aurait plus à trancher dans les cas de rétrogradation et de cessation d’emploi découlant de mesures non disciplinaires. La Commission de la fonction publique conserverait toutefois un droit de contrôle. Elle aurait le pouvoir de faire rapport à l’Agence, au vérificateur général et au Conseil du Trésor, au sujet de la conformité du programme de dotation de l’Agence avec les principes énoncés dans le résumé de son plan d’entreprise et de vérifier périodiquement la compatibilité des principes du programme de dotation avec ceux régissant la dotation sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. Il serait expressément interdit de traiter des questions de dotation dans les conventions collectives négociées.

À l’heure actuelle, le Conseil du Trésor négocie les conventions collectives pour tous les ministères; l’Agence, elle, serait la seule habilitée à conclure des conventions collectives avec les agents négociateurs de ses employés. Malgré ce pouvoir, elle devrait préalablement consulter le Conseil du Trésor au sujet de son plan de ressources humaines, notamment en ce qui a trait au total des augmentations salariales et des avantages des employés.

Après sa troisième année complète de fonctionnement et périodiquement par la suite, l’Agence serait tenue de faire préparer par un tiers indépendant une évaluation des recours qu’elle offre à ses travailleurs et d’inclure le résumé de cette évaluation dans son rapport d’activités.

      4. Utilisation des crédits et recettes (article 60)

L’Agence aurait un cycle budgétaire de deux ans. Autrement dit, le solde des crédits attribués par le Parlement pour un exercice donné ne serait annulé qu’à la fin de l’exercice suivant, quoique le Parlement pourrait prévoir une exception à la règle. Le cycle de deux ans est censé donner aux gestionnaires une marge de manoeuvre suffisante pour faire les dépenses appropriées en temps opportun(13).

L’Agence serait autorisée à garder toutes les recettes d’exploitation visées aux paragraphes 60(2) et (3) du projet de loi, notamment les recettes provenant de ses biens immobiliers, des frais d’utilisation et des contrats. Bien entendu, les taxes, impôts, pénalités et intérêts perçus sous le régime de la législation fiscale et douanière ne constituraient pas des recettes d’exploitation.

      5. Contrats, ententes, actions en justice et propriété intellectuelle (articles 61-72)

L’Agence serait autorisée à conclure certains types de contrats, d’ententes et d’accords avec des gouvernements et des organisations, y compris le gouvernement fédéral. Ainsi, l’Agence pourrait étendre à d’autres taxes les activités de perception dont Revenu Canada se charge actuellement pour le compte des provinces. Les ententes au Canada sous le régime de certaines dispositions législatives et toute entente internationale lui seraient expressément interdites.

Par dérogation à la norme imposée aux ministères fédéraux, l’Agence pourrait se procurer des biens et services à l’extérieur de l’administration publique fédérale, sauf pour les services juridiques puisque ce serait le procureur général du Canada qui la conseillerait et qui se chargerait de ses intérêts dans tout litige où elle serait partie. L’Agence pourrait engager des avocats ou retenir les services de conseillers juridiques de l’extérieur, à condition, toutefois, d’avoir obtenu l’approbation du gouverneur en conseil.

L’Agence posséderait tous les droits d’utilisation ou d’aliénation des titres de propriété intellectuelle qu’elle détient ou dont elle est à l’origine. Les inventions de ses employés lui seraient dévolues.

      6. Immeubles de l’Agence (articles 73-86)

Le projet de loi prévoit un régime détaillé pour la propriété, l’acquisition et l’aliénation des immeubles. Comme l’Agence aurait la gestion de tous ses immeubles, elle ne serait pas soumise à la Loi sur les immeubles fédéraux(14), exception faite de certaines dispositions qui s’appliqueraient tout de même. L’Agence serait expressément exclue du champ d’application de certaines autres lois fédérales régissant les immeubles; le gouvernement espère ainsi raccourcir les délais de réponse et permettre une utilisation plus efficace des ressources pour le service à la clientèle(15).

      7. Contrôle parlementaire (articles 87-89)

En qualité de vérificateur de l’Agence, le vérificateur général du Canada examinerait chaque année les états financiers de celle-ci et préparerait périodiquement une évaluation d’autres sujets la concernant. Les rapports annuels, renfermant les éléments prescrits, seraient remis au ministre du Revenu national qui les déposerait alors devant les deux chambres du Parlement. Dans les cinq années suivant la création de l’Agence, un comité parlementaire (de la Chambre, du Sénat ou mixte) procéderait à un examen complet et à une évaluation des dispositions et de l’application de la Loi, et en ferait ensuite rapport au Parlement.

      8. Langues officielles (article 89.1)

La Loi sur les langues officielles s’appliquerait à l’Agence. Cette dernière devrait aussi s’assurer que les services fournis par d’autres en son nom seraient offerts dans l’une ou l’autre des langues officielles lorsque la Loi l’exige.

   E. Autres dispositions

Les articles 90 à 105 sont des dispositions transitoires qui, pour la plupart, concernent le transfert des employés de Revenu Canada à l’Agence. Tous les postes au ministère du Revenu national seraient transférés à l’Agence et tous leurs titulaires actuels seraient réputés avoir accepté l’offre d’emploi automatique de l’Agence sauf si, dans les 60 jours, ils ont avisé l’Agence par écrit de leur refus. En cas de refus, certaines dispositions de la Directive sur le réaménagement des effectifs s’appliqueraient, y compris les dispositions d’une convention collective qui remplacent la Directive.

Les articles 106 à 185.1 sont des dispositions corrélatives ou conditionnelles. L’article 186 prévoit que les expressions désignant le sous-ministre du Revenu national ou le ministère du Revenu national voudraient respectivement mention du commissaire des douanes et du revenu ou de l’Agence des douanes et du revenu du Canada dans toutes les lois fédérales. L’article 187 abrogerait la Loi sur le ministère du Revenu national(16). Enfin, l’article 188 est la disposition habituelle qui prévoit l’entrée en vigueur de la Loi ou de telle disposition à la date ou aux dates fixées par décret.

COMMENTAIRE

   A. Généralités

Le gouvernement a insisté sur les difficultés qu’éprouvait Revenu Canada à recruter des spécialistes compétents, notamment des informaticiens et des vérificateurs, à cause de la vive concurrence sur le marché de l’emploi. L’un des objectifs du nouveau régime proposé par le projet de loi est donc de permettre à l’Agence d’attirer, de former et de retenir les experts dont elle aura besoin pour profiter de nouvelles possibilités(17). Parce que l’Agence se verrait conférer le statut d’employeur distinct, elle pourrait se doter de nouveaux systèmes de classification(18), de nouvelles échelles salariales et de processus de dotation plus rapides qui pourraient concurrencer ceux du secteur privé(19).

Le gouvernement croit que, grâce à sa nouvelle structure, l’Agence pourrait négocier des conventions collectives selon ses priorités et ses besoins de façon à mieux servir la population. L’Agence continuerait de tabler sur les technologies de l’information dans les principaux services à la clientèle et elle devrait pouvoir réagir rapidement et avec souplesse aux besoins de ses clients. On soutient donc que l’Agence aurait besoin, pour la gestion de ses ressources humaines, d’un régime cadre plus sensible et plus souple que celui de la fonction publique, conçu expressément pour se doter d’un effectif apte à fournir des services électroniques(20), sans être gêné par les règles de la fonction publique qu’on trouve rigides(21).

Il est aussi évident que les salaires des fonctionnaires fédéraux dans les secteurs techniques dont Revenu Canada a besoin sont très inférieurs à ceux pratiqués dans le secteur privé. Le gouvernement a choisi de créer une structure au sein de laquelle il serait plus facile d’offrir les salaires qui s’imposent pour recruter et retenir les employés essentiels. La question qui se pose donc est celle de savoir s’il serait possible d’avoir des employés aux compétences techniques identiques et occupant le même type de poste mais dont le traitement serait différent parce que l’un travaillerait à l’Agence et l’autre, dans un ministère.

   B. Point de vue des syndicats

Certains des syndicats représentant des employés de Revenu Canada ont avancé des arguments contre le projet de loi. Le Syndicat des employé(e)s de l’impôt a déclaré que l’Agence serait une menace pour les Canadiens, car, si elle devenait l’unique percepteur des taxes et impôts au Canada comme l’envisage le gouvernement, elle concentrerait au même endroit plus de renseignements sur les contribuables que jamais auparavant, décuplant ainsi le risque de communication sans autorisation de renseignements personnels(22). Soulignons toutefois que les règles de confidentialité énoncées dans la législation fiscale et douanière actuelle continueraient de s’appliquer à l’Agence et que son conseil de direction n’aurait pas accès aux renseignements confidentiels concernant les Canadiens.

L’Institut professionnel de la fonction publique a soutenu que les employés de l’Agence allaient perdre des droits importants dont ils jouissent comme fonctionnaires et qu’ils seraient soumis aux décisions unilatérales des gestionnaires. L’Institut affirme aussi qu’il est impossible de justifier la création de l’Agence en prétendant qu’elle bénéficiera aux Canadiens ou qu’elle permettra d’économiser, surtout s’il fallait que les provinces soient réticentes à y adhérer(23).

Mais les syndicats s’inquiètent surtout pour la sécurité d’emploi et les conditions de travail. Il est entendu que leur demande de sécurité d’emploi permanente a été rejetée et qu’on leur a plutôt accordé une garantie d’emploi de deux ans(24).

 


(1) Dans la version originale du projet de loi, il était dit que le siège social de l’Agence devrait être situé dans la Région de la Capitale nationale. Le Comité a modifié le texte, qui indique maintenant que le siège social pourrait se trouver n’importe où au Canada, au choix du gouverneur en conseil.

(2) Revenu Canada, Document d’information, Proposition concernant l’Agence, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-1000-f.html.

(3) On soutient que l’obligation de fournir les mêmes renseignements commerciaux de base à plusieurs administrations fiscales différentes impose un lourd fardeau à la plupart des entreprises au Canada. L’Agence faciliterait une meilleure intégration des systèmes d’information et de déclaration, ce qui améliorerait les perspectives d’une déclaration unique et allégerait le fardeau administratif que doivent assumer les petites et moyennes entreprises : Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Intégrer les systèmes d’information et simplifier les exigences en matière de déclaration, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(4) Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Permettre une déclaration unique pour des taxes semblables, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-1000-f.html.

(5) Ibid.

(6) Au stade de la planification, il était prévu que l’agence n’aurait des liens administratifs avec aucun des gouvernements. Voir Revenu Canada, Agence des douanes et du revenu du Canada ? Rapport d’étape, avril 1997.

(7) L.R.C. 1985, ch. S-22.

(8) Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Une approche axée sur les clients, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(9) Le gouverneur en conseil pourrait aussi nommer un commissaire adjoint aux mêmes conditions (par. 26(1)).

(10) L.R.C. 1985, ch. F-11.

(11) L.R.C. 1985, ch. P-35. Aux termes de l’article 2 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, employeur distinct s’entend de tout secteur de l’administration publique fédérale spécifié à la partie II de l’annexe I de la Loi. Par exemple, l’Agence canadienne d’inspection des aliments et le Bureau de l’enquêteur correctionnel sont des employeurs distincts.

(12) Ce pouvoir est considéré comme un élément important qui permettrait à l’Agence d’être plus efficace : Revenu Canada, Document d’information, Ressources humaines et mesures pour aider les employés à vivre la transition : Pouvoirs de gestion des ressources humaines, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-5000-f.html.

(13) Revenu Canada, Document d’information, Finances et administration : Finances, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-6000-f.html.

(14) L.R. 1991, ch. 50.

(15) Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Gestion des biens immobiliers, du matériel et des contrats adaptée aux besoins, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(16) L.R.C. 1985, ch. N-16.

(17) Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Attirer et retenir les employés clés, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(18) Pour justifier le pouvoir de créer un nouveau régime de classification, le gouvernement signale que dans la structure actuelle, les 46 000 employés de Revenu Canada sont répartis en 32 groupes de classification différents et que la démarche pour réaffecter des employés à des secteurs où la demande de service augmente est lourde et fastidieuse : Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Réaffecter les ressources humaines pour améliorer les délais de réponse et la qualité du service, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(19) À Revenu Canada, il faut entre six et douze mois pour mener à terme une démarche de dotation : Revenu Canada, Document d’information, Analyse de rentabilisation de l’Agence : Attirer et retenir les employés clés, accessible à l’adresse Internet : http://www.ccra-adrc.gc.ca/agency/toc-2000-f.html.

(20) Il est prévu, entre autres, de créer un système protégé sur Internet, qui permettrait à l’Agence d’offrir une gamme de services électroniques tout en s’assurant que les lois fiscales, commerciales et douanières sont correctement appliquées dans le secteur du cybercommerce : Ibid.

(21) Il convient de signaler que le gouvernement tente depuis des années de réformer ses politiques en ressources humaines mais sans grand succès jusqu’à présent.

(22) The Financial Post, 12 septembre 1998, p. 22.

(23) Ottawa Citizen, 12 mai 1998, p. A1.

(24) Vancouver Sun, 23 mai 1998, p. A13.