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LS-336F

 

PROJET DE LOI S-26 : LOI SUR LA SANCTION ROYALE

 

Rédaction : 
James R. Robertson
Division du droit et du gouvernement
Le 18 mars 1999


HISTORIQUE DU PROJET DE LOI S-26

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture :   Première lecture : 10 mars 1999
Deuxième lecture :   Deuxième lecture ::  
Rapport du comité :   Rapport du comité :  
Étape du rapport :   Étape du rapport :  
Troisième lecture :   Troisième lecture :  


Sanction royale :
Lois du Canada







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

   A. Propositions canadiennes de réforme de la procédure d’octroi de la sanction royale

      1. Motion d’interpellation au Sénat (1983)
      2. Comité McGrath (1985)
      3. Rapport du Comité sénatorial permanent du Règlement et de la procédure (1985)
      4. Projet de loi S-19, Loi sur la sanction royale (1988)
      5. Comité permanent de la gestion de la Chambre des communes (1993)

   B. Procédure d’octroi de la sanction royale dans d’autres pays du Commonwealth

DESCRIPTION ET ANALYSE

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI S-26 : LOI SUR LA SANCTION ROYALE

CONTEXTE

Le projet de loi S-26 a été déposé au Sénat par le sénateur John Lynch-Staunton, leader de l’opposition au Sénat, le 10 mars 1999.

Le sénateur Lynch-Staunton avait déjà déposé le projet de loi S-15 le 2 avril 1998. Ce projet de loi avait été adopté en deuxième lecture et renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles le 9 juin 1998; puis, le Comité avait fait rapport à ce sujet avec des amendements le 18 juin 1998. Le projet de loi a toutefois été retiré le 8 décembre 1998(1). Le projet de loi S-26 est pratiquement identique au projet de loi S-15 modifié par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il a d’ailleurs fait l’objet d’un rappel au Règlement parce qu’on se demandait s’il était recevable étant donné qu’il était à peu près pareil au projet de loi S-15 et qu’il contrevenait donc au paragraphe 63(1) du Règlement du Sénat. Le Président a toutefois statué le 16 mars 1999 que le projet de loi S-26 était recevable puisque le premier projet de loi avait été retiré avec la permission du Sénat.

Le projet de loi S-26 offrirait une solution de rechange à la procédure officielle d’octroi de la sanction royale actuellement en usage au Parlement canadien. Il permettrait que la sanction royale soit signifiée par une déclaration écrite un peu comme cela se fait en Australie depuis nombre d’années. Il est à peu près identique au projet de loi S-19 déposé en juillet 1988 par le sénateur Lowell Murray, alors leader du gouvernement au Sénat.

La sanction royale est la dernière étape que doit franchir une loi du Parlement avant d’entrer en vigueur. Elle est octroyée par le souverain ou au nom de celui-ci aux projets de loi après qu’ils ont été adoptés sous leur forme définitive à la fois par le Sénat et la Chambre des communes. Selon le commentaire 753 de la sixième édition de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne : « Dès lors que des projets de loi d’intérêt public ou privé ont été adoptés sous leur forme définitive par le Sénat et la Chambre des communes, ils n’attendent plus que l’annonce au Parlement de la sanction royale, acte de leur édiction ».

L’article 17 de la Loi constitutionnelle de 1867 se lit comme suit :

Il y aura pour le Canada, un parlement qui sera composé de la Reine, d’une chambre haute appelée le Sénat, et de la Chambre des Communes.

Les articles 55 à 67 de la Loi constitutionnelle de 1867 traitent de l’octroi de la sanction royale par le gouverneur général et des circonstances dans lesquelles elle peut être désavouée ou refusée. Ces articles ne précisent pas la procédure à suivre.

Au Canada, une cérémonie officielle de sanction royale se déroule dans l’enceinte du Sénat après convocation de la Chambre des communes. Au nom de la reine, le gouverneur général ou son suppléant accorde la sanction royale aux projets de loi qui lui sont présentés. En règle générale, l’usage qui semble établi depuis 1885 prévoit que la sanction royale est accordée par un juge de la Cour suprême du Canada agissant en qualité de suppléant du gouverneur général. Les Lettres patentes constituant la charge de gouverneur général autorisent la nomination de suppléants tout en précisant que chacun d’entre eux doit « exercer, durant le plaisir de Notre gouverneur général, les pouvoirs, attributions et fonctions de Notre gouverneur général que celui-ci jugera nécessaire ou opportun [de lui] assigner ».

La cérémonie de la sanction royale remonte à l’époque où, en Grande-Bretagne, les projets de loi étaient soumis par les Lords et les Communes à l’approbation du souverain. Le rassemblement des trois pouvoirs dans le cadre d’une cérémonie officielle faisait partie intégrante du processus et confirmait leurs liens et leurs rôles respectifs.

La plupart des pays dotés d’un système parlementaire de type britannique ont abandonné la cérémonie de la sanction royale. Le Canada semble être le seul pays du Commonwealth à l’avoir conservée. Dès 1958, on disait que « la cérémonie canadienne semblait être celle qui ressemblait le plus à l’originale »(2).

Il y a eu plusieurs propositions de réforme de la procédure d’octroi de la sanction royale depuis une quinzaine d’années. Le lecteur trouvera ci-après une description des plus importantes ainsi qu’un rappel de l’évolution de la sanction royale dans d’autres pays du Commonwealth.

   A. Propositions canadiennes de réforme de la procédure d’octroi de la sanction royale

      1. Motion d’interpellation au Sénat (1983)

Le 28 avril 1983, le sénateur Royce Frith, alors leader adjoint du gouvernement, dépose l’avis de motion suivant : « Qu’il attirera l’attention du Sénat sur l’opportunité d’établir d’autres procédures d’octroi de la sanction royale aux projets de loi ». Dans le long discours qu’il prononce le 10 mai 1983, le sénateur se demande s’il convient de simplifier la procédure et, dans l’affirmative, quelle forme elle devrait revêtir et comment il faudrait s’y prendre pour la mettre en oeuvre. Il passe en revue l’histoire de la sanction royale en Grande-Bretagne ainsi que la procédure suivie au Parlement canadien. Il expose les arguments en faveur de l’établissement de procédures de rechange : les précédents dans d’autres pays; l’avantage qu’il y aurait à ne pas devoir réunir les deux chambres; et l’avantage qu’il y aurait à exprimer la sanction royale par écrit au moyen, par exemple, d’une proclamation. Il passe également en revue les dimensions juridiques et constitutionnelles de la question. Le débat sur la motion est cependant ajourné.

      2. Comité McGrath (1985)

Dans son deuxième rapport, le Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes (communément appelé le comité McGrath, du nom de son président, l’hon. James A. McGrath) traite de la question de la sanction royale. Il note que, dans la première session de la 32e législature, la cérémonie de sanction royale a absorbé plus que l’équivalent d’un jour de séance tout en interrompant la conduite des affaires de la Chambre. Il observe que les Parlements du Royaume-Uni et d’autres pays du Commonwealth ont abandonné la procédure utilisée au Canada et il exprime une opinion favorable sur la procédure australienne. Il recommande :

Que le Parlement du Canada adopte la formule selon laquelle la sanction royale est donnée par message écrit et que le gouvernement entreprenne les discussions nécessaires à cette fin. Par contre, on devrait également prévoir la possibilité de recourir à la pratique actuelle si c’est là le bon vouloir de Son Excellence ou le conseil de ses ministres.

      3. Rapport du Comité sénatorial permanent du Règlement et de la procédure (1985)

Dans son quatrième rapport déposé le 6 novembre 1985, le Comité sénatorial permanent du Règlement et de la procédure note qu’il a beaucoup été question au Sénat et à la Chambre des communes de modifications pouvant être apportées à la cérémonie de la sanction royale et que la question a été soulevée plusieurs fois au Sénat au cours des dernières années, pendant la période de questions. Après avoir tenu une série de réunions à ce sujet entre mai et octobre 1985, le Comité formule les recommandations suivantes :

Que la présente formule traditionnelle de la sanction royale soit retenue et qu’elle soit utilisée :

  1. à la demande du Gouverneur général ou de l’une ou l’autre des Chambres du Parlement
  2. au moins une fois par session, par exemple à la prorogation d’une session.

Qu’en surcroît, une procédure simplifiée qui respecterait les principes suivants soit établie :

  1. que la procédure suivie engage et le Sénat et la Chambre des communes à y participer,
  2. qu’elle soit publique,

  3. qu’après chaque cérémonie l’on fasse rapport aux deux Chambres du Parlement sur la sanction royale déclarée.

Que des représentants du Sénat rencontrent des représentants de la Chambre des communes pour rédiger une résolution en vue de la préparation d’une adresse qui doit être présentée conjointement par les deux Chambres à Son Excellence le Gouverneur général la priant de bien vouloir approuver certaines modifications à la cérémonie de la sanction royale décrites dans ce rapport.

      4. Projet de loi S-19, Loi sur la sanction royale (1988)

En juillet 1988, le sénateur Lowell Murray, alors leader du gouvernement au Sénat, dépose le projet de loi S-19 concernant l’octroi de la sanction royale par le gouverneur général au nom de la reine aux projets de loi adoptés par les deux chambres du Parlement. Ce projet de loi propose une solution de rechange à la procédure officielle en vigueur grâce à l’établissement d’un système similaire à celui en usage en Australie depuis nombre d’années. Le projet de loi tenait compte de beaucoup — mais non de la totalité — des recommandations du Comité sénatorial permanent du Règlement et de la procédure. Débattu plusieurs fois, le projet de loi n’avait pas encore été adopté en deuxième lecture lorsque le Parlement a été dissous le 1er octobre 1988 et il n’a pas été déposé de nouveau au cours de la législature suivante.

      5. Comité permanent de la gestion de la Chambre des communes (1993)

En 1993, le Comité permanent de la gestion de la Chambre des communes dépose un rapport sur la réforme parlementaire où il est question, entre autres, de la sanction royale. Le Comité signale que la procédure en usage prend beaucoup de temps, interrompt les travaux de la Chambre et, lorsqu’une des deux chambres n’est pas en session, exige le rappel de celle-ci. Il croit qu’il convient de donner suite à la recommandation du comité McGrath et il la reprend d’ailleurs à peu près telle quelle dans son rapport :

que la déclaration de la sanction royale par message écrit soit adoptée au Canada, et que le gouvernement entreprenne les discussions nécessaires pour procéder à ce changement. On devrait pouvoir continuer à utiliser la procédure actuelle lorsque Son Excellence le souhaite, sur les conseils de Ses Ministres.

   B. Procédure d’octroi de la sanction royale dans d’autres pays du Commonwealth

Il convient également d’examiner l’évolution de la sanction royale dans d’autres pays, notamment ceux de tradition parlementaire britannique.

Au Royaume-Uni, la sanction royale a été octroyée par le souverain en personne jusqu’en 1541. Cette année-là, pour épargner au roi l’indignité d’octroyer en personne la sanction royale au Bill of Attainder (décret de confiscation de biens et de mort civile), qui châtiait la reine Catherine pour haute trahison, la tâche fut confiée pour la première fois à une commission royale. La nomination de lords commissaires chargés d’octroyer la sanction royale au nom du souverain est devenue ensuite de plus en plus courante. La dernière fois que le monarque en personne a octroyé la sanction royale en Grande-Bretagne remonte au 12 août 1854, lorsque la reine Victoria a personnellement donné la sanction royale à plusieurs projets de loi avant de proroger le Parlement.

Dans les années 60, il est survenu au Parlement britannique deux incidents qui ont conduit à l’abolition de la cérémonie de la sanction royale. En 1960 et de nouveau en 1965, il est arrivé que le gentilhomme huissier de la verge noire frappe à la porte de la Chambre des communes alors qu’elle était engagée dans un débat passionné. Un certain nombre de députés ont alors protesté haut et fort et refusé d’assister à la sanction royale. En 1965, ils ont poursuivi le débat même après que le Président eut quitté le fauteuil.

D’où le Royal Assent Act of 1967, qui prévoit deux procédures d’octroi de la sanction royale. Il confirme la procédure traditionnelle suivant laquelle trois lords commissaires octroient la sanction royale en présence des deux chambres à la Chambre des lords dans les formes en usage avant l’adoption de la loi. Mais il stipule que la sanction royale peut être signifiée à chacune des chambres du Parlement, siégeant séparément, par le Président de la chambre ou, en son absence, par son suppléant. La sanction royale est alors octroyée par les lords commissaires au nom de Sa Majesté (d’ordinaire à Buckingham Palace) et chacune des chambres en est informée par le Président ou le Président suppléant à un moment opportun pendant la séance. À la Chambre des lords, la sanction royale peut être signifiée à n’importe quel moment opportun durant une séance. À la Chambre des communes, la sanction royale peut être signifiée immédiatement après la prière, avant l’étude des affaires d’intérêt public, entre les questions à l’ordre du jour, entre les discours dans un débat et entre les amendements au moment de l’examen d’un projet de loi. La Chambre des communes a également statué qu’elle ne s’ajourne qu’après l’octroi de la sanction royale. La procédure traditionnelle est suivie lorsque les commissaires sont chargés par lettres patentes du souverain de proroger le Parlement et d’octroyer la sanction royale aux projets de loi restants.

Bien que la procédure d’octroi de la sanction royale en usage au Parlement australien soit semblable à celle en usage en Grande-Bretagne et au Canada, elle n’a pas été suivie depuis les débuts du Commonwealth australien. L’usage veut que la chambre qui a initié le projet de loi en transmette des copies à la résidence du gouverneur général. Après que le gouverneur général y a apposé sa signature, la sanction est signifiée par un message au Président du Sénat et au Président de la Chambre des communes, qui en informent chacun leur chambre.

En Nouvelle-Zélande, le gouverneur général ne se déplace pas pour proroger le Parlement ou octroyer la sanction royale aux projets de loi depuis 1875. Les projets de loi lui sont plutôt présentés en deux copies à son bureau et il les signe avant de les retourner à la Chambre avec un message l’informant qu’il a sanctionné les projets de loi au nom du souverain. Le Président fait lecture du message s’il le reçoit pendant que la Chambre siège.

DESCRIPTION ET ANALYSE

L’article 1 donne le titre abrégé du projet de loi — Loi sur la sanction royale.

Comme l’octroi de la sanction royale est une prérogative royale, la marche à suivre pour la modifier a déjà fait l’objet de discussions. En 1988, par exemple, à l’occasion de l’étude du projet de loi S-19, on a estimé qu’il conviendrait de faire adopter le projet de loi par les deux chambres du Parlement et de le soumettre par la suite au gouverneur général pour la sanction royale.

L’article 2 prévoit que l’octroi de la sanction royale par le gouverneur général au nom de Sa Majesté aux projets de loi adoptés par le Sénat et la Chambre des communes pourrait s’effectuer comme à l’heure actuelle par la cérémonie de la sanction royale dans l’enceinte du Sénat ou par une déclaration écrite. L’alinéa 2b) prévoit toutefois l’utilisation de la procédure officielle de sanction royale dans le cas du premier projet de loi de crédits présenté lors d’une session. La procédure pour ces projets de loi est légèrement différente : le Président des Communes rappelle alors que c’est la Chambre qui accorde les crédits et qu’elle joue le rôle prépondérant dans leur approbation. Le fait qu’on serait ainsi tenu d’avoir recours à la procédure habituelle pour ce premier projet de loi de crédits permettrait également de garantir l’utilisation occasionnelle de cette cérémonie officielle.

L’article 3 prévoit que la procédure traditionnelle d’octroi de la sanction royale devrait avoir lieu au moins une fois par année civile. Comme il est arrivé souvent au cours des dernières années qu’une session parlementaire dure de deux à trois ans, la cérémonie de la sanction royale risquerait de ne pas avoir lieu pendant longtemps sans cette disposition.

L’article 4 propose que la déclaration écrite de sanction royale devrait être présentée devant le Sénat et la Chambre des communes par son Président ou son suppléant, et ce, dans aucun délai précis après la signature de la déclaration.

L’article 5 prévoit que, lorsque la sanction royale serait octroyée par déclaration écrite, la déclaration porterait la date du jour où elle a été présentée devant les deux chambres du Parlement; si cette déclaration était présentée dans chaque chambre à des jours différents, la sanction royale serait réputée avoir été donnée le dernier de ces deux jours. Cette disposition serait particulièrement importante dans le cas des projets de loi qui entrent en vigueur au moment de l’octroi de la sanction royale ou dans un délai lié à la date de la sanction royale. Cette disposition pourrait poser des difficultés lorsqu’une des chambres ne siège pas comme c’est souvent le cas avant Noël et pendant l’été, lorsque la Chambre des communes s’ajourne avant le Sénat. Le gouvernement aurait normalement intérêt à ce que les deux chambres siègent de manière qu’il soit possible de leur présenter la déclaration; néanmoins, il vaudrait peut-être mieux prévoir la marche à suivre en pareille éventualité dans le Règlement du Sénat ou dans le Règlement de la Chambre.

À l’heure actuelle, il semble que la sanction royale soit octroyée au moment où le gouverneur général ou son suppléant exprime son assentiment en inclinant la tête. De même, aux termes du projet de loi, la sanction royale serait apparemment octroyée au moment où la déclaration écrite serait signée, non au moment où elle serait présentée. De toute évidence, il importe que la sanction royale soit formellement signifiée aux deux chambres. Il serait sans doute plus efficace, moins coûteux et plus rapide en cas d’urgence de déposer une déclaration écrite auprès du Greffier de l’une et l’autre chambre, mais il faudrait qu’elle soit présentée d’une façon ou d’une autre aux parlementaires.

L’article 6 prévoit que la déclaration écrite de la sanction royale ne serait pas un texte réglementaire au sens de la Loi sur les textes réglementaires. Tout ce que la définition intentionnellement large de « textes réglementaires » englobe est sujet à l’examen parlementaire ainsi qu’à d’autres procédures. La sanction royale sous forme de déclaration écrite n’est évidemment pas destinée à un tel traitement.

L’article 7 prévoit qu’aucune sanction royale ne serait invalide du fait qu’on n’a pas respecté l’article 3. Cette disposition vise à dissiper tout doute concernant la validité d’une sanction royale octroyée par déclaration écrite au cours d’une année où, pour une raison ou une autre, la procédure formelle n’aurait pas eu lieu. Par exemple, il se pourrait qu’une cérémonie traditionnelle n’ait pas été nécessaire ou qu’une prorogation ou la dissolution soit intervenue avant qu’elle n’ait lieu. On s’est toutefois inquiété que cette disposition soit invoquée pour éviter complètement de recourir à la cérémonie traditionnelle.

COMMENTAIRE

L’insatisfaction concernant l’actuelle procédure d’octroi de la sanction royale couve depuis plusieurs années. L’assistance à cette cérémonie est souvent clairsemée et elle peut avoir lieu à des moments qui ne conviennent pas aux sénateurs, aux députés et au gouverneur général et à ses suppléants. La délégation récente de juges de la Cour suprême du Canada à cette cérémonie pose également des difficultés : non seulement les juges sont-ils déjà très occupés, mais il y a aussi le fait qu’ils peuvent être ultérieurement appelés à rendre des décisions sur des contestations de ces projets de loi qu’ils ont sanctionnés au nom du souverain. De plus, en raison des travaux de rénovation de l’édifice du Centre, il pourra arriver au cours des prochaines années que les deux chambres ne siègent pas dans le même immeuble, ce qui compliquera encore davantage la tenue des cérémonies de sanction royale. Le projet de loi S-26 vise à offrir une solution de rechange à la procédure habituelle — une solution plus simple, plus expéditive et plus pratique.

À l’encontre de ces arguments, on fait remarquer que la cérémonie de la sanction royale constitue une composante importante et significative de l’héritage parlementaire canadien. Comme il s’agit d’une des rares occasions où les trois éléments du Parlement se rassemblent, elle rappelle aux parlementaires et au grand public que les lois ne sont édictées qu’une fois approuvées par le Sénat, la Chambre et le gouverneur général. Selon certains, l’élimination de la cérémonie diminuerait encore plus l’importance du Sénat et celle du gouverneur général. Les tenants de ce point de vue soutiennent que ce n’est pas parce que d’autres pays ont laissé tomber la cérémonie que le Canada doit les imiter.

Il a été question du projet de loi S-15 dans les médias, mais il ne semble pas avoir suscité jusqu’ici de grand débat public. La Ligue monarchiste du Canada a comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pendant son examen du projet de loi. Elle s’est opposée fermement au projet de loi, soutenant que la cérémonie de la sanction royale est importante sur les plans constitutionnel et symbolique et qu’elle ne doit pas être abandonnée, que la procédure de rechange proposée dans le projet de loi risque fort de devenir la norme et qu’il y a d’autres moyens de régler les problèmes qui se posent.

La Constitution du Canada ne fixe pas de procédure à suivre pour l’octroi de la sanction royale et, comme il est noté ci-dessus, la plupart des autres gouvernements parlementaires se dispensent de la cérémonie. Les partisans du projet de loi S-26 et de ses prédécesseurs signalent cependant que le projet de loi n’a pas pour but d’abolir la cérémonie de la sanction royale. Le projet de loi prévoit en effet qu’il devrait y avoir au minimum une cérémonie traditionnelle à l’occasion du premier projet de loi de crédits de chaque session et au moins une fois par année. Il a été proposé qu’une cérémonie de sanction royale ait lieu dans le cas des projets de loi importants comme les projets de modification de la Constitution ou les projets de loi d’importance historique. Selon le sénateur Lynch-Staunton, parrain du projet de loi, si la cérémonie de la sanction royale avait lieu moins souvent, peut-être obtiendrait-elle plus de respect et revêtirait-elle plus d’importance qu’à l’heure actuelle.

D’autres solutions que celles proposées dans le projet de loi C-26 ont été mises de l’avant pour régler les problèmes que pose la procédure actuelle. Certains parlementaires estiment qu’il est essentiel que le gouverneur général assiste personnellement à la cérémonie de la sanction royale ou du moins qu’il y a assiste plus fréquemment qu’il ne l’a fait ces dernières années. On a aussi suggéré que le gouverneur général confie la tâche de présider la cérémonie à d’éminents Canadiens comme les Compagnons de l’Ordre du Canada. Il serait aussi possible de tenir à intervalle fixe la cérémonie de la sanction royale, par exemple tous les quatre jeudis, afin de permettre au Parlement et aux parlementaires de prendre leurs dispositions.

D’autres proposent de maintenir en grande partie la cérémonie actuelle et qu’on n’ait recours à la procédure de rechange que lorsque le Sénat et la Chambre ne siègent pas en même temps. On réglerait ainsi le problème qui se pose lors des longues périodes d’ajournement, lorsque la Chambre s’ajourne avant le Sénat, laissant à celui-ci des projets de loi à adopter. Il arrive souvent que la Chambre ne soit alors représentée que par un Président adjoint et un ou deux députés.

On pourrait également ajouter au projet de loi S-26 un article permettant à l’une ou l’autre chambre, aux leaders parlementaires ou à un certain nombre ou pourcentage de sénateurs et/ou de députés de demander qu’il y ait une cérémonie traditionnelle de sanction royale. Le gouvernement pourrait toujours opter pour la cérémonie traditionnelle et cette disposition garantirait que les autres parlementaires puissent le demander.

Mis à part la proposition voulant que la sanction royale soit signifiée par une déclaration écrite, le projet de loi S-26 ne donne pas de détails sur la nouvelle procédure. Il a été proposé, par exemple, que des représentants du gouvernement et de l’opposition siégeant au Sénat et à la Chambre des communes soient présents lorsque le projet de loi est présenté au gouverneur général bien qu’on ne sache pas trop si cette cérémonie serait publique. Certains craignent toutefois que cette exigence ne donne lieu à une cérémonie de sanction royale complexe qui serait semblable à la cérémonie de signature des projets de loi par le président des États-Unis. Les modalités de cette procédure devraient être précisées.


(1) Pour une analyse du projet de loi S-15, notamment des dispositions du projet de loi original, voir le résumé législatif LS-318.

(2) Norman Wilding et Philip Laundy, An Encyclopedia of Parliament, Londres, Cassell and Company Ltd., 1958, p. 501-502.