Bibliothèque du Parlement


LS-307F

 

PROJET DE LOI S-4 :  LOI MODIFIANT LA LOI SUR LA
MARINE MARCHANDE DU CANADA
(RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE MARITIME)

 

 

                Rédaction :   David Goetz
                                         Division du droit et du gouvernement

                                         Le 20 novembre 1997

     


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI S-4

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 11 février 1998 Première lecture : 8 octobre  1997
Deuxième lecture : 23 février 1998 Deuxième lecture :: 22 octobre 1997
Rapport du comité : 12 mars 1998 Rapport du comité : 12 décembre 1997
Étape du rapport : 2 avril 1998 Étape du rapport : 15 décembre 1997
Troisième lecture : 2 avril 1998 Troisième lecture : 16 décembre 1997


Sanction royale : 12 mai 1998
Lois du Canada 1998, chapitre 6







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Créances maritimes générales : application de la Convention sur la limitation de la
         responsabilité et autres modifications
      1.  Portée du régime de limitation de la responsabilité
         a.  Intimés
         b.  Types de créance
         c.  Portée géographique
      2.  Relèvement des limites de responsabilité
         a.  Nouvelles limites
         b.  Modifications ultérieures des limites
      3.  Limites pour les petits navires
      4.  Nouvelles limites pour les propriétaires de docks, de canaux et de ports
      5.  Créances des passagers
      6.  Application des limites
         a.  Les limites représentent la somme des créances
         b.  Ordre de priorité des créances
         c.  Compensation des créances
         d.  Normes plus strictes pour supprimer la limitation
      7.  Fonds de limitation et autres questions de procédure

   B.  Créances pour dommages dus à la pollution par les hydrocarbures
      1.  Élargissement du champ d'application du régime
         a.  Hydrocarbures persistants et autres polluants
         b.  Eaux intérieures
         c.  Eaux extraterritoriales
         d.  Nouvelle responsabilité de remise en état de l'environnement
      2.  Actualisation des limites de responsabilité
         a.  Nouvelles limites
         b.  Modifications ultérieures des limites
      3.  Application des limites
         a.  Nouvelle méthode de calcul de la jauge des navires
         b.  Navires non soumis à l'application de la Convention
         c.  Norme plus stricte pour supprimer la limitation
      4.  Modifications des règles de responsabilité
      5.  Financement du Fonds international d'indemnisation des dommages dus à la pollution
           par les hydrocarbures
         a.  Obligation de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par
              les hydrocarbures causée par les navires de contribuer au Fond international
         b.  Exemption des petites cargaisons du prélèvement de la Caisse d'indemnisation
         c.  Nouveaux pouvoirs de l'administrateur de la Caisse d'indemnisation
         d.  Nouvelle sanction
      6.  Créance contre la Caisse d'indemnisation
         a.  Navires soumis à l'application de la Convention et navires non soumis
         b.  Période de limitation en l'absence de dommages
         c.  Créance pour perte de revenu
      7.  Divers

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI S-4 :  LOI MODIFIANT LA LOI SUR LA MARINE MARCHANDE
DU CANADA (RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE MARITIME)

CONTEXTE

Le projet de loi S-4, présenté au Sénat le 8 octobre 1997 (deuxième lecture le 22 octobre 1997), modifierait des parties de la Loi sur la marine marchande du Canada(1), qui portent sur la responsabilité à l’égard des accidents maritimes et des dommages causés par la pollution par les hydrocarbures.

Le projet de loi S-4 propose de nouveau les modifications à la Loi sur la marine marchande du Canada d’abord proposées dans le projet de loi C-58, le 19 septembre 1996. Le projet de loi C-58 a franchi l’étape de l’étude du comité, et a été amendé par le Comité permanent des transports, dont le rapport a été remis à la Chambre des communes le 11 décembre 1996. Le projet de loi est resté en plan au Feuilleton en avril 1997, au moment de la dissolution de la trente-cinquième législature.

Pour l’essentiel, le projet de loi S-4 vise à mettre en oeuvre la Convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes (Convention sur la limitation de la responsabilité) et le Protocole de 1996, ainsi que les Protocoles de 1992 modifiant la Convention de 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (Convention sur la responsabilité civile) et la Convention de 1971 portant création d’un fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (Convention sur le Fonds). Ces textes visent essentiellement à accroître le montant d’indemnisation qui peut être accordé aux créanciers, tant privés que publics, en matière de créances maritimes en général et de dommages dus à la pollution par les hydrocarbures en particulier, tout en maintenant la politique fondamentale, qui est de limiter la responsabilité des propriétaires de navire.

La plupart des pays maritimes ont toujours accordé aux propriétaires de navire une limitation de leur responsabilité. Il s’agissait d’encourager l’investissement dans des entreprises maritimes et de permettre aux propriétaires de navire d’évaluer plus facilement leur responsabilité et de s’assurer en conséquence. La norme mondiale précédente de limitation de la responsabilité des propriétaires de navires, établie en 1957, a fini par sembler inadéquate, tout comme les limitations analogues de la responsabilité des propriétaires de docks, de canaux ou de ports, ou des réparateurs de navires. De plus, les dispositions visant ces groupes n’étaient pas uniformes.

Le régime existant de limitation des créances maritimes en général est contenu dans la partie IX, articles 574 à 584, de la Loi sur la marine marchande du Canada et repose en grande partie sur la Convention internationale sur la limitation de la responsabilité des propriétaires de navires de mer de 1957. Naturellement, les limites de responsabilité qui y sont établies ont perdu de la valeur au fil des ans à cause de l’inflation. Les modifications proposées à la partie IX de la Loi visent à mieux harmoniser les limites de responsabilité appliquées par le Canada avec les normes mondiales existantes, reflétées dans la Convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité et dans le Protocole de 1996; elles permettraient au Canada d’adhérer à ces deux accords internationaux. Le projet de loi S-4 vise plus précisément à relever substantiellement la limite de la responsabilité des propriétaires de navire (dans une proportion variant entre plus de 300 p. 100 et plus de 2600 p. 100 selon de la jauge du navire); à relever la limite de la responsabilité des propriétaires de docks, de canaux et de ports; à imposer des critères plus rigoureux pour les demandeurs qui cherchent à contourner les limites de responsabilité; à introduire des dispositions spéciales au sujet des limites de responsabilité pour les petits navires (de moins de 300 tonneaux); à introduire une disposition spéciale sur la responsabilité des propriétaires de navire envers leurs passagers; et à affirmer que le régime des créances maritimes s’applique aux navires qui croisent dans les eaux nationales et intérieures.

En ce qui concerne la responsabilité et l’indemnisation en matière de pollution par les hydrocarbures, les modifications proposées à la partie XVI de la Loi mettraient en oeuvre les Protocoles de 1992 modifiant la Convention sur la responsabilité civile et la Convention sur le Fonds. Plus précisément, le projet de loi S-4 aurait les effets suivants : porter de quelque 120 millions à 270 millions de dollars l’indemnisation maximum disponible auprès des propriétaires de navire aux termes de la Convention de 1969 sur la responsabilité civile et du Fonds international d’indemnisation pour les créanciers en cas de pollution par des hydrocarbures; permettre une indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par des navires vides qui contiennent encore des hydrocarbures d’un trajet précédent; permettre le recouvrement des coûts de mesures préventives en prévision d’un déversement d’un navire-citerne; rendre les propriétaires de navire responsables des coûts de mesures raisonnables de remise en état de l’environnement; et étendre la zone géographique d’application du régime de responsabilité et d’indemnisation en matière de pollution par des hydrocarbures à la zone économique exclusive (la limite de 200 milles).

En outre, le projet de loi simplifierait de façon appréciable la procédure à suivre pour modifier à l’avenir la limite de la responsabilité des propriétaires de navire, tant pour les créances générales que pour les indemnisations en cas de pollution par les hydrocarbures. Les procédures de modification rapide adoptées dans les Protocoles de 1992 et de 1996 permettent la négociation de nouvelles limites par un certain nombre d’États parties aux conventions plutôt que par une grande conférence diplomatique. Le projet de loi autoriserait le gouverneur en conseil à déclarer ces nouvelles limites en vigueur au lieu de faire adopter une modification législative par le Parlement.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A. Créances maritimes générales : application de la Convention sur la limitation de la
        responsabilité et autres modifications

L’article 2 du projet de loi abrogerait les articles 574 à 584 de la partie IX de la Loi et les remplacerait par les nouveaux articles 574 à 583, portant sur la « Limitation de responsabilité en matière de créances maritimes ».

Fait à noter, l’article 2 ajouterait le nouvel article 575 déclarant que les articles 1 à 15 de la Convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes, modifié par le Protocole de 1996, a force de loi au Canada(2). Les articles 576 à 583 l’emportent sur les dispositions incompatibles des articles 1 à 15 de la Convention.

      1. Portée du régime de limitation de la responsabilité

         a. Intimés

L’article 1 de la Convention définit qui a droit à la limitation de la responsabilité aux termes de la Convention. Il vise les mêmes personnes que la Loi actuelle (c’est-à-dire les propriétaires de navire, les affréteurs, les personnes ayant un intérêt dans un navire ou la possession d’un navire, et les armateurs-gérants, exploitants ou d’un navire)(3), mais il étendrait les avantages de la Convention aux assistants qui n’interviennent pas à partir d’un navire et aux assureurs des propriétaires de navire et assistants. L’article 1 confirme aussi explicitement que les officiers, préposés ou agents du propriétaire de navire ou de l’assistant ont le droit de limiter leur responsabilité en vertu de la Convention. Il stipule en outre que la responsabilité du propriétaire de navire englobe tout réclamation réelle à l’égard du navire.

         b. Types de créance

L’article 2 définit les types de créance soumis à la limitation de la responsabilité aux termes de la Convention :

a) créances pour mort, pour lésions corporelles, pour pertes et pour dommages à tous biens survenus à bord du navire ou en relation directe avec l’exploitation de celui-ci ou avec des opérations d’assistance ou de sauvetage, ainsi que pour tout autre préjudice en résultant;

b) créances pour tout préjudice résultant d’un retard dans le transport par mer de la cargaison, des passagers ou de leurs bagages;

c) créances pour d’autres préjudices résultant de l’atteinte à tous droits de source extracontractuelle, et survenus en relation directe avec l’exploitation du navire ou avec des opérations d’assistance ou de sauvetage;

d) créances pour avoir renfloué, enlevé, détruit ou rendu inoffensif un navire coulé, naufragé, échoué ou abandonné;

e) créances pour avoir enlevé, détruit ou rendu inoffensive la cargaison d’un navire; et

f) créances pour les mesures prises afin de prévenir ou de réduire un dommage pour lequel la personne responsable peut limiter sa responsabilité en vertu de la Convention.

L’article 3 définit les types de créance exclus de la limitation aux termes de la Convention :

a) créances pour assistance ou sauvetage;

b) créances pour dommages dus à la pollution par les hydrocarbures;

c) créances pour dommages nucléaires, lorsqu’une convention internationale ou une loi nationale interdit la limitation de la responsabilité à cet égard;

d) créances pour dommages nucléaires formées contre le propriétaire d’un navire nucléaire;

e) créances des préposés du propriétaire du navire ou de l’assistant, aux termes d’un contrat d’engagement, si la loi régissant ce contrat ne permet pas la limitation de responsabilité ou prévoit une limite plus élevée que celle prévue par la Convention.

Aux termes du paragraphe 15(5), la Convention ne s’applique pas aux aéroglisseurs ni aux plates-formes flottantes destinées à l’exploration des ressources naturelles des fonds marins et de leur sous-sol.

         c. Portée géographique

L’alinéa 15(2)a) de la Convention permet à un État partie de stipuler la limitation de responsabilité à l’égard des navires qui sont destinés à la navigation sur les voies d’eau intérieures. L’article 576 de la Loi proposé étendrait le champ d’application du régime de la Convention aux voies d’eau intérieures canadiennes en redéfinissant les mots et expressions de la Convention « transport par mer », « navire » et « propriétaire de navire » (article 2 du projet de loi). Ces nouvelles définitions concordent avec le champ d’application de l’actuel régime de responsabilité prévu à la partie IX de la Loi.

      2. Relèvement des limites de responsabilité

        a. Nouvelles limites

L’article 6 de la Convention établit les limites de la responsabilité à l’égard de toutes les créances autres que celles régies par l’article 7 (perte de vie et lésions) visées par la Convention et nées d’un même événement. S’agissant des lésions pour mort ou lésions corporelles :

  • deux millions d’unités de compte(4) pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 2 000 tonneaux; pour un navire dont la jauge dépasse 2 000 tonneaux, viennent s’ajouter les montants supplémentaires suivants :

  • pour chaque tonneau de 2 001 à 30 000 tonneaux, 800 unités de compte;

  • pour chaque tonneau de 30 001 à 70 000 tonneaux, 600 unités de compte; et

  • pour chaque tonneau au-dessus de 70 000 tonneaux, 400 unités de compte.

S’agissant de toutes les autres créances :

  • un million d’unités de compte pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 2 000 tonneaux; et

  • pour un navire dont la jauge dépasse 2 000 tonneaux, viennent s’ajouter les montants supplémentaires suivants :

  • pour chaque tonneau de 2 001 à 30 000 tonneaux, 400 unités de compte;

  • pour chaque tonneau de 30 001 à 70 000 tonneaux, 300 unités de compte; et

  • pour chaque tonneau au-dessus de 70 000 tonneaux, 200 unités de compte.

         b. Modifications ultérieures des limites

L’article 2 du projet de loi propose un nouvel article 579 pour mettre en oeuvre la nouvelle procédure adoptée à l’article 8 du Protocole 1996 modifiant la Convention sur la limitation de la responsabilité à l’égard des modifications des limites de responsabilité pour les créances générales. Ces modifications pourraient être négociés par un certain nombre d’États parties et le gouverneur en conseil pourrait ensuite modifier par décret les limites qui s’appliquent.

      3. Limites pour les petits navires

L’alinéa 15(2)b) de la Convention donne aux États parties le droit de légiférer pour limiter la responsabilité à l’égard des navires de moins de 300 tonneaux. Le nouvel article 577 de la Loi sur la marine marchande du Canada proposé à l’article 2 du projet de loi limiterait la responsabilité des propriétaires de ces navires à l’égard des créances, autres que celles se rapportant à la mort ou aux lésions corporelles de passagers (créances visées par le nouvel article 578) à un million de dollars pour les créances pour mort ou lésions corporelles et à 500 000 $ pour les autres créances(5)..

      4. Nouvelles limites pour les propriétaires de docks, de canaux et de ports

Le nouvel article 583 mettrait à jour les limites de responsabilité des propriétaires de docks, de canaux et de ports en cas de perte ou dommage causés à des navires ou à tout ce qui peut se trouver à bord. La responsabilité des propriétaires de ces installations et des personnes dont la négligence entraîne la responsabilité du propriétaire serait limitée au plus élevé des deux montants suivants : deux millions de dollars ou 1 000 $ multipliés par la jauge du plus gros navire qui a utilisé le dock, le canal ou le port pendant les cinq années précédentes. Comme il est proposé pour les propriétaires de navire dans le projet de loi (voir 6d.) plus loin), les propriétaires de docks, de canaux ou de ports perdraient l’avantage de cette limitation si la perte ou le dommage sont attribuables à leur négligence personnelle, lorsque le dommage était voulu ou lorsqu’il était notoire que le dommage était probable.

      5. Créances des passagers

L’article 7 de la Convention établit la limite de la responsabilité des propriétaires de navire à l’égard des passagers pour mort ou lésions corporelles à 175 000 unités de compte multipliées par le nombre de passagers que le navire est autorisé à transporter conformément à son certificat(6).

Toutefois, l’article 7 s’applique uniquement pour les créances relatives à des navires qui doivent avoir un certificat aux termes de la partie V de la Loi (p. ex., navires de plus de cinq tonneaux de jauge brute et capables de transporter plus de 12 passagers(7)) et lorsqu’il y a un contrat de transport de passagers (ou lorsque la personne, avec le consentement du transporteur, accompagne un véhicule ou des animaux vivants faisant l’objet d’un contrat de transport de marchandises). Le nouvel article 578, proposé à l’article 2 du projet de loi, vise ces scénarios. Pour ce qui est des créances pour mort ou lésions corporelles de passagers à bord de navires qui n’ont pas à avoir de certificat aux termes de la partie V, le nouveau paragraphe 578(1) limiterait la responsabilité du propriétaire de navire au plus élevé des montants suivants : deux millions d’unités de compte ou le produit de 175 000 unités de compte par le nombre de passagers. Pour les créances de passagers, lorsqu’il n’y a pas de contrat de transport, le paragraphe 578(2) limiterait la responsabilité du propriétaire de navire à 175 000 unités de compte multipliées par le nombre de passagers que le navire est autorisé à transporter.

L’article 1 du projet de loi prévoit l’abrogation du paragraphe 565(4) de la Loi, auquel les propriétaires de navire ont eu recours pour se dégager des responsabilités à l’égard des passagers. Il s’agit d’une disposition d’interprétation qui stipule que rien, dans l’article 565 (qui répartit les responsabilités entre les navires en cause dans des collisions) ne doit s’interpréter comme influant sur la responsabilité aux termes d’un contrat ni sur le droit de quiconque de limiter sa responsabilité conformément à la loi.

L’article 3 du projet de loi abrogerait l’article 587 de la Loi, qui impose une limite spéciale (200 $) à la responsabilité du propriétaire de navire à l’égard de la perte des bagages des passagers ou des dommages à ces bagages.

      6. Application des limites

         a. Les limites représentent la somme des créances

L’article 9 de la Convention confirme que les limites de responsabilité établies aux articles 6 et 7 respectivement s’appliquent à la somme de toutes les créances nées d’un événement distinct, ce qui est conforme à la Loi actuelle (voir le paragraphe 577(2) de la Loi).

         b. Ordre de priorité des créances

L’article 6 de la Convention permet d’établir des priorités entre les créances. Dans la mesure où les créances pour mort ou lésions corporelles dépassent les limites de responsabilité pour ce type de dommage, il peut y avoir partage entre les créances des fonds disponibles pour les dommages aux biens aux termes de la Convention. En outre, l’article 6 permet aux États parties à la Convention de prévoir dans leur législation nationale que les créances pour dommages aux ouvrages portuaires, bassins, voies navigables et aides à la navigation ont priorité sur les autres créances relatives à des biens.

         c. Compensation des créances

Aux termes de l’article 5 de la Convention, si une personne en droit de limiter sa responsabilité selon la Convention a contre son créancier une créance née du même événement, leurs créances respectives se compensent et les limites de responsabilité s’appliquent uniquement au solde exigible d’une personne dont la responsabilité est limitée en vertu de la Convention.

         d. Normes plus strictes pour supprimer la limitation

L’article 4 décrit la conduite qui prive une personne du droit de limiter sa responsabilité en vertu de la Convention. Pour que cela se produise, la perte en question doit résulter de la négligence personnelle de la personne en cause, lorsque le dommage a été commis intentionnellement ou lorsqu’elle était consciente que le dommage se produirait probablement.

      7. Fonds de limitation et autres questions de procédure

L’article 10 confirme que l’intimé n’a pas à constituer un fonds de limitation pour invoquer la limitation de sa responsabilité aux termes de la Convention, bien que les États parties soient autorisés à inscrire cette exigence dans leur législation nationale.

Selon l’article 11, toute personne dont la responsabilité peut être mise en cause pour une créance soumise à limitation aux termes de la Convention peut constituer un fonds auprès du tribunal de l’État partie dans lequel l’action est engagée. Cela se fait par versement d’un montant au tribunal ou la production d’une garantie acceptable, la somme correspondant aux limites de responsabilité applicables, aux termes des articles 6 ou 7, plus les intérêts courus entre le moment de l’événement et la date de la constitution du fonds. Lorsque plus d’un intimé est responsable du même événement (p. ex., le propriétaire du navire et le préposé), un fonds constitué par l’un d’eux ou l’assureur de l’un d’eux est réputé avoir été constitué par tous les intimés.

L’article 12 maintient et consacre les règles existantes sur la répartition du fonds entre les créanciers proportionnellement au montant de leurs créances reconnues contre le fonds. Il précise aussi un droit de subrogation pour une personne responsable qui a déjà payé une créance pour le demandeur avec qui le règlement a été conclu.

L’article 13 interdit aux personnes qui ont produit une créance contre un fonds de saisir d’autres biens ou de produire une créance contre d’autres biens de la personne au nom de laquelle le fonds a été constitué. Cet article prévoit également une procédure permettant au tribunal de libérer un navire ou d’autres biens saisis lors qu’un fonds de limitation a déjà été constitué dans un autre État partie. Il existe des dispositions analogues dans la Loi actuelle (voir l’article 583 de la Loi).

Les articles 580 à 582 proposés à l’article 2 du projet de loi portent sur des questions de procédure relativement aux délibérations devant les tribunaux canadiens sur des créances visées par la Convention.

Le nouveau paragraphe 580(1) maintiendrait la compétence exclusive de la Cour d’Amirauté pour entendre toute question relative à la constitution et à la répartition des fonds de limitation. Le paragraphe 580(2) confirmerait le droit d’une personne qui peut limiter la responsabilité en vertu du projet de loi et de la Convention à utiliser ce moyen de défense devant tout tribunal compétent au Canada.

Les nouveaux paragraphes (1) à (4) de l’article 581 confirmeraient le pouvoir de la Cour d’Amirauté de se saisir de questions de constitution et de répartition de fonds de limitation; de contrôler les personnes habilitées à former des créances contre le fonds; de mettre de côté de l’argent d’un fonds pour des poursuites hors du Canada; de contrôler les doubles poursuites; d’empêcher des privilèges maritimes d’entraver la répartition des fonds de limitation et d’établir des règles de procédure. Le paragraphe 581(5) établirait le taux d’intérêt applicable à la constitution d’un fonds, soit le taux fixé par la Loi de l’impôt sur le revenu et payable par le ministre du Revenu national sur les remboursements de l’impôt payé en trop.

Le nouvel article 582 porte sur certains aspects de la libération de navires saisis relativement à des créances maritimes générales visées par le projet de loi et la Convention de 1976. Lorsque le tribunal libère un navire parce qu’un fonds de limitation a été constitué, la personne qui a demandé la libération serait réputée avoir soumis la détermination de sa créance à la compétence du tribunal qui a ordonné la libération. Aux termes du nouvel article 582, lors de la demande de libération, le tribunal prendrait en compte la constitution d’un fonds de limitation dans un pays étranger seulement s’il est convaincu que le pays en question est un État partie à la Convention. Ces dispositions du projet de loi ressemblent fort à la loi actuelle (voir l’article 583 de la Loi).

   B. Créances pour dommages dus à la pollution par les hydrocarbures

Les modifications proposées qui suivent portent principalement sur la partie XVI de la Loi (responsabilité civile et indemnisation pour dommages dus à la pollution) et elles auraient essentiellement pour effet de mettre en oeuvre les Protocoles de 1992 modifiant respectivement la Convention de 1969 sur la responsabilité civile et la Convention de 1971 sur le Fonds international.

      1. Élargissement du champ d’application du régime

Les articles 4 et 5 du projet de loi actualiseraient et modifieraient certaines définitions des parties XV (prévention et contrôle de la pollution) et XVI (responsabilité civile et indemnisation pour dommages dus à la pollution). Ces modifications, corrélatives surtout, rendraient les définitions conformes aux Protocoles de 1992 modifiant la Convention de 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.

         a. Hydrocarbures persistants et autres polluants

La définition de « navire soumis à l’application de la Convention » serait élargie pour englober les navires qui ont des résidus persistants d’hydrocarbures d’une cargaison précédente, et la définition de « polluant » serait modifiée pour englober « les organismes aquatiques et les agents pathogènes ».

         b. Eaux intérieures

Les articles 4 et 5 modifieraient également la définition de « navire » pour signifier clairement que ce terme s’applique aux bâtiments qui naviguent dans les eaux du Canada et ses eaux intérieures. L’article 6 remplacerait l’article 675 de la Loi pour élargir les limites géographiques d’application de la partie XVI (responsabilité civile et indemnisation pour dommages dus à la pollution) relativement aux navires soumis à l’application de la Convention de façon qu’elles englobent toute zone où se produisent ou peuvent se produire des dommages par la pollution dans les eaux intérieures du Canada ou de toute autre partie à la Convention sur la responsabilité civile.

         c. Eaux extraterritoriales

L’article 6 étendrait également l’application de la partie XVI à la zone économique exclusive du Canada ou celle de toute autre partie à la Convention. Lorsqu’un État n’a pas établi de zone économique exclusive, l’application serait étendue à toutes les eaux adjacentes à la mer territoriale de l’État, jusqu’à une distance de 200 milles nautiques. Ces dispositions sont conformes aux Protocoles de 1992 modifiant la Convention de 1969.

         d. Nouvelle responsabilité de remise en état de l’environnement

Le paragraphe 7(3) du projet de loi créerait un nouveau paragraphe 677(2) pour mettre en oeuvre un élément des Protocoles de 1992 en stipulant que les propriétaires de navire sont responsables des frais occasionnés par des mesures raisonnables de remise en état lorsqu’il y a des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.

      2. Actualisation des limites de responsabilité

         a. Nouvelles limites

L’article 10 du projet de loi modifierait l’article 679 de la Loi pour relever de façon significative les limites de responsabilité des propriétaires de navires soumis à l’application de la Convention, en adoptant les limites prévues dans le Protocole de 1992 modifiant la Convention de 1969. Cela représente une augmentation de 326 p. 100 par rapport aux limites de la Convention de 1969 et de 125 p. 100 par rapport au recouvrement permis en vertu de la Convention de 1971 sur le Fonds(8).

         b. Modifications ultérieures des limites

L’article 10 prévoit également une nouvelle procédure de modification rapide pour les modifications ultérieures des limites de responsabilité à l’égard des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Cela permettrait au gouverneur en conseil de modifier les limites en fonction de celles convenues par un certain nombre d’États parties de la manière prévue à l’article 15 du Protocole de 1992 modifiant la Convention de 1969.

      3. Application des limites

         a. Nouvelle méthode de calcul de la jauge des navires

L’article 10 modifierait la méthode de calcul de la jauge des navires aux fins de l’application des limites de responsabilité à l’égard de la pollution par les hydrocarbures. À l’avenir, on utiliserait la jauge brute établie conformément à la Convention internationale de 1969 relative au jaugeage des navires.

         b. Navires non soumis à l’application de la Convention

L’expression « navires soumis à l’application de la Convention » désigne essentiellement les navires qui transportent des hydrocarbures en vrac(9).

L’article 10 prévoit de nouvelles limites de responsabilité à l’égard des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Pour ces navires jaugeant au plus 300 tonneaux, les limites seraient celles prévues à l’article 2 du projet de loi pour les créances maritimes générales (lorsqu’il y a mort ou lésions corporelles, un million de dollars; autrement, 500 000 $, à l’exclusion des créances pour pertes subies par les passagers). Pour les navires de plus de 300 tonneaux non soumis à l’application de la Convention, les limites seraient celles prévues à l’article 6 de la Convention sur la limitation de la responsabilité (voir 2a. à la partie A, plus haut).

         c. Norme plus stricte pour supprimer la limitation

L’article 10 restreindrait les conditions auxquelles les créanciers pourraient contourner les limites de responsabilité en prouvant la négligence de la part des propriétaires de navire. Actuellement, le paragraphe 679(1) prive les propriétaires de navire des avantages de la limitation de responsabilité lorsqu’il y a eu faute ou participation de leur part. Aux termes du nouveau paragraphe 679(2) proposé à l’article 10 du projet de loi, le plaignant devrait, pour empêcher que ne s’appliquent les limites de responsabilité à l’égard de sa créance, établir que les dommages dus à la pollution ont été causés intentionnellement ou au moins qu’il y a eu insouciance alors que la probabilité que tel dommage se produise était connue.

      4. Modifications des règles de responsabilité

La Convention de 1969 sur la responsabilité civile et la Convention de 1971 sur le Fonds international rendent directement responsable des déversements d’hydrocarbures le propriétaire de navire et interdisent la présentation de créances contre les préposés et mandataires de celui-ci. Il s’agir d’une « orientation » de la responsabilité. Conformément aux Protocoles de 1992, l’article 12 du projet de loi remplacerait le paragraphe 681(2) de la Loi pour étendre la notion d’orientation de façon à interdire les créances contre : le pilote du navire; l’affréteur; toute personne accomplissant des opérations de sauvetage avec l’accord du propriétaire ou sur les instructions d’une autorité publique compétente; toute personne qui prend des mesures pour prévenir des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par le navire; et tout préposé ou mandataire de ces personnes. Celles-ci pourraient cependant être tenues personnellement responsables lorsque les dommages découlent d’une conduite personnelle tenue avec l’intention de causer un dommage ou avec insouciance, alors qu’elles connaissaient la probabilité du dommage.

L’article 12 ajouterait également le paragraphe 681(3) à la Loi pour imposer une responsabilité solidaire à l’égard des dommages causés par deux ou plusieurs navires soumis à l’application de la Convention lorsque les dommages ne peuvent raisonnablement être imputés à l’un ou à l’autre. Ce paragraphe donnerait suite à une disposition de la Convention de 1969 sur la responsabilité civile, qui est reprise à peu près telle quelle dans le Protocole de 1992.

      5. Financement du Fonds international d’indemnisation des dommages dus à la pollution
           par les hydrocarbures

Le Fonds international a été établi par la Convention de 1971 sur le Fonds. Il est conçu pour couvrir les créances au-delà des limites de responsabilité des propriétaires de navire. Le Canada a également un fonds propre, la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, pour couvrir les créances qui ne peuvent être recouvrées auprès des personnes responsables ni du Fonds international.

         a. Obligation de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les
             hydrocarbures causée par les navires de contribuer au Fonds international

L’article 17 du projet de loi remplacerait le paragraphe 701(1) de la Loi. Il maintiendrait l’obligation de verser des contributions au Fonds international sur la Caisse d'indemnisation, conformément aux articles 10 et 12 de la Convention sur le Fonds. Les contributions au Fonds international sont établies en fonction du volume des hydrocarbures expédiés en vrac en provenance ou à destination de chaque pays membre.

L’article 17 maintiendrait également la disposition existante, au paragraphe 701(1), selon laquelle l’administrateur de la Caisse d’indemnisation doit communiquer au directeur du Fonds international les noms et adresses des personnes qui reçoivent les hydrocarbures pris en compte et les quantités reçues, conformément à l’article 15 de la Convention sur le Fonds. L’article 17 ajouterait toutefois que l’administrateur de la Caisse d’indemnisation est tenu d’indemniser le Fonds pour toute perte financière causée par le défaut de remplir ses obligations. Cette disposition donnerait suite à une nouvelle disposition de l’article 15 de la Convention sur le Fonds, qui impose une responsabilité aux États membres à l’égard des pertes du Fonds international en pareil cas. L’article 18 du projet de loi modifierait l’article 702 de la Loi pour permettre à l’administrateur de verser cette indemnisation sur la Caisse d’indemnisation.

         b. Exemption des petites cargaisons du prélèvement de la Caisse d’indemnisation

L’article 22 du projet de loi modifierait le paragraphe 716(1) de la Loi pour établir un certain seuil aux fins des prélèvements de la Caisse d’indemnisation qui, lorsqu’ils s’appliqueront, devront être payés sur les hydrocarbures à destination et en provenance du Canada. Les prélèvements doivent aider à financer la Caisse d’indemnisation et, indirectement, le Fonds international. L’article 22 exempterait les cargaisons d’hydrocarbures de 300 tonnes ou moins, car il ne serait pas rentable de les y assujettir.

         c. Nouveaux pouvoirs de l’administrateur de la Caisse d’indemnisation

L’article 17 du projet de loi conférerait de nouveaux pouvoirs à l’administrateur de la Caisse d’indemnisation pour vérifier et obtenir des renseignements sur la réception et la déclaration des cargaisons d’hydrocarbures. Plus expressément, l’article 17 ajouterait l’article 701(1.2) à la Loi pour donner à l’administrateur le pouvoir :

  • de procéder à la visite de tout lieu où, à son avis, il y a des registres relatifs à la réception et à la déclaration d’hydrocarbures visés par la Convention;

  • d’examiner, d’emporter ou de copier tout ce qui s’y trouve; et
  • d’obliger le propriétaire, l’occupant ou le responsable du lieu visité à lui prêter toute l’assistance possible dans l’exercice de son pouvoir d’examen et, à cette fin, à l’accompagner dans le lieu.

L’article 17 ajouterait également à la Loi l’article 701(1.3) de façon à ce qu’il soit interdit d’entraver l’action de l’administrateur dans l’exercice de ses pouvoirs décrits plus haut. Le nouvel article interdirait également de faire à l’administrateur des déclarations fausses ou trompeuses dans l’exercice de ces pouvoirs.

L’article 701(1.4) proposé imposerait certaines restrictions : dans le cas d’un local d’habitation, l’administrateur ne pourrait procéder à la visite sans l’autorisation de l’occupant que s’il est muni d’un mandat délivré aux termes de l’article 701(1.5) proposé. Cette nouvelle disposition permettrait à un juge de paix de délivrer un mandat s’il est convaincu que :

  • il y a des motifs raisonnables de croire qu’il se trouve dans le local d’habitation des registres relatifs à la réception et à la déclaration d’hydrocarbures visés par la Convention;

  • la visite est nécessaire pour que l’administrateur s’acquitte de ses obligations de fournir des renseignements au Fonds international; et

  • un refus a été opposé à la visite ou il y a des motifs raisonnables de croire que tel sera le cas.

         d. Nouvelle sanction

L’article 25 du projet de loi modifierait le paragraphe 725(2) de la Loi pour prévoir une sanction (sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende pouvant aller jusqu’à 100 $ par jour pour chaque jour que dure l’omission) pour omission de communiquer au ministre des Transports les renseignements relatifs aux livraisons d’hydrocarbures, conformément au règlement pris sous l’empire de l’alinéa 719c) de la Loi. Cette disposition porte sur l’information dont l’administrateur de la caisse d'indemnisation a besoin pour se conformer aux exigences de l’article 701 relativement aux paiements et renseignements à faire ou à communiquer au Fonds international. Le paragraphe 725(2) de la Loi prévoit déjà la même sanction pour omission de communiquer des renseignements au ministre conformément au règlement pris sous l’empire à l’alinéa 719b) au sujet des livraisons d’hydrocarbures assujettis aux prélèvements de la Caisse d’indemnisation en vertu de l’article 716.

      6. Créance contre la Caisse d’indemnisation

         a. Navires soumis à l’application de la Convention et navires non soumis

Le paragraphe 19(1) du projet de loi remplacerait l’alinéa 709c) de la Loi par une nouvelle disposition qui établirait une distinction entre les navires soumis à l’application de la Convention et les autres navires en ce qui concerne la responsabilité de la Caisse d’indemnisation à l’égard des créances. Dans le cas des navires soumis à l’application, le paragraphe 19(1) maintiendrait la responsabilité de la Caisse pour le montant des créances qui dépassent la limite de responsabilité des propriétaires de navire aux termes de la partie XVI (modifiée par le projet de loi) qui ne peut être recouvrée auprès du Fonds international. Quant aux navires non soumis, la Caisse d’indemnisation serait responsable du montant des créances dépassant la responsabilité maximum du propriétaire aux termes des nouvelles limites de responsabilité pour les créances maritimes générales, dans les modifications apportées par l’article 2 du projet de loi à la partie IX de la Loi (voir la section 2, à la partie A, ci-dessus).

         b. Période de limitation en l’absence de dommages

Le paragraphe 20(2) du projet de loi remplacerait l’alinéa 710(1)b) de la Loi, qui exige en ce moment que les créances pour perte, frais ou dépenses soient déposées auprès de l’administrateur de la Caisse d’indemnisation dans un délai d’un an, lorsqu’il n’y a pas eu de dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (c.-à-d. lorsque la créance porte uniquement sur des mesures préventives). Le paragraphe 20(2) porterait cette période à cinq ans, ce qui cadre mieux avec la période de six ans pour les créances formées contre les propriétaires de navires en vertu de l’alinéa 677(10)b) et laisserait tout de même un an à la Caisse d’indemnisation pour exercer son droit de former une créance en subrogation contre le propriétaire de navire.

         c. Créance pour perte de revenu

L’article 712 de la Loi régit les créances formées contre la Caisse d’indemnisation pour pertes de revenus de certaines personnes (p. ex., celles dont la subsistance dépend d’activités dans les eaux en question). L’article 21 du projet de loi vise à préciser cette disposition et à l’harmoniser avec celles qui régissent d’autres créances, et aussi à faciliter ces créances.

Le paragraphe 21(1) de la version française du projet de loi et le paragraphe 21(2) de la version anglaise, ainsi que les paragraphes 21(4) et 21(5) dans les deux langues officielles modifieraient les paragraphes 712(1) et 712(8) de la Loi pour préciser que la personne qui présente une créance contre la Caisse d’indemnisation pour perte de revenu attribuable à une pollution par les hydrocarbures n’aurait pas à épuiser tous les autres recours légaux avant de déposer sa créance contre l’administrateur.

Le paragraphe 21(3) du projet de loi ajouterait l’article 712(3.1) à la Loi pour préciser que le demandeur présentant une créance pour perte de revenu en vertu de cet article n’aurait pas à démontrer à l’administrateur de la Caisse que la pollution a été provoquée par un navire. Il suffirait que l’administrateur ne soit pas convaincu que l’événement n’a pas été causé par un navire. Une disposition identique existe déjà pour les autres créances formées contre la Caisse (voir le paragraphe 710(5)).

      7. Divers

L’article 16 du projet de loi abrogerait l’article 700 de la Loi qui, adoptée pour donner suite à l’article 5 de la Convention de 1971 sur le Fonds, tenait compte d’autres frais (notamment d’assurance) pour les propriétaires de navire par suite de l’indemnisation assurée aux demandeurs en vertu de la Convention de 1969 sur la responsabilité civile, frais qui devaient donner lieu à indemnisation par le Fonds. L’expérience n’a toutefois pas montré, semble-t-il, que cette disposition était nécessaire. La disposition sur l’indemnisation des propriétaires de navire pour ces frais supplémentaires a été retirée du Protocole de 1992 modifiant la Convention sur le Fonds.

COMMENTAIRE

Les groupes touchés par le projet de loi comprennent : les propriétaires de navire, les propriétaires de marchandises diverses transportées par navire, les propriétaires de pétroliers, les passagers, les assureurs maritimes et les milieux du droit maritime. La plupart de ces protagonistes s’entendent pour dire qu’il y a lieu de réviser les limites de responsabilité, mais les petits exploitants craignent que cela n’entraîne une augmentation appréciable de leurs frais d’assurance. En ce qui concerne notamment les dispositions sur les dommages dus à la pollution causée par les hydrocarbures, l’industrie pétrolière canadienne est en faveur de l’adhésion du Canada aux Protocoles de 1992; elle estime cependant que les contributions au Fonds international devraient provenir de la Caisse d’indemnisation telle qu’elle existe plutôt que d’un nouveau prélèvement.

Quant aux modifications proposées par le projet de loi à la partie XVI, il peut y avoir une certaine urgence. Tout retard à faire la transition entre le régime de 1969-1971 et celui du Protocole de 1992 exposerait les États qui en restent au Fonds de 1971 à verser des contributions plus élevées pour toute créance relevant de ce régime.

 


(1) L.R.C. 1985, chap. S-9, Parties IX et XVI, modifiées.

(2) Aux termes de l’article 2 du projet de loi, l’article 7 — qui porte sur les créances pour mort ou lésions corporelles de passagers — n’aurait force de loi au Canada que lorsque entrera en vigueur le nouvel article 578, également proposé à l’article 2 du projet de loi. Aux termes de l’article 31 du projet de loi, le nouvel article 578 n’entrerait en vigueur que par proclamation du gouverneur en conseil, alors que le reste de l’article 2 (et les autres dispositions de la Convention sur la limitation de la responsabilité) entreraient en vigueur 90 jours après la sanction royale.

(3) Voir les articles 575 et 577 de la Loi actuelle.

(4) L’article 8 définit l’unité de compte dans laquelle sont libellées les limites de responsabilité de la Convention. L’unité de compte est l’équivalent du droit de tirage spécial du Fonds monétaire inernational (FMI) et doit être convertie dans les devises nationales voulues selon la méthode du FMI. En 1997, l’unité de compte valait environt 2 $.

Le paragraphe 8(2) établit la méthode de calcul de la valeur des limites de responsabilité pour les États qui ne sont pas membres du FMI et dont les lois ne permettent pas l’utilisation de la formule de l’unité de compte; cela ne s’applique pas au Canada. Aux termes de la Loi actuelle, les limites sont exprimées en francs or.

(5) Cependant, aux termes du paragraphe 577(3) proposé, jusqu’à l’entrée en vigueur du nouvel article 578 (voir l’article 31 du projet de loi), qui traite expressément des créances pour mort ou lésions corporelles de passagers, les limites proposées par le nouveau paragraphe 577(1) s’appliqueraient relativement aux navires de moins de 300 tonneaux et celles de l’article 6 de la Convention (qui serait mis en vigueur par le paragraphe 575(1)) s’appliqueraient relativement aux navires de plus de 300 tonneaux.

(6) Ces questions sont traitées dans la partie V de la Loi.

(7) Voir l’article 406 de la Loi.

(8) Les nouvelles limites seraient les suivantes. Pour les navires jaugeant jusqu’à 5 000 tonneaux : trois millions d’unités de compte; pour les navires de plus de 5 000 tonneaux le moindre des montants suivants : a) le total de trois millions d’unités de compte pour les 5 000 premiers tonneaux et 420 unités pour chaque tonneau en sus ou b) 59,7 millions d’unités de compte.

(9) Article 673 de la Loi.