PRB 01-6F

 

LE PROTOCOLE DE KYOTO : PROGRÈS ACCOMPLIS À BONN

 

Rédaction :
Lynne Myers
Division des sciences et de la technologie
juillet 2001


TABLE DES MATIÈRES

Historique

Décisions prises à Bonn


LE PROTOCOLE DE KYOTO : PROGRÈS ACCOMPLIS À BONN

Historique

En 1992 était conclu un accord international qui, malgré certaines incertitudes entourant les prévisions relatives au réchauffement anthropique de la planète, constituait une approche de précaution face au problème.  Cet accord a permis d’établir la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, laquelle exigeait une stabilisation des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) aux niveaux de 1990 à compter de 2000.   Au cours des cinq années qui ont suivi, la communauté internationale s’est réunie à plusieurs reprises pour négocier une entente exécutoire qui permettrait d’atteindre l’objectif de la Convention-cadre.  En décembre 1997, une entente était conclue à Kyoto, au Japon.  Le Protocole de Kyoto comprenait un engagement à réduire la moyenne des émissions mondiales de GES de 5,2 p. 100 entre 2008 et 2012.  L’engagement individuel du Canada consistait en une réduction de ses émissions de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990.  Le Protocole décrivait également divers mécanismes qui pouvaient être utilisés par les pays pour atteindre leurs objectifs.  Le détail des règles régissant ces divers mécanismes devait être précisé au cours des futures Conférences des Parties (CdP).

Le processus de négociations qui s’est ensuivi a été marqué par des demandes et des approches très variées par rapport aux règles de base de la mise en œuvre.  À plusieurs reprises, l’Union européenne (UE) s’est élevée contre le « regroupement » comprenant le Canada, le Japon, l’Australie, la Norvège et, jusqu’au début de 2001, les États-Unis.  À la CdP6, qui a eu lieu en novembre 2000 à La Haye, les différends au sujet de certaines questions clés n’ont pu être résolus.  Ces questions comprenaient entre autres le traitement des « puits de carbone », les règles régissant l’échange international des crédits d’émissions et les meilleures façons d’apporter de l’aide aux pays en développement pour lutter contre le changement climatique.  Les pourparlers se sont soldés par un échec, mettant en jeu la survie du Protocole de Kyoto.  Lorsque les États-Unis ont annoncé en mars 2001 qu’ils retiraient leur appui au Protocole, la situation semblait sans issue.  Ne voulant pas que le Protocole reste lettre morte, les pays qui participaient toujours au processus se sont entendus pour que les négociations se « poursuivent » à Bonn, Allemagne, en juillet 2001.  Cette fois, des compromis ont été faits et le débat s’est avéré un succès, une entente politique ayant été conclue au sujet des règles de base de la mise en œuvre du Protocole.

Décisions prises à Bonn

Les pays industrialisés du monde, à l’exception des États-Unis, se sont entendus pour maintenir les engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto en ce qui a trait aux réductions de GES.  Au Canada, les émissions ont en fait augmenté depuis 1990.  Si elles continuent de grimper comme prévu, le Canada devra en 2012 réduire ses émissions d’environ 26 p. 100 pour respecter son engagement à les réduire de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990.

À Bonn, on a convenu que l’utilisation de l’énergie nucléaire serait exclue des projets mis en œuvre dans le cadre du Mécanisme de développement propre (MDP) et de l’Application conjointe (AC).  En d’autres mots, l’exportation de centrales nucléaires vers les pays en développement ne permettra pas aux pays exportateurs d’obtenir un crédit pour réduction.   C’est là un point sur lequel le Canada a dû accepter  un compromis, même s’il avait été un solide défenseur de ce type de crédit.

Les parties au Protocole de Kyoto ont également convenu de mettre en place un système d’échange des crédits d’émissions entre les pays développés.  Dans le cadre d’un tel système, un pays dont les réductions d’émissions sont supérieures à l’objectif établi se verra accorder un crédit pour ces réductions supplémentaires.   Il pourra alors vendre ces crédits à un autre pays qui n’a pas atteint son objectif et qui a besoin de ces crédits pour y arriver.  Avant la rencontre de Bonn, l’UE avait insisté pour que l’on fixe un plafond à la mesure dans laquelle un pays peut utiliser l’échange de crédits afin de répondre à son engagement à réduire ses émissions.  L’UE a fait un compromis, en acceptant de retirer cette exigence.

Les pays industrialisés ont accepté de verser des montants additionnels au Fonds pour l’environnement mondial.  Deux nouveaux fonds ont également été créés pour compléter ce travail.  Plus de 410 millions de dollars américains par an seront affectés aux trois fonds d’ici 2005.

Les deux nouveaux fonds sont les suivants :

  • Le Special Climate Change Fund, qui aidera les pays en développement à appuyer divers projets relatifs au transfert technologique; à l’adaptation aux impacts prévus du changement climatique; aux activités de réduction des émissions dans certains secteurs de l’économie comme l’énergie, le transport et la foresterie; et à la diversification économique.

  • Le Least Developed Countries Fund destiné uniquement, comme son nom l’indique, aux pays les moins développés du monde.  Il sera utilisé pour les aider à élaborer des plans nationaux d’adaptation de même que les programmes de réduction des émissions qui s’y rattachent.

Pour le Canada, l’accord le plus significatif conclu à Bonn a trait au traitement des puits de carbone, en particulier les forêts et les terres agricoles.  L’article 3.3 du Protocole de Kyoto n’accorde des crédits que pour une gamme limitée de pratiques forestières et agricoles.  Par exemple, il spécifie que les crédits seront accordés uniquement pour le boisement et la reforestation (qui consiste à planter des arbres là où il n’y a pas de forêts).  Également, des débits seront enregistrés lorsque des arbres sont coupés et que le terrain déboisé est utilisé à d’autres fins (routes, habitations, etc.)  Cet article n’aborde pas l’exploitation et la replantation des forêts, ni les perturbations comme les incendies de forêts.  Toutefois, l’article 3.4 du Protocole permet l’ajout éventuel d’activités forestières et agricoles.  L’application de cet article s’est retrouvée au cœur des débats entre les divers pays industrialisés.  À Bonn, le Canada a obtenu que l’on élargisse les concepts d’« aménagement forestier », d’« aménagement des terres cultivables », d’« aménagement des pâturages » et de « revégétation » acceptés à titre d’activités admissibles de réduction du carbone.  Même si une limite a été établie relativement aux crédits d’émissions qu’un pays peut réclamer grâce aux puits de carbone, le Canada s’est vu attribuer un quota annuel généreux de 12 millions de tonnes (Mt) de CO2.  Seuls la Russie (17,6 Mt) et le Japon (13 Mt) ont obtenu des quotas plus élevés.  En outre, les crédits accordés pour les puits peuvent maintenant être obtenus par l’entremise d’activités réalisées dans le cadre du MDP et de l’AC, comme la plantation d’arbres dans un pays en développement, et ce, jusqu’à concurrence de 5 p. 100 des émissions de l’année de référence.  Certains observateurs estiment que dans le cadre de l’accord de Bonn, le Canada sera en mesure d’atteindre de 25 à 30 p. 100 de son objectif uniquement grâce aux puits de carbone.