Direction de la recherche parlementaire


Les documents qui figurent sur ce site ont été rédigés par le personnel de la Direction de la recherche parlementaire; ils visent à tracer, à l'intention des parlementaires canadiens, dans un libellé simple et facile à saisir, le contexte dans lequel chaque projet de loi gouvernemental examiné a été élaboré et à fournir une analyse de celui-ci. Les résumés législatifs ne sont pas des documents gouvernementaux; ils n'ont donc aucun statut juridique officiel et ils ne constituent ni un conseil ni une opinion juridique. Prière de noter que la version du projet de loi décrite dans un résumé législatif est celle qui existait à la date indiquée au début du document. Pour avoir accès à la plus récente version publiée du projet de loi, veuillez vous rendre sur le site parlementaire Internet à l'adresse suivante www.parl.gc.ca.


LS-294F

 

PROJET DE LOI C-3 :  LOI SUR L'IDENTIFICATION
PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

 

Rédaction :
Marilyn Pilon
Division du droit et du gouvernement
Le 14 octobre 1997
Révisé le 22 mai 1998


 

HISTORIQUE DU PROJET DE LOI C-3

 

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture : 25 septembre 1997 Première lecture : 30 septembre 1998
Étude avant
Deuxième lecture :

27 mars 1998

Deuxième lecture :

22 octobre 1998
Étape du rapport : 12 mai 1998 Rapport du comité : 8 décembre 1998
Deuxième lecture : 12 mai 1998 Étape du rapport :  
Troisième lecture : 29 septembre 1998 Troisième lecture : 9 décembre 1998


Sanction royale : 10 décembre 1998
Lois du Canada 1998, chapitre 37







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

 

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  La nouvelle Loi
      1.  Définitions, objet et principes
      2.  La banque nationale de données génétiques proposée
      3.  Accès aux données
      4.  Durée
      5.  Conservation des substances corporelles
      6.  Infractions

   B.  Modifications au Code criminel
     
1.  Prélèvement d'échantillons biologiques après une condamnation
      2.  Contrevenants purgeant une peine
      3.  Prélèvement des échantillons et rapports

COMMENTAIRE

 


PROJET DE LOI C-3 : LOI SUR L’IDENTIFICATION
PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

 

 CONTEXTE

Le projet de loi C-3, qu’a présenté le solliciteur général et qui a franchi l’étape de la première lecture le 25 septembre 1997, procurerait un cadre légal permettant de réglementer la conservation et, dans certains cas, le prélèvement de profils génétiques et d’échantillons biologiques dont ils sont tirés. En plus de créer une nouvelle Loi qui permettrait d’encadrer pour la première fois la structure et l’administration d’une banque nationale de données génétiques, le projet de loi modifierait le Code criminel en conférant aux tribunaux le pouvoir d’ordonner le prélèvement d’échantillons biologiques pour analyse génétique. La banque de données qui résulterait d’un tel prélèvement serait sous la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada et servirait aux corps policiers du Canada lors d’enquêtes portant sur des crimes graves. Lors de la première lecture, le projet de loi C-3 était, en substance, presque identique à l’ancien projet de loi C-94, mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissout en avril 1997(1). La nouvelle loi autoriserait le prélèvement et la conservation, à des fins d’analyse génétique, d’échantillons biologiques provenant de quiconque est reconnu coupable d’une infraction « désignée ». Ces échantillons biologiques, destinés aux analyses et à la conservation, pourraient également provenir d’un groupe limité de délinquants déjà condamnés.

L’acide désoxyribonucléique (ADN) se retrouve dans les chromosomes des organismes vivants. On estime que sauf chez les jumeaux identiques, deux personnes ne peuvent avoir le même ADN. À partir de cette donnée, l’ADN qui se trouve dans les substances corporelles présentes sur les lieux d’un crime peut être comparé à celui qu’on prélève sur un suspect, afin de déterminer si les deux échantillons proviennent de la même personne. Ainsi l’analyse génétique peut constituer un outil irremplaçable pour éliminer un suspect ou pour confirmer une culpabilité. L’analyse génétique permet de corriger des erreurs judiciaires, comme en témoignent au moins deux cas récents qui ont été très publicisés au Canada.

Avant que les modifications apportées en 1995 au Code criminel n’établissent des critères et une procédure de prélèvement des substances nécessaires à l’analyse génétique, le Canada n’avait aucun texte de loi qui autorisait le prélèvement de tissus humains à cette fin, avec ou sans le consentement d’un accusé. Nonobstant ce vide juridique, l’analyse génétique avait quand même été utilisée dans des poursuites criminelles au Canada depuis 1988. La jurisprudence menaçait l’admissibilité de cet élément de preuve en cour, en particulier dans les cas où les échantillons biologiques avaient été prélevés sans le consentement de l’accusé(2).

Une fois adopté le projet de loi C-104(3), qui donnait le pouvoir de prélever des substances corporelles pour analyse génétique, le solliciteur général a cherché à obtenir l’avis du public sur la création d’une banque nationale de données génétiques qui faciliterait les enquêtes sur les crimes pour lesquels on n’a pas de suspect ou pour les infractions non résolues où l’ADN du criminel était toujours accessible. À partir d’un document de consultation intitulé Une banque de données génétiques, les intéressés ont pu donner leur avis sur un certain nombre de questions, dont celles de savoir qui devrait être visé par le prélèvement d’échantillons biologiques à des fins d’analyse et quand cette analyse devrait avoir lieu. Comme on pouvait s’y attendre, les corps policiers et les défenseurs de la vie privée différaient d’opinion sur certaines de ces questions. Celle savoir si la loi devait permettre la conservation des échantillons biologiques ou simplement la conservation des profils qu’on en tire a également soulevé la controverse. En février 1997, le solliciteur général a publié un Résumé des consultations, dans lequel on examine les opinions des répondants au document de consultation.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A. La nouvelle Loi

      1. Définitions, objet et principes

L’article 2 incorporerait, par référence, la définition d’infractions désignées « primaires » et « secondaires » au sens de l’article 487.04 du Code criminel. L’article 3 précise que la Loi s’appliquerait aux infractions commises avant son entrée en vigueur. L’article 4 reconnaît les avantages, pour la société, de « la découverte, l’arrestation et la condamnation rapides des contrevenants », ainsi que l’importance de protéger la vie privée des personnes dont le profil génétique et les substances corporelles seraient conservés dans la banque.

      2. La banque nationale de données génétiques proposée

Le paragraphe 5(1) autoriserait et obligerait le solliciteur général à établir une banque nationale de données génétiques composée de deux fichiers. Selon le paragraphe 5(3) le « fichier de criminalistique » contiendrait les profils d’ADN tirés des substances corporelles trouvées sur les lieux d’une « infraction désignée » ou encore sur ou dans le corps d’une victime ou de toute personne ou chose liée à la perpétration de l’infraction. Le « fichier des condamnés » contiendrait le profil obtenu des contrevenants soit avec leur consentement, soit à la suite d’une ordonnance d’un tribunal.

      3. Accès aux données

En vertu du paragraphe 6(1), le commissaire de la GRC serait responsable de la réception des profils génétiques destinés à la banque de données. Sur réception, le nouveau profil serait comparé à ceux qui se trouvent déjà dans la banque afin de déterminer si on ne peut pas faire un recoupement qui pourrait alors être communiqué au laboratoire ou au corps policier approprié avec l’information concernant le ou les crimes et le contrevenant auquel le nouveau profil renvoie. En vertu du paragraphe 6(2), cette information serait mise à la disposition des corps policiers qui ont présentement accès aux dossiers criminels conservés par la GRC. Les paragraphes 6(3), 6(4) et 6(5) permettraient également de comparer et de partager des données avec des corps policiers étrangers, sous réserve d’une entente limitant l’usage de l’information « aux seules fins d’une enquête ou d’une poursuite relative à une infraction criminelle ».

Les paragraphes 6(6) et 6(7) interdiraient la communication ou l’utilisation d’un profil d’identification génétique « sauf pour l’application de la présente loi ». L’article 7 permettrait cependant au commissaire de donner accès à la banque de données à des fins de formation et pour en assurer le bon fonctionnement et l’entretien, tandis que l’article 8 interdirait de communiquer l’information à des fins autres que celles autorisées par la Loi.

      4. Durée

L’article 9 obligerait généralement de conserver indéfiniment l’information contenue dans le fichier des condamnés conformément à la Loi sur le casier judiciaire(4). Cependant, l’information « serait rendue inaccessible une fois pour toutes » si un condamné était éventuellement acquitté. Une mesure semblable serait prise pour les personnes absoutes en vertu du Code criminel; ces données seraient rendues inaccessibles un an après une absolution inconditionnelle ou trois ans après une absolution sous conditions, à moins que la personne ne soit condamnée de nouveau dans l’intervalle. Ainsi, les profils génétiques d’adultes condamnés demeureraient normalement accessibles à moins d’une réhabilitation.

L’information concernant le profil génétique des adolescents poursuivis en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants serait rendue inaccessible une fois pour toutes dix ans après l’exécution complète des décisions relatives a beaucoup d’infractions graves, y compris la plupart des infractions sexuelles, les voies de fait, le vol, etc. Les données génétiques concernant les condamnés pour la plupart des autres d’infractions désignées en vertu de la Loi seraient rendues inaccessibles cinq ans après l’exécution complète des décisions. Pour ceux qui sont coupables, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, d’une infraction désignée punissable sur déclaration sommaire de culpabilité, les données deviendraient inaccessibles trois ans après l’exécution des décisions.

En conséquence des exemptions présentées à l’alinéa 9(2)d), les profils génétiques de ceux qui sont condamnés, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, pour meurtre, tentative de meurtre, homicide involontaire coupable ou agression sexuelle grave demeureraient normalement disponibles. Cette disposition est conforme à l’article 45.02(2) de la Loi sur les jeunes contrevenants, qui permet de conserver indéfiniment dans un fichier spécial établi à cette fin par la GRC les empreintes digitales et les autres éléments de dossier concernant ces infractions.

      5. Conservation des substances corporelles

Les paragraphes 10(1) à 10(6) obligeraient le commissaire à entreposer « en lieu sûr » les échantillons reçus en vertu du Code criminel et jugés nécessaires à l’analyse génétique; tout échantillon excédentaire devait être détruit « sans délai ». Le commissaire aurait également le pouvoir d’ordonner de nouvelles analyses génétiques des échantillons conservés lorsque « des progrès techniques importants » le justifient. En vertu des paragraphes 10(3) et 10(5), tout profil génétique résultant devrait être transmis au commissaire pour dépôt au fichier des condamnés, tandis que les échantillons biologiques ne pourraient ni servir, ni être transmis à d’autres fins. En vertu des paragraphes 10(4) et 10(6), le commissaire pourrait donner accès aux substances corporelles, pour assurer leur conservation ou les détruire lorsqu’ils ne sont plus nécessaires pour analyse.

En vertu du paragraphe 10(7), le commissaire serait tenu de détruire les substances corporelles dans les cas où le profil génétique deviendrait inaccessible en vertu de l’article 9. Cette exigence de destruction des échantillons est nouvelle car l’ancien projet de loi C-94 ne la contenait pas. En outre, le paragraphe 10(8) précise que les échantillons des personnes réhabilitées devraient être conservés « à part » des autres échantillons et qu’ils ne pourraient servir à de nouvelles analyses génétiques.

      6. Infractions

L’article 11 précise les peines qui découleraient de l’usage d’échantillons biologiques ou de la communication des résultats d’analyse génétique à des fins non prévues par la Loi. Quiconque commet ces infractions et est poursuivi pour un acte criminel serait passible d’une peine maximale de deux ans de prison. En cas d’infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine serait une amende maximale de 2 000 $ et un emprisonnement maximal de six mois, ou l’une de ces peines.

L’article 12 donnerait au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements pour l’application de la Loi, tandis que l’article 13 exigerait un examen de la Loi dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur. Afin de garantir la confidentialité des profils génétiques et de l’information connexe contenue dans la banque de données, l’article 14 modifierait l’annexe 2 de la Loi sur l’accès à l’information pour inclure le refus des demandes d’accès à ces dossiers.

   B. Modifications au Code criminel

La deuxième partie de la Loi comprend une série de modifications qui simplifieraient les mandats requis pour les prélèvements aux fins d’analyse. Ainsi, l’article 16 modifierait l’actuel article 487.05 du Code criminel pour préciser qu’un mandat de prélèvement de substances corporelles d’un suspect autorise le nombre d’échantillons « jugé nécessaire à cette fin ». En outre, l’article 23 créerait un nouvel article 487.091 afin de permettre à un juge d’une cour provinciale d’autoriser le prélèvement, pour analyse génétique, du « nombre d’échantillons supplémentaires de substances corporelles de la personne jugé nécessaire à cette fin » s’il s’avère impossible d’établir un profil génétique à partir des échantillons prélevés en vertu d’un mandat précédent. L’article 24 ajouterait également au Code criminel plusieurs formulaires servant à demander ou à autoriser les mandats ou les ordonnances, et à faire rapport à la cour ou au juge sur leur exécution.

D’autres modifications au Code criminel élargiraient les pouvoirs des tribunaux en permettant l’analyse génétique de certains contrevenants, après leur condamnation. Ainsi, les tests génétiques involontaires ne seraient plus limités aux circonstances où un mandat a été émis afin de faire le lien entre un suspect et une infraction particulière.

      1. Prélèvement d’échantillons biologiques après une condamnation

L’article 487.05 du Code criminel permet actuellement à un tribunal d’autoriser le prélèvement de substances corporelles de suspects à des fins d’analyse génétique, pour les enquêtes concernant toute infraction « désignée » à l’article 487.04. Le paragraphe 15(1) modifierait la définition d’« infraction désignée » en créant deux listes d’infractions, désignées « primaires » et « secondaires », afin que les condamnations aient des conséquences différentes. Les infractions primaires désignées en vertu du paragraphe 15(2) seraient les infractions essentiellement violentes ou à caractère sexuel, dont beaucoup peuvent entraîner la perte ou l’échange de substances corporelles permettant d’identifier le coupable par analyse génétique. Même si certaines infractions secondaires peuvent avoir des conséquences aussi graves, bon nombre d’entre elles sont moins susceptibles de donner lieu à la perte ou à l’échange de substances corporelles. Dans ces cas, on peut arguer que les profils génétiques des contrevenants ont peu de chances d’être utiles en cour. En réponse aux recommandations présentées par diverses sources, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a approuvé l’ajout de l’infanticide à la liste des « infractions primaires ». Un certain nombre d’infractions à caractère sexuel concernant les enfants, ainsi que les infractions créées lorsque la mort ou des lésions corporelles sont causées par une conduite dangereuse ou la conduite avec capacité affaiblie ont également été ajoutées à la liste des « infractions secondaires ».

L’article 17 ajouterait l’article 487.051 au Code criminel afin de permettre aux tribunaux d’ordonner le prélèvement d’échantillons servant à l’analyse génétique, dans le cas de contrevenants précis, après condamnation. Si la condamnation concerne une infraction primaire désignée, le tribunal serait obligé d’émettre une telle ordonnance, à moins que l’intéressé ne l’ait convaincu que l’ordonnance aurait sur sa vie privée et sa sécurité un effet « nettement démesuré » par rapport à l’intérêt public. Dans le cas d’une infraction secondaire, le tribunal pourrait émettre une ordonnance s’il est convaincu que cela « servirait au mieux l’administration de la justice ». Pour décider s’il rend ou non l’ordonnance, le tribunal devrait tenir compte de l’effet qu’elle aurait sur la vie privée et la sécurité de l’intéressé. Il serait également tenu de motiver sa décision. L’article 487.054 donnerait à la fois au contrevenant et au procureur le droit d’en appeler de la décision du tribunal.

L’article 487.052 proposé précise que les tribunaux pourraient ordonner le profil génétique des coupables d’une infraction désignée commise avant l’adoption du projet de loi C-3. Le procureur devrait en faire la demande et le tribunal devrait prendre sa décision à partir des mêmes critères que ceux dont il devrait tenir compte pour les condamnés pour une infraction secondaire. Ici encore, l’article 487.054 proposé donnerait aux deux parties le droit d’en appeler de la décision de la cour d’appel.

L’article 487.053 proposé interdirait aux tribunaux d’ordonner un prélèvement pour analyse génétique, sur condamnation, lorsque le procureur déclare que le profil génétique n’est « pas nécessaire » aux fins de la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques. De la même manière, un tribunal ne pourrait ordonner de prélèvement si le condamné consentait à ce que soient portés au fichier des condamnés les résultats de l’analyse génétique des substances corporelles qu’il a fournies, à titre volontaire, dans le cadre de l’enquête relative à l’infraction ou qui ont été prélevés en exécution d’un mandat.

      2. Contrevenants purgeant une peine

L’article 487.055 proposé permettrait à un tribunal d’ordonner le prélèvement d’échantillons corporels à des fins d’analyse génétique chez certains contrevenants condamnés avant l’adoption du projet de loi C-3. Sur demande ex parte, un juge pourrait émettre une ordonnance pour quiconque a été déclaré délinquant dangereux, ou déclaré coupable de plus d’une des infractions sexuelles indiquées et qui purge une peine d’emprisonnement d’au moins deux ans. La définition d’« infraction sexuelle » inclurait les agressions sexuelles ainsi que la plupart des infractions sexuelles visant des enfants. Par suite des modifications approuvées par le Comité permanent, les contrevenants qui auraient été trouvés coupables de plusieurs meurtres commis à différents moments pourraient également être tenus, par une ordonnance, de se soumettre à une analyse génétique. Les contrevenants en libération conditionnelle recevraient une sommation pour le prélèvement de substances corporelles; s’ils ne se présentent pas, on pourrait émettre un mandat d’arrestation aux fins de l’application de la loi.

      3. Prélèvement des échantillons et rapports

L’article 487.056 proposé stipule que l’appel de culpabilité ne retarderait pas l’exécution de l’ordonnance du tribunal de prélever des substances corporelles. De la même manière, le prélèvement devrait être effectué « le plus tôt possible » sur les délinquants déclarés coupables, une fois l’autorisation accordée. Le prélèvement serait fait par un agent de la paix, ou par toute personne agissant sous son autorité, capable d’y procéder du fait de sa formation ou de son expérience. L’article 487.057 proposé obligerait l’agent de la paix à rédiger un rapport et à le déposer auprès de la cour qui a délivré le mandat, le plus tôt possible après le prélèvement. Le rapport préciserait la date et l’heure du prélèvement, ainsi que les substances qui ont été prélevées. L’article 487.058 protégerait l’agent de la paix ou toute personne agissant sous son autorité de toute poursuite, au civil ou au criminel, pour les actes nécessaires qu’il accomplit aux fins de l’exécution du mandat, de l’ordonnance ou de l’autorisation, à condition qu’il ait fait les prélèvements « en prenant les précautions raisonnables ».

Les articles 18 et 19 clarifieraient certaines dispositions du Code criminel découlant du projet de loi C-104 et apporteraient des modifications corrélatives en ce qui concerne les conséquences au sujet des circonstances additionnelles dans lesquelles les tribunaux sont en mesure d’autoriser les prélèvements biologiques, une fois le projet de loi C-3 adopté. Par suite des modifications approuvées par le Comité permanent, la police devrait également s’informer de la préférence exprimée par quiconque est visé par une telle ordonnance et en tenir compte, en ce qui concerne le type de substance corporelle à prélever. L’article 20 mettrait en vigueur l’article 487.071, qui exige que les résultats d’analyse génétique d’un contrevenant soient envoyés au commissaire de la GRC pour transfert dans le fichier des condamnés. Les surplus d’échantillons seraient également envoyés au commissaire, et traités conformément aux dispositions de la Loi.

L’article 21 développerait l’article 487.08 du Code criminel afin de limiter l’utilisation des substances corporelles et de l’analyse génétique qui en découle. Les deux pourraient servir lors d’une enquête sur une infraction désignée pour laquelle on a émis un mandat ou dans le cas de laquelle on a trouvé une substance corporelle, ou pour transmettre les substances au commissaire de la GRC. Les personnes utilisant des substances corporelles ou les résultats d’analyse à des fins non autorisées seraient passibles d’une peine maximale de deux ans de prison, dans le cas d’une poursuite criminelle, ou, dans le cas d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 2 000 $ et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou de l’une de ces peines.

L’article 22 modifierait l’article 487.09 afin que les résultats de l’analyse génétique « sur support électronique » soient rendus inaccessibles une fois pour toutes s’il n’y a pas de lien avec le crime, si l’intéressé est acquitté ou si une année s’écoule après une absolution, un sursis à l’exécution de la peine, le renvoi ou le retrait de l’accusation. Selon la version actuelle de cet article, les dossiers doivent être détruits sur le champ dans l’un ou l’autre des cas précédents.

COMMENTAIRE

Comme nous l’avons mentionné, le projet de loi sur l’identification par les empreintes génétiques a suscité une certaine controverse. Ainsi, les défenseurs de la vie privée ont plaidé en faveur de la conservation des seules données génétiques, craignant que les échantillons biologiques soient plus susceptibles de faire l’objet d’un usage prohibé. Cependant, le gouvernement semble avoir accepté l’argument selon lequel les technologies nouvelles pouvant nécessiter de nouveaux tests, il faut garantir la disponibilité des échantillons. La critique qui est peut-être la plus véhémente du projet de loi vient de groupes policiers qui estiment que le prélèvement d’échantillons devrait se faire au moment de la mise en accusation, comme c’est le cas actuellement pour les empreintes digitales et les photos. La police craint que si tel n’est pas le cas, les coupables de crimes graves non résolus s’abstiennent tout simplement de comparaître sous de nouvelles accusations s’ils savent que la condamnation pourrait donner lieu à un profil génétique pouvant les impliquer dans une autre infraction.


(1)  Outre l'ajout de dispositions pour la destruction des échantillons biologiques dans certaines circonstances, la nouvelle version du projet de loi prévoit également les formulaires devant être utilisées par les corps policiers et les tribunaux.

(2)  Voir, par exemple, R. c. Borden (1994), 3 R.C.S. 145 et R. c. Stillman (1997), 1 R.C.S. 607, deux causes dans lesquelles la Cour suprême du Canada a jugé que l'identification génétique était inadmissible en cour parce que les substances corporelles avaient été saisies par la police sans le consentement de l'accusé et sans autorisation préalable d'un tribunal.

(3)  Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les jeunes contrevenants (analyse génétique), L.C. 1995, C. 27.

(4)  En vertu de l'article 6 de la Loi sur le casier judiciaire, il est permis de conserver séparément des autres casiers judiciaires ceux pour lesquels un pardon a été accordé et de ne pas les dévoiler sans l'autorisation préalable du solliciteur général.  Pour être plus clair, le projet de loi C-3 précise, à l'article 25, que les résultats d'analyse génétique contenus dans le fichier des condamnés seraient considérés comme un « dossier judiciaire relatif à la condamnation » aux fins de la Loi sur le casier judiciaire.