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LS-347F

 

 

PROJET DE LOI S-2: LOI FACILITANT LA PRISE DE
DÉCISIONS MÉDICALES LÉGITIMES RELATIVEMENT AUX TRAITEMENTS DE SURVIE
ET AU TRAITEMENT DE LA DOULEUR

 

Rédaction :
Mollie Dunsmuir
Division du droit et du gouvernement
Le 26 octobre 1999


HISTORIQUE DU PROJET DE LOI S-2

CHAMBRE DES COMMUNES

SÉNAT

Étape du Projet de loi Date Étape du projet de loi Date
Première lecture :   Première lecture : 13 octobre 1999
Deuxième lecture :   Deuxième lecture : 23 février 2000
Rapport du comité :   Rapport du comité :  
Étape du rapport :   Étape du rapport :  
Troisième lecture :   Troisième lecture :  


Sanction royale :
Lois du Canada







N.B. Dans ce résumé législatif, tout changement d'importance depuis la dernière publicaiton est indiqué en caractères gras.

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

ANNEXE


PROJET DE LOI S-2 : LOI FACILITANT LA PRISE DE DÉCISIONS
MÉDICALES LÉGITIMES RELATIVEMENT AUX TRAITEMENTS DE
SURVIE ET AU TRAITEMENT DE LA DOULEUR

CONTEXTE

Le 23 février 1994, un comité spécial du Sénat sur l’euthanasie et le suicide assisté a été chargé d’examiner les enjeux légaux, sociaux et éthiques de l’euthanasie et du suicide assisté et de faire rapport à ce sujet. Le 6 juin 1995, le Comité a présenté au Sénat son rapport intitulé De la vie et de la mort. Dans ce document, le Comité commençait par examiner la portée du rapport, un sujet qui avait suscité une vive discussion.

Le Comité s’est rendu compte qu’il devait se familiariser d’une part avec de nombreuses pratiques touchant les soins de santé dispensés aujourd’hui dans l’ensemble du Canada par les médecins praticiens, les infirmières, les établissements médicaux et les services communautaires, d’autre part avec le rôle et l’influence qu’exercent les gouvernements dans la prestation de tels services. [...]

L’opinion de chacun au sujet de l’aide au suicide et de l’euthanasie pourra ou non être influencée par ces autres considérations de fin de vie, mais il importe de les approfondir afin de laisser à ceux qui prendront le relais du débat une idée juste de cette situation fort complexe. [...] (p. 3)

Par conséquent, le Comité a rédigé des chapitres sur :

  • la terminologie liée à des situations de fin de vie;

  • les soins palliatifs;

  • le traitement de la douleur et la sédation;

  • l’abstention et l’interruption de traitement de survie; et

  • les directives préalables.

Le Comité n’a pas réussi à faire l’unanimité sur toutes les questions, mais il a présenté des recommandations unanimes au sujet de ces premiers chapitres (voir l’annexe).

Au cours de l’examen des enjeux touchant à la mort et à la fin de la vie et des raisons pour lesquelles ces sujets suscitent un tel intérêt dans le public, le Comité a identifié les six facteurs suivants :

  • l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, qui a placé tous les droits individuels dans un contexte légal et juridique tout à fait différent;

  • les progrès de la technologie, qui permettent de prolonger la vie de plus en plus longtemps, et partant de retarder la mort d’autant;

  • l’écart entre l’opinion tenue par certains professionnels de la santé, selon laquelle la mort est un échec médical, et celle défendue par d’autres, dont les spécialistes des soins palliatifs, voulant que les soins dispensés aux mourants devraient viser à alléger la souffrance et non pas à traiter;

  • le changement radical des réalités, où les gens sont beaucoup plus susceptibles de mourir à l’hôpital ou dans des établissements de soins de longue durée qu’à la maison;

  • le changement d’attitude; jadis, on croyait que le médecin savait ce qui était dans l’intérêt du patient alors qu’aujourd’hui le patient est beaucoup plus responsabilisé et a des choix personnels à faire; et

  • le changement démographique, le vieillissement de la population et l’apparition de groupes à risques, p. ex., les personnes porteuses du HIV et les malades du SIDA.

La conjugaison de ces facteurs a porté les membres du Comité à conclure à la nécessité de définir une terminologie appropriée et à entamer une discussion exhaustive sur les soins palliatifs, le traitement de la douleur et l’abstention et l’interruption de traitement de survie.

Le projet de loi S-2 vise principalement à mettre en oeuvre les recommandations du Comité sur le traitement de la douleur et l’abstention et l’interruption de traitement de survie, quoiqu’il aborde également des questions comme la terminologie, les soins palliatifs et les directives préalables.

DESCRIPTION ET ANALYSE

Le projet de loi S-2 débute par un préambule qui le place nettement dans le contexte du rapport du Comité spécial.

L’article 1 donne le titre abrégé de la loi : Loi facilitant la prise de certaines décisions médicales. Le Comité spécial avait recommandé que le Code criminel soit modifié de manière à préciser et à reconnaître explicitement les circonstances dans lesquelles il serait légal a) de permettre l’abstention et l’interruption de traitement de survie et b) d’administrer un traitement visant à alléger les souffrances mais susceptible d’abréger la vie. Toutefois, le projet de loi S-2 porte également, à l’article 6, sur d’autres questions de santé, de sorte qu’il était impossible de ne procéder qu’à une simple modification du Code criminel.

L’article 2 préciserait qu’un soignant peut légalement administrer au patient des médicaments en doses suffisantes pour soulager la souffrance physique, même si ces doses sont susceptibles d’abréger sa vie. « Le Comité reconnaît qu’administrer un traitement destiné à soulager la souffrance au risque d’abréger la vie est légal. Toutefois, il reconnaît également que le corps médical et le public comprennent mal les règles juridiques actuelles concernant cette pratique [...] » (p. 33). Cette confusion engendre la crainte de la responsabilité, laquelle peut mener à l’administration de médicaments ne convenant pas et entraînant pour le patient des souffrances inutiles. De même, en raison du secret qui caractérise le cadre médical, il est difficile d’obtenir des données, un phénomène qui nuit à la recherche sur le traitement de la douleur et qui pourrait même cacher des abus.

Le projet de loi vise à expliquer clairement que la protection contre la responsabilité criminelle n’existe que lorsque le but du traitement aux médicaments est de soulager la douleur et se limite au soulagement de la douleur physique. Le Comité spécial avait utilisé l’expression plus large de soulagement de la souffrance; l’article 2 réduit la portée du concept et exclut les situations où un traitement aux médicaments pourrait être administré pour soulager des souffrances d’ordre émotif ou psychologique. De plus, l’article 2 n’offrirait aucune protection dans le cas où le motif de l’accusation de responsabilité criminelle serait autre, par exemple la négligence criminelle. Enfin, il est précisé que l’article 2 ne s’appliquerait pas aux situations d’euthanasie dans lesquelles existe l’intention de causer la mort.

Le « soignant » est défini comme le praticien habilité à exercer la médecine sous le régime des lois d’une province et ayant la responsabilité du traitement et des soins médicaux à administrer à la personne visée, ou un infirmier ou une autre personne travaillant, dans le même cas, sous la direction et sur les instructions d’un tel praticien. Cette définition reconnaît le fait qu’il s’agit souvent d’infirmiers ou d’infirmières travaillant sous la direction d’un médecin qui se chargent du traitement continu de la douleur.

L’article 3 permettrait de préciser l’absence de responsabilité criminelle dans le cas d’un soignant qui autorise l’abstention ou l’interruption de traitement médical de survie d’une personne, à condition que cette personne ait présenté une demande valide en ce sens pendant qu’elle en était capable. Le paragraphe 3(3) établit la marche à suivre pour obtenir cette permission lorsque l’intéressé n’a pas la capacité de faire la demande.

L’expression « traitement de survie » est définie comme l’ensemble d’actes médicaux ou chirurgicaux destinés à prolonger la vie, y compris l’hydratation et l’alimentation artificielles. Le Comité spécial a donné les définitions et exemples suivants, à ce sujet.

Le Comité a défini l’abstention de traitement de survie comme étant le fait de ne pas amorcer un traitement susceptible de maintenir le patient en vie, par exemple ne pas tenter la réanimation cardiorespiratoire (RCR), ne pas donner une transfusion sanguine, ne pas administrer d’antibiotiques ou ne pas assurer l’alimentation et l’hydratation artificielles. L’interruption désigne le fait de cesser un traitement susceptible de maintenir le patient en vie, par exemple débrancher le respirateur ou enlever la sonde gastrique qui assure l’alimentation et l’hydratation. (p. 39)

Le paragraphe 3(2) traite du cas où une personne capable fait une « demande libre et éclairée » pour l’abstention ou l’interruption de traitement. Les définitions de « demande libre et éclairée » et de « capable » ou « capacité » du projet de loi S-2 sont très proches des définitions données dans le rapport du Comité spécial.

« Consentement libre et éclairé » : Accord volontaire d’une personne qui possède une capacité mentale suffisante, selon l’avis d’un médecin compétent, pour faire un choix rationnel quant aux options de traitement. Il suppose que la personne sait ce qu’il adviendra si le traitement est administré ou omis et qu’elle connaît les solutions de rechange possibles. Le consentement ne doit pas être vicié par la coercition, la contrainte ou une erreur.  (p. 16)

« Capable » : Qui est apte à comprendre la nature et les conséquences de la décision à prendre ainsi qu’à communiquer cette décision.  (p. 14)

Le projet de loi préciserait qu’une personne capable est habilitée à consentir à l’avance à des décisions mettant en cause un traitement médical de fin de vie, par le truchement d’une directive, « soit par écrit, soit verbalement, soit par signes », en présence d’au moins un témoin qui n’est pas un soignant.

Le paragraphe 3(3) traite du cas où une personne perd sa capacité avant d’avoir pris une décision. Dans un tel cas, la demande d’abstention ou d’interruption de traitement pourrait être faite par 1) un mandataire nommé conformément à une loi provinciale; 2) à défaut, par son représentant légal ayant le pouvoir de prendre en son nom des décisions en matière de soins de santé; 3) à défaut encore, par son conjoint, son compagnon ou le parent qui est le plus intimement lié à lui.

L’article 4 donne les définitions de « capable » ou « capacité », de « demande libre et éclairée », de « soignant » et de « traitement de survie », que nous avons déjà examinées ci-dessus.

L’article 5 indique que la Loi n’aurait pas pour effet d’imposer l’obligation légale d’administrer un traitement médical. L’un des objectifs de la Loi est de préciser le fait qu’un patient peut prendre la décision de refuser le traitement mais que cette décision n’a pas d’effet sur l’administration du traitement. Si un professionnel de la santé estime qu’un traitement est futile, il n’est pas obligé de l’administrer. De même, dans le cas d’un professionnel de la santé estimant que l’administration d’un traitement de la douleur risque d’abréger la vie, le projet de loi indique clairement qu’il n’est pas obligé de l’administrer.

L’article 6 reconnaît qu’un bon nombre des recommandations du Comité spécial nécessitent des recherches et des lignes directrices. Étant donné que les questions touchant le traitement de la douleur et l’abstention et l’interruption de traitement de survie tombent dans une zone « grise », il est difficile d’obtenir des informations précises à ce sujet. En clarifiant la situation légale, le projet de loi S-2 devrait permettre que de telles données soient produites et diffusées; cependant, il continuerait d’être nécessaire de poursuivre le travail d’éducation et l’élaboration de lignes directrices. Les provinces jouent un rôle important dans le domaine des soins de santé; c’est pourquoi l’article 6 indique clairement que le mandat du ministre de la Santé pourrait consister notamment à coordonner l’établissement de lignes directrices nationales sur l’abstention et l’interruption de traitement, le traitement de la douleur et les soins palliatifs, en collaboration avec les autorités provinciales et les associations de professionnels de la santé. Le ministre de la Santé serait également autorisé à encourager l’éducation du public en ce qui a trait au traitement de la douleur et aux soins palliatifs. L’article 6 propose enfin que le Ministre soit habilité à surveiller les effets du projet de loi S-2 sur l’abstention et l’interruption de traitement.


ANNEXE

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