PRB 98-9F COLLOQUE PARLEMENTAIRE « AU-DELÀ DE L'ALÉNA VERS
UN MARCHÉ Rédaction
: TABLE
DES MATIÈRES
PRÉFACE LALÉNA ET LUNION EUROPÉENNE RÉSUMÉ
DES POINTS SAILLANTS DU COLLOQUE PARLEMENTAIRE EXPÉRIENCE DU CANADA DANS LALÉNA (PREMIER JOUR) Panel
no 1 «Questions
commerciales et mécanismes de règlement des différends» LE
CANADA ET LUE : VERS UN MARCHÉ TRANSATLANTIQUE Séance
no 1 « Faits
saillants des relations commerciales et économiques Canada-Europe » ANNEXE
PROGRAMME NOTES
DE SYNTHÈSE POUR LE COLLOQUE PARLEMENTAIRE PANEL
No 1 QUESTIONS COMMERCIALES ET MÉCANISMES NOTE No 1 : LALÉNA ORIGINES, ÉLÉMENTS CLÉS ET ÉVOLUTION Origine ANNEXE
1 : LES PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DE LALÉNA NOTE
No 2 : LES MÉCANISMES DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS Le
fonctionnement des institutions de règlement des différends
ANNEXE : Différends entre le Canada et les É.-U. en vertu du chapitre PANEL No 2 : LES COMMISSIONS DE LALÉNA : ENVIRONNEMENT ET TRAVAIL NOTE
No 3 : MANDAT ET ÉVOLUTION DES COMMISSIONS SPÉCIALISÉES LANACE
et la Commission de coopération environnementale
NOTE No 4 : LALÉNA ET LES QUESTIONS ENVIRONNEMENTALES LALÉNA,
un accord « vert »?
NOTE No 5 : LALÉNA ET LE DOMAINE DU TRAVAIL Les
résultats des institutions de lALÉNA
ANNEXE : PRINCIPES DE LANACT RELATIFS À LA MAIN-DOEUVRE PANEL No 3 : LALÉNA ET LES QUESTIONS SOCIALES ET CULTURELLES NOTE No 6 : LALÉNA ET LES QUESTIONS SOCIALES Une
« charte sociale » pour contrer le « dumping social »?
NOTE No 7 : LALÉNA ET LES QUESTIONS CULTURELLES L« exemption
culturelle » contenue dans lALÉ et dans lALÉNA
SÉANCE
No 1 : LE COMMERCE BILATÉRAL CANADA-EUROPE ET
SÉANCE
No 2 : QUESTIONS ET SECTEURS SECTORIELS EN VUE NOTE
No 8 : APERÇU DES IRRITANTS COMMERCIAUX Introduction
SÉANCE
No 3 : AU-DELÀ DE LALÉNA VERS UN MARCHÉ NOTE
No 9 : POUR RENFORCER LA RELATION COMMERCIALE TRANSATLANTIQUE ANNEXE
2 : MEMBRES DES PRINCIPALES ORGANISATIONS EUROPÉENNES COLLOQUE PARLEMENTAIRE « AU-DELÀ DE LALÉNA
VERS UN MARCHÉ
PRÉFACE LALÉNA ET LUNION EUROPÉENNE Dans un monde dactivité économique de plus en plus internationalisée et de prolifération daccords commerciaux régionaux, les deux blocs dintégration économique qui se distinguent clairement de par leur taille et leur importance sont la Communauté économique européenne et la zone créée par lAccord de libre-échange nord-américain. Avec une population totale de plus de 370 millions dhabitants et un PIB global proche de 9 billions de dollars US, les 15 pays membres de lUnion européenne constituent déjà un énorme marché intérieur, et ce marché connaîtra une expansion considérable avec lélargissement prévu de lUE à plus de 20 pays. LUE est aussi la plus grosse zone mondiale dexportation de biens et de services, et le deuxième marché dimportation. Les trois pays signataires de lAccord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) le Canada, les États-Unis et le Mexique ne constituent pas un marché unique et nient toute velléité dintégration politique. La zone de lALÉNA est pourtant de plus en plus intégrée sur le plan de lactivité commerciale, ce qui a une incidence sur les politiques intérieures, notamment dans les domaines délicats de la réglementation environnementale, sociale et culturelle. La zone de lALÉNA est aussi une entité puissante à léchelle internationale, était donné la taille de son marché : près de 400 millions dhabitants, un PIB de plus de 11 billions de dollars US et des échanges commerciaux internes de 500 milliards de dollars US. Et il se peut aussi que lALÉNA sélargisse pour intégrer dautres pays. Les politiques de lUE et de lALÉNA exercent une très forte influence sur lévolution du régime global de commerce et dinvestissement, et cest pourquoi il est tellement important quelles soient compatibles avec les principes et règles multilatéraux de lOrganisation mondiale du commerce (OMC). Le protectionnisme régional engendrerait une concurrence dommageable. Il est donc extrêmement important de bien entretenir la relation entre les deux blocs. Jusquà présent, cependant, du côté nord-américain, la relation économique avec lEurope a évolué essentiellement en suivant des voies bilatérales. Le Canada et les États-Unis ont tous deux des accords-cadres exhaustifs et récemment mis à jour avec lUE; pour ce qui est du Mexique, il négocie actuellement son propre accord commercial bilatéral avec lUE. Daucuns craignent au Canada que ce bilatéralisme ne devienne excessivement dominé par les priorités UE-EU, ce qui marginaliserait les intérêts et valeurs canadiens. On en a conclu que les deux parties, nord-américaine et européenne, devraient donc avoir une optique transatlantique plus large. Quels que soient les mérites de cette thèse, il semble que, tout comme les Canadiens ont intérêt à comprendre les ramifications des développements économiques en Europe, les Européens ont intérêt à comprendre la position du Canada tant du point de vue des développements en Amérique du Nord que de la poursuite dobjectifs transatlantiques. Voilà pourquoi un colloque parlementaire Canada-Conseil de lEurope sest tenu en octobre 1998 sur le thème « Au-delà de lALÉNA vers un marché transatlantique Canada-Europe ». Dans la partie qui suit, nous donnons un résumé des points saillants de ce colloque. RÉSUMÉ
DES POINTS SAILLANTS DU COLLOQUE PARLEMENTIARE Les 19 et 20 octobre 1998, le Parlement canadien a tenu un colloque sur le thème suivant : « Au-delà de lALÉNA vers un marché transatlantique Canada-Europe ». Le colloque était parrainé conjointement par lAssociation parlementaire Canada-Europe et la Sous-commission des relations économiques internationales de la Commission du développement et des affaires économiques de lAssemblée parlementaire du Conseil de lEurope. Le Conseil, établi à Strasbourg en France, est le plus ancien organisme européen voué à la solidarité démocratique et sociale; il va fêter en 1999 le 50e anniversaire de sa fondation. Au sein de son Assemblée, des parlementaires des 40 États membres dont les 15 États de lUnion européenne (UE) et la plupart des pays de lEurope centrale et de lEurope de lEst, y compris la Russie participent à ses sessions trimestrielles, aux activités de ses commissions et aux activités connexes de groupe sur des questions politiques. Depuis mai 1997, les parlementaires canadiens ont le statut dobservateur à lAssemblée et ils sen sont servi pour étendre le champ de leur participation et pour accentuer leurs rapports de longue date avec sa commission des affaires économiques. Lidée dun colloque à Ottawa a dabord été discutée avec la nouvelle présidente de cette commission, Mme Helle Degn, à loccasion de la session de janvier 1998 de lAssemblée. Leurs homologues européens ayant exprimé le désir den apprendre plus long sur la zone nord-américaine de libre-échange vue du Canada, les parlementaires canadiens ont manifesté un intérêt réciproque en proposant daller au-delà de lALÉNA pour explorer dautres perspectives et options, en particulier la possibilité daboutir à un accord économique transatlantique plus étendu, susceptible de mettre en rapport les blocs régionaux de plus en plus intégrés que sont lAmérique du Nord et lEurope, et de leur profiter mutuellement. Les questions soulevées au colloque, en particulier à la séance de clôture où lon sest penché sur les liens possibles à établir entre les visions canadienne et européenne, étant donné des plans de mondialisation, dinterrégionalisation et de continentalisation du commerce complexes et en pleine évolution, sont de plus en plus pertinentes depuis laccord conclu entre les États-Unis et lUE en novembre 1998 sur un plan daction pour un « Partenariat économique transatlantique ». Le sommet Canada-UE du 17 décembre 1998 a lancé une nouvelle initiative commerciale UE-Canada mais sans fournir de détails. Dans de telles circonstances, quelle est la meilleure façon pour le Canada daméliorer sa situation aux côtés de ses partenaires de lALÉNA tout en resserrant ses liens avec ses partenaires européens? Les quatorze pénalistes qui ont été entendus pendant les deux journées du colloque (voir lannexe 1 pour connaître lordre du jour officiel) ont contribué de diverses façons à la formulation dune réponse éclairée à la question. Mais le débat a aussi permis de constater quil ne sera pas aisé de veiller à la protection des intérêts du Canada et à leur promotion dans le contexte de lintégration régionale et des négociations commerciales, compte tenu de lautre dynamique puissante qui est le moteur dun engagement accru entre lAmérique du Nord et lEurope. La première journée du colloque a été consacrée à lévaluation de la participation du Canada à lALÉNA; plus précisément, trois panels se sont concentrés chacun sur une des questions suivantes : la performance commerciale et le règlement des différends, les mécanismes et effets dans les domaiens de lenvironnement et du travail, les dimensions culturelles et sociales. Dans chaque cas, il y a trois exposés liminaires suivis dune période de questions et dune discussion très animée. Au déjeuner, le ministre des Transports, lhon. David Collenette, sest adressé aux participants. Le deuxième jour, on a étudié les possibilités pour le Canada et lEurope détablir un marché transatlantique. Le matin, il y a eu deux séances au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international pour étudier les relations commerciales et économiques Canada-UE, en particulier certaiens questions sectorielles et les domaines de coopération bilatérale future. De plus, le ministre de lIndustrie, lhon. John Manley, a prononcé une allocution sur ce thème au déjeuner. La séance de clôture a tenté de tirer des conclusions générales susceptibles de servir de base à la promotion dune politique orientée vers un resserrement et un approfondissement dun partenariat commercial entre le Canada et lEurope qui va consolider le pont transatlantique à une époque de grande transition et dincertitude sur le plan international. Vous trouverez ci-après une brève synthèse des six ateliers qui ont eu lieu au cours des deux journées du colloque (une transcription révisée des délibérations intégrales sera disponible). Nous avons tenté de focaliser sur les idées qui sont les plus intéressantes au sens où elles favorisent une politique progressiste du Canada dans le contexte de lALÉNA et, au-delà, un lien transatlantique plus fort avec lEurope, qui tienne compte des problèmes mondiaux accentués qui affligent les pays des deux régions. EXPÉRIENCE DU CANADA DANS LALÉNA (PREMIER JOUR) Panel n°1 « Questions commerciales et mécanismes de règlement des différends » Panélistes :
M. Michael Hart qui, comme M. Gordon Ritchie, un autre panéliste, a participé intimement à la négociation de lAccord de libre-échange Canada-États-Unis (ALÉ) il y a plus de dix ans, commence son exposé en soulignant limportance dun mécanisme efficace pour le règlement des différends; ce doit être un impératif de la politique commerciale canadienne pour les accords non seulement bilatéraux mais aussi multilatéraux. Les efforts se poursuivent pour renforcer de tels mécanismes basés sur des règles, afin de surmonter les obstacles de « lintégration profonde ». Il ne suffit pas dabaisser les barrières commerciales et de faciliter le commerce transfrontière; les gouvernements doivent aussi trouver de meilleurs moyens de gérer les relations entre eux et de concilier les divers intérêts des entreprises, des consommateurs et de la société. Bien quil demeure extrêmement difficile damener les législateurs américains à accepter des procédures internationales contraignantes, M. Hart soutient que lALÉ et lALÉNA ont permis de faire bien des progrès grâce au « chapitre 19 » qui crée un système innovateur de groupes spéciaux binationaux, institué sous le régime de lALÉ et conservé dans lALÉNA, pour régler les problèmes de droits antidumping (AD) et de droits compensateurs (DC), qui surviennent entre les deux pays. Parmi les 35 cas réglés sous le régime de lALÉ, laffaire interminable du bois doeuvre résineux est la seule grande cause qui na pas pu être réglée. De plus, au lieu de parler de « gagnants » et de « perdants », M. Hart estime que lorsque le règlement des différends se fait comme il faut, le système est plus honnête et, de surcroît, il « a le merveilleux avantage damener les gouvernements à rejeter les politiques plutôt insensées ». En vertu de lALÉNA, seulement 12 des 21 nouvelles causes présentées sous le régime du chapitre 19 et une seule (au sujet de la gestion de loffre des produits agricoles) sous le régime du chapitre 20 (qui prévoit la procédure générale de règlement des différends) concernent le Canada. Le système binational pourrait être mis à lépreuve plus souvent si la situation économique venait à se détériorer. De même, le monde profite nettement du système de règlement des différends plus rigoureux de lOrganisation mondiale du commerce (OMC) mis sur pied en 1995 (148 consultations concernant 112 cas, et 20 décisions finales des groupes spéciaux jusquà présent), un régime qui, somme toute, est « meilleur que celui de lALÉNA ». Selon M. Hart, le système de règlement des différends commerciaux marche bien, mais il continue dévoluer et il sera amélioré par les négociations futures entre les gouvernements membres. À mesure que les causes se multiplient et que les problèmes se compliquent, on peut aussi apprendre beaucoup de lUnion européenne (UE) qui a un tribunal permanent apte à offrir une plus grande stabilité et une meilleure crédibilité que les groupes spéciaux ponctuels de lALÉNA. Mme Sally Rutherford souscrit à lopinion que, de façon générale, les mécanismes de règlement des différends ont bien servi le Canada, notamment dans des secteurs comme lagriculture qui continue de faire lobjet dattaques incessantes de lautre côté de la frontière. Comme le système des groupes spéciaux constitue au moins une procédure plus rationnelle et moins soumise aux pressions politiques, il a « accru sensiblement la confiance de lindustrie à la fois dans le secteur primaire et dans le secteur de la transformation ». LALÉ a été une percée décisive à cet égard; lALÉNA na pas ajouté grand-chose. Malgré ce progrès, Mme Rutherford donne des exemples tirés des annales récentes du commerce agricole entre le Canada et les États-Unis pour illustrer la façon dont les systèmes politique et administratif du droit commercial des deux côtés de la frontière sopposent parfois. Non seulement de tels problèmes persistent, mais ils sont susceptibles de saggraver à mesure que la réglementation intergouvernementale va se compliquer et se multiplier à divers paliers p. ex., des règles différentes sappliquant à la dimension hygiénique ou biotechnologique des produits alimentaires aux niveaux subnational (étatique ou provincial), fédéral et, dans le cas de lUE, supranational. LALÉNA a cherché à réduire le plus possible le harcèlement, mais lorsque les différends « vont au-delà des problèmes juridiques ou commerciaux traditionnels ou historiques, on ne sait pas encore comment ça sintègre ». Les dépenses de plus en plus élevées constituent une autre difficulté pour les industries canadiennes touchées, puisque les groupes de pression américains sont capables de réunir la somme des ressources maintenant nécessaires pour défendre les causes complexes. Le troisième panéliste, M. Gordon Ritchie, conseille la circonspection puisque, en pratique, le règlement des différends Canada-États-Unis a révélé de « graves problèmes » de fonctionnement. Il serait incorrect de porter un jugement sur le système en se basant sur son incapacité de régler le litige sur le bois doeuvre, mais cette affaire est pourtant révélatrice puisque cest le différend commercial bilatéral le plus important, le plus ancien et celui qui continue de monopoliser lattention. Malheureusement, les États-Unis persistent à refuser de démanteler leur système de recours commerciaux qui est inacceptable. En vertu des règles de lALÉ et de lALÉNA, ils sont au moins tenus dappliquer équitablement leur propre droit. Cest une amélioration de taille, mais il faut sattendre quils se contenteront de restreindre les considérations dintérêt national. Malgré les nouvelles règles de lOMC, les pratiques nationales des États-Unis contredisent souvent leurs engagements internationaux. Dans le litige sur le bois doeuvre qui nest toujours pas réglé, seule la chance a permis au Canada de remporter une décision cruciale dun groupe spécial qui était divisée 3-2 selon la nationalité des membres, et les trèves protectionnistes ultérieures peuvent naccorder au mieux quune solution temporaire. Pour de plus amples détails sur cette situation, voir la note n° 2 figurant dans la documentation produite par la Direction de la recherche parlementaire. M. Ritchie a soulevé une deuxième grande question : une innovation de lALÉNA concernant les différends relatifs aux investissements, en particulier les dispositions permettant aux entreprises américaines dentreprendre de leur propre chef, sans avoir besoin de lapprobation du gouvernement américain, une procédure arbitrale contre les autorités gouvernementales canadiennes en cas de violation de leurs droits sous le régime de lALÉNA. Le plus ironique, cest quune entreprise étrangère active au Canada aurait alors un recours dont une entreprise canadienne ne pourrait pas se prévaloir. Plusieurs poursuites intentées récemment contre le Canada en invoquant les dispositions investisseur-État de lALÉNA ont soulevé la controverse, surtout que des dispositions tout aussi mauvaises « ont été subrepticement incorporées dans les projets daccords prétendument multilatéraux sur linvestissement ». (Pour de plus amples détails sur cette situation et son rapport avec les négociations avortées de lAMI, voir la note n° 4.) M. Terry Davis (Royaume-Uni) entame la période de discussion en demandant si lopinion publique était pour ou contre le libre-échange nord-américain. La coprésidente du panel, la sénatrice Sharon Carstairs, et dautres parlementaires canadiens de divers partis qui sont présents expliquent que cest une question politique qui a soulevé les passions et qui avait dailleurs été lun des principaux enjeux de la campagne électorale de 1988 à lissue de laquelle le gouvernement avait été réélu même si, daprès les sondages, la majorité, malgré dimportantes variations suivant les régions, sopposait à lALÉ initial. Les syndicats de même que certaines provinces ont mené la charge contre les accords de libre-échange. (Le lecteur trouvera une histoire détaillée de cette opposition dans le livre de Jeffrey Ayres, Defying Conventional Wisdom : Political Movements and Popular Contention Against North American Free Trade, Toronto, University of Toronto Press, 1998.) Au fil de la décennie, la position de la population sur le libre-échange semble sêtre assouplie et être devenue généralement favorable. Cependant, M. Ritchie fait remarquer quau-delà de lALÉNA, certaines questions primordiales comme la culture et le commerce demeurent en suspens, notamment entre le Canada et les États-Unis. Anticipant sur la discussion prévue pour le panel de laprès-midi, il fait valoir que le Canada doit défendre avec beaucoup de fermeté ses valeurs nationales dans de tels secteurs. Le coprésident du panel, le député Bill Graham (président du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes, qui va entreprendre en 1999 une grande étude sur les négociations commerciales mondiales possibles) a vivement insisté sur ce fossé culturel et sur la nécessité pour les Canadiens de coopérer avec leurs collègues européens pour trancher la question multilatéralement. Se mêlant à la discussion, M. Hart souligne les nouveaux facteurs que fait intervenir la « nouvelle économie politique des négociations commerciales internationales » auxquelles les parties sont plus nombreuses que jamais. Non seulement les gouvernements et les intérêts commerciaux y participent, mais un éventail de plus en plus étendu dacteurs sociaux sy engagent, établissant ainsi un lien entre, dune part, les priorités commerciales et les programmes dinvestissement qui se développent et, dautre part, les droits environnementaux, sociaux et fondamentaux et les autres objectifs normatifs. Ce qui est arrivé à lAMI montre quil est désormais impossible de faire abstraction de ces préoccupations. Insistant sur ce point, Mme Durrieu (France) donne des détails sur les raisons pour lesquelles la France sest retirée des pourparlers sur lAMI qui auraient normalement dû reprendre le jour même à Paris. Mme Rutherford fait remarquer avec intention que nous sommes entrés dans une ère de mondialisation où les grandes questions telles que la souveraineté, la gestion des affaires publiques et la cohérence des accords internationaux qui pullulent nont pas encore été tranchées et dont les conséquences restent mystérieuses. Résumant leurs vues sur les développements au-delà de l ALÉNA, les autres panélistes conviennent quil faudra encore surmonter dimportants obstacles politiques. M. Ritchie soulève la question dune meilleure répartition des avantages de la libéralisation du commerce et aussi la perspective dajouter une « configuration nord-atlantique » au libre-échange nord-américain. M. Hart envisage que les différends portant sur les problèmes bilatéraux comme le bois doeuvre se poursuivent, mais il croit à une interaction progressive des expériences et des regroupements grâce à une pluralité de tribunes de négociation régionales et multilatérales. Toutefois, il demeure sceptique au sujet de la possibilité darriver à une libéralisation considérable du commerce dans les contextes distincts du projet de « zone de libre-échange des Amériques », de lAPEC ou dune éventuelle zone de libre-échange transatlantique (ZLÉTA). À son avis, une démarche vers un regroupement multilatéral (c.-à-d. renvoyer les affaires à lOMC) est plus plausible, étant donné la logique même des grandes questions actuellement à létude. Au sujet de lavenir de la politique commerciale multilatérale, M. Hart conclut ainsi :
Panel n°2 « Le travail et lenvironnement sous le régime de lALÉNA » Panélistes :
Mme Jeanine Ferretti commence par expliquer les origines de la Commission, créée par les trois États membres de lALÉNA, après sa conclusion, en réaction aux craintes que lAccord, bien qu'il renferme des dispositions « vertes », nentraîne une détérioration de létat de lenvironnement, un affaiblissement de la réglementation environnementale et une érosion de la responsabilisation des gouvernements. Laccord « parallèle » concernant lenvironnement, qui a créé la CCE, énonce trois grands objectifs : éviter les différends relatifs au travail et à lenvironnement; appliquer efficacement les lois concernant lenvironnement; régler les préoccupations environnementales communes. La CCE même est dotée dune structure tripartite qui comprend un comité consultatif populaire unique. Tout en reconnaissant que la CCE ne fait pas lunanimité chez les écologistes, Mme Ferretti décrit un programme de travail trilatéral militant dans des secteurs clés comme la pollution transfrontalière, les rapports commerce-environnement et lapplication du droit de lenvironnement. Un des points faibles des institutions de lALÉNA, comme un examen du rendement a permis de le constater dernièrement, cest que « jusquà présent, le programme commercial est appliqué en fonction dintérêts et daffaires bien différents de ceux du programme de la CCE ». Toutefois, la CCE possède des mécanismes innovateurs qui permettent aux simples citoyens de présenter des plaintes qui font lobjet dune décision sur les faits. Selon Mme Ferretti, les trois gouvernements reconnaissent que la coopération environnementale a entraîné la réalisation de bien plus de choses que le seul règlement des questions de commerce et denvironnement, un champ complexe et controversé. À son avis, le défi le plus intéressant de la CCE, cest le dernier lancé par une coalition dorganisations syndicales et écologistes canadiennes soutenant que la procédure darbitrage investisseur-État au chapitre 11 de lALÉNA compromet ses objectifs environnementaux. Ce geste a déclenché un examen interne des structures de la CCE et de lALÉNA et ce sera une cause type très importante quil faudra surveiller. Au sujet de laccord parallèle concernant le travail, M. Peter Bakvis expose plusieurs inquiétudes exprimées par le mouvement syndical lors des négociations de lALÉNA : les risques de perte demplois et de salaires, laffaiblissement du code du travail et lérosion des mesures de protection sociale. LALÉNA a été vivement critiqué parce quil ne renfermait aucune disposition mentionnant expressément les droits des travailleurs ou les normes sociales. Contrairement à ce qui se passe en Europe, lALÉNA proposait lintégration à un pays industrialisé où le salaire moyen atteignait à peine 10 p. 100 du niveau établi au Canada. Les choses se sont améliorées après lélection du gouvernement Clinton, puisquil y a eu conclusion dun « accord parallèle » complémentaire sur la coopération dans le domaine du travail. Les États-Unis ont aussi implanté un programme daide à ladaptation, même si aucun ne sannonçait au Canada. La commission nord-américaine du travail qui a été créée ressemble à son équivalent pour lenvironnement en ce quelle a énoncé quelques principes louables. Pourtant, il lui manque un comité consultatif populaire et elle est incapable de soutenir la comparaison avec les structures européennes mises sur pied pour défendre les droits économiques et sociaux. Aucune norme commune na été établie et lapplication des lois nationales en vigueur demeure particulièrement problématique au Mexique (où le pouvoir dachat du salaire minimum a diminué de 30 p. 100 depuis 1994). M. Bakvis soutient aussi que la procédure des plaintes est restrictive et faible, puisque la violation de certains droits élémentaires p. ex. liberté dassociation, négociation collective peut seulement faire lobjet de consultations entre les gouvernements des parties à lALÉNA. Par conséquent, il recommande de consolider ces structures en ajoutant lobligation de respecter les droits primordiaux internationaux dans le domaine du travail (en particulier les sept conventions fondamentales de lOrganisation internationale du travail), en prévoyant des sanctions en cas de non-respect des obligations et en établissant des mécanismes de consultation permanents avec les représentants des ONG, des syndicats et du patronat. Mme Michelle Swenarchuk ramène sur le tapis les effets sur lenvironnement et sur la santé des dix années dapplication de lALÉ et de lALÉNA. Ses pronostics ne sont pas optimistes à en juger daprès le récit quelle fait de la façon dont les traités commerciaux successifs, malgré une vive opposition populaire, ont en fait restreint les motifs de protection de lintérêt public. Elle mentionne plusieurs causes litigieuses (notamment la contestation, avec succès, par le Canada des normes de lUE interdisant les résidus dhormones dans le boeuf et la poursuite remportée contre le Canada par Ethyl Corp., une société américaine, en vertu du chapitre de lALÉNA sur les investissements) pour illustrer comment, à son avis, on a laissé des intérêts commerciaux lemporter sur dautres valeurs dordre public dans la loi. « Nous avons vu croître le nombre de domaines légitimement réglementés où la déréglementation du commerce et les accords ont eu pour effet dempêcher les gouvernements de prendre des mesures légitimes ». Se servant de lannonce par le premier ministre français, M. Jospin, que la France se retire des négociations sur lAMI, Mme Swenarchuk fait remarquer la différence importante entre une délégation de souveraineté intergouvernementale dans le cadre bien établi de lUE et la cession de la souveraineté à des intérêts commerciaux internationaux privés. Quant à la structure du régime du commerce international et des différends commerciaux, elle plaide pour une plus grande « transparence », y compris des droits daccès publics, et aussi pour un contrôle et une responsabilisation parlementaires efficaces. Elle trouve encourageantes les possibilités dalliances entre le Canada et lEurope, qui sont susceptibles dêtre conclues de façon à entraîner une remise en question politique et démocratique opportune de lorientation future du régime commercial. Lors de la discussion, les réponses aux questions pointues de M. Davis confirment la réussite limitée et inégale des institutions de lALÉNA sur le plan du travail et de lenvironnement, même si lon a fait un premier pas en établissant des mécanismes de coopération dans ces deux domaines. Mme Swenarchuk fait aussi remarquer que laffaire Ethyl, quelle a déjà mentionnée, a entraîné, malgré le bien fondé de la stratégie de défense du gouvernement contre la poursuite, une extension du sens de « expropriation » telle que définie dans lALÉNA et proposée pour lAMI, laquelle expose les gouvernements à une multiplication des contestations de la réglementation dintérêt public par des intérêts privés, ainsi que des demandes de dédommagement débordant ce qui aurait été acceptable en vertu des obligations internes et internationales antérieures concernant larbitrage commercial. Mme Durrieux, en précisant les motifs de lopposition de la France à lAMI, convient que de telles dispositions investisseur-État avantagent maintenant les intérêts privés au détriment de lintérêt public. À la suite dune question de M. le député Daniel Turp sur lévolution dune « communauté nord-américaine », un concept dont le ministre canadien des Affaires étrangères, M. Lloyd Axworthy, a fait état dans de récents discours mais qui a été peu débattu en public, il y a une brève discussion sur les façons dont lALÉNA peut mener à une meilleure intégration hémisphérique parallèlement aux négociations [note : actuellement présidées par le Canada] sur un projet de zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA). M. Bakvis fait remarquer que le MERCOSUR, ayant à sa tête le Brésil, envisage un processus bien plus proche du modèle dintégration européen qui fait une grande place à la dimension sociale. M. Behrendt (Allemagne) se demande dans quelle mesure le réseau des ONG, qui déborde les frontières, cherche à attirer lattention sur les questions environnementales, entre autres. M. Gusenbauer (Autriche) veut savoir quel sort il faudrait réserver à lAMI. Mme Swenarchuk répond que les ONG internationales sont en train de tisser des liens solides et de forger des alliances sociales grâce à Internet. Au sujet du libre-échange des Amériques, elle soutient que « la ZLÉA va servir à mettre en oeuvre les accords de lOMC dans tout lhémisphère et à accélérer leur application ». À propos des options après lAMI, elle conclut que : « Sil nest pas adopté à lOCDE, il refera surface à lOMC », mais elle est daccord avec de nombreux autres qui « se sont toujours opposés à ce que lOMC empiète davantage sur la souveraineté nationale en négociant un régime pour les investissements ». Panel n°3 « Aspects sociaux et culturels de lALÉNA » Panélistes :
La professeure Brooke Jeffrey commence par faire remarquer certaines différences fondamentales entre la méthode dintégration choisie pour lALÉNA et celle choisie pour lUE. Elle signale que dans le cas de lALÉNA, on na jamais eu lintention de conjuguer lintégration politique et sociale à lintégration économique. Selon elle, les Canadiens cherchent surtout à préserver leur identité nationale et elle rappelle à cet égard le train de mesures adopté par le gouvernement actuel pour protéger les éditeurs de magazines canadiens contre la concurrence américaine, que la coprésidente du panel, la sénatrice Lorna Milne, a mentionné dans son mot douverture. Au Canada, où les provinces ont dimportantes compétences dans le champ des affaires sociales, il y a des débats enflammés sur les effets du libre-échange, de la mondialisation, des compressions budgétaires et dautres facteurs sur la cohésion sociale. Mais contrairement à lEurope, la structure de lALÉNA ne fait aucune place aux considérations sociales et encore moins à des programmes sociaux fondés sur des valeurs et des objectifs communs. Il y a une clause dans lALÉNA qui laisse à chaque pays le droit dadopter toutes les mesures voulues relativement à des services sociaux établis dans lintérêt public. Cependant, cette réserve a un poids discutable et elle na pas encore été sérieusement mise à lépreuve dans une procédure de règlement dun différend. Dailleurs, il est difficile de mesurer des effets sociaux, bons ou mauvais, qui sont attribuables directement à lALÉNA. Dans une perspective plus générale, Mme Jeffrey affirme quil commence néanmoins à se former des coalitions constructives de la société civile dans les trois pays. En outre, il semble y avoir convergence des échelles de valeurs des citoyens de la région (les Canadiens valorisent par-dessus tout la « tolérance », les Américains, « lindépendance » et les Mexicains, la « responsabilité »), bien quune telle harmonisation semble due surtout à des courants mondiaux et non à lALÉNA. Si tant les citoyens que les représentants élus sont capables dune plus grande interaction et participation dans le contexte de lALÉNA, peut-être que, dans les prochaines années, il y aura de plus en plus de raisons et doccasions de promouvoir des préoccupations assimilables à une charte sociale. M. Keith Kelly constate la même difficulté quand on tente de mesurer avec précision lincidence de lALÉNA sur la culture canadienne. Il croit aussi que lattention actuellement concentrée sur « lexemption de la culture » accordée au Canada dans lALÉ et lALÉNA est sans doute quelque peu déplacée puisque toute une décennie dapplication a révélé clairement que de telles dispositions offrent une piètre protection (« lexemption de la culture nest efficace que dans la mesure où les Américains acceptent de la respecter »). Malheureusement, les Américains nont montré aucune volonté dabandonner leur droit duser de représailles contre les mesures culturelles canadiennes quils jugent discriminatoires et, dernièrement (p. ex. dans le cas des magazines), ils ont réussi à en appeler devant lOMC où « aucun filtre dordre culturel nest ajouté au mécanisme de règlement des différends afin de traiter les cas concernant la culture différemment des litiges portant sur les produits dont on fait traditionnellement le commerce ». Sur une note positive, M. Kelly mentionne létablissement de réseaux internationaux, en particulier avec les homologues européens, pour trouver de nouvelles formules (par exemple le concept dune « charte des droits parallèles mondiaux » dans le domaine culturel) qui mèneront à des solutions durables pour préserver lexpression culturelle autonome à lintérieur dun milieu mondial bénéfique pour le commerce et linvestissement. Il conclut ainsi : « Nous espérons certes que le consensus international sur la culture continuera de se développer au point où on pourrait réussir, au cours du cycle du millénaire (de lOMC) à trouver une solution au problème de la protection des valeurs qui sont les plus importantes pour nous en tant que nations ». M. David Crane analyse leffet de lALÉ et de lALÉNA sur les tendances socio-culturelles dans la mesure où elles sont liées au développement de léconomie canadienne quentraîne lévolution dynamique des activités commerciales internationales et des nouvelles technologies des communications. Il évoque larrivée effective ou éventuelle des fournisseurs de services privés américains dans plusieurs domaines comme la santé, léducation, le système correctionnel qui ont toujours été une chasse gardée de lÉtat. À son avis, la mondialisation au sens plus large restreint aussi la capacité du gouvernement daugmenter les impôts pour financer les objectifs sociaux. Dans le cas du Canada, les objectifs culturels seront aussi en jeu dans les prochaines négociations de lOMC, notamment dans le domaine des services, qui seront sans doute entamées en lan 2000 à la suite du sommet ministériel que les États-Unis organiseront pour la fin de 1999. M. Crane renforce les propos de M. Kelly en faisant remarquer que le Canada doit se montrer créatif autant que vigilant pour concevoir des solutions réalistes avec des pays qui partagent les mêmes idées que lui, puisque les États-Unis ont annoncé leur intention, au contraire, de soumettre les industries culturelles à dautres règles commerciales générales et de naccorder aucun statut spécial à la culture. M. Crane dit que Canadiens et Européens pourraient faire plus defforts pour arriver à établir des alliances et à contrer les assauts des Américains. Le Canada ne cherche pas à empêcher les produits culturels de franchir ses frontières (dailleurs, la culture étrangère occupe presque tout le marché de consommation au Canada), mais de préserver un « espace viable pour les industries culturelles canadiennes afin quelles soient rentables et puissent continuer de servir la population canadienne » dans toute la gamme des médias. Selon M. Crane, laspect commercial est capital pour la survie des médias canadiens qui ne bénéficient pas du gigantesque marché intérieur et des économies déchelle de leurs concurrents américains. Malheureusement, soutient-il, les dispositions de lALÉ et de lALÉNA nont rien fait pour protéger la culture canadienne contre les attaques des Américains et leurs menaces de représailles. Donc, si lALÉNA tend vers une intégration profonde, il y a lieu de sinquiéter. De surcroît, puisque le développement accéléré du cybercommerce et dInternet ont des implications nouvelles pour la culture et le commerce, les Canadiens et les Européens doivent trouver des façons différentes de travailler ensemble sur ce qui sannonce comme lune des questions les plus critiques du prochain cycle de lOMC. Entamant la période de discussion, M. Caccia demande comment il se fait quon en soit arrivé à une telle domination des considérations commerciales dans la diplomatie et les relations internationales, au détriment des valeurs sociales. Peut-on refréner cette forte tendance? Les panélistes répondent en mentionnant les effets profonds dune révolution technologique conjuguée à une révolution idéologique en faveur de la déréglementation et de la privatisation. M. Crane soutient que, même si ce nest pas réaliste de revenir au protectionnisme du passé, des éléments dune « contre-révolution » sont en gestation. Les gouvernements ne sont pas du tout impuissants et on cherche de plus en plus à régler les « déficits de la démocratie » à plusieurs niveaux. Dans le sillage de la crise financière asiatique, même des institutions comme le FMI reconnaissent que « la déréglementation financière mondiale est peut-être allée trop loin ». Les dilemmes de la mondialisation et du « gouvernement planétaire » sont aujourdhui dimportants sujets de discussion dans les tribunes internationales. Au sujet de la culture et du libre-échange, M. Davis dit comprendre que les Canadiens sinquiètent de linfluence écrasante de la télévision et du cinéma américains, mais il se demande si, en défendant lindustrie canadienne des magazines, le Canada ne subventionne pas tout simplement les profits des éditeurs qui, pour certains, ne semblent pas à la hauteur. M. Kelly et M. Crane détaillent les raisons pour lesquelles les éditions dites « dédoublées » des magazines américains compromettent la viabilité des éditeurs canadiens de moindre envergure. M. Jan Figel (Slovaquie, président du Sous-comité des relations économiques internationales) oppose la quête de la compétitivité qui est le moteur de lALÉNA au principe de la solidarité qui a guidé létablissement dune communauté européenne multinationale dans laprès-guerre et, aujourdhui, dans laprès-guerre froide. Il demande : « Existe-t-il une vision institutionnalisée de la solidarité dans les relations nord-américaines en général et lALÉNA en particulier? » M. Crane répond quil ny en a pas. Le gouvernement Clinton a pourtant créé une banque de développement nord-américaine pour faire adopter lALÉNA au Congrès, mais comme elle ne visait que les projets frontaliers États-Unis-Mexique, le Canada a refusé dy participer. Dernièrement, le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, fait la promotion du concept dune communauté nord-américaine (voir à ce sujet le compte rendu du panel n° 2 et aussi la note de synthèse n° 7) qui semble tourner surtout autour de léducation. Toutefois, M. Crane doute que cette initiative aboutisse, compte tenu notamment des divergences philosophiques entre le Canada et les États-Unis au sujet des politiques sociales et culturelles. [*Note : dans un récent essai comparant les schémas nord-américains et européens dintégration « continentale », Stephen Clarkson, un spécialiste canadien des relations internationales, présente un point de vue lucide sur les possibilités transatlantiques de la naissance dun axe « ALÉNA-UE »(1)]. Dautres interventions portent sur la question de la conception des accords commerciaux qui se dessinent et sur leur incidence sur les droits des gouvernements. Par exemple, le député Clifford Lincoln parle de la puissance excessive des sociétés basées aux États-Unis, comme on peut le constater dans laffaire Ethyl et dans le domaine culturel. M. Crane en impute la responsabilité aux gouvernements qui, après tout, négocient et concluent ces accords commerciaux « les gouvernements détiennent plus de pouvoir quils croient en avoir ». Poursuivant sur le sujet des conséquences sociales et culturelles, M. Gusenbauer remet en question les avantages dun marché transatlantique « fonctionnant plus ou moins suivant les termes de lALÉNA. [...] Si les clauses de lALÉNA noffrent pas de meilleures conditions sociales et environnementales, à quoi sert-il dentreprendre des négociations? Si ce nest pas mieux que lOMC, quel est lavantage comparatif? » En sefforçant de répondre à la question, les panélistes saccordent à dire que les négociations internationales sur ces questions seront extrêmement difficiles. En ce qui concerne la culture, qui fait aussi problème en Europe, les choses navanceront que si les États-Unis changent dattitude. Insistant sur ce point, la députée Francine Lalonde revient sur une question posée plus tôt au sujet de lavenir des « exemptions » culturelles quelle qualifie de défi commun au Canada et à tous les pays européens, pas seulement à ceux de lUnion européenne. M. Kelly a peu despoir que les États-Unis modifient leur position de négociation, mais il exhorte néanmoins le Canada à travailler en étroite collaboration avec les pays qui partagent les mêmes idées, dans le cadre de lOMC, pour arriver à des propositions pratiques, capables de protéger les objectifs culturels. Pour clore la discussion, M. Caccia se demande si lincorporation de nouvelles clauses dordre social ou culturel dans les accords commerciaux sera efficace étant donné les résultats, peu impressionnants jusquà présent, des commissions de lALÉNA pour le travail et lenvironnement. M. Gusenbauer remet aussi en question le « libellé trop conciliant » quon a tendance à employer pour régler ces problèmes du système commercial : « Quand des profits sont en jeu, on sort lartillerie lourde, mais quand des droits fondamentaux et sociaux sont concernés, on sexprime en des termes fort nébuleux ». M. Davis signale que lUnion européenne a au moins un régime supranational dapplication plus aisée grâce à la Convention européenne des droits de lhomme. Dans une dernière observation, Mme Jeffrey fait remarquer combien il est difficile damener les États-Unis à accepter une telle compétence multilatérale et, de façon plus générale, de négocier des questions sociales entre plusieurs parties disparates. LALÉNA demeure un instrument très limité pour cette raison et lUE sera vraisemblablement confrontée à des problèmes comparables quand elle négociera avec le Mexique et ses autres partenaires de lAmérique latine. Pourtant, M. Kelly et M. Crane conservent tous deux lespoir de faire accepter des formes de coopération intergouvernementale en particulier, les Canadiens et les Européens travaillant ensemble à la résolution de certains de ces problèmes susceptibles de transformer la manière dont cette nouvelle ère de commerce mondial et de progrès technologiques considérables est gérée afin de promouvoir les valeurs sociales et culturelles importantes au lieu de les miner. Il faut maintenant envisager daller au-delà de lALÉNA parce que cest un élément crucial du défi transatlantique et planétaire que le Canada et lEurope devront relever à laube du prochain millénaire. LE
CANADA ET LUE : VERS UN MARCHÉ TRANSATLANTIQUE Le deuxième jour du colloque, on a délaissé lALÉNA pour se concentrer sur une discussion des relations actuelles et futures entre le Canada et lUE, vu la nécessité de renforcer les liens commerciaux transatlantiques. Outre le besoin daméliorer les rapports bilatéraux actuels dans certains domaines, il y a une considération clé quont présentée les parlementaires qui ont pris la parole tant aux séances du matin ayant eu lieu au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international quà la séance de clôture sur la Colline du Parlement : comment bâtir entre lEurope et lAmérique du Nord des ponts plus efficaces, susceptibles de mener même jusquà la conclusion dun Accord de libre-échange transatlantique (ALÉTA). Séance n° 1 « Faits saillants des relations commerciales et économiques Canada-Europe » Panélistes :
Après avoir été présenté par les coprésidents, la députée Francine Lalonde (vice-présidente, Association parlementaire Canada-Europe) et M. Jan Figel (Slovaquie, président de la Sous-commission des relations économiques internationales), M. lambassadeur Juneau commence par brosser un portrait très rose de létat actuel des relations entre le Canada et lUE. Parmi les caractéristiques positives des relations quil a présentées, il y a les suivantes :
Avec le même optimisme, M. lambassadeur Juneau entrevoit des liens transatlantiques encore plus prospères dans lavenir, y compris dans le commerce des services. Les sciences et la technologie forment un autre secteur atteignant un bon rendement. À son avis aussi, le lancement de leuro favorisera le commerce avec le Canada directement en atténuant le risque lié au taux de change et, indirectement, grâce aux effets bénéfiques des réformes économiques et monétaires en Europe. En outre, les relations économiques Canada-UE sintensifieront parallèlement à lexpansion que prendra lUE à long terme, étant donné les liens commerciaux quentretient le Canada depuis longtemps avec certains des pays candidats à ladhésion. M. Juneau dit être certain que le Canada peut envisager un partenariat économique solide avec le marché de lUE qui est déjà le plus grand au monde. Pourtant, le Canada doit continuer de travailler fort pour obtenir un meilleur accès au marché de lUE grâce à des accords de reconnaissance mutuelle et à dautres moyens. Les liens économiques Canada-UE seront encore plus étroits lorsque les barrières commerciales auront été enlevées. Du côté des Européens, M. Alfred Gusenbauer soutient que lavenir des relations entre le Canada et lUE dépend surtout des conditions commerciales mondiales. On a certainement besoin de relations régionales au sein de ce marché planétaire; cest pourquoi le marché transatlantique pourrait jouer un rôle clé, mais il faudra en analyser soigneusement les avantages et les inconvénients. La question de savoir comment concilier les pactes commerciaux régionaux qui se multiplient et une approche multilatérale globale revient à plusieurs reprises dans la discussion pendant la journée. Outre les diverses négociations commerciales entre lUnion européenne, les pays de lALÉNA et dautres pays latino-américains, notamment le bloc du MERCOSUR, les coprésidents de la séance, M. Jan Figel (Slovaquie) et la députée Francine Lalonde, mentionnent aussi les négociations que le Canada vient dentreprendre avec lAssociation européenne de libre-échange (AELÉ), ainsi que le projet de zone de libre-échange Centre Europe. De telles questions commerciales doivent être étudiées, soutient M. Gusenbauer, en tenant compte de certaines difficultés politiques et gouvernementales fondamentales que doit régler le système économique planétaire. À son avis, pour corriger linstabilité financière que connaît actuellement le monde entier, il faut apporter des changements aux institutions internationales, cest-à-dire, essentiellement, conclure de nouveaux accords de Bretton Woods. M. Gusenbauer recherche en particulier de nouveaux accords monétaires internationaux mieux coordonnés et il croit que ladoption dune monnaie unique et stable en Europe contribuera à favoriser une plus grande stabilité dans le monde. Il exprime son appui au « Millenium Round » de lOMC, mais signale quil faut entamer un cycle de négociations vraiment complet sur le commerce et linvestissement. M. Gusenbauer fait valoir avec vigueur que « la démocratie est une condition préalable essentielle à létablissement dune économie de marché qui tienne compte de la richesse, de la croissance et du développement ». Par conséquent, la tendance à la mondialisation croissante doit aussi saccompagner dune démocratisation accrue. Trop de pouvoir décisionnel est laissé aux sociétés ou aux organisations internationales comme le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale; les législateurs ont besoin de donner plus de poids à leur point de vue et dobliger leurs gouvernements à rendre compte des mesures prises par ces organisations. Dautres participants au colloque partagent cette opinion, notamment M. Povilas Gylys (Lithuanie), M. Wolfgang Behrendt (Allemagne) et le député Benoît Sauvageau (Canada). Mme Helle Degn (Danemark), présidente de la Commission des affaires économiques de lAssemblée du Conseil de lEurope, insiste de nouveau sur ce point dans lintervention quelle fait à la clôture de la seconde séance de la matinée. Au cours de la période de discussion, les participants soulèvent plusieurs questions au sujet des progrès vraiment réalisés dans le développement des débouchés commerciaux Canada-Europe. Le sénateur Jerahmiel Grafstein fait remarquer que le commerce canadien avec lEurope continentale (en pourcentage) est à la baisse et que le projet daccélérer le plan daction Canada-UE a reçu un accueil tiède à Bruxelles. La création dune zone de libre-échange transatlantique ne va-t-elle pas insuffler un regain de dynamisme et constituer un premier pas bénéfique vers la libéralisation du commerce multilatéral à lOMC? Réagissant à cette observation, M. Gusenbauer demande si un tel « marché transatlantique » profitera nécessairement au Canada : « Avez-vous analysé les effets quaurait un marché transatlantique sur le Canada en particulier? » Il se demande si un nouvel accord transatlantique namènerait pas les entreprises européennes à transiger avec les sociétés américaines plutôt quavec celles dorigine canadienne. En réaction à une question posée par M. Terry Davis (Royaume-Uni) sur létat des progrès du plan daction Canada-UE, M. lambassadeur Juneau signale un certain nombre daccords bilatéraux déjà conclus (p. ex. les normes, les douanes, les sciences et la technologie). Selon M. Juneau, il est possible que le plan daction du Canada soit plus avancé que celui des États-Unis. Toutefois, compte tenu des discussions commerciales bilatérales entre les États-Unis et lUnion européenne [note : celles-ci ont abouti à ladoption, le 9 novembre, dun plan daction pour le Partenariat économique transatlantique], il reconnaît aussi que :
Il a aussi été révélé que la conclusion de létude commerciale conjointe Canada-UE, prévue dans le Plan daction de 1996 pour déterminer les barrières commerciales à supprimer, avait connu des problèmes et des retards. M. lambassadeur Juneau soutient néanmoins que la politique canadienne maintient le cap. À son avis, comme aucun cadre ne permet la tenue de négociations collectives entre les pays de lALÉNA et lUE, le mieux cest de poursuivre les efforts bilatéraux actuels tout en recherchant des possibilités de convergence ou de négociations trilatérales simultanées avec les Américains et les Mexicains. [*Note : Le 2 décembre 1998, dans un exposé de toute la politique commerciale canadienne et de ses objectifs en vue des négociations attendues de lOMC, le ministre canadien du Commerce international, M. Sergio Marchi, a rappelé au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes quà son avis, un partenariat Canada-UE devait avoir pour objet que lEurope considère lAmérique du Nord comme une seule communauté ALÉNA et non pas comme trois pays voisins différents. Il soutient que le Canada privilégie nettement que lEurope soit réputée être en train de négocier avec nos trois pays en même temps.] Séance n° 2 « Perspectives sectorielles et domaines où des accords bilatéraux sont possibles » Panélistes :
Les coprésidents, la députée Aileen Carroll et le député Roy Cullen, ouvrent la séance en rappelant quelques-unes des difficultés et certains des débouchés qui attendent le Canada sil veut sortir du schéma de ses échanges passés pour nouer des relations commerciales plus diversifiées et plus dynamiques avec ses partenaires européens. Comme laffirme Mme Carroll : « Les services financiers, les industries de matière grise et lécotechnologie sont les principales industries de croissance. Les irritants commerciaux se retrouvent surtout parmi les marchés de produits primaires. Par conséquent, il nous appartient de nous concentrer sur des initiatives commerciales bilatérales dans ces secteurs davenir qui ne sont pas grevés dirritants commerciaux dont on narrive pas à se défaire ». M. Cullen rappelle les réserves exprimées lors des panels de la veille à propos de la question de savoir si lALÉNA, compte tenu de ses problèmes intrinsèques, « constitue vraiment un modèle pour le commerce transatlantique ». De plus, il conseille vivement de se pencher aussi sur les questions de lutte contre la corruption et les crimes économiques, car celle-ci est cruciale pour améliorer les perspectives déchanges avec les pays de lEurope centrale et de lEurope de lEst. M. Jason Myers présente des observations sur les changements structuraux qui se sont produit dans toute lindustrie canadienne depuis la libéralisation du commerce en Amérique du Nord, notamment une spécialisation accrue de la production, une intégration des entreprises et un meilleur rapport coût-efficacité. Les entreprises détiennent de plus en plus des exclusivités mondiales, quoique lorientation reste résolument américaine. Selon M. Myers, cela signifie en pratique que la croissance économique découlant du libre-échange en Amérique du Nord pousse les sociétés canadiennes à se tourner vers dautres régions telles que lEurope pour combler une bonne partie de leurs besoins en main-doeuvre spécialisée, en technologie et en information. Le Canada attire aussi de plus en plus dinvestissements provenant de sources européennes. M. Myers met donc son auditoire en garde contre une libéralisation du commerce et une quête des débouchés qui seraient strictement bilatérales. Il faut plutôt que les entreprises profitent du marché mondial et que les discussions entourant le commerce transatlantique reflètent celles se déroulant à léchelle planétaire. Dans son exposé, M. John Colfer approuve énergiquement la conclusion daccords bilatéraux plus étendus entre le Canada et lUE pour arriver à des tarifs plus compatibles, à lélimination des barrières non tarifaires entre les deux parties et à lamélioration du climat dinvestissement transatlantique. Il souligne aussi le « déficit informationnel » de la petite et moyenne entreprise (PME) au sujet des occasions daffaires sur le plan international, mais il croit que le gouvernement fédéral commence à soccuper du problème. M. Colfer fait aussi écho au point de vue du ministre fédéral du Commerce international, M. Marchi, en exprimant sa conviction que « la négociation, entre communautés, daccords bilatéraux plus équitables et mieux équilibrés est essentielle pour obtenir des avantages à long terme pour le Canada et les États-Unis. De tels accords dissiperont la crainte du protectionnisme, née du fait quil y a des négociations séparées entre lUE et les É.-U. dune part, et entre lUE et le Mexique dautre part. Ils permettront aussi de stabiliser le commerce mondial». En réaction à une observation de M. Caccia sur les avantages de conclure un accord du type de lALÉTA, M. Davis explique le peu denthousiasme que cette idée a soulevé en Europe. Plus tard, à la séance de laprès-midi, il précise que dans lesprit européen, le « marché transatlantique » désigne un axe Union européenne-États-Unis; autrement dit, un marché dominé par Bruxelles et Washington qui exclurait Ottawa. Par contre, M. Davis sintéresse énormément à létat de létude commerciale conjointe Canada-UE qui a été entreprise. M. lambassadeur Juneau révèle que la publication du document est retardée par limpossibilité den arriver à des conclusions communes sur la meilleure méthode à employer pour libéraliser le commerce. À cause de cette impasse, il entrevoit la publication éventuelle dun document canadien plutôt quun document conjoint. En conclusion, Mme Degn fait une observation indiquant certains des obstacles quil faudra surmonter pour que les discussions commerciales en cours passent à une sphère supérieure :
Séance de clôture « Au-delà de lALÉNA vers un marché transatlantique Canada-Europe » Panélistes :
Le sénateur Allan MacEachen ouvre la dernière séance du colloque en présentant les remarques faites récemment par M. le ministre Marchi au sujet de létablissement de rapports transatlantiques plus étendus dans le contexte dune perspective historique utile sur les relations économiques du Canada avec lEurope. Il fait remarquer que lAccord cadre de coopération commerciale et économique de 1976, conclu par le Canada et lUE, était un produit du nationalisme économique à la mode au Canada à lépoque. La tentative de diversification du Canada qui voulait orienter ses activités économiques non plus seulement vers les États-Unis mais vers lEurope et dautres pays a été appelée la « Troisième option », les deux premières étant le statu quo et une intégration accrue aux États-Unis. Mais même si « le premier ministre a investi considérablement dans louverture à lEurope... il ny a eu aucune révolution, du moins de notre politique commerciale, pendant des lunes ». M. MacEachen poursuit en faisant observer que les forces qui mènent à une intégration plus poussée du Canada en Amérique du Nord ont certainement détourné le Canada de lEurope durant presque toutes les années 80. LAccord de libre-échange Canada-États-Unis (ALÉ) qui a marqué le début dun virage politique historique a été ensuite renforcé par lALÉNA. Néanmoins, dans les années 90, on a tenté à maintes reprises de raviver les relations Canada-Europe qui, selon certains, languissaient. Ces relations ont traversé de mauvaises passes, notamment le « froid » causé par le litige sur la morue qui a opposé le Canada à lEspagne. Le Canada a dû apprendre que « face à la puissance économique de lUnion européenne, il noccupait pas une position de négociation avantageuse ». M. MacEachen croit que si, en 1976, cétait le Canada qui recherchait lappui de lEurope pour réduire la domination économique des États-Unis, aujourdhui, ce serait sans doute linverse. Bien que le climat politique actuel ne soit pas propice au projet dALÉTA du premier ministre Chrétien, son heure viendra (dès les années 50 Lester Pearson avait lancé lidée dun accord commercial nord-atlantique); « il faut savoir être patient ». En attendant, le Canada peut encore tirer dimportants bénéfices à la fois des efforts bilatéraux dont on a déjà parlé et qui devraient viser tant les vieux amis que les nouveaux parmi la famille des nations européennes et du nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales. M. MacEachen termine en faisant observer que, dans une période de turbulence comme celle que nous vivons dans le sillage de la crise asiatique, il faut sattaquer aux problèmes « en corrigeant les principes fondamentaux nationaux » et « en tenant une discussion approfondie sur le fonctionnement du système financier international et sur les implications des applications enthousiastes de la mondialisation ». M. Terry Davis (ancien président de la Commission du développement et des affaires économiques de lAssemblée parlementaire du Conseil de lEurope) a brutalement jeté une douche froide sur la possibilité détablir en ce moment un ALÉTA. À son avis, il est fort douteux que lédification dun seul pont au-dessus de lAtlantique (lALÉTA par opposition à trois processus bilatéraux séparés), quoique préférable, soit réalisable parce que « je ne crois pas que le gouvernement des États-Unis laccepte ». Il fait remarquer que : « Quand les politiciens en Europe parlent dun marché transatlantique, ils songent aux États-Unis dAmérique. Voilà un détail extrêmement important dont les Canadiens et les Mexicains doivent tenir compte ». M. lambassadeur Juneau lavait mentionné dans son allocution de la matinée. Effectivement, la voie de négociation principale sera celle entre les États-Unis et lUE, qui mènera à une nouvelle relation bilatérale entre les deux superpuissances économiques. Cette relation renforcée préparera ensuite à une approche commune des négociations multilatérales de 1999 à lOMC. En fait, la prédiction de M. Davis sest déjà matérialisée. Comme nous lavons déjà signalé dans lintroduction de la présente synthèse, un nouveau plan daction pour un « Partenariat économique transatlantique » entre les deux géants économiques a été conclu en novembre 1998. M. Davis se risque à affirmer quil serait peut-être plus utile pour le Canada de travailler étroitement avec le Mexique au lieu de chercher à engager les États-Unis dans une « trilatéralisation » dune relation avec lUE : « Si jétais un député fédéral canadien, je ferais pression pour la tenue de négociations trilatérales, étant donné que lAmérique ne veut pas les rendre quadrilatérales, mais la troisième partie serait le Mexique et non les États-Unis ». Il a aussi fait une remarque pénétrante sur la proposition de partenariat économique transatlantique (qui a été adoptée depuis) :
Pourtant, M. Davis soutient énergiquement que le Canada nest pas dépourvu de possibilités qui lui sont propres. Il conseille au Canada dutiliser le bilinguisme à son avantage à Bruxelles et « dessayer de cultiver de nouvelles amitiés et de songer à lavenir plutôt quà la situation présente... pas seulement à lAllemagne (lexemple de liens bilatéraux donné par M. MacEachen) mais aussi à la République tchèque, à la Pologne, à la Hongrie et à quelques autres qui feront partie de lUnion européenne mais qui, en attendant, partagent votre sentiment dêtre tenus à lécart des négociations ». M. Davis regrette que la publication de létude commerciale conjointe Canada-UE ait été retardée, puisque, comme il le dit lui-même : « Si vos amis au Conseil de lEurope veulent défendre vos intérêts à lintérieur de lUnion européenne et dans le reste de lEurope, alors ils doivent connaître les faits ». Au moment de la récapitulation, on insiste de nouveau sur létablissement dalliances entre les deux côtés de lAtlantique non seulement pour promouvoir le commerce et la création de richesses, mais pour le faire avec une conscience sociale qui, pour reprendre les termes de M. Figel, contribuera à « édifier une véritable communauté de valeurs ». M. Gusenbauer fait remarquer que la « réalpolitik » de lhégémonie américaine ne devrait pas ternir les réussites de la diplomatie canadienne. Et M. MacEachen ajoute que son expérience personnelle lui a appris que le Canada, quand il traite avec son voisin superpuissant, est parfois plus libre que ses homologues européens. Chez les Européens, M. Gonzalez-Laxe (rapporteur de la Sous-commission au colloque) sestime satisfait des deux journées de discussions fructueuses, notamment les questions stimulantes quelles ont soulevées au sujet de lévolution de lALÉNA dans lavenir, de la nécessité détablir des cadres institutionnels et parlementaires pour gérer les intérêts économiques transatlantiques communs, et des choix que doit faire le Canada pour naviguer entre les superpuissances économiques de lUE et des É.-U. Chez les Canadiens, M. Caccia est reconnaissant à tous les participants de leurs interventions et, soulignant en particulier la franchise de Terry Davis, il réaffirme la détermination du Canada à réaliser un jour son « objectif insaisissable » dune « troisième option » transatlantique. PROGRAMME COLLOQUE PARLEMENTAIRE CANADA-CONSEIL DE LEUROPE « Au-delà de lALÉNA vers un marché transatlantique Canada-Europe » OTTAWA, 19-20 octobre 1998 Lundi 19 octobre 1998 Premier jour « LEXPÉRIENCE DU CANADA DANS LALÉNA » 8 h - 8 h 30 Inscription 8 h - 8 h 20 Convocation
officielle Sous-commission des affaires économiques 8 h 20 - 8 h 45 Déclarations douverture 8 h 45 - 10 h 30 Panel
n° 1 « Questions commerciales et mécanismes de règlement des différends » Présidents :
Panélistes :
10 h 30 - 10 h 45 Pause 10 h 45 - 12 h 30
Panel n° 2 « Le travail et lenvironnement sous le régime
de lALÉNA » Président :
Panélistes :
12 h 30 - 14 h Lhon.
David Collenette, Ministre des Transports 14 h - 15 h 15 Période des questions à la Chambre des communes 15 h 30 - 17 h 30 Panel
n° 3 « Aspects sociaux et culturels de lALÉNA » Présidentes :
18 h Réception pour les
participants Mardi 20 octobre 1998 Deuxième jour « LE CANADA ET LU.E. : VERS UN MARCHÉ TRANSATLANTIQUE » 9 h - 10 h 30 Séance
n° 1 Faits saillants des relations commerciales et économiques Canada-Europe Présidents :
Panélistes :
10 h 30 - 10 h 45 Pause 10 h 45 - 12 h 15 Séance
n° 2 Perspectives sectorielles et domaines où des accords bilatéraux Présidents :
Panélistes :
12 h 15 - 12 h 30
12 h 30 - 13 h 45 Déjeuner
de travail et allocution de lhonorable John Manley, 13 h 45 - 14 h Retour à la Colline du Parlement 14 h - 14 h 30 Période des questions au Sénat 15 h - 17 h Séance de
clôture : « Au-delà de lALÉNA vers un marché transatlantique Canada-Europe » Président :
Panélistes :
17 h Mot de la fin
18 h Réception
donnée par lAssociation parlementaire Canada-Europe et la Commission NOTES
DE SYNTHÈSE POUR LE COLLOQUE PARLEMENTAIRE Les 19 et 20 octobre 1998 a eu lieu au Canada un séminaire parlementaire sur le thème suivant : Au-delà de lALÉNA, vers un marché transatlantique Canada-Europe. La rencontre était parrainée conjointement par lAssociation parlementaire Canada-Europe et la Sous-commission des relations économiques internationales de la Commission des questions économiques et du développement de lAssemblée parlementaire du Conseil de lEurope. Quarante pays font maintenant partie de lAssemblée de Strasbourg, le plus ancien organisme européen voué à la solidarité démocratique et sociale, qui fête son 50e anniversaire en 1999. Des parlementaires des 15 États membres de lUnion européenne et de la plupart des pays de lEurope centrale et de lEurope de lEst, y compris la Russie, participent à ses sessions trimestrielles et aux activités de ses commissions. Depuis mai 1997, les parlementaires canadiens y ont le statut dobservateurs. Lidée du séminaire résulte du désir des homologues européens den apprendre plus long sur la zone nord-américaine de libre-échange selon la perspective canadienne, et dun intérêt canadien réciproque pour ce qui est dexplorer, outre lALÉNA existant, des options économiques qui pourraient aboutir à un arrangement transatlantique plus large, susceptible de profiter mutuellement aux blocs régionaux de plus en plus intégrés de lAmérique du Nord et de lEurope. Conséquemment le colloque Canada-Conseil de lEurope a mis laccent sur ces questions dans le but de stimuler un dialogue entre homologues canadiens et européens qui pourraient faire ressortir des points et des options communs visant à mener à de plus grandes relations économiques transatlantiques. Les panels du premier jour se sont penchés sur les principales dimensions de lexpérience du Canada dans lALÉNA, laquelle ne cesse dévoluer. Au cours du deuxième jour les participants ont examiné les relations commerciales du Canada avec lEurope et les perspectives den arriver à des partenariats transatlantiques plus étroits. La présente publication modulaire est une version légèrement révisée dune série de notes dinformation produites par la Direction de la recherche parlementaire à lintention des participants au colloque. Les notes de Gerald Schmitz introduisent le thème et décrivent de nombreux aspects de lexpérience canadienne au sein de lALÉNA, y compris les institutions de règlement des différends, les organes associés de coopération touchant lenvironnement et la main-doeuvre et les liens avec les questions de politique culturelle et sociale. Les notes de Peter Berg portent principalement sur les dossiers commerciaux du Canada et de lUnion européenne, tant du point de vue bilatéral que selon la perspective dune zone de libre-échange transatlantique qui favoriserait les intérêts canadiens tout en étant compatible avec les intérêts partagés de lAmérique du Nord et de lEurope à léchelle mondiale. Le lecteur trouvera également des références choisies à dautres sources de documentation et certains liens électroniques connexes. Les trois notes de synthèse qui suivent ont été produites pour le premier jour du colloque Canada-Conseil de lEurope, qui sest tenu en octobre 1998. Elles portent sur certains des aspects les plus importants de la participation du Canada à lALÉNA. Les notes pour le panel no 1 portent sur la genèse de laccord, sur ses principaux éléments et sur les tendances constatées depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 1994, soit il y a près de cinq ans. On y examine aussi les mécanismes de résolution des différends de lALÉNA ainsi que les tendances communes aux différends commerciaux ayant touché le Canada dans le régime de lALÉNA. Si lon remonte au début des années 80, on constate que lune des raisons primordiales pour lesquelles le Canada voulait établir un régime de libre-échange continental était quil souhaitait assurer son accès aux marchés des États-Unis. Certes, le volume des échanges transfrontaliers a considérablement augmenté mais cet objectif na été, au mieux, que partiellement atteint. Bien que le but fondamental de lALÉNA soit de favoriser les flux du commerce et de linvestissement, laccord a aussi innové par lajout de deux « accords parallèles » sur lenvironnement et sur la main-doeuvre. Les notes pour le panel no 2 font le point sur le travail des commissions établies pour mettre en oeuvre ces accords ainsi que sur lévaluation des résultats atteints en matière de questions environnementales et de normes du travail dans le cadre de lALÉNA. Précisons que lALÉNA suscite aussi des controverses du point de vue de ses conséquences apparentes ou potentielles qui pourraient mettre en danger le réseau canadien de protection sociale (en santé publique, par exemple) et les politiques de protection de la culture. Les notes pour le panel no 3 sont consacrées à lincidence de lALÉNA sur ces domaines dintervention gouvernementale et de choix démocratique. QUESTIONS COMMERCIALES
ET MÉCANISMES NOTE NO 1 : LALÉNA ORIGINES, ÉLÉMENTS CLÉS ET ÉVOLUTION (2) Le Canada a fait le premier pas crucial vers lALÉNA lorsque le gouvernement conservateur de Brian Mulroney a décidé dengager des négociations bilatérales de libre-échange avec les États-Unis au milieu des années 80. Bien que les pourparlers aient quasiment échoué et que lAccord de libre-échange (ALÉ) de 1988 ait été extrêmement controversé, il a été le modèle des arrangements subséquents de libre-échange continental. Parce que les États-Unis avaient négocié lALÉ avec leur voisin du nord, leur voisin du sud, le Mexique, a demandé en 1990 dengager ses propres négociations de libre-échange. Sil est vrai que les trois quarts des exportations canadiennes étaient destinées aux marchés américains, le Mexique était quasiment aussi tributaire que le Canada dans ce contexte, les deux tiers de ses exportations étant destinées aux États-Unis. En outre, des intérêts géopolitiques importants étaient en jeu. Alors que ces pourparlers bilatéraux avançaient, le Canada a craint une érosion de ses gains de lALÉ et voulu éviter un résultat dans lequel un « moyeu » américain jouirait dune situation plus avantageuse que les « rayons » séparés de chaque partenaire du libre-échange. Début 1991, les négociations sont devenues trilatérales à la demande du Canada. Le Canada est ensuite passé dune position essentiellement défensive à une position proactive en réclamant linclusion de nouvelles questions et un programme plus large de libéralisation du commerce régional. Le processus trilatéral signifiait aussi que le Mexique, malgré un niveau de développement et un régime politique différents, devrait accepter des obligations réciproques comparables à celles de lALÉ canado-américain sil voulait être considéré comme un partenaire égal. Le président mexicain Salinas était favorable à un modèle de développement économique axé sur le marché et sur linternationalisation croissante des flux du commerce et de linvestissement, et répondant aux pressions compétitives résultant des stratégies transnationales des entreprises. De fait, lALÉNA dans son ensemble, qui a trouvé ses partisans les plus vigoureux dans les milieux daffaires des trois pays, doit sans doute être considéré comme un volet dune tendance plus générale à la libéralisation des marchés au niveau régional et au niveau mondial, avec des disciplines régissant le comportement des gouvernements. Fin 1992, les trois gouvernements ont conclu les négociations et signé lALÉNA. À ce moment-là, toutefois, un nouveau gouvernement démocrate dirigeait les États-Unis. La négociation daccords parallèles en 1993 sur la coopération environnementale (accord signé en août) et sur le travail (accord signé en septembre) sexpliquait essentiellement par le souci du président Clinton datténuer les craintes américaines au sujet des conditions environnementales et du travail au Mexique. Bien que le Congrès ait alors ratifié lALÉNA par une marge très étroite, une majorité de démocrates a quand même voté contre. Fin 1993, le Canada venait délire un nouveau gouvernement libéral, qui avait exprimé des réserves au sujet de lALÉNA, notamment en ce qui concerne lapplication continue des lois américaines de recours commercial (c.-à-d., limposition de droits antidumping et de droits compensatoires sur les exportations canadiennes). Dans une déclaration politique commune, les parties annoncèrent la mise sur pied de groupes de travail sur ces irritants avant lapprobation de la législation relative à lALÉNA par le Parlement canadien. Le traité lui-même est entré en vigueur comme prévu le 1er janvier 1994. LALÉNA crée une zone de libre-échange entre les trois pays et non une union douanière ou un marché commun, et encore moins une union économique. Cela veut dire que les parties restent libres dappliquer des politiques commerciales distinctes envers les États tiers; de complexes « règles dorigine » ont été adoptées pour établir si des biens et services sont suffisamment nord-américains pour bénéficier des dispositions préférentielles de lALÉNA. On ne trouve dans laccord quasiment aucune autre exigence formelle dharmonisation des autres politiques économiques, ni aucun mécanisme dajustement pour faire face aux dislocations économiques. LAccord ne parle pas non plus de la mobilité de la main-doeuvre, à part quelques dispositions destinées à faciliter lentrée temporaire des gens daffaires et des professionnels des secteurs libéralisés. Il nen reste pas moins que lALÉNA est un traité exhaustif et de très vaste portée, qui étend le principe du « traitement national » lequel oblige les gouvernements à ne faire aucune discrimination entre les producteurs nationaux et les producteurs étrangers aux secteurs du commerce des services, des marchés publics et de linvestissement. LALÉNA est destiné à favoriser une circulation régionale plus libre des marchandises, des services et du capital, ce en quoi il avive la concurrence dans les trois pays, sauf dans les domaines pour lesquels il est explicitement indiqué que les règles de lALÉNA ne sappliquent pas. Voici quelques caractéristiques notables de lALÉNA(3).
LALÉNA est beaucoup plus institutionnalisé que ne létait lALÉ canado-américain. Sa mise en oeuvre est supervisée par une Commission du libre-échange composée de représentants de rang ministériel des trois pays, et il existe aussi des commissions de rang ministériel qui surveillent la mise en oeuvre des accords relatifs à lenvironnement et au travail. La Commission principale bénéficie des services dun secrétariat composé de sections nationales. Un « secrétariat de coordination » trilatéral a été mis sur pied à Mexico fin 1997 pour seconder la Commission. On trouve ensuite une trentaine de comités intergouvernementaux, de groupes de travail et de sous-groupes qui soccupent des divers aspects des dispositions de lALÉNA (le lecteur en trouvera la liste complète à lannexe 2). Daucuns doutent que les institutions de lALÉNA soient suffisantes. Selon Stephen Randall : « Le fait de navoir pas établi dans le contexte de lALÉNA dorganisation-cadre pouvant prendre des décisions en étant relativement isolée des caprices de la politique intérieure de chaque pays reflète le caractère traditionnel de lALÉNA et la jalousie mutuelle de ses membres sur le plan de la souveraineté nationale»(5). Toutefois, un récent rapport préparé pour la Commission de coopération environnementale de lALÉNA, établie à Montréal, permet de penser que lon voit apparaître peu à peu un véritable « régime ALÉNA » intergouvernemental caractérisé par « des signes évidents de modification profonde de la portée, de lampleur et des voies de la coopération entre les trois pays »(6). Certains critiques de lALÉNA ont reproché à laccord de ne pas traiter adéquatement des questions sociales, contrairement à ce qui existe dans les institutions de la Communauté économique européenne (voir la note de synthèse no 6). Toutefois, ajouter des dispositions sociales à lALÉNA exigerait des transferts de souveraineté additionnels au palier trilatéral, ce qui susciterait des plaintes, qui sembleront familières aux oreilles européennes, sur le fait que les règles de lALÉNA constituent une ingérence excessive dans des questions de compétence nationale, et que les instances intergouvernementales de lALÉNA sont trop technocratiques et trop distantes du contrôle démocratique. LALÉNA semble avoir clairement augmenté les flux du commerce et de linvestissement dans la région nord-américaine, ainsi que leur importance pour le Canada. Plus de 82 p. 100 des exportations de marchandises du Canada en 1997 et plus de 70 p. 100 des importations concernaient des partenaires de lALÉNA, la quasi-totalité de ces échanges se traduisant par un commerce transfrontalier quotidien de 1,4 milliard de dollars avec les États-Unis. À titre de comparaison, indiquons que le commerce du Canada avec lUE ne représente que 5 p. 100 des exportations et 10 p. 100 des importations. Le commerce des services avec les États-Unis vaut également plus de 50 milliards de dollars par année. Pour ce qui est du commerce avec le Mexique, il a augmenté de 80 p. 100 depuis 1993 mais il ne représente encore que moins de 0,5 p. 100 des exportations canadiennes, bien que les importations provenant du Mexique atteignent aujourdhui la proportion de 2,5 p. 100. Les flux dinvestissement entre les partenaires de lALÉNA ont fortement augmenté et atteignent aujourdhui plus de 200 milliards de dollars. Encore une fois, bien que les investissements canadiens au Mexique se soient multipliés, la relation Canada-États-Unis domine encore à ce chapitre. Les investissements américains représentent près des deux tiers du total des investissements directs étrangers (IDE) au Canada. Selon des études gouvernementales et privées, les premières années de lALÉNA se sont caractérisées par une création demplois positive dans lensemble. Toutefois, des organisations syndicales et dautres critiques affirment que les chômeurs nont pas été aidés et que des milliers de bons emplois de lindustrie manufacturière sont partis au Sud à cause de la concurrence des bas salaires et de la restructuration des entreprises au sein dun marché nord-américain intégré. Les analystes indépendants ont tendance à rejeter les conclusions à la fois de gains importants ou de pertes considérables causés par les accords commerciaux(7). Au demeurant, abstraction faite de la tendance croissante vers une intégration économique transnationale, les frontières nationales continuent dinfluer grandement sur les flux des échanges(8). En outre, vu la persistance des barrières interprovinciales dans le cas du Canada, il reste encore beaucoup à faire au chapitre de la libéralisation du commerce intérieur. Le débat politique qui continue au sujet de lévolution et de lincidence de lALÉNA porte moins sur la question de savoir sil y a eu un gain de prospérité global que sur celle de déterminer si les avantages et les coûts sont équitablement répartis et si les contraintes imposées à laction gouvernementale sont compatibles avec des valeurs démocratiquement établies telles que la protection environnementale et sociale. Pour le Canada, il est également fondamental de pouvoir préserver une identité culturelle distincte. Bien que lon ait envisagé dans lALÉNA que dautres pays puissent y accéder, et bien que le Canada ait pris position en faveur dune telle adhésion pour des pays comme le Chili, de très sérieuses réserves sont exprimées dans chaque pays au sujet dune nouvelle étape dexpansion du libre-échange, du fait de préoccupations dordre social et environnemental et dautres questions dintérêt public. Les États-Unis sont entravés à ce chapitre par le fait que le Congrès na pas renouvelé le pouvoir de négociation « accélérée » depuis 1994. Par rapport à la trajectoire fortement institutionnalisée de lintégration européenne, lALÉNA reste un instrument très limité pour faire face à de telles questions. Pourtant, au fur et à mesure que les processus dintégration sélargissent et sapprofondissent, les complications croissantes de la société civile et la dimension des valeurs dans les régimes naissants de commerce et dinvestissement deviennent manifestes par exemple, dans le débat public que suscite actuellement lAMI et au moment où le Canada assume la présidence initiale des négociations hémisphériques vers une éventuelle zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA). En outre, au cours des derniers mois, le ministre canadien des Affaires étrangères, Lloyd Axworthy, a défendu lidée de « bâtir une communauté nord-américaine » en réponse à lintégration économique régionale et aux plans daction mondiaux (voir également la note de synthèse no 7)(9). Pour ce qui est des relations futures entre les blocs économiques nord-américain et européen, il est évident quil y a encore de nombreuses différences entre les deux et que les pays de lALÉNA continuent de gérer séparément leurs relations respectives avec lUE, dans le cadre de processus bilatéraux. Le Canada cherche pour sa part à négocier une entente bilatérale avec les pays de lAssociation européenne de libre-échange (AELÉ)(10). Cela dit, la dynamique dintégration régionale risque doffrir de plus grandes occasions de convergence. Il y a plusieurs décennies, daucuns avaient espéré quun Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) différent une zone de libre-échange nord-atlantique verrait le jour. Loption envisagée ne sest jamais matérialisée, et les propositions récentes en vue détablir une Zone de libre-échange transatlantique (ZLÉTA) se heurtent à de nombreux obstacles, mais peu dobservateurs nieraient quil est souhaitable de resserrer les liens économiques transatlantiques. La question est la suivante : comment doit-on sy prendre compte tenu des réalités actuelles de lALÉNA et de lUnion européenne?(11) Le Canada a également exprimé publiquement sa préférence pour un arrangement économique transatlantique « de communauté à communauté » qui serait bon pour chaque partie tout en étant conforme au mouvement de libéralisation globale du commerce (voir la note de synthèse no 9)(12). Même si le contexte actuel est peu favorable à un tel concept, celui-ci mérite sérieuse réflexion. En outre, comme laffirmait récemment un ambassadeur canadien ayant oeuvré des deux côtés de lAtlantique :
LES PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DE L'ALÉNA A. Droits de douane
B. Règles d'origine
C. Investissement
D. Services
Source : Anthony Chapman, LAccord de libre-échange nord-américain : justification et enjeux, Étude générale 327-F, Ottawa, Direction de la recherche parlementaire, janvier 1993. E. Services financiers
F. Marchés publics
G. Transport terrestre
H. Télécommunications
I. Agriculture
J. Examen des questions relatives aux droits antidumping et compensateurs
K. Dispositions institutionnelles et mécanismes de règlement des différends
L. Automobiles
M. Textiles et vêtement
N. Énergie et produits pétrochimiques de base
O. Autres mesures
ORGANISMES INTERGOUVERNEMENTAUX DE LALÉNA COMMISSION DU LIBRE-ÉCHANGE (CLÉ) Secrétariat de coordination de lALÉNA Secrétariat de la CLÉ Comité du commerce des produits Groupe de travail sur les règles dorigine
Comité du commerce darticles de friperie Comité du commerce des produits agricoles
Comité des mesures sanitaires et phytosanitaires Groupe de travail technique sur les pesticides Groupes de travail trilatéraux ou bilatéraux adoptés de lAccord de libre-échange CanadaÉtats-Unis
Comité des mesures normatives Sous-comité des normes relatives aux transports terrestres
Source : NAFTAs Institutions : The Environmental Potential and Performance of the NAFTA Free Trade Commission and Related Bodies, Montréal, Commission for Environmental Cooperation, 1997, Annexe A, p. 67-69. Groupe de travail sur les marchés publics Comité des petites entreprises Comité des services financiers Groupe de travail sur le commerce et la concurrence Groupe de travail sur ladmission temporaire Comité consultatif des différends commerciaux privés Groupe de travail sur les mesures durgence Groupe de travail sur les subventions et les droits compensateurs Groupe de travail sur le dumping et les droits antidumping Groupe de travail sur linvestissement et les services COMMISSION DE COOPÉRATION ENVIRONNEMENTALE (CCE) Conseil de la CCE Secrétariat de la CCE Comité consultatif public mixte Comités consultatifs nationaux COMMISSION DE COOPÉRATION DANS LE DOMAINE DU TRAVAIL (CCDT) Conseil de la CCDT Secrétariat de la CCDT Bureaux administratifs nationaux (BAN) Comités consultatifs nationaux PROCESSUS DEXAMEN Processus dexamen à long terme Automobile Processus dexamen à long terme GATT/OMC INSTITUTIONS INSPIRÉES DE LALÉNA Groupe sur létiquetage en matière defficacité énergétique Groupe sur la santé Groupe consultatif sur les transports Border Environment Cooperation Commission North American Development Bank NOTE
NO 2 : LES MÉCANISMES DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS Le fonctionnement des institutions de règlement des différends LALÉNA repose sur les mécanismes novateurs qui ont été établis comme volet crucial de lALÉ entre le Canada et les États-Unis, et il les prolonge. Lune des principales motivations de la négociation du libre-échange bilatéral par le Canada était dobtenir une certaine protection contre la montée du protectionnisme aux États-Unis, cest-à-dire essentiellement les lois de recours commercial autorisant limposition de droits antidumping (DA) ou compensatoires (DC) en guise de rétorsion contre des importations du Canada que des concurrents américains prétendaient être sous-tarifées ou subventionnées de manière déloyale. Lobjectif canadien était et demeure de remplacer ces recours controversés et dispendieux par un ensemble de règles nord-américaines convenues. Les États-Unis ont toujours été très réticents à accepter des concessions dans ce domaine. Comme lindique Gilbert Gagné : « Étant donné les divergences entre les autorités canadiennes et américaines, ce qui a été accepté a été un mécanisme « provisoire », composé essentiellement de groupes binationaux chargés dexaminer les décisions de DA et de DC pour voir si les lois nationales de recours commercial ont été correctement appliquées. Ces dispositions devaient être provisoires dans lALÉ, dans lattente dun régime commun en matière de dumping et de subventions »(14). LALÉNA prévoyait une période de cinq à sept ans pour négocier un tel régime. Considérant la réticence américaine à renoncer aux lois nationales, il est tout à fait concevable que le régime provisoire dexamen binational de lALÉ naurait pas survécu au-delà de cette période si lALÉNA navait pas été négocié. LALÉNA établit toutefois de manière permanente le recours à des groupes dexamen binationaux, dans son chapitre 19, ainsi que dautres procédures institutionnelles de règlement des différends concernant nimporte laquelle des trois parties(15). On trouve également des dispositions générales de règlement des différends au chapitre 20 de laccord. Si lon constate des contradictions avec les obligations de lALÉNA qui ne peuvent être résolues au moyen de consultations devant la Commission du libre-échange trilatérale, lALÉNA autorise la mise sur pied de groupes darbitrage de cinq membres choisis dans une liste tenue par la Commission et pouvant contenir jusquà 30 noms de personnes accréditées et nommées par consensus pour des périodes renouvelables de trois ans. Il existe dautres mécanismes de règlement des différends dans dautres chapitres de lALÉNA, notamment limportante procédure darbitrage investisseur-État pour les questions dinvestissement (chapitre 11)(16) et des modifications aux procédures générales en ce qui concerne les problèmes de services financiers (chapitre 14). Précisons enfin que les commissions de coopération dans le domaine de lenvironnement et du travail disposent de leurs propres procédures de règlement des différends, dont nous traiterons dans les notes relatives à lAtelier II. Pour le moment, nous nous intéresserons uniquement au domaine principal des différends commerciaux ayant touché le Canada pendant la décennie ayant suivi lentrée en vigueur de lALÉ, cest-à-dire les affaires de DA et de DC susmentionnées, qui sont couvertes par les dispositions complexes du chapitre 19 de lALÉ/ALÉNA. En vertu de ce système, chaque pays conserve ses propres lois nationales de recours commercial, bien que chacun ait lobligation de ne pas les modifier dune manière qui irait à lencontre du GATT/OMC ou de lesprit de lALÉNA. Cela pourrait en soi faire lobjet dune procédure de règlement des différends, bien quil ny ait encore eu aucune cause à ce sujet jusquà présent. Lélément central du chapitre 19 est que les décisions finales des tribunaux commerciaux nationaux en matière de DA et de DC sont assujetties à lexamen de groupes binationaux au lieu dun examen judiciaire national. Pour ce faire, on a prévu dans lALÉ létablissement dune liste de 50 spécialistes du droit commercial international 25 désignés par le Canada et 25 par les États-Unis; en pratique, les États-Unis ont étendu leur liste à 50 du fait de leur difficulté à choisir des candidats sans conflit dintérêts. Les candidats sont censés être indépendants de toute allégeance ou instruction gouvernementale. Les groupes dexamen sont composés de cinq membres deux nommés par chaque partie après consultations mutuelles, et le cinquième par consensus; en cas dabsence de consensus, le cinquième est choisi par accord des quatre déjà nommés ou, si tout accord est impossible, par tirage au sort parmi les noms de la liste globale. Dans la version du chapitre 19 qui figure dans lALÉNA, la liste a été portée à au moins 75 noms et lon a prévu une procédure de sélection similaire, à quelques différences importantes près. Si les deux parties au différend ne peuvent sentendre sur un cinquième membre, cest un pays tiré au sort qui choisira ce membre parmi la liste. Il se pourrait donc fort bien que le Mexique choisisse le cinquième membre pour un différend concernant le Canada et les États-Unis. La liste de lALÉNA doit comprendre dans toute la mesure du possible des juges ou ex-juges, concession faite aux États-Unis qui espéraient que cela aurait un effet modérateur sur les décisions dexamen. Les procédures de lALÉNA sont plus fermement établies et peuvent être considérées comme techniquement plus rigoureuses que celles de lALÉ. Il importe toutefois de souligner que les groupes dexamen de lALÉNA, comme ceux de lALÉ, sont seulement habilités à déterminer si la législation commerciale du pays importateur a été correctement appliquée dans le cas despèce. Lexamen se limite « au dossier administratif et à la norme dexamen de la partie dont lordonnance de recours est contestée. Autrement dit, les groupes dexamen ne font pas un nouveau procès et ne peuvent pas substituer leur jugement à celui des autorités étatiques. La législation américaine de mise en oeuvre de lALÉ dispose clairement que les décisions des groupes dexamen ne constituent pas des précédents exécutoires, cest-à-dire quelles ne sont pas loi »(17). Toute demande officielle de mise sur pied dun groupe dexamen au titre de lALÉNA doit être formulée dans les 30 jours dune décision finale de DA ou DC par lorganisme pertinent (p. ex., le Département du commerce des États-Unis ou la Commission commerciale internationale dans des plaintes formulées contre des importations canadiennes). La décision finale du groupe dexamen doit être livrée au plus tard 315 jours après la date de demande et elle est normalement exécutoire pour les parties, des mesures de rétorsion pouvant être autorisées en proportion du préjudice si elle nest pas appliquée. Il existe toutefois des cas exceptionnels dans lesquels la décision dun groupe dexamen peut être contestée : si lon prétend que la décision du groupe et lintégrité du processus dexamen ont été sensiblement influencées par le fait quun membre du groupe a été coupable dinconduite flagrante ou dun sérieux conflit dintérêts, ou si un groupe dexamen a enfreint les règles fondamentales de procédure ou outrepassé sa compétence. Dans ce cas, lALÉNA prévoit la mise sur pied dun « comité de contestation extraordinaire » (CCE) composé de trois juges(18) et qui dispose de 90 jours pour décider de confirmer, de renvoyer ou dinfirmer la décision du groupe spécial. Les résultats du règlement des différends, selon le Canada Comme nous lavons indiqué, lALÉNA ne prévoit pas le remplacement des lois de recours commercial par un quelconque système de règles nord-américaines communes. Il nexiste que la déclaration, acceptée fin 1993 à linsistance du Canada, que des groupes de travail sefforceront délaborer des codes bilatéraux sur les questions de dumping et de subventions pour la fin de 1995. Ces efforts semblent cependant avoir été bien peu fructueux(19). De fait, lopinion générale au sein du Congrès américain est que les États-Unis ont déjà fait trop de concessions en ce qui concerne leur possibilité de déployer leur arsenal commercial contre de prétendues pratiques « déloyales » de leurs principaux partenaires commerciaux. On semble penser que le Canada, pays plus petit, a été favorisé par un processus dexamen binational qui lui accorde des droits égaux et qui est destiné à être impartial et isolé des pressions politiques qui peuvent sexercer sur les organismes nationaux appliquant les lois commerciales. En même temps, la culture commerciale qui prévaut aux États-Unis repose toujours sur lidée de limiter le plus possible la révision internationale de leurs mesures commerciales, alors que le Canada ne cesse de réclamer des règles internationales plus rigoureuses. Il est vrai que le Canada a connu un succès considérable dans les causes quil a gagnées devant les groupes spéciaux du chapitre 19. Analysant le dossier cumulatif de plus de 35 décisions finales de groupes spéciaux entre 1989 et 1997, Homer Moyer, célèbre avocat américain spécialiste du droit commercial qui a représenté des intérêts canadiens à Washington, a trouvé un « taux de succès » de près de 60 p. 100 pour le Canada, de manière générale, ainsi quune diminution du nombre de nouvelles causes lancées depuis 1994 (voir lannexe 1)(20). Bien que les résultats aient été à peu près également partagés dans les affaires de dumping, le Canada a clairement gagné la majorité des causes relatives à limposition de droits compensatoires ou concernant des décisions de « préjudice » pour des producteurs américains. Cest au sujet des décisions des organismes américains concernant des causes de DC relatives à des subventions canadiennes prétendument incorrectes que les groupes spéciaux ont formulé le plus de reproches. Dans lensemble, les décisions des groupes spéciaux ne reflètent aucune préférence nationale et, selon Moyer, elles ont produit des normes constructives de révision juridique et débouché sur des conclusions de qualité, même si les responsables du commerce et les politiciens des États-Unis sont réticents à en convenir. Jusquà présent, le Canada a gagné dans les trois causes où les États-Unis invoquaient la procédure de contestation extraordinaire pour attaquer des décisions de groupes spéciaux favorables au Canada. Deux de ces décisions de CCE furent unanimes. Hélas, la troisième cause concernait le différend notoirement interminable et fortement politisé touchant les exportations canadiennes de bois doeuvre, différend important qui remonte aux négociations bilatérales originelles de lALÉ et qui constitue la cause la plus importante de toutes celles jamais intentées par les États-Unis en matière de recours commercial. Depuis lors, le Canada a gagné pas moins de cinq décisions consécutives ALÉ/ALÉNA dans les causes à répétition intentées par des producteurs américains sur le bois doeuvre. Et ce résultat a été confirmé en appel par un CCE. Il sagissait toutefois dune décision partagée, à deux contre un, dans laquelle le seul juge américain exprimait vigoureusement sa dissidence, offrant ainsi des munitions aux critiques américains du système. Dautres poursuites juridiques intentées par des producteurs américains de bois doeuvre et par dautres lobbies industriels prétendant que lexamen binational dans le cadre de lALÉNA enfreint la Constitution des États-Unis ont aussi échoué. Celle intentée par la American Coalition for Competitive Trade fut rejetée en novembre 1997, et une nouvelle poursuite constitutionnelle anti-ALÉNA, de portée plus large, a été intentée devant une cour fédérale des États-Unis en juillet 1998 par la Made in U.S. Foundation et par les Métallurgistes unis dAmérique. Jusquà présent, les retombées de ces attaques semblent avoir été circonscrites. Mais ce qui inquiète sérieusement les Canadiens, cest de constater que la campagne de harcèlement entreprise non seulement contre des secteurs clés dexportation de denrées canadiennes mais aussi contre le principe même de lexamen binational nen continue pas moins vigoureusement. De fait, comme dans laffaire du bois doeuvre, le résultat est que le Canada a finalement accepté de négocier des ententes bilatérales en dehors des règles de lALÉNA, ententes qui ont pour effet de limiter les exportations en échange dune suspension temporaire des mesures commerciales américaines. Dautres analyses des résultats du règlement des différends révèlent que, de manière plus générale, les mécanismes ALÉ/ALÉNA nont pas comblé les espoirs de ceux qui pensaient quils empêcheraient les États-Unis dintenter des poursuites en recours commercial pour harceler les exportateurs canadiens. Après avoir examiné les 19 décisions de groupes spéciaux binationaux concernant des déterminations américaines de DA ou DC dans la période 1989-1993(21), Gagné convient quelles ont produit certains bénéfices. Dans certains cas, notamment en ce qui concerne les exportations canadiennes de viande de porc, ces décisions ont imposé lannulation ou le remboursement de droits américains mais, dans dautres domaines, leur incidence a été minime et les droits ont été maintenus(22). Plus important encore, il estime que, pendant la période dapplication de lALÉNA, le mécanisme de règlement des différends a été miné par les sérieux problèmes ci-après, sous-jacents et interreliés, en tout cas du point de vue canadien.
Gagné résume ainsi son évaluation : « Bien que plus de 80 causes aient été portées devant des groupes spéciaux binationaux, la plupart concernaient des problèmes limités, de portée économique et politique circonscrite. Bien que ces causes aient eu tendance à être réglées de manière satisfaisante après lexamen du groupe spécial, les causes fortement politisées concernant de gros volumes commerciaux ont fait ressortir les limites du mécanisme binational »(23). Le gouvernement canadien porte un jugement beaucoup plus positif sur lefficacité des mécanismes de règlement des différends de lALÉNA, en prétendant souvent que quelque 95 p. 100 dun énorme commerce transfrontalier ne posent aucun problème(24). Il nen reste pas moins que lon convient généralement que le Canada na pas atteint son objectif daccès assuré aux marchés pour ses exportations. À preuve, cet extrait dune publication récente : « Malgré le succès évident des procédures prévues au chapitre 19 de lALÉ et de lALÉNA, le Canada continue de considérer que les recours commerciaux nont pas leur place dans une zone de libre-échange. Cest pourquoi il entend poursuivre ses efforts en vue dobtenir une réforme significative, sinon lélimination, de ces mesures en Amérique du Nord »(25). Les experts canadiens de droit commercial conviennent quun quelconque renforcement éventuel des règles de lALÉNA produirait encore beaucoup moins que le régime centralisé mis en place dans le Marché commun européen. Quoi quil en soit, bon nombre estiment que le cadre institutionnel nord-américain de résolution des différends commerciaux doit être sérieusement renforcé. Selon Lawrence Herman, « une certaine forme de permanence [des groupes binationaux de lALÉNA] contribuerait à donner plus de cohérence à la jurisprudence tout en créant au moins un organisme central ayant un intérêt acquis permanent envers le système général de lALÉNA, par opposition à des secrétariats nationaux ayant chacun un point de vue particulier, et à des groupes spéciaux dont les membres se réunissent, décident puis disparaissent pour reprendre leurs activités respectives, sans quon les revoie jamais »(26). William Graham, ancien professeur de droit commercial international présidant le Comité des affaires étrangères et du commerce de la Chambre des communes du Canada, qui a tenu des audiences sur la mise en oeuvre des mécanismes de règlement des différends commerciaux, convient quil devrait y avoir un tribunal permanent de lALÉNA(27). Toutefois, lors de réunions récentes dans la capitale américaine, Jeffrey Schott, du Institute for International Economics, a mis le Comité en garde contre toute réouverture des dispositions de lALÉNA, en disant que ce serait dangereux dans le contexte politique américain daujourdhui. Comme le Canada ne peut pas faire grand-chose dans limmédiat pour corriger les sérieuses faiblesses des mécanismes de lALÉNA, il ferait mieux, affirme Robert Howse dans une nouvelle étude, de porter les causes les plus complexes devant les groupes spéciaux de lOMC, dont le système a été considérablement renforcé par rapport à ceux qui existaient avec le GATT. Howse recommande aussi que le Canada continue de réclamer lamélioration du processus de lALÉNA, notamment par létablissement dun tribunal permanent, mais il croit que lOMC offre aujourdhui une option efficace pour régler certains différends (comme celui du bois doeuvre) qui ont jusquà présent échappé à toute résolution satisfaisante dans le cadre de lALÉNA(28). Un autre facteur de portée encore plus vaste est labsence de processus public démocratique dexamen des causes soumises aux mécanismes de règlement des différends, dans lesquels des « intérêts spéciaux » du secteur privé ont tendance à jouer un rôle dominant en coulisses. Comme laffirme Henry Jacek : « Lintérêt public a peu à voir avec le mécanisme de règlement des différends. Les aspects des différends qui concernent les consommateurs, les travailleurs et lenvironnement sont laissés de côté. Certes, il sagit en apparence de désaccords entre des États nationaux mais, bien souvent, les gouvernements ne sont que les substituts ou les agents dintérêts commerciaux organisés »(29). De plus, des lobbies industriels concurrents produisent bon nombre des informations utilisées pour plaider les causes, les procédures dexamen ont tendance à être spécialisées et secrètes, et « il nexiste pas de règles commerciales communes, surtout quand il sagit de subventions gouvernementales et de politiques de prix différentielles des entreprises »(30). Cela étant, décider qui a tort ou raison dans ce domaine risque encore en pratique de dépendre plus de qui est capable de mener de longues batailles juridiques dispendieuses que de savoir quel serait le meilleur résultat du point de vue de la société. En bref, même si les mécanismes de règlement des différends de lALÉNA ont présenté un considérable intérêt pour les exportateurs canadiens, ils noffrent aucune garantie daccès aux marchés et ils nont pas non plus été conçus pour tenir compte des questions dintérêt public plus générales touchant les aspects politiques et sociaux dun espace économique nord-américain de plus en plus intégré.
LES COMMISSIONS DE LALÉNA
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NOTE
NO 3 : MANDAT ET ÉVOLUTION DES COMMISSIONS Comme nous avons indiqué dans la note no 1 ainsi que dans son annexe 2, lALÉNA a provoqué la création dun certain nombre dinstitutions de mise en oeuvre, dorganismes subsidiaires et de groupes de travail trilatéraux. Lentité la plus importante à ce chapitre est la Commission du libre-échange, qui se réunit au moins une fois par année au niveau ministériel, et qui est appuyée par des secrétariats de travail. Les mandats et fonctions de ces entités sont énoncés dans le texte principal de lALÉNA publié en décembre 1992. On ne trouve cependant dans ce texte aucune disposition particulière en matière de normes environnementales et du travail. Toutefois, le président Clinton avait pris lengagement de respecter sa promesse électorale de 1992 concernant la négociation daccords parallèles ou subsidiaires sur lenvironnement et sur le travail avant la ratification du traité par le Congrès, initiative quappuyait le Canada. Cela a débouché sur un Accord nord-américain de coopération dans le domaine de lenvironnement (ANACE) signé en août 1993, et dun Accord nord-américain de coopération dans le domaine du travail (ANACT), signé en septembre 1993. Ces « accords parallèles » sont entrés en vigueur (à quelques exceptions importantes près dans le cas du Canada, comme nous le verrons plus loin) en même temps que laccord principal, le 1er janvier 1994. Pour assurer la mise en oeuvre de ces accords, on a créé deux autres commissions de niveau ministériel la Commission de coopération environnementale, située à Montréal, et la Commission de coopération dans le domaine du travail (CCT), située à Dallas. LANACE et la Commission de coopération environnementale (31) Bien que lAccord de coopération environnementale de lALÉNA nétablisse pas de normes environnementales communes que devraient respecter les pays de lALÉNA, on y trouve des dispositions impératives vigoureuses concernant lobligation pour les partenaires dappliquer des normes élevées de manière autonome et de coopérer pour atteindre des objectifs environnementaux. Ainsi, chaque partie doit veiller à ce que ses lois et règlements établissent des niveaux élevés de protection environnementale, et sefforcer de continuer à améliorer ses lois et règlements. Plusieurs instruments et procédures sont prévus à cette fin, notamment en ce qui concerne léducation et la recherche, des techniques appropriés dévaluation et dexécution, des droits et pouvoirs juridiques denquête, etc. La principale institution trilatérale établie en vertu de lANACE est la Commission de coopération environnementale (CCE) qui se compose dun Conseil de direction, dun Secrétariat et dun Comité consultatif public mixte (CCPM). De plus, la CCE a créé en 1995 le Fonds nord-américain de coopération environnementale (FNACE) pour financer des projets communautaires de protection de lenvironnement dans les trois pays. Le Conseil est un organisme de haut niveau comprenant des ministres ou leurs représentants qui se réunit au moins une fois lan pour se pencher sur toutes les politiques publiques relatives à lenvironnement touchées par les accords de lALÉNA et pour adresser des recommandations à ce sujet aux gouvernements de lALÉNA. Le Secrétariat de Montréal assume des fonctions variables : il prépare un rapport annuel au Conseil, ainsi que des évaluations périodiques sur létat de lenvironnement dans chaque pays; il peut produire des rapports sur dautres questions qui lui sont soumises si au moins deux pays sont daccord; et il assure la mise en oeuvre du programme de travail coopératif de la CCE. Les premières questions envisagées par la CCE portaient sur létablissement de limites pour certains polluants atmosphériques et marins, lévaluation environnementale de projets ayant une incidence transfrontalière, et létablissement de mécanismes réciproques daccès aux tribunaux en cas de dommages ou de préjudice résultant de la pollution transfrontalière. Ses domaines dintérêt plus récents comprennent lélaboration de plans daction pour la gestion régionale des produits chimiques dangereux et le lancement de projets sur le changement climatique. Le Secrétariat peut aussi se pencher sur des interventions non gouvernementales alléguant quune partie nappuie pas efficacement sa législation environnementale, ce qui déclenche un processus à date limite dans lequel la partie accusée doit répondre et le Conseil peut, par un vote des deux tiers, autoriser la production et la divulgation publique dun « dossier factuel ». Finalement, le CCPM de 15 membres se compose de cinq citoyens de chaque pays et il contribue au programme et aux questions budgétaires de la CCE. Un comité peut aussi mettre sur pied son propre comité consultatif public national en lui donnant le pouvoir de choisir ses représentants au CCPM. LANACE contient des procédures de règlement des différends lorsquun pays est accusé par ses partenaires de lALÉNA déchec patent à appliquer ses lois environnementales dans un secteur touché par le commerce de lALÉNA. Si aucun progrès nest réalisé après une période initiale de consultations et une réunion spéciale du Conseil, on peut autoriser par un vote des deux tiers la mise sur pied dun groupe darbitrage de cinq membres (choisis dans une liste de 45, soit 15 pour chaque pays, avec une procédure de sélection similaire à celle des groupes spéciaux en vertu de laccord général). Les pays ont la possibilité de répondre aux constatations initiales du groupe darbitrage avant que le rapport final de celui-ci, contenant ses recommandations éventuelles en matière de correctifs, soit remis au Conseil et rendu public. Si des correctifs sont indiqués mais que les parties ne parviennent pas à sentendre sur un plan daction satisfaisant, le groupe darbitrage peut être reconvoqué pour faire le travail. Celui-ci peut aussi imposer une « amende dexécution », cest-à-dire une amende qui doit être payée au Conseil et qui ne peut dépasser 20 millions de dollars US pendant la première année de lALÉNA ou, pendant les années suivantes, 0,007 p. 100 de la valeur du commerce régional combiné. Si les mesures recommandées ne sont toujours pas exécutées, on peut appliquer des sanctions commerciales équivalant au montant de lamende. Le Canada a toutefois réussi à se dispenser de cette dernière disposition qui ne sapplique donc quaux États-Unis et au Mexique. De ce fait, si le Canada refusait de payer une amende imposée par un groupe darbitrage, la CCE pourrait sadresser aux tribunaux canadiens pour obtenir une ordonnance dexécution juridique. Il existe un autre aspect très important sous lequel lANACE permet un « régime spécial » pour le Canada, du fait de la répartition constitutionnelle des pouvoirs en matière denvironnement(32). Dans les domaines qui sont clairement de la compétence du gouvernement fédéral, il ny a aucun problème. Par contre, dans les domaines de compétence provinciale, il faut dabord que les provinces canadiennes acceptent dêtre liées par laccord pour que ses dispositions puissent sy appliquer. En outre, le gouvernement fédéral ne peut porter de causes environnementales devant des organismes de lALÉNA sur des questions de compétence provinciale à moins davoir obtenu laccord de provinces représentant au moins 55 p. 100 du PIB canadien, et quau moins 55 p. 100 de la production du secteur ou de lindustrie concernée némanent de provinces liées par lANACE. De même, les États-Unis et le Mexique ne peuvent intenter de poursuites environnementales contre des provinces canadiennes si les seuils de 55 p. 100 ne sont pas atteints. En 1994, les gouvernements fédéral et provinciaux du Canada ont négocié une « entente intergouvernementale » établissant des modalités communes dexécution de lANACE. Il a cependant fallu attendre 1996 pour que lAlberta devienne la première province à ratifier lentente, suivie depuis par le Québec et par le Manitoba. Par contre, la plus grande province canadienne, lOntario, qui représente plus de 40 p. 100 du PIB et près de la moitié du commerce de lALÉNA, na toujours pas ratifié lAccord environnemental, ce qui veut dire que celui-ci ne sapplique encore que partiellement au Canada. LANACT et la Commission de coopération dans le domaine du travail Comme lAccord environnemental, laccord parallèle de lALÉNA concernant le domaine du travail nétablit pas de normes nord-américaines communes en la matière mais contient des dispositions impératives obligeant les parties à respecter les droits des travailleurs et à faire appliquer efficacement des « normes élevées du travail » par le truchement de leurs propres lois et ce, de plusieurs manières. Toutefois, à la différence de lAccord environnemental, il nexiste aucune obligation de se pencher sur des demandes non gouvernementales denquête concernant des allégations dinfraction aux lois du travail. Les objectifs énoncés dans lANACT sont lamélioration des conditions de travail et du niveau de vie dans chaque pays et la promotion « dans toute la mesure du possible » dune série de 11 principes relatifs au travail. Parmi les plus importants, mentionnons la liberté dassociation, le droit de se syndiquer et de négocier collectivement, le droit de grève, linterdiction du travail forcé et du travail des enfants, la parité salariale entre les hommes et les femmes, la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, et lindemnisation en cas de blessure ou de maladie. Les principales institutions de mise en oeuvre de lANACT sont la Commission de coopération dans le domaine du travail (CCT), qui se compose dun conseil intergouvernemental de haut niveau chargé de se pencher sur les grandes politiques du travail, et dun secrétariat de soutien chargé des fonctions administratives et de lexécution dun programme de travail convenu. Cela dit, la CCT est un organisme sensiblement plus faible que la CCE. En effet, son secrétariat nest pas obligé dadresser un rapport annuel au conseil, bien quil doive préparer périodiquement des rapports contenant les informations publiquement disponibles fournies par chaque partie. Jusquà présent, il a publié des études sur le marché du travail en Amérique du Nord, le droit du travail dans le cadre des relations industrielles, et les effets de fermetures soudaines dusines. Le secrétariat de Dallas na que 15 employés. Il nexiste en outre aucun comité consultatif public mixte. Il ny a que des bureaux administratifs nationaux (BAN) établis au sein des organismes gouvernementaux fédéraux des trois pays de lALÉNA. Au Canada, il sagit du ministère du Travail, au sein du ministère du ministère du Développement des ressources humaines. Finalement, les pays sont libres détablir leurs propres organismes consultatifs nationaux. Les procédures de règlement des différends dans le domaine du travail ne sont par ailleurs pas les mêmes que celles de lAccord environnemental. Pour certaines questions, outre les consultations par le truchement des BAN et du Conseil de la CCT, il y peut y avoir une intervention par des comités dévaluation dexperts (CEE) de trois membres dont les présidents sont issus dune liste dressée après consultation de lOrganisation international du travail (OIT), et les autres membres, dune liste dressée par les parties. Les constatations des CEE sont sujettes aux commentaires des parties avant que des rapports définitifs ne soient adressés au Conseil et publiés dans des délais établis. Toutefois, seuls les rapports de CEE concernant trois domaines le travail des enfants, la santé et la sécurité professionnelles, et les normes techniques de salaire minimum peuvent donner lieu à dautres mesures de règlement des différends pour des raisons déchec patent à appliquer les lois pertinentes. Si les consultations au sein du Conseil échouent sur une question qui est reliée au commerce et qui est « couverte par les lois du travail mutuellement reconnues », laffaire peut être portée devant un groupe darbitrage dont les procédures sont les mêmes que celles de lANACE en ce qui concerne la sélection des membres, les échéances de rapport, limposition damendes et le recours ultime à des sanctions commerciales en cas dinexécution. Ici encore, le Canada a obtenu des exemptions spéciales. Il nest pas assujetti aux sanctions, auquel cas il convient que les décisions finales des groupes darbitrage pourront être exécutées par un tribunal canadien. En outre, dans toute cause à caractère général portée contre le Canada, il faut que 35 p. 100 des travailleurs touchés se trouvent dans des provinces ayant accepté dêtre liées par lANACT. Le seuil passe à 55 p. 100 dans le cas des causes qui concernent un secteur dactivité particulier. Comme dans le cas de lANACE, trois provinces seulement le Québec, lAlberta et le Manitoba, représentant quelque 40 p. 100 de la population active du Canada ont jusquà présent signé laccord intergouvernemental canadien régissant la participation provinciale. Évaluation des accords parallèles et des commissions de mise en oeuvre Depuis 1994, les structures de lALÉNA relatives à lenvironnement et au domaine du travail ont fait lobjet dévaluations très mitigées, autant des thuriféraires que des adversaires du libre-échange. Certes, elles étaient novatrices et elles ont contribué à légitimer la prise en compte des questions denvironnement et de travail dans les négociations sur le commerce et linvestissement. De plus, leur application réciproque au Mexique était un test important, compte tenu des disparités profondes et problématiques existant entre ce pays et ses partenaires nord-américains. Toutefois, les milieux daffaires ont eu tendance soit à minimiser délibérément la valeur de ces accords, soit à les considérer comme des à-côté injustifiés du programme de libéralisation économique(33). Certains les considèrent même comme un précédent dangereux. Pour ce qui est des groupes environnementaux et syndicaux, ils peuvent être tout aussi négatifs dans leur évaluation de ces accords, mais pour des raisons opposées : parce quils sont trop faibles et trop subordonnés aux obligations primordiales du libre-échange. Lune des principales critiques est que les organismes de lALÉNA ne peuvent en réalité rien faire au sujet des carences existant dans les trois pays en matière de protection de lenvironnement et de droits des travailleurs, et que leurs moyens dintervention pour améliorer lapplication des lois existantes sont très limités. Après tout, les commissions de lALÉNA restent des créations de leurs gouvernements. Donc, comme le constatait Watson au départ : « Il est facile dêtre cynique au sujet des accords parallèles. Les trois parties conservent une latitude considérable... et elles peuvent être tentées, plus souvent quautrement, de saccorder des passe-droits »(34). On peut cependant aussi considérer que cette flexibilité, plutôt quune adhésion rigide à des normes minimums communes, pourrait être un atout pour les gouvernements de lALÉNA. Selon le professeur de droit américain Jack Garvey, les accords parallèles « affirment explicitement le droit de chaque partie dadopter des normes supérieures aux niveaux internationaux. (...) De fait, le mandat est dassurer le degré de protection le plus élevé dans le cadre des lois de chaque partie. (...) Tant que des normes internationales ne pourront pas être négociées, les accords parallèles constituent le meilleur mécanisme pour veiller à ce que les valeurs de qualité de vie soient prises en considération parallèlement aux valeurs du commerce »(35). Compte tenu des dispositions plus rigoureuses de lAccord environnemental, certains analystes estiment que ce sont les institutions pertinentes qui ont les meilleures chances de jouer un rôle vraiment actif. Avant dentreprendre un examen plus spécifique des résultats de lALÉNA en matière denvironnement et de travail, il convient dajouter que les commissions sont des entités en évolution. Lune des dispositions de lANACE et de lANACT prévoit un examen intergouvernemental de leur fonctionnement et de leur efficacité quatre ans après leur entrée en vigueur. Du côté environnemental, le conseil de direction de la CCE a nommé un comité dexamen indépendant (CEI) en novembre 1997 pour quil effectue cette évaluation, et son rapport a été publié après avoir été remis à la Commission lors de sa dernière réunion, à Mexico, en juin 1998. On trouve dans ce rapport quelques observations et recommandations ambitieuses (26 en tout). Voici par exemple un extrait du synopsis :
Le processus dexamen au bout de quatre ans de lAccord relatif au travail a pris fin en octobre 1998. Lors de sa dernière réunion à Washington, en septembre 1997, le Conseil de la CCT est convenu que ce processus devait englober les commentaires des organismes consultatifs ainsi que des commentaires écrits publics (qui devaient être reçus pour la fin de 1997) et quun « rapport consultatif indépendant pour le Conseil » serait préparé par un comité dexamen de trois personnes composé dexperts non gouvernementaux du monde du travail choisis parmi les membres ou suppléants du comité consultatif national de chaque pays. Ce rapport doit être rendu public dans le cadre du rapport final destiné au Conseil sur lexamen de lANACT(37). Conformément aux lignes directrices adoptées par le Conseil de la CCT lors de sa réunion de Washington, en septembre 1997, ce processus a englobé des commentaires. Se réunissant pour la deuxième fois au Canada le 8 octobre 1998, le Conseil ministériel a produit une série de conclusions préconisant de modestes améliorations en réponse à lexamen, tout en reconnaissant des lacunes et une absence de consensus dans certains secteurs. Un deuxième examen exhaustif doit avoir lieu en lan 2002.(38) NOTE NO 4 : LALÉNA ET LES QUESTIONS ENVIRONNEMENTALES LALÉNA, un accord « vert »? (39) Lors de la signature du texte final de lALÉNA en décembre 1992, les trois gouvernements ont vanté lAccord, disant quil allait plus loin que nimporte quel autre accord de libre-échange dans la mesure où lon y avait intégré des dispositions environnementales. De fait, lorsque le gouvernement canadien, en octobre 1992, a procédé à lexamen environnemental officiel du projet daccord daoût de cette année, il a déclaré que : « LALÉNA constitue un nouveau point de référence pour assurer des relations commerciales et économiques internationales sensibles à lenvironnement ». Et il est vrai que lon trouve dans le texte de lAccord et dans son préambule un certain nombre darticles qui semblent favorables à lenvironnement, notamment :
Bon nombre de groupes environnementaux ont toutefois été fort peu impressionnés par laccord et par les examens officiels parce quils doutent que les engagements pro-environnement soient exécutoires et quils soupçonnent que lobligation primordiale de veiller à ce que les lois et règlements restreignent le moins possible le commerce primerait sur les dispositions de protection de lenvironnement. Le débat a fait ressortir certains des principaux arguments environnementaux contre la libéralisation du commerce : « 1) le commerce favorise une croissance qui fait peu de cas des questions environnementales; 2) les disciplines commerciales sont une menace aux mesures environnementales intérieures; 3) la libéralisation du commerce et de linvestissement est un outil dharmonisation vers le bas; 4) les lois sur le commerce sont des obstacles à ladoption de mesures commerciales intérieures visant à promouvoir la protection de lenvironnement global; et 5) le manque douverture et de transparence des règles et institutions commerciales est un problème critique »(41). Les graves préoccupations exprimées au sujet des conditions environnementales au Mexique, notamment dans les zones frontalières de transformation des exportations (les maquiladoras), et les mauvaises perspectives dexécution dans ce pays nont fait quenvenimer le débat(42). Il est clair que lALÉNA est un accord commercial comportant certaines dispositions environnementales de valeur et defficacité contestables, dispositions qui « privilégient la confrontation et les méthodes punitives plutôt que les procédures dinformation, de divulgation, de discussion des problèmes communs et de coopération ». Les optimistes estiment que cette démarche pourrait rehausser linfluence des organisations environnementales et provoquer létablissement de liens transnationaux fondés sur le principe que « le prix des produits des partenaires vendus sur les marchés de chaque autre devrait intégrer le coût de la protection de lenvironnement »(43). Malgré la résistance acharnée des milieux daffaires face à ce concept, il existe dans lALÉNA des éléments favorables à une harmonisation à la hausse des normes environnementales et, par conséquent, susceptibles dêtre favorables aux entreprises les plus nouvelles, mieux à même de profiter de cette tendance(44). Au Canada, par exemple, le gouvernement fédéral a formulé dans le sillage de lALÉNA une stratégie industrielle environnementale qui a reçu lappui vigoureux des membres de lAssociation canadienne des industries environnementales, bien que lon craigne aujourdhui que ce programme ne soit plus financé(45). Pour ce qui est de laccord parallèle de lALÉNA sur lenvironnement, lANACE, la situation nest probablement ni aussi verte ni aussi désespérément grise que ne le prétendent les parties antagonistes. Il est clair quil y a des faiblesses et des lacunes. LANACE se compose en grande mesure dengagements politiques non exécutoires et il ny a aucun moyen den garantir lefficacité. La définition du droit environnemental dans lAccord nenglobe pas le secteur important de la gestion et de lexploitation des ressources naturelles, lequel est en grande mesure au Canada de compétence provinciale et où les problèmes sont encore compliqués par une situation insatisfaisante en ce qui concerne le fondement constitutionnel du droit environnemental, même en comparaison avec le Mexique(46). De plus, dans le cas canadien, lANACE nest encore exécutoire que dans trois des 10 provinces. Certains groupes environnementaux, notamment lAssociation canadienne du droit environnemental, qui avait contribué à lopposition de lOntario, la plus grande province du Canada, aux accords originels, continuent de juger très sévèrement la valeur environnementale de lAccord(47). Cela dit, daucuns ont défendu lANACE en disant quil sagit « dune avancée très importante étant donné que laccord parallèle est le premier de ce genre », et ses auteurs ont été félicités pour avoir « bien compris les questions et la gestion environnementales »(48). Dans lensemble, Johnson et Beaulieu prononcent un verdict provisoire nuancé qui montre le chemin vers une utilisation plus positive du potentiel de lALÉNA à lavenir :
Les résultats environnementaux des institutions de lALÉNA Lanalyse la plus exhaustive de la performance environnementale du régime de lALÉNA se trouve dans une étude indépendante commandée par la Commission de coopération environnementale dans le cadre de son projet « Effets de lALÉNA », publiée en novembre 1997. En se penchant sur tous les aspects des structures de lALÉNA à partir de la Commission du libre-échange, les auteurs ont produit une conclusion très mitigée et identifié certaines carences cruciales. La bonne nouvelle est celle-ci : « Au minimum, la quasi-totalité des institutions économiques de lALÉNA ayant des responsabilités ou une pertinence environnementales ont commencé à appliquer leur mandat. (...) La prolifération des institutions post-ALÉNA à lintérieur et à lextérieur de la structure de la Commission du libre-échange permet de penser quun processus dynamique de trilatéralisation croissante est en cours et quil est susceptible denglober une gamme toujours plus large de champs fonctionnels et de questions environnementales »(50). En revanche, les succès concrets semblaient rares(51). Malgré leur recherche déléments positifs, les auteurs de létude ont aussi fait ressortir des résultats décevants :
Les auteurs de létude ont été particulièrement troublés par « la séparation malsaine [qui continue dexister] entre les questions commerciales et environnementales », dont la manifestation la plus frappante est « labsence de dialogue régulier entre la Commission du libre-échange et la Commission de coopération environnementale, bien que les représentants ministériels des deux organismes soient convenus de lintérêt dun tel dialogue ». Il nest donc pas surprenant que les auteurs de ce rapport aient conclu « quil reste encore beaucoup à faire pour que les institutions de lALÉNA atteignent le but essentiel de laccord commercial, la « promotion du développement durable, ainsi que ses objectifs économiques » dune manière qui soit conforme à la protection environnementale et à la conservation »(53). Pour ce qui est de la CCE elle-même, de nombreuses questions importantes se posent encore à son sujet. Certes, la Commission a fait la manchette avec son premier rapport annuel, Taking Stock, publié en juillet 1997, dans lequel elle critiquait les grandes firmes canadiennes et classait lOntario comme troisième État en importance pour ce qui est de la pollution en Amérique du Nord. Toutefois, la Commission navait jusquà cette date été saisie que dune poignée de cas en vertu de sa procédure de plaintes non gouvernementales, dont trois émanant de Canadiens, et aucune navait été couronnée de succès. Par exemple, une plainte formulée par le groupe écologiste de lAlberta Friends of the Oldman River a été rejetée par la CCE en avril 1997. En septembre 1998, sur les 18 plaintes déposées par des particuliers auprès de la Commission depuis 1994 aux termes de larticle 14 de lANACE, 10 sont en instance : quatre concernant le Canada, cinq concernant le Mexique et une concernant les États-Unis. Le Conseil de la CCE na rendu quune seule décision fondée sur des faits jusquà maintenant. Début 1998 et suite à une controverse entourant une autre cause environnementale contre le Canada, qui a entraîné le renvoi du principal représentant américain, la Commission a été secouée par le renvoi brutal de son premier directeur général, le Mexicain Victor Lichtinger qui, paradoxalement, avait été reconduit dans son poste pour un mandat de trois ans à peine quelques mois avant. Daucuns en ont conclu que son style agressif était devenu trop embarrassant pour les gouvernements. En outre, la méthodologie et le contenu du deuxième rapport Taking Stock de la CCE, publié en octobre 1998, a fait lobjet de critiques soutenues de la part de sources gouvernementales canadiennes(54). Quoi quil en soit, lors de sa réunion de Mexico en juin 1998, le conseil ministériel de la CCE a semblé réitérer quil avait confiance dans son mandat, tout en coupant apparemment les ailes du secrétariat et en plafonnant son budget annuel à neuf millions de dollars US(55). Comme nous lavons indiqué dans la note no 3, le rapport de juin 1998 du Comité dexamen indépendant de lANACE comportait une recommandation concernant un renforcement ambitieux du rôle de la CCE. En bref, il y a de fortes pressions conflictuelles en jeu. La controverse sur les dispositions de lALÉNA en matière dinvestissement Si la réputation de la Commission environnementale semble encore incertaine, une controverse peut-être encore plus dommageable a éclaté sur la réputation environnementale de lALÉNA du fait de plusieurs poursuites intentées contre le gouvernement canadien par des sociétés américaines invoquant la procédure darbitrage investisseur-État du chapitre 11 de lALÉNA. Il sagit du chapitre établissant des règles en vertu desquelles des firmes privées peuvent intenter des poursuites directes contre les gouvernements pour des allégations dinfraction à leurs obligations au titre de lALÉNA, et cest un chapitre qui a été mis en exergue comme prototype pour la protection des investisseurs dans le cadre de lAccord multilatéral sur linvestissement (AMI) proposé. Laffaire qui a retenu le plus lattention est notamment celle de la société Ethyl Corp., seul producteur du MMT, additif de lessence basé sur le manganèse. Compte tenu des risques que pose le MMT pour la santé, ainsi que de ses autres effets négatifs précisons quon ne lutilise pas en Europe et quil reste banni dans certaines parties des États-Unis limportation et le commerce interprovincial du MMT ont été interdits au Canada en 1997. En labsence de données scientifiques concluantes contre le MMT, et peut-être conscient des batailles juridiques au sujet de son utilisation qui minent lagence américaine de protection de lenvironnement, le Canada a imposé linterdiction en vertu de sa législation commerciale plutôt que de sa législation environnementale. Cette décision a provoqué une contestation intérieure et une contestation en vertu de lALÉNA. Plusieurs provinces ont contesté linterdiction du commerce interprovincial, en vertu dun accord de 1994 sur le commerce intérieur. En juin 1998, un groupe darbitrage a rendu une décision en leur faveur. Ce qui est inquiétant toutefois, dans ce contexte, cest que la société-américaine Ethyl Corp. avait intenté une poursuite contre le Canada en vertu du chapitre 11 de lALÉNA, en réclamant 250 millions de dollars US de dommages et intérêts. Selon Gordon Ritchie, consultant commercial canadien réputé qui fut lun des principaux négociateurs de lALÉ canado-américain : « Si cette cause était gagnée, cela imposerait une contrainte majeure du point de vue de la souveraineté dun pays souhaitant appliquer une réglementation environnementale ou autre »(56). Une différence importante entre lALÉ et lALÉNA est que, selon le premier accord, seuls les gouvernements pouvaient autoriser de tels groupes spéciaux darbitrage. Alors que la controverse sintensifiait suite à la perte du gouvernement canadien au sujet de linterdiction interprovinciale, celui-ci a soudainement annoncé fin juillet quil avait réglé à lamiable avec Ethyl, cest-à-dire en fait quil avait concédé la victoire. La firme américaine a accepté dabandonner sa poursuite et le Canada a accepté en contrepartie dabroger son interdiction transfrontalière, de verser à Ethyl 13 millions de dollars US de dommages et intérêts et de reconnaître quil ny avait encore aucune preuve scientifique des effets néfastes du MMT(57). Cette décision a non seulement été largement condamnée du point de vue de lenvironnement et de la santé, elle a aussi fait renaître les peurs que les dispositions de règlement des différends de lALÉNA ne soient dangereusement viciées à plusieurs égards. Premièrement, selon un expert réputé du droit commercial, elles mettent les gouvernements « en péril sils adoptent des mesures ayant pour « effet » dexproprier des biens appartenant à des étrangers, directement ou indirectement ». Deuxièmement, lALÉNA « permet que ces différends soient réglés complètement à huis clos sur simple demande de lune des parties. Cest ce qui est arrivé dans laffaire du MMT. En fin de compte, le public ne peut avoir confiance dans le système que sil a lassurance dune transparence complète des informations »(58). La controverse sest encore avivée en août 1998 quand on a révélé quune deuxième firme américaine avait annoncé en juillet son intention dinvoquer la même procédure de lALÉNA pour réclamer des indemnités suite à une interdiction canadienne de 1995 des exportations de BPC toxiques vers les États-Unis. Lavocat commercial et environnemental Howard Mann, lun des principaux rédacteurs du rapport de juin 1998 du Comité dexamen indépendant de lANACE, dit que cela pourrait nêtre que la « pointe de liceberg »(59). Ces causes ne font quintensifier les craintes similaires qui ont été exprimées quant à la manière dont les dispositions de lAMI pourraient être utilisées en secret par des intérêts privés pour obtenir labrogation de règlements gouvernementaux destinés à protéger le public. En septembre 1998, une coalition denvironnementalistes, de syndicats et de groupes sociaux a demandé que la Commission de coopération environnementale de lALÉNA se penche sur les risques que peuvent éventuellement présenter pour lenvironnement les cas qui relèvent des règles de lALÉNA relatives à larbitrage investisseur-États(60). NOTE NO 5 : LALÉNA ET LE DOMAINE DU TRAVAIL On ne trouve dans le texte même de lALÉNA quasiment rien sur les questions de travail, sauf pour ce qui est dun engagement inexécutoire dans le préambule « daméliorer les conditions de travail et le niveau de vie » et « de protéger, de renforcer et dappliquer les droits fondamentaux des travailleurs ». Bien que les partisans de la libéralisation du commerce prétendent que lactivité économique que celle-ci vise à stimuler devrait provoquer une hausse générale des revenus, les critiques du monde syndical affirment que les forces compétitives déréglementées lâchées par la libéralisation des marchés ont pour effet de miner le pouvoir de négociation des travailleurs et risquent dentraîner des pertes sérieuses pour ce qui est des salaires et (ou) des emplois dans les secteurs dont la compétitivité décline suite au libre-échange. LALÉNA suscite encore plus de controverses que lALÉ canado-américain à ce chapitre, du fait de linclusion du Mexique, pays encore en développement où les salaires sont beaucoup plus bas et où les normes du travail sont bien mal respectées, dans le cadre dun régime de gouvernement autoritaire où il y a peu de syndicats indépendants. On a dit alors que les travailleurs canadiens et américains risquaient dêtre perdants si des firmes transféraient leur production pour tirer parti de telles conditions. Comme les coûts sociaux de tels transferts reliés au commerce ne sont pas pris en compte dans les prix à la consommation (lesquels sont susceptibles de baisser avec une main-doeuvre bon marché), daucuns ont qualifié ce phénomène de « dumping social » similaire au problème résultant du fait que lon ne tient pas compte des coûts environnementaux dans les transactions économiques. Dans le cadre du débat portant sur lALÉNA, les groupes syndicaux ont dit que lenvironnement commercial entre les trois pays ne serait pas loyal si lon ne pouvait pas imposer des normes du travail rigoureuses dans chacun et tant que lon naurait pas pris de mesures pour faciliter ladaptation des travailleurs dans les secteurs susceptibles dêtre pénalisés par lévolution de la compétitivité(61). Daucuns sont même allés jusquà proposer lintégration à lALÉNA dune « charte sociale » à leuropéenne(62). On trouvera des précisions sur cette idée dans la note no 6 du panel no 3 sur les aspects sociaux et culturels de lALÉNA. Les résultats des institutions de lALÉNA Laccord parallèle de 1993 portant création de la Commission nord-américaine de coopération dans le domaine du travail est certainement loin davoir comblé les voeux des syndicats. Selon une étude, lANACT est « essentiellement une manière non invasive de promouvoir les droits des travailleurs... [méthode] à la fois « large » et relativement « faible » »(63). Comme nous lavons indiqué dans la note no 6, laccord prévoit le respect de 11 principes dans le domaine du travail, ce qui en fait une liste plus exhaustive que la demi-douzaine de normes « fondamentales » du travail identifiées par lOIT et par lOCDE et déjà intégrées, au demeurant unilatéralement, dans certaines lois commerciales américaines. Cela dit, ce ne sont pas les principes qui font problème mais limpossibilité de les appliquer. Sur les 11, trois droits fondamentaux concernant la liberté dassociation et de syndicalisation, la liberté de négocier collectivement et le droit de grève sont assujettis uniquement aux procédures plus faibles de lANACT; cest seulement dans trois domaines que des plaintes peuvent entraîner des sanctions ou des amendes dans le cas du Canada. (On trouvera à lannexe les catégories de principes du travail de lALÉNA regroupés en fonction de la portée limitée de leur applicabilité en vertu de laccord parallèle.) La majorité des 17 soumissions adressées à la Commission de lANACT jusquen octobre 1998 concernaient des allégations que le Mexique nappliquait pas ses propres lois concernant le droit des travailleurs à se syndiquer. Ces soumissions sont donc sujettes uniquement aux procédures de consultation entre les trois parties. En juin 1998, une de ces causes fut intentée pour la première fois par le gouvernement canadien au nom dune coalition de groupes syndicaux(64). Une seconde cause, intentée elle aussi par le Canada en octobre 1998 a trait aux travailleurs migrants. La plupart des cinq causes intentées contre les États-Unis jusquà maintenant portaient aussi sur une allégation dinfraction au droit de syndicalisation. Jusquà présent, les résultats semblent au mieux modestes « bien que le Mexique ait finalement reconnu un syndicat indépendant comme entité de négociation en avril 1997, pas un seul travailleur mexicain renvoyé pour activité syndicale na été réengagé ou indemnisé comme résultat direct dune soumission en vertu de lANACT. Indirectement, toutefois, la publicité ayant entouré certaines des causes reliées à lANACT a provoqué la réintégration de plusieurs travailleurs »(65). Daucuns affirment aussi que le Mexique dépense aujourdhui beaucoup plus quauparavant pour faire appliquer ses lois du travail et que ses résultats en matière de santé et de sécurité professionnelles saméliorent. Lune des analyses les plus critiques de lANACT émane dun ancien fonctionnaire américain qui fut assistant du négociateur en chef américain de laccord. Stephen Herzenberg affirme en effet que laccord parallèle souffre dêtre le produit dun compromis vicié :
Herzenberg ajoute que, même si les politiques économiques de lALÉNA sont bénéfiques aux entreprises, elles ont été un échec aux yeux des syndicats du Canada et des États-Unis parce quils ont le sentiment que les travailleurs et les chômeurs, loin davoir gagné du terrain, en ont perdu. Comme la majeure partie de la législation du travail au Canada est de compétence provinciale, il faut aussi mentionner lexception canadienne à lANACT qui établit un seuil pour obtenir une couverture provinciale. En fin de compte, tant et aussi longtemps que lOntario naura pas ratifié laccord, les dispositions relatives au règlement des différends resteront dapplication limitée au Canada et dépendront de la créativité de leurs partisans dans les syndicats canadiens. Nonobstant toutes ces faiblesses, Herzenberg estime que lon pourrait faire plus pour que lANACT devienne un « outil de propulsion à la hausse ». On pourrait déposer un plus grand nombre de plaintes sur les questions de normes du travail qui sont assujetties aux procédures dévaluation dexperts et aux groupes darbitrage. On pourrait intensifier la coopération trilatérale et accorder au secrétariat de la Commission plus de pouvoirs denquête et de recommandation. De même, « lintégration complète du Canada à lANACT pourrait accélérer la formulation dune critique trinationale des lois du travail américaines analogue à celle qui se développe actuellement au Mexique. Cela produirait des pressions internationales pour la modernisation de la législation américaine du travail, dans le but dassurer la résurrection du droit à la syndicalisation et de permettre aux travailleurs américains de partager équitablement la prospérité et dy contribuer plus »(67). Lincidence de lALÉNA dans le domaine du travail Évaluer lincidence de lALÉNA dans le domaine du travail savère beaucoup plus difficile et politiquement beaucoup plus controversé que simplement prétendre que la création demplois résulte dune augmentation incontestablement vaste des flux de commerce et dinvestissement entre les trois pays. Les critiques syndicaux ont laissé de côté laffirmation quil y a eu des gains demploi en préférant centrer leur attention sur les pertes. Quel que soit le côté de la barrière où lon se trouve dans ce débat, il est douteux que lon puisse distinguer les effets purs de lALÉNA de ceux de lévolution technologique, de la compétitivité globale croissante, de la restructuration des entreprises, de la compression des effectifs et de toutes les autres forces qui influent sur les marchés du travail nord-américains. Quoi quil en soit, les syndicats américains ont décidé dattaquer lALÉNA dans le cadre de la campagne visant à priver le président américain du pouvoir de négociation « accélérée » pour étendre les accords de libéralisation du commerce. Ce pouvoir na pas été renouvelé par le Congrès depuis 1994(68). Quelles que soient les prétentions des gouvernements et des économistes pro-ALÉNA, laccord nest manifestement pas très apprécié dans les milieux syndicaux. En se joignant à la dernière contestation constitutionnelle américaine de lALÉNA, le président des Métallurgistes unis dAmérique, George Becker, a brutalement déclaré que « lALÉNA a été une catastrophe pure et simple pour les travailleurs du Canada et du Mexique ainsi que des États-Unis »(69). Il nen reste pas moins que les syndicats sintéressent de plus en plus aux possibilités dutilisation des mécanismes de lAccord parallèle de coopération dans le domaine du travail, autant pour contrer les pressions exercées par les entreprises sur les travailleurs que pour réclamer lexpansion, lélargissement et le renforcement de ce lien embryonnaire entre le commerce et les normes du travail(70). Comme nous lavons déjà indiqué, une première cause a été intentée au Canada au début de cette année en vertu de lANACT. Des porte-parole de syndicats canadiens ont également utilisé la Commission de coopération dans le domaine du travail pour exposer vigoureusement leurs thèses dans un contexte trinational. Léconomiste en chef du Congrès du travail du Canada (CTC) a résumé ainsi sa position sur lincidence de lALÉNA dans un mémoire adressé à la Commission à loccasion du premier colloque nord-américain annuel sur les revenus et la productivité :
Il nest probablement pas exagéré de dire quil est encore impossible de juger si les modestes dispositions de lALÉNA dans le domaine du travail offrent beaucoup despoir à légard de cet objectif.
Source : Mary Jane Bolle, Nafta Labour Side Agreement: Lessons for the woeker rights and Fast-Track Debate, Washington, Congressional Research Service Report for Congress, octobre 1997, tableau 1, p. 4. LALÉNA ET LES QUESTIONS SOCIALES ET CULTURELLES NOTE NO 6 : LALÉNA ET LES QUESTIONS SOCIALES Le texte de lALÉNA naborde pas en termes précis les questions sociales dans les trois pays visés. Laccord affirme cependant les engagements politiques à ne pas abaisser les normes en matière de protection de lenvironnement, de main-doeuvre et de santé et de sécurité ainsi que lintention de promouvoir une amélioration du niveau de vie, mais chaque pays se réserve le droit de conserver ses propres politiques en matière de soins de santé, de services sociaux et le reste. À lexception des accords connexes en grande partie non exécutoires sur la collaboration dans le domaine de lenvironnement et de la main-doeuvre, lALÉNA ne prévoit aucun mécanisme datteinte dobjectifs sociaux à léchelle nord-américaine. Il reste que les répercussions de lALÉNA dans le domaine social ont suscité la controverse pour plusieurs raisons, notamment parce quil étend trop la portée des forces du marché et ne va pas assez loin dans le champ des normes sociales, y compris en matière de droits de la personne(72). On pourrait soutenir que lapproche « néolibérale » du développement économique qui caractérise lALÉNA laisse de côté de nombreux problèmes de la libéralisation des échanges : lélargissement du fossé entre les riches et les pauvres et entre les travailleurs qualifiés et moins qualifiés; les tensions sociales aggravées par les pressions exercées pour amener les gouvernements à réduire les dépenses et la réglementation sociales dans le cadre dune libéralisation économique qui avantage au premier chef les investisseurs et les nantis. Au Mexique, les disparités socio-économiques et les « ajustements structurels » sont vus comme étant particulièrement aigus(73). Cette situation en a amené certains à réclamer une modification de lALÉNA qui irait même jusquà lui donner un volet social supranational explicite. Parallèlement, on pourrait soutenir que les règles de lALÉNA, tout axées sur le marché, font peser un risque sur des politiques sociales nationales qui devraient demeurer à labri de la concurrence commerciale internationale. Comme nous le verrons, les réserves visant à protéger la souveraineté nationale dans ce domaine continuent dalimenter de grands débats au Canada. En termes plus généraux, lALÉNA peut être vu comme faisant partie dune tendance vers ce que le président de lOMC, Renato Ruggiero, a appelé l« intégration profonde », phénomène qui survient plus rapidement dans certaines régions. Même à léchelle mondiale, on sattend à ce que : « les défis futurs du système commercial se retrouvent plutôt au niveau de la réglementation intérieure que des mesures aux frontières »(74). Cela soulève des questions sociopolitiques complexes de gouvernance et de démocratie. Dans lune des premières critiques de lALÉNA, Ian Robinson soutenait que, en réduisant les pouvoirs du secteur public et en augmentant ceux des entreprises dans un climat de concurrence accrue, lALÉNA risquait fort daggraver les tensions sociales et de porter atteinte à la démocratie. Établissant une comparaison avec les processus dintégration économique européens, dont le volet social est plus marqué, Robinson proposait de lier les politiques commerciales nord-américaines à des efforts damélioration de la condition sociale et de renforcement de la démocratie, à léchelle régionale dans un premier temps, puis à léchelle mondiale(75). Les gouvernements liés par lALÉNA pourraient bien prétendre que les craintes exprimées par ses détracteurs ne se sont pas matérialisées, mais cet accord a indéniablement attiré une plus grande attention sur les enjeux sociaux mis en cause par les réformes de la politique commerciale. Une « charte sociale » pour contrer le « dumping social »? La thèse voulant que lALÉNA accentue les problèmes de « dumping social » ne tient que sil existe des conditions de production et demploi très différentes au Canada et aux États-Unis par rapport à ce quon trouve au Mexique. Il ny a dumping social que lorsque les exportations bénéficient dune fixation de prix injuste parce la production se fait là où les normes et leur mise en oeuvre sont les plus déficientes, cest-à-dire où les entreprises exploitent une piètre condition sociale pour produire à moindre coût des biens dexportation(76). On pourrait avancer un argument économique et social de poids contre un tel dumping. Comme lexplique le spécialiste du commerce de renom Peter Morici :
Pour quils acceptent de remédier au dumping social, il faudrait que les partenaires commerciaux sentendent au préalable sur des valeurs sociétales communes notamment des normes en matière de protection de lenvironnement, de main-doeuvre et de programmes sociaux visant à se mettre tous sur le même pied dans un contexte déquité et de liberté. Il faudrait pour cela une sérieuse harmonisation à la hausse des normes sociales ainsi que des transferts sociaux visant à aider toutes les régions de la zone commerciale à se conformer à ces normes. Selon Morici, cest là une voie positive, quoi que difficile, dans le contexte de lALÉNA : « Un cadre social nécessitant lapplication de normes raisonnables partout en Amérique du Nord et donnant au Mexique les ressources financières et techniques voulues pour agir serait beaucoup plus productif que des sanctions commerciales. Cest à ces conditions quun accord de libre-échange permettrait dapporter une solution, autrement illusoire, au problème du dumping social »(78). Les détracteurs de lALÉNA, associant cet accord à laccentuation des inégalités sociales et à la diminution des transferts gouvernementaux redistributifs,(79) restent très septiques devant la possibilité quapparaisse le cadre mentionné plus haut sous le régime du libre-échange. Les défenseurs des travailleurs et des droits sociaux ont davantage été enclins à rechercher dans les modèles fournis par la communauté européenne des moyens dintégrer des éléments comme une plus grande liberté de mouvement des travailleurs et des capitaux, des chartes sociales énonçant des obligations et des droits sociaux communs, le « chapitre sur les droits sociaux » du traité de Maastricht (que la Grande-Bretagne ne bloque plus), des « fonds dadaptation structurelle » et dautres véhicules dinvestissement sociaux européens. Bien sûr, lintégration des marchés en Europe a aussi ses opposants qui prétendent quelle entraîne une érosion continue des droits sociaux et démocratiques. La transposition des modèles européens poserait un défi de taille, car il faudrait trouver le moyen de faire la distinction entre les éléments de la solidarité sociale et les institutions dintégration politique. Il est évident quil faudrait créer une forme ou une autre de budget commun ainsi que des institutions délaboration de politiques en instituant un « ALÉNA social ». Il est difficile dimaginer comment, sur le plan politique, on pourrait amener lun ou lautre des trois pays membres à céder une partie de sa souveraineté à un organisme supranational. Il est clair que, si on la compare à celle de lAmérique du Nord, lexpérience historique acquise par lEurope dans les domaines social et politique de lintégration économique est très propre à ce continent et beaucoup plus vaste(80). Certains analystes canadiens soulignent que, au Canada, les propositions de charte sociale ont été liées à des débats constitutionnels intérieurs où un des grands objectifs était de garantir le droit aux programmes existants (p. ex. lassurance-maladie), les droits sociaux et les droits des travailleurs au Canada même afin de protéger les acquis canadiens face aux pressions liées au commerce extérieur ce qui contraste avec un mouvement tourné vers lextérieur et où la dimension sociale est un moyen de faciliter le passage à une union économique transnationale. Gilbert Winham et Elizabeth De Boer soutiennent que : « En Europe, charte sociale rime avec internationalisme, tandis quau Canada, cela rime avec nationalisme et protectionnisme »(81). Les partisans canadiens dune charte sociale pourraient sinscrire en faux contre une telle affirmation en précisant quils ne sopposent pas à des formes socialement responsables de libéralisation du commerce international résultant dune intégration économique en Amérique du Nord et au-delà. Winham et De Boer reconnaissent quil est très possible que les aspects sociaux prennent une grande place dans les négociations post-ALÉNA puisque : « À mesure que les blocs commerciaux régionaux acceptent des partenaires plus pauvres et de plus en plus différents des vieux membres, la question de la normalisation des programmes de santé, de sécurité et demploi reviendra constamment sur le tapis. [...] Le soutien que lui apportent les groupements de travailleurs et autres en fait un sujet à suivre dans les négociations commerciales hémisphériques futures »(82). Les répercussions de lALÉNA sur les politiques et les programmes sociaux Lannexe II de lALÉNA contient une disposition générale par laquelle chaque pays : « se réserve le droit dadopter ou de maintenir toute mesure concernant les services dapplication du droit public et les services correctionnels, ainsi que les services suivants dans la mesure où ils constituent des services sociaux établis ou maintenus à des fins dintérêt public : sécurité ou garantie des revenus, sécurité ou assurance sociale, bien-être social, éducation publique, formation publique, santé et garde denfants ». Cette exclusion générale des règles de lALÉNA vise autant des mesures déjà existantes que futures. Lexemption sociale de lALÉNA na pas encore subi lépreuve des groupes de règlement des différends, mais on présume quelle est affaiblie par certaines lacunes. Dautres aspects de lALÉNA donnent également prise à certaines craintes. Par exemple, au cours de la première année dexistence de laccord, Philip Morris, une société de tabac américaine, a menacé de poursuivre le gouvernement du Canada pour des centaines de millions de dollars, en invoquant le chapitre II de laccord, sur les investissements, pour « expropriation » de sa marque de commerce si, dans le cadre de ses mesures de lutte contre le tabagisme, le gouvernement adoptait une loi imposant la banalisation des paquets de cigarettes(83). Ces menaces de poursuites devant les tribunaux ne reposent peut-être pas sur des fondements assez solides pour faire plier les gouvernements, mais elles créent lincertitude et ont pour effet de « refroidir lardeur » de certains. Les craintes les plus sérieuses jusquà maintenant ont trait à la protection des mesures de non conformité des gouvernements provinciaux dans le système canadien décentralisé et hybride (public-sans but lucratif-privé) de prestation des soins de santé et des services sociaux. En plus des réserves nationales générales de lannexe II, lALÉNA accordait une période de deux ans aux provinces et aux États des États-Unis pour préciser, selon un processus dénumération détaillé, les mesures susceptibles dentrer en conflit avec les règles de laccord quils voulaient réserver. Avec lapproche de la date limite, fixée à décembre 1995, on a commencé à sinquiéter sérieusement de la portée restreinte des réserves générales puisque le gouvernement des États-Unis avait déclaré quil leur donnait une interprétation très étroite pour ne couvrir que les services fournis directement par les gouvernements, ce qui ne protégeait pas beaucoup des services de santé et des services sociaux canadiens fournis « à des fins dintérêt public » par des organismes non gouvernementaux. Les syndicats du secteur public et des groupes du secteur de la santé ont obtenu des opinions juridiques leur donnant à penser que lexclusion générale était à la merci de telles ambiguïtés et risquait dêtre minée davantage par les effets des compressions financières et de la déréglementation des services. Le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique a aussi exprimé de fortes inquiétudes. Tandis que le gouvernement fédéral et certains gouvernements provinciaux soutenaient que le système de santé canadien nétait pas menacé, le délai dinscription des réserves provinciales était prolongé jusquen avril 1996. Au même moment, les partenaires de lALÉNA concluaient une entente visant à réserver indéfiniment de toute contestation en vertu des règles de lALÉNA sur linvestissement et le traitement national toutes les mesures non conformes en vigueur dans les provinces et les États avant le 1er janvier 1994. Toutefois, certains nont pas été entièrement rassurés. Laccord de 1996 ne couvre pas les services financiers ou tout futur programme provincial dans le domaine de la santé et des services sociaux. Un membre de la Coalition canadienne de la santé a déclaré ceci :
De telles inquiétudes ont surgi à nouveau à légard des négociations sur lAMI. Compte tenu de lexpérience vécue avec lALÉNA, certains ont soutenu que le Canada devait obtenir une réserve claire et non consolidée pour les services publics et sociaux dans tout accord international sur linvestissement. Le comité parlementaire canadien qui a étudié lébauche de 1997 du texte de lAMI abonde dans le même sens. Il a recommandé que : « En consultation avec les gouvernements provinciaux, le Canada doit en arriver à une réserve non consolidée concernant les services de santé, léducation et les services sociaux »(85). NOTE NO 7 : LALÉNA ET LES QUESTIONS CULTURELLES Comme pour les dimensions sociales, on a défini le traitement de la culture et de léducation dans lALÉNA en termes négatifs cest-à-dire en précisant ce qui est et nest pas suffisamment protégé par une exclusion plutôt quen précisant ce que laccord peut faire pour promouvoir des objectifs communs dans ces domaines. Encore là, il y a un contraste frappant par rapport à lintégration européenne. Certains soutiennent que lon ferait fausse route en adoptant une vision purement économique des rapports créés par lALÉNA et que, en plus de ses annexes sur lenvironnement et la main-doeuvre, cet accord pourrait intensifier la collaboration trilatérale dans les domaines social, culturel et éducatif(86). Prenant la parole à la dixième conférence annuelle du North American Institute (NAMI) à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, en août 1998, M. Lloyd Axworthy, ministre des Affaires étrangères du Canada, a déclaré que le temps était venu denvisager un approfondissement de lensemble des rapports des trois pays de lALÉNA(87). M. Axworthy sest étendu sur le défi de l« édification dune communauté nord-américaine » à loccasion dun discours prononcé en septembre à Chicago, et qui mérite dêtre longuement cité :
Cependant, pendant la première décennie du régime de libre-échange continental, le débat culturel canadien a été davantage occupé par la crainte persistante que lidentité culturelle et les valeurs distinctes du Canada deviennent encore plus vulnérables à des influences « américanisantes » à mesure de lintégration croissante du marché nord-américain que par le sentiment davoir de nouvelles possibilités à saisir. Ce débat a tourné autour de la survie des moyens de défense de la culture canadienne contre la domination américaine. Par tant, létablissement dun lien entre culture et commerce na rien pour calmer les inquiétudes ou simplifier les choses. L« exemption culturelle » contenue dans lALÉ et dans lALÉNA Au milieu des années 80, la négociation de laccord de libre-échange canado-américain survenait après plusieurs décennies de politiques de réglementation intérieure et de soutien financier visant à nourrir et à protéger les « industries culturelles » canadiennes devant la vive concurrence des États-Unis, et également à faire augmenter le « contenu canadien » dans les grands secteurs de lactivité culturelle (musique, livres et magazines, film, radiodiffusion, etc.). La préservation et la promotion dune expression culturelle typiquement canadienne revêtait une dimension politique renvoyant à des objectifs essentiels en matière didentité et dunité nationales. Parallèlement, les Canadiens continuaient dêtre de gros consommateurs consentants de produits culturels américains (par exemple, en achetant près de 80 p. 100 de tous les magazines américains vendus à létranger). Selon la description quen donne John Thompson, la « quête de la souveraineté culturelle » du Canada a reçu peu de compréhension ou de sympathie parmi les responsables américains de lélaboration des politiques, qui voient leur position sur le marché canadien comme étant passive et inoffensive (ils ne font que répondre à la demande des consommateurs canadiens) et qui sopposent de plus en plus vivement aux politiques culturelles protectionnistes susceptibles de restreindre leur accès à un marché lucratif pour les exportations culturelles américaines(89). Les attitudes fondamentalement opposées des deux pays face à la culture et au commerce ont abouti au compromis plutôt ambigu de lALÉ. La clause centrale semble exempter les politiques culturelles canadiennes des règles du libre-échange, sauf dans quelques cas précis(90). Cependant, la même disposition affirme le droit des États-Unis de prendre des mesures de rétorsion et de réclamer des indemnités suffisantes représentant un « effet commercial équivalent » à toute perte établie lorsque ces politiques sont réputées incompatibles avec les règles de lALÉ(91). Les deux pays convenaient à toutes fins pratiques de lexistence de leur différend et exemptaient officiellement la culture canadienne de laccord, mais la laissaient aussi exposée quauparavant aux mesures commerciales américaines. Les dispositions de lALÉ ont été transposées dans lALÉNA pratiquement sans modifications(92). La clause dexemption culturelle ne sapplique pas au commerce entre les États-Unis et le Mexique. Le problème, cest que les dispositions de lALÉ et de lALÉNA ont sanctionné les différends, mais ne les ont pas réglés. Les différends commerciaux bilatéraux se rapportant à la culture se sont multipliés et sont passés à lavant-scène au cours des années 90, lorsque lon a vu les États-Unis attaquer certaines mesures visant à protéger la part canadienne du marché intérieur sous prétexte quelles constituaient des barrières injustes au commerce et à linvestissement. Les ambiguïtés de la clause dexemption contenue dans lALÉ et lALÉNA demeurent et aucun des deux pays na tenté dappliquer à la culture la procédure de règlement des différends prévue dans ces accords(93). Qui plus est, dans les batailles actuelles sur la culture, comme laffaire des tirages équifractionnés de magazines américains, ce sont des règles commerciales mondiales qui sont invoquées(94). À lintérieur du GATT/OMC, lAccord général sur le commerce des services (GATS) permet au Canada de continuer dexempter ses industries culturelles. Cependant, dautres règles très complexes de lOMC, notamment dans le domaine de la propriété intellectuelle, du droit dauteur et de ce quil est convenu dappeler les mesures concernant les investissements liées au commerce (MIC), sappliquent aux industries culturelles canadiennes et sont susceptibles de servir de fondements à de nouvelles contestations. Par exemple, les États-Unis ont protesté contre la modification des lois canadiennes sur les droits dauteur, car, selon eux, elles privaient des artistes américains de redevances, en contravention des règles de lALÉNA et de lOMC(95). Protéger et répandre la culture au-delà de lALÉNA Lexemption culturelle de lALÉ/ALÉNA a été remise en cause pour différents motifs. Des groupes culturels soutiennent que cette exemption na pas été une protection efficace contre les puissants intérêts commerciaux américains et les menaces de représailles, ce qui a amené le Canada à renoncer à des politiques plus nationalistes, notamment dans le domaine de lédition et de la distribution de films. Dans ce dernier cas, les producteurs américains, notamment les grands studios dHollywood, continuent de bénéficier de certains droits historiques sur le marché canadien, un privilège contesté par leurs concurrents européens, comme Polygram, et qui a amené la Commission européenne à porter plainte contre le Canada devant lOMC. Dans une perspective à plus long terme, certains prétendent que lexemption de lALÉNA perpétue un statu quo insatisfaisant sans mettre en place un cadre constructif qui permettrait den arriver à une meilleure harmonie internationale et à un système de règlement des différends reconnaissant la légitimité de certains objectifs des politiques culturelles nationales. Keith Acheson et Christopher Maule font remarquer que :
Bref, lALÉNA nous a enseigné que, dans le domaine culturel, les exemptions laissent beaucoup de problèmes non résolus et peuvent constituer des moyens de défense inefficaces ou pervers en cas de contestations de lextérieur. Qui plus est, elles sont essentiellement des moyens réactifs et non constructifs. Dès lors, elles ne sont pas très utiles lorsquil sagit de soccuper de questions comme les répercussions des nouvelles technologies mondiales (p. ex. lInternet ou les satellites) sur la culture, ou lorsquil sagit de faire pénétrer des produits et des services culturels canadiens dans dautres pays. Dailleurs, les exportations culturelles canadiennes, à lexclusion du film, ont doublé depuis 1990, pour atteindre une valeur de 1,5 milliard de dollars en 1997. Pour soutenir cette expansion du commerce dans le domaine culturel, il faut un cadre international ordonné et fondé sur des règles de réciprocité. Conscient des défis, le Canada a été lhôte dune Rencontre internationale sur la politique culturelle en juin 1998. Des ministres de 20 pays étaient présents. Le but de cette rencontre était de former un réseau international qui recherchera des moyens de préserver et de promouvoir la diversité culturelle. Les États-Unis nont pas été invités à cette rencontre, mais lautre partenaire du Canada dans lALÉNA est membre du groupe de contact (avec le Canada, la Suède et la Grèce). Le Mexique sera lhôte de la prochaine rencontre, en 1999(97). Les groupes culturels canadiens, tout en demeurant très sceptiques devant les dispositions des accords internationaux actuels sur le commerce et linvestissement (GATT/OMC et projet dAMI, de même que ALÉ et ALÉNA), explorent des dautres véhicules internationaux constructifs. Un important rapport paru en juin 1998 laisse croire que, plutôt que de sen remettre à des exemptions boiteuses incluses dans des accords commerciaux imparfaits, il fallait sefforcer de parvenir à un accord international distinct sur la culture qui mettrait de lavant le concept de « droits mondiaux parallèles » dans le domaine culturel(98). De toute évidence, de telles initiatives se heurteront à de nombreux obstacles et séloignent beaucoup de ce qui est prévu dans lALÉNA. Il reste que, même si lALÉNA semble, jusquà maintenant, avoir accentué plutôt quatténué les différends commerciaux culturels entre le Canada et les États-Unis, si le ministre Axworthy a raison, peut-être pourra-t-il évoluer dans le sens dun accord communautaire régional pouvant concilier ces divergences et favoriser des solutions plus coopératives. SÉANCE
NO 1
SÉANCE
NO 2 NOTE
NO 8 : APERÇU DES IRRITANTS COMMERCIAUX DU CANADA
En 1997, le commerce bilatéral des biens entre le Canada et lUnion européenne (UE) a dépassé 40 milliards de dollars, ce qui est considérable. Le commerce des services ajoute environ un tiers à ce total. Étant donné limportance de cette relation économique, on ne devrait pas se surprendre quun certain nombre dirritants bilatéraux aient vu le jour. En effet, les relations commerciales canado-européennes ont été dominées, ces dernières années, par une longue liste de petits accrochages commerciaux, mineurs en importance au plan global, mais importants au niveau local. Ce qui est gênant, cest le fait que certains irritants demeurent sans solution pendant si longtemps. On estime généralement que lélimination ou latténuation des irritants commerciaux est un processus souvent laborieux, susceptible de distraire les fonctionnaires de la tâche plus noble de mettre en valeur la relation commerciale globale; par conséquent, le nombre de différends qui perdurent entre les deux parties est un embarras constant. Un autre point qui mérite dêtre mentionné est le fait que les différends qui mettent en cause le Canada et un seul pays européen ont des répercussions sur les relations globales entre le Canada et lUE. Voilà un problème fondamental pour le Canada, dans ses rapports avec un ensemble comme lUE, qui fonctionne sur une base de solidarité. Ainsi, un différend sur une question touchant les intérêts dun seul pays essentiellement, lEspagne, entache automatiquement les relations avec lensemble de lUnion; ce problème risque dempirer avec larrivée de nouveaux pays membres(100). Bien entendu, aucune relation commerciale, et a fortiori si elle est vaste et complexe, nest à labri des différends. On peut également observer que les irritants commerciaux en cause ont été examinés ou sont en train de lêtre dune façon rationnelle, en bonne partie par des mécanismes de règlement de lOrganisation mondiale du commerce (OMC). À lexception peut-être de la guerre du flétan (résolue bilatéralement par le Canada et lUE en avril 1997), et le recours aux pièges à patte pour la capture des animaux à fourrure (différend réglé par la signature dune entente Canada-UE sur le piégeage sans cruauté en décembre 1997), ces différends ont rarement une visibilité ou une charge aussi grandes que beaucoup de ceux que le Canada a avec son voisin du Sud. La plupart des différends concernent le commerce des matières premières : produits agroalimentaires, poisson, produits forestiers, amiante. Les grands dossiers non réglés, regroupées par secteur primaire, sont présentées ici(101). Le Canada continue davoir des problèmes avec la Politique agricole commune (PAC) qui protège les agriculteurs européens. La PAC gêne laccès du pays aux marchés européens et touche également les exportations du Canada vers des pays tiers, en concurrence avec celles de lUE. Laugmentation récente par lUE des subventions à lexportation de lorge et de lavoine pour réagir à la diminution du cours mondial des céréales, est particulièrement gênante pour le Canada. On espère que lélargissement prochain de lUnion européenne précipitera les changements aux modes de subvention de la PAC. Une autre pierre dachoppement est le régime dimportation de céréales de lUE, qui, de lavis du Canada, contrevient aux engagements de lEurope envers lOMC. Ceux-ci prévoient que lUnion nimposera pas de droits sur limportation de céréales dans le cas où le prix à limportation est plus élevé que son propre prix dintervention, plus 55 p. 100. Le Canada soutient que le recours de lEurope aux cotations boursières du marché américain des denrées comme référence pour le calcul les droits, plutôt que la valeur de la transaction, est injuste pour les exportateurs canadiens de produits de qualité supérieure. Le Canada a demandé la constitution dun groupe dexamen à lOMC en juillet 1995, mais a retiré cette demande après sêtre entendu avec lUE sur un remboursement en décembre 1995. Autre différend, autre entente de remboursement, obtenue durant la campagne agricole de 1997-1998. Le retour du Canada devant lOMC nest pas écarté. Ces dernières années, lUnion a adopté un principe de prudence en matière dinnocuité des aliments. Conformément à ce principe, elle a accéléré le recours aux mesures de restrictions des importations, afin de protéger la santé et la sécurité de sa population. Ces mesures, affirment le Canada, ne sont pas toujours fondées en science. Un bon exemple est le refus dapprouver toutes les variétés canadiennes de canola transgénique. En conséquence, le Canada na pas été en mesure dexporter du canola en Europe depuis 1997, et le commerce bilatéral des graines oléagineuses est compromis. De la même manière, lexportation de suif canadien et de ses dérivés est compromise par une interdiction qui frappe certaines matières à risque élevé qui, estime-t-on, peuvent causer lencélopathie spongiforme bovine (ESB), également connue sous le nom de « maladie de la vache folle ». Le Canada et les États-Unis affirment tous deux que lexposition du suif et de ses dérivés à la chaleur durant la transformation élimine lagent infectieux; le Canada cherche donc à faire lever linterdiction touchant le suif. Un autre exemple de barrière commerciale érigée par lUE au nom de la santé et de la sécurité est la décision dinterdire en 1989 le recours aux hormones de croissance chez le bétail, ainsi que limportation de boeuf produit à partir de ces hormones. Le Canada, comme les États-Unis, justifie son opposition à linterdiction en affirmant quelle nest pas fondée en science et quelle représente donc un obstacle non tarifaire injustifié au commerce. Après des consultations directes avec lUnion, qui nont pas résolu le différend, le Canada a demandé à lOMC un groupe dexamen en 1996. Le rapport du groupe (août 1997) et celui de lorgane dappel de lOMC créé en réponse à lappel de la décision du groupe (janvier 1998) donnent raison au Canada. LUnion a maintenant jusquen mai 1999 pour rendre ses mesures touchant limportation de boeuf canadien conformes aux règles de lOMC. Enfin, laccès au marché européen est également restreint pour les vins canadiens désignés de qualité. Lindustrie vinicole canadienne a été informée quelle a jusquen septembre 1998 pour sentendre avec la Commission européenne sur les appellations (lUnion veut que le Canada exige de ses viticulteurs quils sabstiennent dutiliser certaines appellations européennes comme champagne, porto et xérès) et sur les normes canadiennes de production, afin dassurer que la santé des Européens ne soit pas menacée. Laccès au marché européen sera bloqué si aucune entente nest signée dici là. On a mentionné déjà que le règlement du différend canado-espagnol (et donc canado-européen) sur laccès aux stocks canadiens de flétan noir. Techniquement, ce différend concerne laccès à une ressource, non le commerce. Pour nous, le problème continue cependant, avec le maintien des tarifs européens élevés sur les exportations canadiennes de poisson et de produits de la mer. Les tarifs qui frappent le poisson de fond qui intéresse le Canada sont de lordre de 7,5 à 12 p. 100 tandis que les tarifs qui touchent la crevette canadienne varient de 12 à 20 p. 100, selon le produit. La vente de produits de la mer aux clients européens a chuté, passant de 446 millions de dollars en 1988 à tout juste 300 millions maintenant. Plusieurs pays européens ont interdit ou grandement limité lutilisation de lamiante crysotile, produit que lEurope avait toujours importé par le passé. La plus publicisée de ces décisions a été imposée par la France en 1997 sur la fabrication, limportation et la vente damiante et de produits contenant de lamiante. Le gouvernement fédéral, voulant protéger le sort de cette industrie basée au Québec, affirme que les interdictions de ce genre ne sont pas fondées en science et que lusage contrôlé du produit ne met pas en danger la santé humaine. En mai 1998, le gouvernement a annoncé sa décision dentreprendre des consultations avec lOMC afin de régler son différend avec la France à ce sujet. Pour empêcher lintroduction en Europe du nématode du pin, lUnion européenne a, depuis juillet 1993, insisté sur le fait que les bois résineux provenant du Canada, à lexception du thuya (cèdre) soient séchés au four ou traités à la chaleur. Le gouvernement fédéral sest toujours opposé à cette exigence réglementaire, affirmant quil y a un risque minime de transmission du parasite aux forêts européennes. Afin de regagner laccès au marché européen, qui lui a été refusé dans les faits, le gouvernement envisage un recours devant lOMC. AU-DELÀ DE LALÉNA
VERS UN MARCHÉ NOTE
NO 9 : POUR RENFORCER LA RELATION COMMERCIALE Il est tout à fait évident que la relation commerciale du Canada avec lUnion européenne (UE), le plus grand marché du monde, a besoin dun sérieux coup de pouce. Bien que les exportations canadiennes de biens et de services vers lUE totalisent 23 milliards de dollars par année, leur part dans lensemble des exportations vers lEurope ne cesse de diminuer de 12,6 p. 100 en 1980 à 5,1 p. 100 en 1997(102). En outre, les exportations canadiennes vers les 15 pays membres de lUE nont pas suivi le rythme de la croissance économique européenne. En fait, la valeur des exportations du Canada vers lEurope est minuscule (0,6 p. 100) comparée à la valeur des importations totales de lUE. Autre sujet de préoccupation, le déficit sur marchandises avec lUE continue de salourdir (7,6 milliards de dollars en 1997) et le commerce de services est lui aussi déficitaire. Certes, il y a au recul du Canada sur le marché européen de bonnes raisons, dont la plus importante est lintégration croissante de léconomie nord-américaine, qui a entraîné une montée en flèche des exportations canadiennes vers les États-Unis(103). Ce qui est déconcertant, toutefois, cest que la présence commerciale relative du Canada en Europe diminue au moment même où le marché de lUE entre dans une phase dexpansion par suite dune forte augmentation du nombre des pays membres et de ladoption dune monnaie unique(104). Selon un récent rapport du Conference Board sur la relation commerciale Canada-UE, le Canada doit saisir les occasions que présente le marché en expansion de lUE et intensifier ses relations commerciales transatlantiques(105). Cest dans ce sens que le Plan daction Canada-UE a été signé en décembre 1996 afin de régler les différends commerciaux bilatéraux et dexaminer les moyens daméliorer lenvironnement commercial en supprimant les tarifs existants(106) et les barrières non tarifaires comme les normes de produits et les règlements techniques, en améliorant la situation en matière de droits de propriété intellectuelle, en abolissant les pratiques discriminatoires dans ladjudication des marchés publics et en libéralisant le commerce des services. Le Plan daction prévoyait, entre autres, le lancement dune étude commerciale conjointe en vue de relever les barrières qui existent dans divers secteurs de léconomie(107) et de recommander des moyens de les faire disparaître au niveau bilatéral ou multilatéral. Un projet du document détude a été présenté au Sommet Canada-UE de mai 1998. Dans son rapport, le Conference Board déclare que les entreprises des deux rives de lAtlantique doivent absolument remédier à ce qui semble être un « déficit dinformation » sur leurs marchés respectifs, sans quoi leurs stratégies de conquête de parts de marché ne seront pas efficaces. Létude commerciale conjointe cherche à trouver des moyens de répondre à ce besoin impérieux de dialogue transatlantique. En outre, une première réunion de petites entreprises européennes et canadiennes a eu lieu en juin 1998 et le gouvernement fédéral collabore avec lAssociation canadienne de technologie de pointe pour promouvoir les intérêts communs des entreprises dinformation, de technologie et dinstruments médicaux en matière de commerce et dinvestissement. LUE cherche également à améliorer ses relations économiques bilatérales avec dautres partenaires de lhémisphère occidental, notamment les États-Unis, le Mexique et les pays du MERCOSUR. Au début de 1998, dans la foulée de laccord de décembre 1995 entre les États-Unis et lUE sur un « nouvel agenda transatlantique », la Commission de lUE a déclaré son intention dexplorer avec les É.-U. lidée dun « nouveau marché transatlantique » (NMT) comportant le libre-échange dans les services commerciaux dici lan 2000; labolition des droits de douane sur les biens industriels dici 2010; la réduction des obstacles normatifs au commerce; et des mesures dans les domaines de linvestissement, de la propriété intellectuelle et des marchés. Cependant, il a été difficle par la suite dobtenir les appuis politiques nécessaires au Congrès des États-Unis et au sein de lUE, où le consensus sur la proposition initiale est à tout le moins fragile. En mai 1998, un sommet entre les États-Unis et lUE a donné lieu à une déclaration conjointe plus modeste dans laquelle on convient dune exploration de moindre envergure le Partenariat économique transatlantique. En septembre 1998, la Commission de lUE a approuvé un « plan daction provisoire » pour le Partenariat; elle a aussi exprimé lespoir que lon adopte un plan conjoint au prochain sommet prévu pour décembre 1998 et que Bruxelles et Washington aient une meilleure communauté de vues quant aux dossiers clés à régler lors de toute négociation commerciale multilatérale à compter de lan 2 000(108). Malgré les obstacles à un démarrage rapide des négociations sur les propositions de la Commission européenne concernant le NMT et le Partenariat économique transatlantique, le gouvernement du Canada est demeuré acquis à lidée de « trilatéraliser » (Canada, Union européenne, États-Unis) toutes les initiatives commerciales bilatérales entre lUE et les États-Unis. Il continue en effet de penser que la conclusion dun accord bilatéral excluant le Canada risque de nuire à ses intérêts. Il estime également quun succès au niveau trilatéral pourrait favoriser les objectifs de libéralisation multilatérale des échanges dans un contexte plus inclusif quun strict dialogue entre Bruxelles et Washington. Bien que le Canada cherche à participer à ces discussions bilatérales, ses efforts continuent de ne rien donner à cause surtout dun manque dintérêt de la part des États-Unis. Les ministres des Affaires étrangères de lUE ont par ailleurs donné le feu vert à des négociations accélérées sur un accord de libre-échange avec le Mexique, négociations qui ont reçu laval tant du Parlement européen que du Mexique. Amorcées en juillet 1998, ces négociations se concentrent sur certains secteurs au lieu de chercher à déboucher sur accord global. Ce qui pousse les Européens à vouloir conclure un accord de libre-échange, cest que lUE a perdu des parts de marché au Mexique depuis la conclusion de lAccord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). Les relations économiques entre lUE et lunion douanière sud-américaine MERCOSUR (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) pourraient également être sensiblement renforcées. Des pourparlers pourraient être amorcés au premier Sommet Europe-Amérique latine qui doit avoir lieu à Rio de Janeiro en 1999 en vue daugmenter lintégration économique des deux blocs régionaux(109). Le Canada joue lui aussi la carte bilatérale en lançant ses propres négociations avec lAssociation européenne de libre-échange (AELÉ). Malgré le petit nombre de ses membres (Suisse, Norvège, Islande et Liechtenstein), un accord de libre-échange avec lAELÉ pourrait aider le Canada à résorber le déficit considérable quil a accumulé dans son commerce avec ces quatre pays tout en servant de tremplin pour des négociations commerciales plus larges avec lEurope. Le libre-échange transatlantique : une option réaliste?
Les discussions bilatérales en vue de libéraliser le commerce entre lUE et le Mexique et surtout entre lUE et les États-Unis sont devenues un sujet de préoccupation pour le Canada. Il est toujours difficile de prédire le cours des relations commerciales avec lUE. Cependant, quelque soit la tournure des événements, le Canada tiendra à ce que ses intérêts ne soient pas lésés dans tout accord de libre-échange conclu entre lEurope et ses partenaires commerciaux de lALÉNA. Le travail qui se fait dans le cadre du Plan daction Canada-UE et de létude commerciale conjointe qui en fait partie a beau être utile, on voit mal comment il pourrait en résulter une libéralisation appréciable des échanges. Pour le dire comme un analyste des relations Canada-UE : « ...il est difficile de considérer le Plan daction comme lélément déterminant des relations Canada-UE dans les années qui viennent. Le Plan daction, après tout, ne fait essentiellement quofficialiser et remballer des activités de coopération qui se déroulaient déjà dans toute une gamme de dossiers au sein de lOrganisation mondiale du commerce (OMC) »(110). Bien quil soit dans lintérêt du Canada de poursuivre ses initiatives dans le cadre du Plan daction Canada-UE, la prudence exige quil cherche par dautres moyens à améliorer son accès au marché. Cest pourquoi il continue de plaider pour une approche interrégionale en matière de libéralisation des échanges par opposition à une approche strictement bilatérale. Il estime quil serait beaucoup plus efficace de développer lALÉNA et de lélargir à lUE dans le cadre dun large Accord de libre-échange transatlantique (ALÉTA). À Londres en octobre 1997, le premier ministre Chrétien a renouvelé la proposition canadienne dabord formulée en 1994 portant de forger un ALÉTA entre les pays de lALÉNA et lUE. Il sagirait globalement dabolir les droits de douane industriels dans la région désignée à lintérieur dun certain délai. À toutes les occasions qui se sont présentées depuis, le gouvernement fédéral a plaidé pour une relation « communauté à communauté » au lieu de trois processus bilatéraux séparés. La conclusion dun ALÉTA aurait au moins deux avantages pour léconomie mondiale. À un moment où de nombreux pays asiatiques traversent de graves difficultés économiques et où les marchés naissants de lEurope de lEst et de lAmérique latine ressentent les effets de la « grippe asiatique », un renforcement des liens économiques entre les deux blocs économiques les moins affectés pourrait stimuler lactivité économique. Deuxièmement, un lien interrégional pourrait contribuer à enrayer les tendances protectionnistes engendrées par le malaise économique actuel et donner un nouvel élan au projet de négociations commerciales de la « Ronde du millénaire » au sein de lOMC. Cette organisation reste le meilleur moyen dobtenir des résultats concrets à long terme dans le domaine commercial. « Du moment que lobjectif nest pas de remplacer le système multilatéral et encore moins détablir un bloc défensif, mais daller au-delà des engagements que nous avons pris dans le cadre de lOMC, un nouvel accord de libre-échange entre lEurope et lAmérique du Nord pourrait mettre en branle une dynamique commerciale de réduction des barrières commerciales à léchelle mondiale. En bref, le libre-échange transatlantique pourrait revitaliser la totalité du système planétaire et amorcer lessentiel processus de rapprochement entre des blocs potentiellement isolationnistes »(111). Une stratégie aussi ambitieuse de libéralisation du commerce est-elle réalisable? Jusquici, le projet dALÉTA ne semble pas susciter beaucoup dintérêt ou dappui dun côté comme de lautre de lAtlantique. De toute évidence, il subsiste beaucoup de divergences entre les deux blocs économiques et, comme il a déjà été noté, lUE continue de poursuivre des processus bilatéraux séparés avec les membres de lALÉNA. De toutes les options, cependant, il semble quune forme élargie de partenariat transatlantique renforcé, offrant la possibilité dune entente de libre-échange ouverte sur lavenir, constitue le meilleur moyen de stimuler un pan majeur de léconomie mondiale et de relancer les efforts pour amorcer une nouvelle ronde de libéralisation des échanges à léchelle planétaire.
EXTRAITS DUN RAPPORT
DU PARLEMENT EUROPÉEN
MEMBRES DES PRINCIPALES
ORGANISATIONS
(1) Stephen Clarkson, « Fearful Asymmetries: The Challenge of Analyzing Continental Systems in a Globalizing World », Canadian-American Public Policy, n° 35, septembre 1998. Pour dautres scénarios, voir aussi Nicholas Gianaris, The North American Free Trade Agreement and the European Union, Westport (Connecticut), Praeger, 1998. (2) Il existe de plus en plus détudes sur lALÉNA, outre les documents officiels produits par les gouvernements concernés et par les organismes intergouvernementaux. Du point de vue canadien, voici un document utile et généralement en faveur de laccord : Richard Lipsey et al., The NAFTA: Whats In, Whats Out, Whats Next, Toronto, C.D. Howe Institute, 1994. Dautres études du secteur privé ont mis laccent sur les effets globalement positifs de laccord sur les affaires et sur lexpansion économique. Voici lun des premiers recueils détudes critiques : Ricardo Grinspun et Maxwell Cameron (éd.),The Political Economy of North American Free Trade, Montreal et Kingston, McGill-Queens University Press, 1993. Voici enfin un recueil plus récent danalyses mitigées portant sur un large éventail de questions liées à lALÉNA : Stephen Randall et Herman Konrad (éd.), NAFTA in Transition, Calgary, University of Calgary Press, 1995. LALÉNA est peut-être devenu un élément incontournable de la vie économique nord-américaine mais le débat sur lALÉNA est loin dêtre épuisé. (3) On en trouvera une liste plus détaillée à lannexe 1. (4) Les règles dorigine comportent une discrimination explicite à légard des produits des pays tiers, ce qui en fait lun des aspects les plus controversés des pactes commerciaux régionaux. Dans le secteur de lautomobile, par exemple, la Commission européenne conteste actuellement devant lOrganisation mondiale du commerce les droits de douane imposés par le Canada sur les automobiles européennes importées qui ne satisfont pas aux conditions nord-américaines. (5) Randall, « Managing Trilateralism », in NAFTA in Transition, p. 45 (traduction). (6) NAFTAs Institutions: The Environmental Potential and Performance of the NAFTA Free Trade Commission and Related Bodies, Montréal, Commission de coopération environnementale, 1997, p. 11 (traduction). (7) Pour le Canada et les États-Unis, Gary Hufbauer et Jacqueline McFaden formulent cette conclusion : « Nos succès et échecs macro-économiques nont pratiquement rien à voir avec lAccord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis (ALÉ) ou avec lALÉNA ». Toutefois, le cas du Mexique est différent du fait dune transition turbulente et des effets de la crise du peso de 1994-1995. (« Judging NAFTA », Canada-United States Law Journal, vol. 23, no 11, 1997, p.11 et suivantes (traduction.) (8) Dans une étude réalisée récemment, léconomiste canadien John Helliwell a constaté quavant lAccord de libre-échange canado-américain, la probabilité que les provinces commercent entre elles était 20 fois plus élevée que la probabilité quelles commercent avec les États-Unis. Cet « effet de frontière » est tombé à un multiple de 12 en 1993, mais il est demeuré stable depuis lALÉNA. Helliwell affirme quil peut être trompeur de se concentrer sur les liens extérieurs compte tenu de la prédominance du commerce intérieur et des relations commerciales établies à lintérieur des pays. Cette remarque vaut même dans le cas despaces économiques très intégrés comme le marché unique de lUnion européenne. J. Helliwell, How Much Do National Borders Matter?, Washington (D.C.), Brookings Institution Press, août 1998. (Voir aussi « The Myth of the Global Economy », The Ottawa Citizen, 14 septembre 1998.) (9) Cf. Notes pour une allocution de lhonorable Lloyd Axworthy, ministre des Affaires étrangères, à la Conférence de politique étrangère de 1998 de lInstitut canadien des affaires internationales, ministère des Affaires étrangères et du commerce international, Ottawa, 16 octobre 1998. (10) La négociation officielle dun accord de libre-échange entre le Canada et lAELÉ (qui comprend la Suisse, le Liechtenstein, la Norvège et lIslande, ces trois derniers pays étant aussi membres de lEspace économique européen) a été lancée en octobre 1998. Les exportations du Canada vers lAELÉ dépassent ses exportations au Mexique, et la valeur des exportations du Canada vers lAELÉ est à peu près équivalente à celle de ses exportations vers les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay). (11) On trouvera le point de vue dun parlementaire canadien important à ce sujet dans William C. Graham, « NAFTA vis à vis the EU Similarities and Difference and their Effects on Members Countries », Canada-United States Law Journal, vol. 23, 1997, p. 123-135. La difficulté consistera à concilier des intérêts régionaux divergents afin de définir des positions communes. Pour un éventail de points de vue nord-américains et européens, voir Gavin Boyd (éd.), (R.-U.) The Struggle of World Markets: Competition and Cooperation between NAFTA and the European Union, Chelterham Edward Elgar, 1998, en part. John Dunning, « Re-energizing the transatlantic Connection », et Stephen Blank et Anne Taillandier, « Atlantic Interdependencies and Free Trade ». (Le livre a pour origine une conférence tenue en novembre 1996 à lÉcole des Hautes études commerciales de lUniversité de Montréal et parrainée par le Centre détude en administration internationale.) (12) Lex-ministre canadien du Commerce au moment de lentrée en vigueur de lALÉNA, Roy MacLaren (aujourdhui le candidat du Canada à la présidence de lOMC) a vigoureusement pris position pour cela en Europe. Le premier ministre canadien Chrétien a proposé une zone de libre-échange transatlantique dans des discours prononcés devant le Sénat français, en 1994, et à Londres, en octobre 1997. Le ministre du Commerce Sergio Marchi a souligné le caractère souhaitable dune démarche commune ALÉNA-UE lorsquil a témoigné devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes en mai 1988. Jusquà présent, cependant, lidée dune « ALÉTA » semble avoir suscité plus dintérêt et dappui aux États-Unis quen Europe. (Voir par exemple Thomas Duesterberg, « Prospects for an EU-NAFTA Free Trade Agreement », The Washington Quarterly, printemps 1995, p. 71-82.) (13) Jeremy Kinsman, « Transatlanticism: Is Europe Old Hat? », Behind the Headlines, vol. 55, no 3, 1998, p. 8 et 13 (traduction). (14) Gilbert Gagné, « North American Free Trade, Canada, and US Trade Remedies: An Assessment After Ten Years », Communication faite lors de lAssemblée annuelle de lAssociation canadienne de sciences politiques, Ottawa, juin 1998, p. 1 (traduction). (15) La description est très sommaire. Le lecteur trouvera dautres détails, notamment sur une comparaison avec les mécanismes de règlement des différends du GATT/OMC, dans Lipsey et al., The NAFTA (1994), chapitre 8; voir aussi Lawrence Herman, « NAFTA The Broad Strokes: A Canadian Lawyers Perspective », Canada-United States Law Journal, vol. 23, no 85, 1997, p. 85-107. Dans bien des domaines, ce sont autant les règles de lALÉNA que de lOMC qui peuvent sappliquer et lon pourrait donc avoir recours à lune ou lautre des deux tribunes (p. ex., pour contester la loi américaine Helms-Burton visant les investissements étrangers à Cuba). Dans quelques cas, cependant, par exemple au sujet dune contestation de règlements environnementaux nationaux restreignant le commerce, le pays faisant lobjet de la plainte peut demander que le différend soit réglé uniquement au moyen des mécanismes de lALÉNA. (16) Cette disposition a été invoquée contre le Canada dans des affaires concernant des questions environnementales contestées et on trouvera des détails à ce sujet dans la note de synthèse concernant lALÉNA et les questions environnementales. (17) Gagné (1998), p. 6, (traduction); cest nous qui soulignons. (18) On tient à cette fin une liste de 15 noms cinq choisis par chaque pays. En choisissant un CCE, chaque partie au différend choisit un membre de cette liste et les parties tirent ensuite au sort pour savoir laquelle choisira le troisième membre. (19) La Statement of Administrative Action américaine faite à lentrée en vigueur de lALÉNA ne mentionnait même pas cette déclaration et lon peut donc douter du sérieux de lengagement américain envers ce processus. Le rapport du seul groupe de travail qui fut mis sur pied, rendu public en 1997 seulement, nallait pas au-delà de recommandations daméliorations techniques mineures au processus dexamen existant. (20) Témoignage devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes du Canada, Washington (D.C.), 31 mars 1998. (21) Pendant cette période, on a demandé en tout la mise sur pied de 49 groupes spéciaux mais certaines demandes ont été retirées ou combinées et, sur les 30 acceptées, 19 concernaient lexamen de décisions dorganismes américains. (Gagné (1998), p. 9.) (22) Voir aussi Wiliam Davey, Pine & Swine. Canada-United States Trade Dispute Settlement: The FTA Experience and NAFTA Prospects, Ottawa, Centre de droit et politique commerciale, 1996. (23) Gagné (1998), p. 11 et passim (traduction). (24) Par exemple, la section canadienne du Secrétariat de lALÉNA, qui est chargée dadministrer la participation canadienne au règlement des différends, affirme ceci : « Avec un commerce aussi volumineux, les différends sont inévitables. On estime que 5 p. 100 environ des 381 milliards de dollars de commerce bilatéral du Canada avec les États-Unis font actuellement lobjet de différends. » (Budget des dépenses 1998-1999, Partie III Rapport sur les plans et les priorités, p. 6.) (25) Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, ALÉNA : Un partenariat au travail, Ottawa, juin 1997. (26) Lawrence Herman, « NAFTA The Broad Strokes », Canada-United States Law Journal, 1997, p. 95. (27) William Graham. « NAFTA vis-à-vis the E.U. », Canada-United States Law Journal, 1997, p. 132 et suivantes. (28) Robert Howse, Settling Trade Remedy Disputes: When the WTO Forum is Better than the NAFTA, Toronto, C.D. Howe Institute Commentary, juillet 1998. (29) Henry Jacek, « Business and Politics in the Formation and Implementation of Trade Agreements Affecting North America : Dispute Settlement Mechanisms and Labour/Environmental Standards », communication devant lAssemblée annuelle de lAssociation canadienne de sciences politiques, Ottawa, juin 1998, p. 9 (traduction). (30) Ibid. (traduction). (31) Il sagit dune description très sommaire dun accord très complexe. Pour une analyse préliminaire plus détaillée, voir William Watson, The NAFTA Papers: Environmental and Labor Standards in the NAFTA, C.D. Howe Institute Commentary No. 57, février 1994. Lanalyse la plus exhaustive, contenant les textes officiels et les ententes intergouvernementales correspondantes, a été produite par Pierre-Marc Johnson et André Beaulieu dans The Environment and NAFTA: Understanding and Implementing the New Continental Law, Washington (D.C.), Island Press, 1996. On trouvera aussi beaucoup dinformations à jour et de documentation trilingue sur le site Internet de la Commission, à : http://www.cec.org. (32) Voir Johnson et Beaulieu (1996), chapitre 11. (33) Selon Jacek : Les partisans des accords de libre-échange dans le monde des affaires considèrent ces accords comme de simples accords commerciaux. Ils estiment que les gouvernements ne devraient pas se pencher sur les composantes ou les intrants des prix tels que les coûts de la main-doeuvre ou les dommages environnementaux. Ils rejettent clairement lidée dun terrain de jeu égal entre toutes les juridictions nationales dans ces domaines. (« Business and Politics in the Formation and Implementation of Trade Agreements Affecting North America » (1998), p. 4 (traduction). (34) Watson (1994), p. 17. (35) Jack Garvey, « Current Development: Trade Law and Quality of Life Dispute Resolution Under the NAFTA Side Accords on Labor and the Environment », The American Journal of International Law, avril 1995 (traduction). (36) FourYear Review of the North American Agreement on Environmental Cooperation: Report of the Independent Review Committee, Montréal, Commission de coopération environnementale, juin 1998, copie Internet, p. 3 (traduction). (37) « North American Labor Ministers Meet to Discuss Progress on NAFTA Labor Commission », communiqué du 18 septembre 1997, Dallas, Commission de coopération dans le domaine du travail, (copie Internet disponible à : http://www.naalc.org). (38) Cf. « Ministers Review NAFTAs Labor Agreement », Communiqué de presse et pièces jointes, Commission de coopération dans le domaine du travail, 8 octobre 1998. (39) On trouvera une analyse poussée de cette question dans John Audley, Green Politics and Global Trade: NAFTA and the Future of Environmental Politics, Washington (D.C.), Georgetown University Press, 1997. (40) Cependant, par comparaison avec le droit de la Communauté européenne, le processus prévu aux termes de lALÉNA « laisse beaucoup moins de place pour les arguments des valeurs concurrentes du commerce et de lenvironnement devant les commissions de règlement de différends. Il est important de garder ceci à lesprit lorsque lon détermine à quel point et de quelle manière les experts peuvent être utilisés par les commissions de règlement de différends de lALENA. » (Prévention de différends : Évaluation des valeurs du commerce et de lenvironnement dans le cadre de lALENA et de lANACDE, Montréal, Série no 3, Environnement et commerce, Commission de coopération environnementale, 1996, p. 22.) (41) Johnson et Beaulieu, The Environment and NAFTA (1996) p. 245-246 (traduction). (42) On trouvera une analyse succincte du débat de lépoque dans les publications suivantes du Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement : Anthony Chapman, LAccord de libre-échange nord-américain : justification et enjeux, BP-327F, janvier 1993; et William Murray, LALENA et lenvironnement,MR-116F, décembre 1993. (43) Annette Baker Fox, « Environment and Trade: The NAFTA Case », Political Science Quarterly, printemps 1995, p. 68 (traduction). (44) Voir Johnson et Beaulieu (1996). Comme lALÉNA prévoit des normes plus rigoureuses sans relâchement, comme le dit Jacek, « les entreprises qui se conforment aux normes nationales les plus élevées jouissent maintenant dun avantage commercial dans lALENA » ((1998), p. 7 (traduction)). (45) « Cabinet Drops Clean, Green Strategy: Environmental Industries Mourn Loss of Valuable Program », The Ottawa Citizen, 17 août 1998, p. A3. (46) On trouvera une étude critique de cette question dans Bradly Condon, « The Impact of the NAFTA, the NAAEC, and Constitutional Law on Environmental Policy in Canada and Mexico », dans Randall and Konrad, NAFTA in Transition (1995), p. 281-94. (47) Voir Donald Abelson, « Environmental Lobbying and Political Posturing: the Role of Environmental Groups in Ontarios Debate over NAFTA", Canadian Public Administration, vol. 38, no 3, automne 1995, p. 352-81. Selon la directrice générale de lACDE, Michelle Swenarchuk : Plusieurs groupes spéciaux américains de lALÉNA ont déjà conclu quils ne peuvent rien faire au sujet de la perte des lois. Ils ont été impuissants à empêcher les États dabaisser les normes de foresterie. Si les gouvernements voulaient éliminer toutes les mesures de protection de lenvironnement, il ny a rien quun accord parallèle de lALÉNA pourrait y faire. (Cité dans le Winnipeg Free Press, 24 janvier 1997, p. A12 (traduction)). (48) Dixon Thompson, « The NAFTA Parallel Accord on the Environment », dans Randall et Konrad, NAFTA in Transition, p. 325-326 (traduction). (49) Johnson et Beaulieu (1996), p. 241-247 (traduction). (50) NAFTAs Institutions: The Environmental Potential and Performance of the NAFTA Free Trade Commission and Related Bodies, p. 17-18 (traduction). (51) Une exception mise de lavant est le Groupe de travail sur le transport des marchandises dansgereuses, du Sous-comité des normes de transport terrestre, qui a produit un Guide de réaction aux crises qui a aidé le Mexique à améliorer sa réglementation. (52) NAFTAs Institutions, p. 16 (traduction). (53) Ibid., p. 18-19 (traduction). (54) « Major Canadian Companies on List of North Americas Worst Polluters », The Globe and Mail (Toronto), 3 mars 1998, p. A3. Les auteurs de ce rapport, enfin diffusé le 7 octobre 1998, constatent quelques signes encourageants dune diminution graduelle des émissions de polluants en Amérique du Nord. (Voir aussi « Canadian Factories Fingered in NAFTA Pollution Study », The Globe and Mail, Toronto, 24 juillet 1998. (55) « NAFTA Watchdog Leashed », The Globe and Mail (Toronto), 2 juillet 1998, p. B6. (56) Cité dans « Feds Fear Loss on MMT », The Globe and Mail (Toronto), 10 juillet 1998, p. B7 (traduction). (57) « Gas War: the Fall and Rise of MMT », The Globe and Mail (Toronto), 24 juillet 1998. (58) Lawrence Herman, « MMT Case Set Far-Reaching Precedent : " Expropriation " Takes on New Meaning », The Financial Post (Toronto), 28 juillet 1998 (traduction). (59) Cité dans « U.S. Firm Hits Ottawa with NAFTA Lawsuit », The Globe and Mail (Toronto), 21 août 1998. Voir aussi « NAFTA process unacceptable », The Globe and Mail (Toronto) 25 août 1998 (traduction). (60) « NAFTA Lawsuits Cloud Mai Discussions », The Globe and Mail (Toronto), 24 août 1998; « Groups Ask for NAFTA Challenge », The Globe and Mail (Toronto), 18 septembre 1998. (61) La législation américaine de mise en oeuvre de lALÉNA comporte un programme provisoire daide à ladaptation des travailleurs américains touchés. Il ny a pas eu de programme spécial similaire au Canada. Précisons que les effets possibles dans ce domaine allaient probablement être beaucoup plus marqués aux États-Unis, ce qui provoqua un débat dautant plus intense, étant donné le volume beaucoup plus élevé du commerce entre les États-Unis et le Mexique à travers la frontière commune. (62) Voir par exemple léconomiste en chef du Congrès du travail du Canada, Andrew Jackson, « A Social Charter and the NAFTA: A Labour Perspective », dans William Watson (éd.), North American Free Trade Area, Policy Forum Series No. 24, Kingston (Ontario), John Deutsch Institute for the Study of Economic Policy, octobre 1991, p. 77-93. (63) Mary Jane Bolle, NAFTA Labor Side Agreement : Lessons for the Worker Rights and Fast-Track Debate, Washington, Congressional Research Service Report for Congress, octobre 1997, p. 3. (64) Cette affaire concerne les opérations mexicaines du fabricant de pièces dautomobiles américain Echlin Inc., qui possède aussi des usines au Canada. (« Labour Groups File First NAFTA Complaint » et « Ottawa Approves Use of NAFTA Side Deal », The Ottawa Citizen, 7 avril 1998 et 6 juin 1998.) (65) Bolle, NAFTA Labor Side Agreement (1997), p. 12 (traduction). (66) Stephen Herzenberg, Calling Maggies Bluf: The NAFTA Labor Agreement and the Development of an Alternative to Neoliberalism, Canadian American Public Policy, Canadian-American Centre, University of Maine, no 28, décembre 1996, p. 3 (traduction). (67) Ibid., p. 26. (68) Sur le lien contesté entre les questions de travail de lALÉNA et le débat sur la négociation « accélérée », voir Bolle (1997) p. 13 et suivantes. Voir aussi Steve Charnovitz, « Labor and Environmental Issues », dans Jeffrey Schott (éd.), Restarting Fast Track, Special Report No. 11, Washington, Institute for International Economics, avril 1998. (69) Cité dans « Trade Pact Pits Worker against Worker », Kitchener-Waterloo Record, 11 août 1998, p. A9 (traduction). (70) Cf. Henry Jacek, « Business and Politics in the Formation and Implementation of Trade Agreements Affecting North America: Dispute Settlement Mechanisms and Labour/Environmental Standards », p. 4-6. (71) Andrew Jackson, « A Note on Productivity, Wages, and Profits in Canada in Relation to NAFTA », Dallas, Communication devant le Commission for Labour Cooperation North American Seminar on Incomes and Productivity, février 1997, p. 2-6 (traduction). (72) Pour ce qui est du traitement des droits de la personne, certains commentateurs sont allés chercher leur modèle en Europe. Contrairement à la situation qui prévaut dans les Amériques, on reconnaît généralement que le processus dintégration de lEurope a lié avec succès lintégration des économies régionales et linstitutionnalisation transnationale de normes en matière de droits de la personne et de normes juridiques. (Voir James Smith, « NAFTA and Human Rights: A Necessary Linkage », University of California Davis Law Review, été 1994.) Au Canada, lidée de lier lALÉNA et les droits de la personne a été mise de lavant par le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique et par des coalitions non gouvernementales comme Common Frontiers. Il semble également que la Commission européenne soulèvera la question des droits de la personne au cours des négociations commerciales quelle a entreprises avec le Mexique au cours de lété 1998. (73) Voir, par exemple, Ann Weston, The NAFTA Papers: Implications for Canada, Mexico and Developing Countries, Ottawa, Institut Nord-Sud, 1994; Diana Alarcon Gonzalez, « Trade Liberalization, Income Distribution, and Poverty in Mexico: An Empirical Review of Recent Trends », dans Stephen Randall et Herman Konrad, NAFTA in Transition, 1995. (74) Robert Wolfe et John Curtis, « Providing Leadership for the Trade Regime », dans Canada Among Nations 1998: Leadership and Dialogue, Fen Osler Hampson et Maureen Appel Molot (éd.), Toronto, Oxford University Press, 1998, 1998, p. 21 (traduction). (75) Ian Robinson, « The NAFTA, Democracy and Continental Economic Integration: Trade Policy as if Democracy Mattered », dans How Ottawa Spends 1993-1994: A More Democratic Canada?, Susan Phillips (éd.), Ottawa, Carleton University Press, 1993, p. 333-80. Dautres versions de cette thèse ont été publiées par le Centre canadien de politiques alternatives. (76) Le fait que les salaires soient nettement inférieurs au Mexique ne constitue pas, en soi, du dumping social puisque cela peut être lié à une plus faible productivité et à une structure de coûts donnant légitimement à ce pays un avantage concurrentiel. Le dumping nexiste que lorsque le coût de la main-doeuvre ou dautres intrants est artificiellement maintenu bas et que lon refuse volontairement dappliquer des normes de production ou de travail acceptables de manière à causer un préjudice matériel à des concurrents étrangers. (77) Peter Morici, « Implications of a Social Charter for the North American Free Trade Agreement », dans The Social Charter Implications of the NAFTA, Washington, Canada-U.S. Outlook, National Planning Association, 1997, p. 8 (traduction). (78) Ibid., p. 10 (traduction). (79) Voir, par exemple, Charles Reasons, « NAFTA and Inequality: A Canadian Perspective », dans Constitutional Forum, printemps-été 1994, p. 72-77. (80) LAmérique du Nord et lEurope communautaire: Intégration économique, intégration sociale?, Dorval Brunelle et Christian Deblock (éd.), Sainte-Foy, Presses de lUniversité du Québec, 1994, constitue un ouvrage comparatif utile. (81) Elizabeth C. De Boer et Gilbert Winham, « Trade Negotiations and Social Charters: The Case of the North American Free Trade Agreement », dans The Social Charter Implications of the NAFTA, p. 30 (traduction). (82) Ibid., p. 33 (traduction). De telles discussions sur la création dune zone de libre-échange sétendant à tout lhémisphère ont été lancées lors du deuxième Sommet des Amériques, tenu au Chili en avril 1998, et se déroulent sous une présidence canadienne pendant les 18 premiers mois des négociations. Aucun des groupes de négociation ne traite expressément des normes en matière de protection de lenvironnement, de main-doeuvre et de programmes sociaux, mais le Canada déploie de grands efforts pour quil y ait des consultations sur la participation à la société civile et sur les facteurs entourant ces normes. (83) Voir David Schneiderman, « Canadian Constitutionalism and Sovereignty after NAFTA », dans Constitutional Forum, printemps-été 1994, p. 97. (84) Colleen Fuller, « Doctoring to NAFTA », dans Canadian Forum, juin 1996, p. 18 (traduction). (85) Le Canada et lAccord multilatéral sur linvestissement, Rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes, Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux, Ottawa, décembre 1997, p. 37. Une réserve « non consolidée » permet à un pays de conserver un mesure non conforme et de la modifier comme il lentend dans lavenir. Le gouvernement du Canada a accepté lidée générale de cette recommandation dans la réponse au rapport quil a produite en avril 1998. (86) Voir, par exemple, Philip Altbach, « NAFTA and Higher Education, The Cultural and Educational Dimensions of Trade », dans Change, juillet-août 1994; Stephen Randall et Herman Konrad, NAFTA in Transition, 1995, Introduction et partie V, « Public Policy and Culture ». (87) Lors de cette réunion, M. Axworthy a annoncé une contribution canadienne au financement de lAlliance pour lenseignement supérieur et lentreprise en Amérique du Nord. (88) Notes pour une allocution de lhonorable Lloyd Axworthy, ministre des Affaires étrangères, à une réunion du Mid-America Committee, Action mondiale, communauté continentale : la sécurité humaine dans la politique étrangère du Canada, Chicago, (Illinois), 9 septembre 1998. Ottawa, Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, p. 4-5 (sur lInternet, http://www.dfait-maeci.gc.ca). (89) Voir John Herd Thompson, « Canadas Quest for Cultural Sovereignty », dans Randall et Konrad, NAFTA in Transition, p. 393-410. (90) Selon le paragraphe 1 de larticle 2005 de lALÉ : « Les industries culturelles sont exemptées du présent accord ». Les mesures spécifiques incluent lélimination des tarifs sur certains produits comme les enregistrements sonores et le paiement de redevance par les câblodistributeurs canadiens aux radiodiffuseurs américains pour la retransmission de leurs signaux sur les systèmes canadiens. (91) Selon le paragraphe 2 de larticle 2005 : « Malgré les autres dispositions du présent accord, chaque Partie pourra prendre des mesures ayant un effet commercial équivalent en réaction à des interventions qui seraient incompatibles avec le présent accord, si ce nétait du paragraphe 1 ». (92) Le seul ajout à la loi de mise en oeuvre canadienne a été linclusion des droits de location des enregistrements sonores et des logiciels protégés par droits dauteur conformément aux dispositions de lALÉNA sur la mise en oeuvre des droits de propriété. (93) Voir Ronald Atkey, « Canadian Cultural Industries Exemption from NAFTA Its Parameters », dans Canada-United States Law Journal, vol. 23, 1997, p. 177-200. (94) Les tirages équifractionnés de magazines canadiens sont essentiellement des éditions canadiennes de périodiques américains dont le coût demeure bas en raison de leur grande circulation, et qui ont aussi détourné dimportants revenus de publicité canadiens. En raison de la concurrence créée par cette forme de tirage, le Canada a adopté différentes mesures instaurant une discrimination en faveur de lindustrie canadienne du magazine. Les É.-U. ayant porté plainte devant lOMC, des groupes spéciaux ont récemment rendu des décisions contre ces mesures, ce qui a contraint le Canada à trouver dautres moyens de soutenir les magazines nationaux sans enfreindre les accords commerciaux internationaux. [...] Le 8 octobre 1998, on a présenté à la Chambre des communes un projet de loi à cet effet, le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques (accessible sur le site Internet parlementaire, à ladresse http://www.parl.gc.ca). Toutefois, dans un rapport quelle a publié quelques jours plus tard, la Commission du commerce international des États-Unis a attaqué vigoureusement les politiques canadiennes visant à protéger la culture dans les négociations internationales sur le commerce et linvestissement. La représentante (américaine) du commerce extérieur, Charlene Barshefsky, sest également empressée de condamner les nouvelles mesures législatives canadiennes comme étant « protectionnistes et discriminatoires ». (95) « Canadas Copyright Laws Violate NAFTA », dans The Financial Post, Toronto, 12 mars 1998. Pour une analyse détaillée des questions sous-jacentes, voir Lesley Ellen Harris, Copyright Issues in Trade Agreements, rapport de recherche préparé pour la Conférence canadienne des arts, octobre 1997. (96) Keith Acheson et Christopher Maule, « The Culture of Protection and the Protection of Culture A Canadian Perspective in 1998 », Carleton Industrial Organization Research Unit Working Paper Series, Ottawa, Université Carleton, février 1998, p. 21 (traduction); voir également une thèse antérieure des mêmes auteurs parue dans la même série, « Canadas Cultural Exemption: Insulator or Lightning Rod? », 1996. (97) « Le Groupe dOttawa lance une alliance internationale des ministres de la Culture », ministère du Patrimoine canadien, Ottawa, Communiqué de presse, 30 juin 1998. (98) Rapport final du Groupe de travail sur la politique culturelle au XXIe siècle, Conférence canadienne des arts, juin 1998 (version électronique disponible à http://www.culturenet.ucalgary.ca). Dans un rapport préliminaire publié en janvier, le groupe de travail concluait que :
(99) David Long, « Canada-EU Relations in the 1990s », dans Fen Osler Hampson et Maureen Appel Molot (éd.), Canada Among Nations: Leadership and Dialogue, Toronto, Oxford University Press 1998, 1998, p. 199 (traduction). (100) Comité permanent des Affaires étrangères, Lintégration européenne : son importance pour le Canada, Ottawa, juillet 1996, p. 36. (101) Linformation détaillée qui suit provient en grande partie du document annuel dAffaires extérieures et Commerce international Canada intitulé Ouvrir des portes sur le monde : priorités du Canada en matière daccès aux marchés internationauxl, 1998. (102) En revanche, la part des importations en provenance de lEurope (10 p. 100) dans lensemble des importations canadiennes ne bouge à peu près pas depuis quinze ans. (103) Parmi les autres facteurs, il y a la stagnation économique que lEurope a connue pendant une grande partie de la décennie et lappréciation du dollar canadien. (104) Le marché de lUE est déjà plus grand que celui des États-Unis. (105) Le Conference Board du Canada, Strengthening Canada-European Business Relations, rapport no 203-97, juillet 1997. (106) Le Canada continue de subir le plein effet du tarif extérieur commun de lUE. (107) Parmi les produits canadiens qui bénéficieraient dun meilleur accès au marché européen, il y a laluminium, le cuivre, les métaux non ferreux, les produits agricoles, le poisson et les produits du poisson, les produits du bois, les produits chimiques et le matériel de télécommunications. (108) La Commission approuve un plan daction provisoire pour le Partenariat économique transatlantique, Bruxelles, 16 septembre 1998 (version Internet accessible à ladresse http://www.europa.eu.int/comm/dg01). Dans un article récent, Richard Steinberg fait un examen utile des liens entre le transatlantisme et le multilatéralisme commercial au niveau de lOMC. Il écrit entre autres :
(109) Pour une analyse plus approfondie, voir Preparing the EU-MERCOSUR Association: Benefits and Obstacles, Madrid, Institut pour les relations Europe-Amérique latine, Document dinformation, juillet 1998. (110) David Long, « Canada-EU Relations in the 1990s », dans Fen Osler Hampson et Maureen Appel Molot (éd.), Canada Among Nations 1998 : Leadership and Dialogue, Toronto, Oxford University Press, 1998, p. 204 (traduction). (111) Affaires étrangères et Commerce international Canada, Notes pour un discours de lhonorable Roy MacLaren, ministre du Commerce international, au Royal Institute of International Affairs à Londres, Déclaration 95/32, 22 mai 1995, p. 2. |